Chapitre 11 : Wally
Je la regarde, percevant sa détresse. Mais je ne bouge pas. Driss non plus d'ailleurs, il reste toujours aussi stoïque. Et moi qui pensais qu'il avait commencé à s'ouvrir...
Le silence me pèse, mais je ne sais pas quoi faire pour le briser. Après quelques minutes, Tracy me demande d'une voix tremblante, sans vraiment me regarder :
- Alors, Anna est ici ?
Attendri, je me lève et vais m'asseoir à coté d'elle. Driss relève la tête à mon passage, et ne me quitte pas des yeux.
- Oui, enfin, je l'espère. Mais les Oplan l'ont attrapée hier, et si ce monde est aussi grand le notre, on n'est pas prêts de la retrouver...
Refusant de rester sur une note négative, je me rattrape :
- Enfin, les Oplan ne peuvent pas la cacher à n'importe quel endroit.
Elle lève la tête et me sourit. Je ne pourrai jamais me lasser de ce si beau sourire. Il allume dans ses yeux une telle lueur que je souris moi aussi. J'ai à nouveau espoir.
- Vous en pensez quoi vous, de tout ça ? Continue-t-elle avec un geste vague de la main.
- Je sais pas. Moi, je veux juste retrouver Anna et me sauver, je me surprends à répondre. Est-ce si vrai que ça ? Je dois reconnaître que les belles paroles de Sten ne m'ont pas touchées, mon esprit n'est occupé que par mon amie. Mais quand je l'aurai retrouvée, ne devrai-je pas aider les Antela ? Une trop grande partie de mon esprit me dit de ne pas me mêler à leurs histoires. Mon destin n'est pas écrit après tout. J'ai été élever par les homme, je ne sais pas me battre. Et je n'ai pas de cause à défendre, j'ai juste des amis et une petite vie bien rangée. Ça ne doit pas changer.
- Moi, je pense que nous ne sommes pas au bout de nos surprises. Pour l'instant, je ne comprends pas ce que les Antela attendent de nous. C'est vrai quoi, nous ne sommes que quatre, enfin... Que trois pour l'instant. Et nous ne savons rien de leur histoire. Même si nous abandonner dans le monde des hommes pouvait se révéler utile en théorie, je pense qu'en pratique, c'est tout l'inverse qui s'est produit. Nous sommes juste inutiles ici, et pas capables d'affronter les Oplan... Alors, pour répondre à ta question, je pense qu'ils n'auraient jamais dû nous arracher à nos familles, car ils ont juste réussit à gâcher nos vies. Nous expose Driss d'une voix grave en fesant quelques pas vers nous.
Je trouve ses yeux plus humides que d'habitude, et je me rends compte qu'il a raison. Nous ne pouvons rien apporter, et nous nous fesons attaquer sans pouvoir nous défendre. Il ont décidé de nos vies, et nous on tous mis dans la galère.
Tracy refond en larmes et je lance un regard noir à Driss avant de la prendre dans les bras. Celui-ci lève les yeux et retourne dans le coin qu'il occupait. Ce silence pesant revient s'installer entre nous. Quand Sten revient, nous n'avons toujours pas changé de place. Il lance des affaires à Tracy, semblables aux notres, et elle part se changer.
- Parfait ! Fait la sentinelle à son retour. Bon, on y va.
Il part décidé, mais dans une autre direction. Intrigué, je l'interroge :
- Bah c'est pas de l'autre côté la ville ? En pointant le doigt sur le passage d'où il venait.
- Non, les villageois m'ont déjà vu. Ça paraîtrait suspect que j'apparaisse avec vous.
Nous hochons la tête, approuvant sa démarche. On marche donc encore pendant une ou deux heures avant d'atteindre l'orée de la forêt.
On aboutit enfin sur une grande route solitaire. Perdue au milieu de grands champs verts, elle est tout de même en bon état. Ça change de nos petites routes de campagne toutes cabossées. Celle là est au contraire noir et bien lisse. C'est sûrement un tronçon important.
- Bon, vous vous souvenez bien de vos rôles ? S'assure Sten. Nous hochons la tête de concert et il s'avance à découvert.
Une fois sur la route, je constate que le soleil ne tape pas très fort. J'aime bien ce léger climat, doux et agréable.
C'est aussi un très grand délice que de ne plus souffrir de ces ailes plaquées sous ma peau. Pour être honnête, je n'ai plus qu'une envie : les déployer. Mais déjà, qu'elles soient cachées sous la cape, est un bon début. Au moins je n'ai pas à les ranger et à les écraser en me détruisant le dos.
Quelques voitures passent de temps en temps sur la route. Elle sont plutôt futuristes : petites, de couleurs vives et très épurées. Au bout d'un moment, un gros camion nous dépasse, pour s'arrêter quelques mètres plus loin. Sten passe devant nous et va à la rencontre du chauffeur qui descendait.
- La prochaine ville est à plusieurs kilomètres mes amis voyageurs, vous voulez que je vous y amène ?
Tracy se presse contre moi. J'avoue, ce mec me fait aussi un peu peur. Depuis quand des camionneurs sortient de nul part traitent-ils de parfaits inconnus en "amis", et se propose gentiment de nous aider ? En même temps, si il nous prend pour des pèlerins ou des gars comme ça, je veut bien croire à sa bonne volonté.
Et puis il a l'air honnête. Les apparences ne disent pas tout, je sais, mais il étant mieux habillé que nous, j'ai l'impression qu'il est sérieux, et qu'on peut lui faire confiance. Et puis, si la prochaine ville est vraiment si loin, je ne dirais pas non à un peu d'aide...
En tout cas au sourire de Sten qui accepte avec gratitude sa proposition, je comprends qu'on n'a pas à faire à un psychopathe.
- Allez montez les jeunes, direction Oudla.
Nous dit l'homme en ouvrant grand la porte arrière du camion.
Driss passe le premier, et je le suis. Tracy toujours près de moi n'hésite pas à monter la troisième dans cette remorque de marchandise. Nous nous installons tout au fond du camion, entre différentes grosses boîtes en bois. Le sol blanc et épuré luit a la lumière du soleil, mais quand le camionneur referme les grandes portes, le noir envahit la remorque.
On l'entend tourner la clanche et s'éloigner. Je me dis qu'on fait quand même vachement confiance à Sten et à ce mec pour nous laisser enfermer dans le noir et conduire n'importe où... Cette pensée est directement suivit par une autre : on est trois, et on a des pouvoirs, ils ne peuvent rien nous faire.
Bon, j'avoue qu'en cas d'enlèvement le mien sera moins utile que ceux de Tracy et Driss, mais je pourrais au moins m'enfuire facilement...
Le sol tremble soudainement et on entend le bruit de moteur à travers la paroi. Je sens un mouvement près de moi, et je comprends que Tracy s'est assise.
Je me pose aussi quand le camion commence à rouler, et un léger bruit un peu plus loin m'annonce que Driss a fait pareil.
Je sens Tracy bouger à côté de moi. Après un petit moment, un flash orange éclaire brièvement la pièce. La lumiere revient vite et le visage de mon amie apparaît à côté de moi, ainsi que ses deux mains jointes sur un petit feu. Je sens la chaleur qui s'en dégage sur ma peau et je m'éloigne un peu. Driss, lui, se rapproche pour profiter de la lumière.
- Merci, murmure ce dernier.
- De rien. Lui sourit Tracy.
- Bon, finalement, tu sera notre lampe torche ambulante, je lui dis.
Elle me tire la langue et je souris moi aussi. Ça fait du bien de la voir réagir. Mon amie reprend un peu de consistance, elle me paraît plus normale... Malgré le fait qu'elle tienne une boule de feu dans ses mains.
La faible lumière n'éclaire que nos visages, mais c'est suffisant pour nous voir sourire, et ça nous réchauffe tous les trois le cœur.
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