Chapitre 1
Tout d'abord, je voulais préciser que les jours de publication de cette fanfic seront le jeudi et dimanche, chaque semaine et sans faute. Ensuite, je tenais à vous remercier pour vos commentaires sur les deux premières parties et votre enthousiasme vis-à-vis de cette histoire. J'avais pas imaginé ça, j'en ai été super touchée. ♥♥♥
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Sans prendre la peine de frapper à la porte, Jungkook la poussa d'un geste agacé et fit irruption dans la pièce. Namjoon s'y trouvait, assis à son ordinateur. Ses lunettes sur le nez, l'air concentré, il replaça une mèche brune imaginaire en relevant la tête sur son cadet. Le patron ne parut pas étonné de son intrusion – en vérité, il n'en était plus étonné. Il observa son employé approcher, tenant d'une main un paquet de feuilles qu'il plaqua sur son bureau dès qu'il fut arrivé à sa hauteur.
« Tu m'expliques ? lâcha le libraire en adressant un regard aux papiers.
— C'est quoi ?
— Un bon de livraison. Les nouveautés du jour.
— Oui, et ?
— Hyung, t'as commandé combien d'exemplaires du dernier thriller de Nesbo ?
— Dix, pourquoi ? C'est trop ? On les vend pas trop mal, se défendit l'aîné.
— Cent, t'en as commandé cent. Dans dix, y a un zéro, dans cent, y en a deux. Comment t'as pu appuyer deux fois sur ce foutu zéro sans t'en apercevoir ?
— Oh la boulette...
— Bien dit. Je fais comment, moi, pour faire rentrer cent thrillers dans mon rayon ?
— Des retours ? proposa son supérieur d'un ton mal assuré.
— Des retours... il me commande cent romans grands formats, et il propose que je fasse des retours...
— Kook...
— J'ai besoin d'un lait à la banane. »
Le jeune libraire, dépité, reprit son bon de livraison et quitta la pièce sans un mot de plus, sous les yeux de son ami qui se hâta d'ouvrir sa boîte mail pour demander à leur fournisseur une autorisation de retour exceptionnelle.
Jungkook longea le couloir réservé au personnel et entra en salle de pause. Il laissa ses papiers sur la table et se dirigea aussitôt vers son casier duquel il tira une brique de sa boisson favorite qu'il alla siroter en observant le paysage depuis la fenêtre qui offrait un ensoleillement chaleureux à la pièce. Les prunelles perdues dans le vague, il s'abandonnait à cette agréable contemplation. Le lait aromatisé lui caressa les papilles, lui arracha un soupir satisfait et le détendit.
Il distingua son reflet sur le verre, et un rictus fier naquit sur ses lèvres : des cheveux courts et sombres, coiffés à la mode, de grands yeux ébène, et des traits délicats malgré une carrure impressionnante – résultat de nombreuses soirées à la salle de musculation. Il portait un pull noir dont les manches tombaient sur ses mains, un jean clair, et ses Timberland favorites. Une tenue simple pour un garçon qui l'était tout autant : ce passionné de lecture avait décidé de devenir libraire en plein milieu de son cursus, mais sa détermination était telle qu'après trois années d'université, il avait décroché le travail de ses rêves dans un commerce géré par une équipe jeune et dynamique.
L'endroit était agréable : situé près du fleuve Han, dans le quartier de Hangang, il s'agissait d'un bâtiment rénové de deux étages. Lui s'occupait d'une partie du rez-de-chaussée : la littérature coréenne et internationale, les thrillers, les romans de science-fiction et fantasy, les romances pour adultes ainsi que les témoignages en tous genres. Il bichonnait chaque jour ses bouquins avec un inébranlable sérieux. D'ailleurs, sa boisson terminée, il ne tarda pas à retourner au travail.
La salle de pause ainsi que le bureau de Namjoon, propriétaire des lieux, se trouvaient au second étage. Il longea un couloir au bout duquel une porte menait au rayon scolaire et parascolaire. Le parquet au sol lui offrait un aspect naturel, et la tranquillité du magasin était plébiscitée par la clientèle. Des murs clairs et propres, des baies vitrées qui ouvraient l'endroit au soleil du début du printemps ; Jungkook appréciait ce calme dont il se régalait lorsqu'il arrivait le matin et profitait d'être seul dans ses rayons pour y rêvasser.
Parce qu'il était huit heures et demie et qu'il avait terminé son réassort, il quitta d'un pas apaisé la pièce. Le couloir donnait sur les rayons jeunesse et scolaire qu'il regarda à peine. Il prit l'escalier qui le mena au premier étage, et descendit une fois de plus pour regagner le rez-de-chaussée. Ses collègues s'activaient déjà, et il adressa à Hoseok un signe de la main accompagné d'un sourire quand ils se croisèrent.
Jungkook poussa une porte réservée au personnel et, aussitôt, le parquet laissa place à un sol de ciment brut, le papier peint clair à de la pierre terne. Des palettes garnies de montagnes de cartons parfois ouverts trônaient dans un coin, et le long du mur, outre quelques étagères, se trouvaient d'autres piles de colis triés par fournisseurs. Des caisses sur roulettes et remplies de livres attendaient bien gentiment d'être mises en rayon, et les seuls bruits qui brisaient le silence étaient les bips à répétition de la douchette.
Le libraire traversa la longue pièce et parvint au bureau de leur réceptionnaire, encombré de multiples romans.
« Alors, il a dit quoi ? s'enquit Yoongi sans quitter son ordinateur des yeux.
— Devine...
— Il voulait en commander dix ?
— Bingo.
— Il changera jamais...
— Le pire, c'est qu'il m'a proposé de faire des retours. Il a vraiment cru que j'allais mettre tout ça en rayon ? Que j'allais renvoyer d'autres livres juste pour faire rentrer son stock monstrueux ?
— C'est beau l'espoir, ricana le réceptionnaire.
— Laisse tomber, j'en mets dix, pas plus. Je peux te laisser le reste ?
— Ouais, t'inquiète, je mettrai ça de côté.
— Merci, tu me sauves ! »
Jungkook lui adressa un sourire que son ami lui rendit. Ce dernier reporta presque aussitôt son attention sur son écran et, sa douchette en main, il scanna article après article la suite de sa réception. Le libraire jeta un regard aux ouvrages qui défilaient devant ses yeux, et un rictus moqueur naquit sur ses lèvres.
« Encore une OP ? lança-t-il avec malice en s'appuyant contre le mur près de lui.
— Ouais, encore. Albums jeunesse, cette fois : deux albums achetés, un bol Anpanman et des baguettes offertes. Ça devrait plaire aux gamins.
— Mais ça plaira sans doute moins à Jieun.
— Ça c'est sûr. »
Jieun, libraire en charge des rayons jeunesse et scolaire, avait une sainte horreur des OP, les opérations promotionnelles. Plus globalement, elle avait une sainte horreur de tout ce qui impliquait de la mise en rayon : sans cesse débordée, elle peinait à rester à jour, et c'était sans arrêt auprès de Jungkook qu'elle mendiait un peu d'aide. Par conséquent, une caisse entière d'albums, ça risquait bien de la mettre de mauvaise humeur.
« Je t'ai même pas demandé, mais tu vas bien ? s'enquit Yoongi.
— Ouais, tranquille, la routine, quoi. Et toi ?
— Idem. »
Il parut vouloir ajouter quelque chose mais s'en retenir.
« Hyung, y a quelque chose dont tu veux me parler ? lui demanda Jungkook.
— Non, non. Pourquoi ?
— T'avais l'air.
— Ah. Bah non. »
Jungkook opina. Parce qu'il avait vingt-deux ans et son ami vingt-sept, il avait pris l'habitude de l'appeler ainsi. Yoongi était probablement son collègue de qui il se sentait le plus proche. Le jeune garçon aux cheveux presque blancs nourrissait une passion démesurée pour la littérature, si bien que travailler dans une librairie lui était apparu comme une évidence dès que Namjoon lui avait proposé cet emploi.
Pourtant, tout n'avait pas toujours été si simple pour lui, aussi bien avant qu'après son embauche...
« Y a des caisses pour moi ? s'enquit Jungkook en tournant les yeux vers l'endroit où elles étaient stockées.
— Ouais, toi aussi t'as eu une OP.
— Oh pitié, non...
— Tu t'en sors bien, t'inquiète : c'était juste un carton
— Quelle promotion ?
— Deux romans achetés, un offert. J'ai apporté les gratuits en caisse.
— Merci, tu gères ! »
Jungkook s'en allait déjà chercher sa caisse, qu'il poussa d'une main en quittant la réserve au pas de course. Méticuleux, organisé et strict, le garçon s'avérait d'une redoutable efficacité dès qu'il se mettait au travail. La librairie ne tarderait plus à ouvrir, si bien qu'il s'attela immédiatement à ses tâches quotidiennes, dont la première fut de ranger tous les livres reçus et réceptionnés par Yoongi. Lorsque les premiers clients arrivèrent, une dizaine de minutes après, sa caisse avait été en partie vidée. Habitué en effet, le jeune employé agissait avec une rapidité déconcertante : une pile de roman sous le bras, il voyageait de rayon en rayon, pareil à un automate.
Sa matinée fut paisible, et il remonta en salle de pause à l'heure du déjeuner. Il croisa en chemin Yeonjun, avec qui il discuta brièvement, et lorsqu'il fut enfin installé à la table, ses nouilles chaudes devant lui, un soupir de soulagement lui échappa. Il ferma les paupières, prit une profonde inspiration, et se régala. Ce jour-là, le soleil brillait, la librairie était calme, les clients peu nombreux, bien que leur flux demeure régulier : la journée idéale, en somme.
« Salut, Jungkook... »
La voix timide de sa collègue s'éleva tandis qu'elle poussait la porte. Jieun, belle jeune femme de l'âge de Yoongi, entra dans la pièce avec une moue gênée que Jungkook connaissait par cœur. Il souffla.
« Combien ?
— Cinq caisses, marmonna-t-elle.
— Tu peux pas t'en empêcher...
— Tu pourras m'aider ?
— Bah ouais, comme d'habitude, râla Jungkook.
— Merci beaucoup. En fait... je te jure, je voulais m'y mettre ce matin, mais Namjoon-ssi m'a convoquée dans son bureau : on va recevoir un auteur samedi, il vient juste de prévenir, et comme c'est de la jeunesse... voilà, quoi.
— Il nous demande avec à peine moins d'une semaine d'avance ? C'est qui ?
— Oh, non, non, je veux dire que Namjoon vient juste de prévenir. L'auteur, ça fait un mois et demi qu'il a indiqué qu'il viendrait. Du coup... j'ai dû préparer l'affiche, la poster sur le site, l'ajouter à nos actualités – en plus c'est un auteur connu – et ça a été un peu le bordel.
— J'en ai marre de lui... j'ai besoin d'un autre lait à la banane. »
Sa collègue garda le silence tandis que le jeune homme allait à son casier chercher une nouvelle brique de boisson dans laquelle il planta une petite paille de carton. Elle se mordit la lèvre pour éviter de rire, amusée par l'air enfantin que revêtait Jungkook lorsqu'il aspirait et que ses joues se creusaient de manière mignonne. Elle quitta la pièce peu après, et son cadet se retrouva seul. Il reposa sa briquette et se passa la main sur le visage avant de récupérer son lait qu'il alla boire près de la fenêtre.
Son habitude favorite.
Ce ne fut qu'une fois l'emballage jeté, son portable dans la main, qu'il songea que Jieun ne lui avait même pas indiqué l'identité de l'écrivain qu'ils allaient recevoir ce week-end. Il s'agissait généralement de personnes du coin qui cherchaient à gagner un peu en popularité. Plusieurs étaient des habitués. Les dédicaces avaient lieu dans le rayon auquel appartenait le livre, et les libraires installaient tout peu avant l'ouverture, depuis la table et les romans jusqu'à l'assiette de gâteaux et sucreries de rigueur – surtout quand il était question d'un auteur de jeunesse, qui pouvait alors proposer à ses petits clients un bonbon.
Parce qu'il avait un peu de temps devant lui avant de reprendre le travail, Jungkook quitta la pièce et entra dans celle, adjacente, qui servait du bureau à Namjoon. Ce dernier était plongé dans ses documents, une boîte de nouilles probablement froides posée à côté de lui.
« Hyung, je peux te déranger un instant ?
— Oh, Kook-ah, bien sûr ! Justement, j'ai envoyé la demande exceptionnelle de retour pour les thrillers en trop, on devrait pas trop tarder à recevoir la réponse.
— Cool, merci beaucoup. Mais je venais pas discuter de ça.
— Ah ? Ça va pas ?
— Si, si, très bien, t'inquiète surtout pas. Je voulais simplement savoir qui était l'auteur qu'on allait avoir samedi.
— Oh... ouais, désolé, j'ai complètement oublié de vous prévenir, heureusement qu'il m'a envoyé un mail pour savoir si c'était toujours bon... Je t'en avais déjà parlé, je crois, c'est un vieil ami, il a fait ses premières dédicaces ici et on a sympathisé. Maintenant qu'il a vraiment gagné en popularité, il n'a plus trop le choix des endroits où il passe, mais son éditeur lui a laissé la possibilité de choisir, cette fois.
— Ah ?
— Ouais, et c'est tout naturellement que Tae s'est tourné vers nous. T'étais pas encore ici quand il a commencé à se faire connaître, mais je suis sûr que t'as déjà entendu parler de lui, se réjouit fièrement Namjoon.
— Tae... des albums jeunesse... Tu veux dire Taehyung ? Kim Taehyung ?
— Exactement ! La librairie va être bondée, on va faire un chiffre de fou, et en plus je vais pouvoir vous présenter, à Yeonjun et toi, un vieil ami ! Que demander de plus ? »
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