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Point de vue : Fred Weasley
« C'est passé si vite. »
Je ne pouvais qu'hocher la tête. Une boule s'était formée dans ma gorge depuis quelques instants. Cela faisait une heure que tout le monde se préparait à partir. Maintenant dans la cour du château, George faisait signe à des élèves de Beauxbâtons afin de leur donner congé. Moi, je n'avais le cœur à saluer personne. Bien que notre propre départ n'eût pas encore lieu, il se trouvait plus proche que jamais, et je ne voulais pas y penser. Mais comment ne pas y songer quand tout le monde autour de soi se dit au revoir ?
Mes yeux se perdirent sur Hermione. Elle se trouvait un peu plus loin, en compagnie d'autres filles, elle semblait heureuse. La boule à ma gorge se renforça malgré mon sourire. Les mains dans les poches, je l'observais sans gêne. Personne ne pouvait me remarquer, mis à part mon frère qui, lui, savait déjà tout.
Hermione, il s'était passé tant de choses, cette année... Par où commencer ? Je n'arriverais pas à tout remettre dans l'ordre pour le moment, mais j'avais besoin de me souvenir. J'avais besoin de me rappeler que je n'y étais peut-être pas pour rien dans le sourire que tu portais en ce jour.
Quand tu es venue passer une partie des vacances avec nous cette année, j'étais heureux. J'ai frôlé la mort, mais j'étais heureux. Je me trouvais au Terrier et quelques semaines à peine avaient passées depuis notre retour. Je prenais mon petit déjeuner en compagnie de ma famille quand notre père est rentré avec un sourire énorme. Au début, j'ai pensé qu'il avait trouvé une nouvelle voiture et qu'il prévoyait d'occuper sa journée avec moultes sortilèges pour la modifier, mais il me rapporta bien vite que je m'étais trompé. Il s'était positionné devant sa chaise, les mains sur le dossier, comme il le faisait souvent, et nous avait annoncé dans la bonne humeur que pouvait provoquer une telle nouvelle :
« Les enfants, cette année, nous allons à la coupe du monde ! »
Ron fut le premier à réagir. Il s'était écrié de joie, il avait serré notre père dans ses bras et embrassé notre mère. Avec George, nous avons échangé un regard heureux, ayant déjà en tête quelques petites idées qui auraient alors tout le temps pour germer. Et puis il avait repris la parole pour ajouter :
« Bien sûr, Harry et Hermione sont les bienvenus, j'ai pris des places pour eux aussi. »
C'est à ce moment que j'ai failli m'étouffer. J'avais fait l'erreur de boire mon jus de citrouille à cet instant, recrachant ainsi la moitié de ce que j'avais mis dans ma bouche et m'étranglant avec la part restante. Maman est venue me taper dans le dos alors que papa me demandait si j'allais bien. Je ne m'étais pas attendue à ce que tu fasses partie de l'aventure. Cela me ravissait, tu peux en être sûre, mais je prenais conscience que le moment était venu pour que tu puisses découvrir l'univers Weasley, le mien, celui auquel tu n'avais alors pas eu accès.
Les vacances s'étaient très bien passées. Je m'étais efforcé de ne pas trop penser à ta venue, et George a été d'une grande aide. Je me souviens d'un soir où il m'a parlé de toi, seule dérogation à son silence d'été sur le sujet. Je lui avais confié être totalement perdu et incapable de savoir comment réagir. Je me souviens encore du sourire qu'il portait à cet instant et de sa phrase, fameuse phrase inoubliable pour moi :
« Ça va glisser tout seul, t'en fais pas. »
Evidemment, je ne l'avais pas pris au sérieux. Mon niveau d'angoisse avait pris une telle ampleur le jour de ton arrivée que j'ai cru plusieurs fois que mon cœur allait exploser. J'avais atteint le stade ultime d'oppression quand je me cachais dans les escaliers, reculant le moment où je devrais te saluer alors que tu venais d'arriver au Terrier. Et puis je m'étais trouvé devant toi et naturellement mon sourire avait surgit. Tu m'as parlé et, comme l'avait prédit George, ça a glissé tout seul. Je n'oublierais sans doute jamais les paroles de mon frère car en ta compagnie tout me semble naturel. Et bien que j'aie eu mal à chaque fois que tu posais trop longtemps tes yeux sur un garçon, j'avais l'impression d'aller mieux quand tu m'offrais un de tes sourires.
J'ai rapidement compris que Viktor Krum finirait par tenter sa chance avec toi. Tu as tellement d'humilité que tu ne t'en rendais pas compte, au début. Tu ne semblais même pas t'apercevoir de sa présence, les premiers jours. Et puis quand tu lui as rendu ses sourires, quand vous avez discuté, quand ta main est venue se loger dans la sienne, j'ai compris que je devais regarder ailleurs. George a posé une main sur mon épaule et moi j'ai tenté de refouler mes larmes. Le pire n'a pas été le bal, comme pourrait le penser la plupart. Ce soir-là j'étais même ravi pour toi. Tu semblais heureuse et il semblait prendre soin de toi.
Non, le pire ça a été de vous voir vous embrasser. De te voir sortir du lac Noir et de le prendre dans tes bras pour le remercier de t'avoir sauvé. J'ai eu peur. J'ai eu terriblement peur à ce moment-là. Dans le lac se trouvait les trésors des champions. J'espérais égoïstement que contrairement à lui, tu ne le considérais pas comme un trésor.
Néanmoins, je me souviendrais probablement toujours de ce fameux soir dans la Salle Commune comme un souvenir plus vivace encore que celui du Lac. Il y avait beaucoup de monde ce soir-là, mais j'avais l'impression qu'il n'y avait personne. Personne à part nous. Mon frère, qui avait croisé mon regard, avait replié ses parchemins et s'était éclipsé, s'éloignant des canapés où nous nous trouvions. Je me souviens même de l'avoir remercié en me couchant, un peu plus tard. C'était ce fameux soir, je ne saurais sans doute jamais si tu t'en rappelles, celui où je me suis intéressé à ce que tu lisais et où nous avons alors discuté pendant ce qui pourrait sembler une éternité et une seconde à la fois.
« Le plus important c'est que tu réalises ton rêve, pas celui des autres. »
Je t'aie alors regardé sûrement comme je ne l'avais encore jamais fait. Nous parlions de nos résultats scolaires et tu venais de contredire tout ce qu'avait pu dire Ron à ton propos. En une seule phrase. Et ça me faisait drôlement sourire.
« Alors ce n'est pas grave pour ces B.U.S.E.S. Personne ne peut t'en tenir rigueur, surtout que tu feras bien plus de bien aux gens avec ce que vous comptez faire qu'en ayant de bons résultats. Si j'avais des enfants, j'aimerais qu'ils soient comme vous deux.
-C'est vrai ?
-Oui. Ne te méprends pas, non plus, un peu plus disciplinés ce serait sympa. »
J'ai ris et j'ai posé mon bras sur le dossier du canapé dans lequel nous étions installé. Tu avais depuis longtemps abandonné ta lecture et le feu crépitait toujours dans l'âtre, nous maintenant tous les deux gentiment au chaud. Je n'entendais rien de ce qui se passait autour. Peut-être que mon frère nous observait avec Lee, peut-être qu'Harry nous surveillait du coin de l'œil, peut-être même que Ginny préparait un petit chantage à mon égard, mais je ne faisais que te voir toi. Et, à travers ton regard, je comprenais réellement que j'étais amoureux.
« Non, je ne suis pas amoureuse de Viktor. »
La discussion continuait alors que je n'arrivais pas à décrocher mon sourire.
« Pourquoi tu sors avec, alors ?
-Parce qu'il me plaît et qu'il m'offre des bonnes expériences. »
Je me souviens de mon haussement de sourcil. Je souriais tout de même, même si je sentais mon cœur se resserrer, et ton rire me fit alors du bien. Tu avais haussé les épaules comme si ce que tu racontais ne représentait rien et j'avais trouvé utile de te rassurer, juste au cas où :
« Tu as bien raison. Il faut faire ce qu'on a envie de faire au moment où on a envie de le faire. »
Et là dans ton regard, Hermione je te le jure, j'ai cru y voir une parcelle de quelque chose. J'ai cru y déceler un détail important. Mais aucun mot ne pourrait décrire précisément ce dont il s'agissait, aucune parole ne serait en mesure de matérialiser cela, aucun écrit ne pourrait me le rendre réel. Pendant un instant, un si court instant, j'ai eu l'impression que tu savais. Je me suis senti démuni, complètement démuni mais tout de même porté par ce sentiment que j'avais nourris pendant toutes ces années. Et je n'ai pas été capable de te parler. Je n'en ai pas été capable et je ne voulais pas créer plus de conflits dans ton esprit qu'il n'y en avait déjà.
La discussion avait continué presque comme si rien ne s'était passé et nous sommes finalement partis nous coucher chacun de notre côté. Je rêve depuis ce jour de te faire des gestes tendres. J'espère pouvoir te dire des choses que personne jamais n'aurait osé te dire. Hermione, tu ne te rends pas compte, tu es si intimidante qu'il a fallu qu'un joueur de quidditch très célèbre débarque pour réussir à te prendre la main. Tu ne te rends pas compte de ton charme, de la façon dont tu bouges tes cheveux avec tes mains, de la manière dont tu chatouilles ta joue avec la plume lors d'une réflexion intense. Tu ne le sais pas, mais tu... Hermione, est-ce qu'un jour je serais capable de te dire ce que je ressens ?
Je te regarde à présent rejoindre Ron et Harry. Je ne sais pas comment les choses vont se dérouler par la suite. J'ai la vague impression que ce sera différent à partir de cet été, qu'une nouvelle tournure va apparaître et nous transformer à jamais. Je veux bien tout accepter, mais je ne veux pas te perdre.
Fin à suivre
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