Chapitre 52

Yoongi offrit un sourire en retour à Jungkook et prit une profonde inspiration.

« Désolé, soupira-t-il, je me suis laissé dépasser par mes émotions. Je stressais depuis une semaine, je crois qu'il fallait que ça sorte d'une façon ou d'une autre. Mais ça va, maintenant. Merci de m'avoir permis d'y voir plus clair.

— J'en suis heureux. Je sais que tu prendras la bonne décision, affirma son cadet. Parce que peu importe ta décision, tu choisiras celle qui, à tes yeux, te rendra heureux. Et le bonheur, c'est toujours la meilleure solution.

— C'est pour ça que t'as finalement pardonné à Taehyung ?

— Ouais. Sur le coup, j'étais tellement énervé que je ne pouvais même plus le voir en peinture, mais... après quelques jours, quand la haine s'est effacée, il ne restait que les regrets et la solitude. On aimait les mêmes choses, et on aimait discuter des mêmes choses... comme Jimin et toi. Je me sentais compris, et... j'imagine que moi aussi, j'ai voulu comprendre : il a pas réfléchi, il a fait une connerie, et je peux te dire qu'il a vraiment tout fait pour que je le pardonne, alors... ouais, je lui ai finalement pardonné.

— Dis... c'est peut-être de la curiosité mal placée, mais il avait fait quoi pour te foutre autant en rogne ?

— Je n'ai plus envie d'en parler, répondit Jungkook dans un haussement d'épaules, j'ai juste envie d'oublier, et lui aussi. On est amis, c'est tout ce qui compte.

— Je comprends. J'en suis heureux pour toi, ça se voyait que t'étais vachement tendu ces derniers temps, t'as l'air d'aller mieux, maintenant.

— Ouais, j'imagine : entre ça et la fin de mes séances chez Jin, j'ai l'impression que je peux enfin respirer ! »

Yoongi approuva d'un hochement de tête. Son collègue lui avait expliqué que le kinésithérapeute chez lequel il se rendait lui avait indiqué qu'il n'avait plus besoin de venir le voir. Ça avait surpris le réceptionnaire, bien sûr, mais Jungkook avait paru si heureux en lui annonçant ça qu'il n'avait pas trouvé la force de lui poser plus de questions. Pour lors, son cadet souhaitait oublier ses soucis, connaître enfin un peu la paix – même si cette paix devait s'avérer provisoire.

Rassuré quant à son dîner, le cœur léger, Yoongi reprit son travail une fois son ami parti. Ainsi, la matinée lui sembla passer vite mais de manière tranquille, et avant la fin de son service, il reçut un SMS de Jimin.

Jimin – Salut, hyung ! Je me demandais : ça te dirait que je vienne te chercher en voiture ? Je sais que tu conduis pas et que ça risque de te faire un petit bout de chemin. À cette heure, y a pas mal de monde dans la rue, alors... c'est comme tu le sens. :3

Yoongi – Salut. C'est gentil de proposer, je veux bien, si ça te gêne pas.

Jimin – Aucun souci, c'est moi qui ai proposé. Et t'en fais surtout pas, ta place à l'arrière t'attend ! ^^

Soulagé de ne pas avoir à demander à s'installer le plus loin possible de Jimin, Yoongi poussa un soupir et se hâta de le remercier pour sa prévenance.

La journée passa vite pour Yoongi. Une fois rentré chez lui, il trépigna d'impatience jusqu'à ce que Jimin sonne à l'interphone de son appartement. Le réceptionnaire n'avait pas réussi à s'apprêter comme il l'aurait désiré : il ne savait pas se maquiller, et il détestait les vêtements près du corps ainsi que ceux qui dévoilaient un peu trop de peau. Du fait de sa phobie, il les percevait comme de véritables générateurs de danger. S'il sortait en manches courtes, il risquait que quelqu'un qui le bouscule le touche de manière directe, sans qu'aucun tissu ne les sépare, et cette seule idée le terrorisait.

Yoongi s'en alla donc sans maquillage, à peine coiffé et habillé d'un t-shirt à manches longues noir rayé de blanc avec par-dessus une veste noire en jean, qui s'accordait avec son pantalon élimé de la même couleur et de la même matière. Jimin l'attendait au pied de son immeuble, et dès qu'il le vit, il lui adressa un large sourire.

« Bonsoir, hyung ! Le noir te va vraiment bien !

— Bonsoir, et merci.

— J'espère que t'as faim, j'ai cuisiné plein de bonnes choses ! Monte ! »

Enthousiaste, Jimin lui ouvrit la portière arrière. Yoongi le remercia du regard et entra. Son cadet ensuite grimpa à sa place et démarra. Le trajet, bien que court, se révéla déjà animé : désireux de le mettre à l'aise, Jimin avait aussitôt évoqué sa dernière découverte, un roman de fantasy dont il avait souvent entendu parler mais qu'il n'avait encore jamais lu avant aujourd'hui.

« Non, tu l'avais jamais lu ! s'étonna Yoongi.

— C'est considéré comme de la jeunesse, alors j'avoue que j'y avais jamais vraiment prêté attention.

— Y a tellement de trucs à côté desquels t'es passé ! La jeunesse, c'est une mine d'or de la fantasy !

— À ce point ? demanda Jimin tandis qu'ils sortaient de la voiture.

— Mais oui, faut absolument que tu t'y intéresses, au moins pour lire des résumés et voir s'ils te plaisent ou non !

— Tu me conseillerais quoi ?

— En fantasy jeunesse, t'as Une braise sous la cendre, qui est une vraie tuerie, ou sinon un truc français, La quête d'Ewilan. Jieun me l'avait conseillé et je me suis bouffé toute la série tellement j'ai aimé !

— Oh, je garde ça dans un coin de la tête, c'est noté ! Je te redemanderai sûrement les titres, par contre, gloussa Jimin en déverrouillant la porte de son appartement.

— Pas de souci, je te ferai une liste ! »

Yoongi retira ses chaussures, imité par son cadet qui referma derrière lui. En se redressant, il croisa le regard de Jimin qui l'attendait. La conversation précédente terminée, un silence s'était installé, qui jusque-là ne les gênait pas. Or, maintenant qu'ils s'avançaient tous deux dans le salon pour dîner, Yoongi sentait un poids pénible lui écraser les épaules : Jimin et lui s'étaient retrouvés pour parler de bien autre chose que de fantasy.

Ils s'assirent sans un mot. La table était déjà dressée, de petits en-cas y étaient placés, prêts à être dévorés. Toutefois...

« Je pense qu'on devrait discuter de ce pour quoi on stresse tous les deux, non ? soupira Jimin.

— J'imagine...

— Je sais que je te l'ai déjà dit, hyung, mais je me suis très vite attaché à toi, je t'apprécie énormément, tu... tu me plais. »

Il marqua un instant de pause pendant lequel il garda les yeux baissés.

« Bon, je vais le dire. Hyung, j-je... je crois que je t'aime. Et... c'est dur... j-j'ai peur de te dire ça, parce que j'ai peur que ça t'effraie et que tu me rejettes, mais je veux que ce soit clair : j'ai pas eu besoin de te toucher pour t'aimer, et j'aurai pas besoin de t'effleurer pour te témoigner ce que je ressens pour toi. J'ai aucun problème avec l'idée que tu refuses mon affection, mais refuse-la parce que tu la partages pas, pas parce qu'elle te fait peur à l'idée que j'aie un jour envie de poser la main sur toi. J-Je... Je t'aime parce j'aime nos discussions, j'aime t'écouter, j'aime le partage, et j'aime ton calme, être avec toi m'apaise beaucoup. Alors... voilà. Peu importe ce que tu répondras, je veux en tout cas qu'on reste proches, et j'espère que ma... déclaration, disons, ne t'aura pas inquiété. J'aimerais que notre relation reste telle qu'elle est, quelle que soit ta réponse. »

Jimin osa enfin lever la tête et il croisa le regard de Yoongi, qui paraissait déboussolé. L'aîné déglutit, détourna les yeux.

« Je comprends pas ce que t'attends de moi, avoua-t-il dans un haussement d'épaules.

— Comment ça ?

— Tu dis vouloir sortir avec moi, je l'entends, et... ça me fait plaisir qu'un garçon comme toi s'intéresse à moi. Mais... qu'est-ce que t'attends vraiment, si on sort ensemble ? Tu peux pas me toucher, pas même me frôler, et tu l'as dit toi-même : quelle que soit ma réponse, t'attends pas à ce que notre relation change. Alors pourquoi vouloir sortir avec moi ? Qu'est-ce que ça t'apporterait ? Qu'est-ce que ça nous apporterait ?

— Je veux pouvoir te dire que je t'aime, et entendre que tu m'aimes aussi, répondit Jimin d'un ton convaincu sans pour autant le regarder en face. Je veux t'inviter dans un restau pas trop fréquenté et me perdre dans tes yeux. J'ai envie qu'on puisse se poser chez moi pour discuter autour d'un thé sans se sentir gênés de se retrouver si souvent. Et... j'ai envie de t'apporter toute l'affection que tu mérites, non à travers des gestes, mais à travers des mots et des actes. Si on sortait ensemble, ça changerait beaucoup de choses pour moi... et pour toi aussi, j'espère. »

Yoongi se mordit l'intérieur de la joue. Il avait espéré que son aîné reste muet, incapable de trouver quoi répondre. Il avait promis à Jungkook qu'il garderait ses distances avec Jimin, qu'il se méfierait, mais... comment résister à pareille déclaration ? Il paraissait l'aimer si fort !

« On se connaît à peine, protesta le réceptionnaire.

— Je suis d'accord, et j'aimerais profiter de sortir avec toi pour te parler plus souvent encore et apprendre toutes les plus jolies choses sur toi.

— Y a rien d'autre à apprendre sur moi.

— Je suis convaincu que si, il reste plain de choses.

— Je te dirai pas pourquoi j'ai ces phobies.

— Mais j'ai jamais demandé à ce que tu me le dises, répondit Jimin. Si tu veux un jour m'en parler pour une raison ou pour une autre, je t'écouterai, mais je sais que ça doit être très difficile pour toi si ça t'a autant marqué, alors je chercherai jamais à t'obliger à parler.

— Tu pourras pas me toucher, vraiment pas. Espère pas que je change pour toi : je... j-je suis un cas désespéré, lutter m'épuise, j'en ai pas la force, et je veux pas que tu sois déçu si...

— Je suis tombé amoureux d'un réceptionnaire timide qui ne supporte ni la foule ni les contacts. Je t'aime comme ça, j'attends pas de ta part des efforts. Si tu veux t'en sortir, je serai là pour t'épauler, mais de toute façon, si vraiment tu veux réussir à surmonter ça, faudra que ça vienne de toi, c'est pas quelque chose dont je pourrai décider. Je sais que je pourrai pas te changer, j'ai jamais eu cette prétention.

— Si on sort ensemble, un jour tu voudras me toucher. Tu voudras me serrer contre toi, m'embrasser, et peut-être me...

— Hyung, le coupa Jimin devant le visage de son aîné qui se décomposait. Non. Quand bien même ça me viendrait à l'idée, la seule pensée de l'horreur que ça représente pour toi me dissuaderait tout de suite de l'envisager. Je déteste t'imaginer en train de pleurer et de paniquer. Je peux pas nous imaginer... avoir des rapports. Et puis... j-je suis vierge aussi, tu sais, et... c'est vraiment trop tôt, même pour moi. J'ai pas besoin de te toucher pour t'aimer.

— Mais un jour t'en auras envie, vraiment envie...

— Ce jour-là, on en discutera, et je trouverai le moyen de me soulager sans t'imposer quoi que ce soit. Je te promets que jamais je ne poserai le petit doigt sur toi sans m'être assuré que tu serais pleinement consentant.

— Tu promets ?

— Serment du petit doigt en wifi, » jura Jimin d'un ton amusé en levant la main, poing fermé et auriculaire dressé, devant lui.

Yoongi gloussa et l'imita. Tous deux à un bout de la table, un bon mètre les séparait, et ils plièrent d'un même mouvement le petit doigt, le regard planté dans celui de l'autre.

« Alors ? osa Jimin, timide.

— Alors... je t'apprécie énormément, Jimin-ah, et... je suis pas vraiment sûr de moi, mais... o-on peut toujours faire un essai, si ça te va ?

— Ça m'irait, ça me ferait super plaisir.

— Je veux bien... essayer de sortir avec toi. Je crois... enfin... que moi aussi, je t'apprécie beaucoup. »

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