Chapitre 144
Le dîner se passa mieux que Jungkook l'avait espéré : ses parents se montrèrent d'abord curieux au sujet de Taehyung, ils lui posèrent des questions à propos de son métier, de sa passion – la mère de Jungkook surtout avait déjà entendu parler du jeune homme dont elle admirait le travail. Les garçons répondirent aussi à quelques interrogations à propos de leur couple, et ils rentraient à pied chez les Jeon quand le sujet de l'opération du libraire arriva.
« Et tu garderas le bras plâtré jusqu'à quand ? demanda son père.
— Je reprends le boulot mi-septembre, j'aurai sûrement encore une attelle à ce moment-là, mais rien n'est sûr : si je dois garder mon plâtre plus longtemps, je pourrai prolonger mon arrêt de travail. Donc rien à craindre de ce côté-là, surtout que mon patron est très compréhensif, et puis celle qui me remplace est compétente.
— Je suis heureux de l'entendre. Et l'hôpital a bien tenu parole, tout a été gratuit ? Si t'as besoin de quoi que ce soit, tu sais que tu peux compter sur nous, on...
— En fait, c'est... j'ai appris que c'était pas vraiment l'hôpital qui me payait tout ça, avoua Jungkook d'un air embarrassé.
— Ah ? Mais c'est bien payé quand même, hein ?
— Oui, oui, t'en fais pas, j'ai pas besoin d'aide. En fait... »
Jungkook tourna un regard vers son petit ami puis se concentra de nouveau sur ses parents.
« J'ai appris que c'était Taehyung-hyung qui finançait mes soins.
— Oh... et...
— Je suis désolé, c'est un peu gênant, j'ai pas trop envie d'en parler, ricana Jungkook en se frottant la nuque d'embarras. Mais le fait est que vous n'avez rien à craindre, tout est gratuit pour moi, et comme je vis chez hyung, je peux mettre encore plus de côté. Ce mois-ci, je pourrai vous envoyer beaucoup plus d'argent que d'habitude.
— Ce qui nous importe le plus, c'est ta santé et ton bonheur, intervint sa mère de qui le regard soucieux marqua Jungkook. Fais bien attention à toi.
— Je te le promets. »
La conversation se poursuivit sur un sujet plus léger, et ils arrivèrent à la maison. Jungkook et Taehyung montèrent dans la chambre du plus jeune où ils se changèrent, et après un passage à la salle de bains, ils s'apprêtaient à se coucher. Ils s'installèrent dans le lit, et il ne leur fallut pas une minute avant de se serrer l'un contre l'autre dans un même mouvement amoureux qui leur tira un sourire.
« Bon, souffla Taehyung, j'espère que j'ai fait bonne impression à ta famille.
— Je suis sûr que oui, je connais un peu mes parents, je sais qu'ils t'apprécient déjà beaucoup.
— J'ai été impressionné qu'ils ne fassent même pas une remarque sur... enfin, tu sais, le fait qu'on soit deux garçons.
— Mon bonheur passe avant tout, ils se moquent de savoir avec qui je sors tant que cette personne me rend heureux.
— Et je te rends heureux, Kookie ? le taquina-t-il.
— Si tu savais...
— Moi aussi je suis heureux avec toi. »
Ils s'enlacèrent, et Jungkook gloussa quand son compagnon lui embrassa à plusieurs reprises le front, les joues, et les cheveux.
Il savait que ses parents apprécieraient Taehyung, mais qu'ils l'acceptent avec enthousiasme, lui parlent comme à n'importe qui, ça l'avait revigoré. Heureux, il s'assoupit, et son aîné ne tarda pas à l'imiter.
Jungkook se réveilla tôt le lendemain du fait d'un grincement des escaliers menant au rez-de-chaussée. Connaissant ses proches, il s'agissait sans doute de son père, bien plus matinal que sa mère qui ne se levait que quand l'alarme de son portable sonnait. Désireux de les voir avant leur départ au travail, le jeune homme quitta les bras de son compagnon qui n'en lâcha qu'un court soupir sans ouvrir les yeux pour autant. Il descendit avec autant de discrétion que possible, et il fronça les sourcils en arrivant dans la cuisine.
« Maman ? Tout va bien ? »
Madame Jeon sursauta, surprise alors qu'elle se préparait une tasse de café. Elle se retourna et adressa un sourire à son fils.
« Bien sûr, pourquoi ?
— Tu te lèves avant papa, maintenant ?
— Et toi, qu'est-ce que tu fais debout à cette heure ? Tu devrais te reposer, je te rappelle.
— Pitié, j'ai déjà Taehyung sur le dos chaque fois que j'essaie de bouger un peu, tu vas pas t'y mettre aussi... »
Il remarqua à ces mots que le visage de sa mère s'était refermé, et il comprit qu'elle lui cachait quelque chose.
« T'as pas l'air d'aimer beaucoup Taehyung, lâcha-t-il – il préférait aller droit au but.
— Qu'est-ce que tu racontes, enfin ? C'est quelqu'un de très gentil et qui te rend heureux, pourquoi je ne l'apprécierais pas ?
— Parce que... c'est un garçon, souffla son fils d'un murmure étranglé alors que tout devenait logique pour lui.
— P-Pardon ?
— T'auras pas de petits-enfants si je sors avec un homme, et... je sais que ça te tenait beaucoup à cœur. Mais Taehyung... c'est quelqu'un d'extraordinaire, tu sais ? Aucune femme ne...
— Jungkook-ah, stop, enfin, je... non, je n'ai aucun problème avec ça. Des petits-enfants, oui, j'en aurais voulu, mais ce que je veux avant tout, c'est que toi tu sois heureux dans ta relation. Et si c'est Taehyung qui te rend heureux, alors ça me rend heureuse aussi.
— Alors qu'est-ce qui va pas ?
— Je sais pas, je... je suis juste inquiète...
— Pourquoi ? Tout se passe très bien.
— Est-ce que... il a utilisé son argent pour te convaincre de sortir avec lui ? »
Sa mère n'osa pas le regarder en face en lui posant cette question, et Jungkook éprouva la sensation que sa mâchoire se décrochait.
« Mais qu'est-ce que tu racontes ?
— Tu as dit qu'il avait payé ton opération, et... je me suis demandé s'il avait pas insisté pour qu'en retour... enfin, tu comprends.
— Hyung n'a jamais utilisé son argent pour exercer la moindre pression sur moi ! Quand j'ai accepté l'opération, j'étais même pas au courant que c'était lui qui l'avait financée, je croyais encore que c'était l'hôpital. Il a tout fait pour rester à distance parce qu'on s'était un peu disputés et qu'il ne voulait pas me déranger, et c'est après qu'on a commencé à sortir ensemble qu'il m'a avoué que c'était lui qui avait tout financé. Je... il m'a jamais forcé à quoi que ce soit, maman, enfin !
— Pardonne-moi, mon ange, j'aurais pas dû imaginer tout ça, mais... j-je sais que quand on est vraiment désespéré, on peut parfois commettre de graves erreurs, et... quand je t'ai vu hier, si gêné de parler du fait que Taehyung avait tout payé à ta place... j'ai eu peur de ce qui avait pu se passer. Je suis désolée, mais j'imagine que c'est le rôle des parents de s'inquiéter pour leur enfant.
— Maman, t'as pas à t'en faire pour moi. Je sors avec Taehyung parce que je l'aime, je t'assure qu'il n'y a aucune question financière derrière tout ça. Il a même insisté pour que je n'essaie jamais de le rembourser pour tout ce qu'il a payé, il veut juste que je me rétablisse correctement, comme vous. Il fait très attention, je suis entre de bonnes mains. Je l'aime autant qu'il m'aime, et plus d'une fois il m'a prouvé sa sincérité et son désintéressement. Il a jamais essayé de me forcer la main, maman, je te le promets. »
Sa mère acquiesça, sa mine angoissée remplacée par un tendre sourire aux déclarations de son fils dont elle savait qu'il ne lui mentirait pas à ce sujet. Jungkook baissa le regard sur son plâtre.
« J'étais vraiment déterminé à ne pas subir l'intervention, tu sais, souffla-t-il d'un ton presque honteux, et... quand je suis sorti de l'hôpital et que j'ai appris que tout se passait bien, j'ai compris que ça aurait été la plus grosse erreur de ma vie de la refuser. Je sais pas ce que je serais devenu si Taehyung avait pas décidé de la financer. Quand j'ai appris que c'était lui qui me l'avait payée, j'ai eu peur qu'il veuille que je lui rende des comptes tôt ou tard, je me sentais vraiment obligé de le rembourser d'une manière ou d'une autre, mais... il m'a bien fait comprendre que c'était pas nécessaire. Je crois que... son geste m'a sauvé d'une vie qui m'aurait détruit, et imaginer à quel point mon état vous aurait fait du mal à vous aussi... j'ai été bête, on en aurait tous souffert si je m'étais entêté à refuser.
— Tu pensais faire au mieux, Jungkook-ah. Et de toute façon c'est terminé, maintenant. Oh, comme je suis heureuse de savoir que tu vas mieux ! Mon précieux bébé !
— Maman, tu m'étouffes ! rit Jungkook alors que madame Jeon était venue l'étreindre.
— T'en fais pas, c'est pas mortel. »
Jungkook sourit, et à son tour il enroula un bras autour de la taille de sa mère. Ils se séparèrent, et le jeune homme décida d'aller voir son petit ami pour redescendre manger avec lui – ou bien se recoucher avec lui s'il dormait toujours.
Ses sourcils se froncèrent quand il arriva devant la porte entrouverte de la pièce : chaque fois qu'il en sortait, il la fermait par réflexe. Il la poussa, entra puis referma. Son regard tomba sur son compagnon, étendu dans son lit, son oreiller serré contre lui. Parce qu'il faisait jour tôt et que Jungkook ne touchait jamais à ses volets, le soleil matinal déversait assez de lumière pour que chacun puisse distinguer sans mal les traits de l'autre. Taehyung, les yeux clos, arborait une petite moue. Son cadet approcha, s'assit au bord du matelas, et avança la main pour lui caresser le front.
« Hyung, ça va ?
— Comment t'as su ? lui répondit-il d'une voix triste.
— La seule chose que tu serres dans tes bras depuis quelques semaines, c'est moi. Et quand je pars, tu te lèves, ou bien tu dors sur le dos. Je t'ai rarement vu dormir en prenant un oreiller – le mien, en plus – contre toi. Il s'est passé quoi ?
— Quand t'es parti, j'ai voulu aller aux toilettes... Depuis l'escalier, on entend bien quand des gens discutent dans la cuisine.
— Oui, je ne le sais que trop. »
Il avait entendu sa mère pleurer des nuits entières après l'accident.
« Je suis désolé de vous avoir écoutés, je suis vite revenu ici.
— Et t'as entendu jusqu'où ? s'enquit Jungkook.
— J'ai préféré partir quand elle t'a demandé si j'utilisais mon argent pour sortir avec toi. Je... j'y arrive pas, je supporte pas l'idée qu'on puisse penser ça de moi – et de toi. Mes sentiments pour toi sont sincères, jamais je ferais pression sur toi pour qu'on... »
Il dut se couper quand les lèvres de son petit ami se posèrent sur les siennes pour le faire taire. Il rouvrit un instant les yeux, juste pour les refermer ensuite et profiter de ce contact affectueux. Jungkook se déplaça de sorte à s'installer sur son bassin. Le baiser se prolongea, et lorsqu'il s'acheva, le libraire s'affala sur Taehyung pour blottir le visage dans son cou.
« J'ai tout expliqué à ma mère : que j'étais pas au courant que t'avais tout payé, que je l'ai appris récemment et que t'as insisté pour que je ne cherche pas à rembourser ce présent que tu m'as offert. Elle s'est excusée, et elle a compris que toi et moi étions sincères. Je sais que j'ai pas à douter de toi, et j'espère qu'en retour, toi non plus tu douteras jamais de mes intentions ni de mon affection.
— Depuis l'instant où tu m'as dit que tu m'aimais, je n'ai plus jamais eu le moindre doute, mon amour. »
Taehyung lui caressa le dos, soulagé d'entendre de bon matin des mots si jolis et réconfortants. Les parents de Jungkook ne l'avaient pas jugé sur son sexe, et tout ce qu'il espérait désormais, c'était leur prouver qu'ils n'avaient pas de raisons non plus de le juger par rapport à son argent.
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