Chapitre 3 : Nora

Lundi, jour du rendez-vous chez la psy... J'attendais seule dans la salle d'attente. Le lendemain a lieu son enterrement, j'ai tout sauf envie d'y aller... Le regard perdu dans le vide, je songe à notre première réelle conversation...

Flash-back

J'ai 13 ans. Je rentre dans cette même salle d'attente avec ma mère qui me suit inquiète, moi je ne pense qu'à mon coup de poing et à la fierté que j'ai ressentie en voyant le sang couler.

Je finis par regarder qui se trouve cette salle et mon regard s'arrête sur une fille revêtie d'un sweat noir, capuche relevée. On ne peut pas apercevoir son visage mais ses cheveux dépassent et une mèche bleue retient mon attention... Je connais cette fille, elle est dans ma classe mais nos conversations se résument généralement à "Tu me passes ton stylo rouge ? Ouais tiens." ou à "Il est là le prof demain ? Je sais pas donne moi ton numéro je t'enverrais un message quand ma mère aura appelé le collège." Elle est mon contraire, elle est ronde, porte des lunettes, a des cheveux teint intégralement en bleu pastel et est hétéro. Moi je suis fine, brune, j'ai les yeux bridés et je suis lesbienne.

C'est alors qu'elle lève la tête et qu'elle me voit. Ma curiosité prend le dessus mais je n'ose pas lui parler, je lui envoie un message rapidement :
"Tu fais quoi ici ?"

Une sonnerie retentit, la faisant sursauter. Elle fouille dans son sac afin de retrouver son téléphone et m'envoie :
"Mon père est mort, ma soeur est dans le coma et ma mère m'aime pas"

À mon tour de sursauter, et je ne sais pas ce qui m'affole le plus, ce qu'elle vient de m'annoncer ou son absence totale de tact. C'est en cherchant comment lui répondre que je reçoit :
"Et toi ?"

Je pianote vite fait une réponse :
"Amoureuse depuis 1 an d'une amie qui, il y a 3 mois, a décidé de sortir avec un mec arrogant qui m'harcèle en me draguant lourdement... trois mois de dépression et hier j'ai craqué, j'ai frappé son copain"
Elle n'a pas tourné autour du pot, je décide d'être tout aussi franche.

En voyant ce texto, elle sourit et me demande :
"Tu lui as pété le nez ou tu l'as rendu stérile ?"

Contente de ne pas être tombée sur une homophobe, je réplique :
"LES DEUX MON GÉNÉRAL"

On se détache de nos téléphones et à peine nos regards se croisent qu'on se prend un fou rire incontrôlable, au grand désarroi de nos mères qui nous accompagnent.

Fin du flash-back

C'est ainsi qu'est née une formidable amitié... Qui s'est mal finie.

Je me rappelle qu'elle détestait son prénom, elle m'avait suppliée de l'appeler Jo' à la place.

La semaine d'après, le petit ami en question avait essayé de se venger, je rentrais avec elle en riant justement du magnifique pansement qui ornait son nez. Mais il nous avait suivi, il avait essayé de me prendre par surprise. Cependant avant même qu'il ne touche mon dos, Jo' s'était retournée, l'avait attrapé par le col et elle l'avait regardé en le jugeant avec toute la haine et le mépris dont elle était capable. Elle avait brandi son poing ou elle avait coincé ses clés de sorte à ce que cela fasse encore plus mal. Il s'était enfui en courant, il ne m'a plus jamais adressé la parole.

Elle avait un sacré courage, et on n'aurait dit qu'elle n'avait jamais peur, pourtant de temps en temps sa carapace se fissurait et laissait entrevoir sa vraie nature.

Je repense à la fois où elle m'avait appelée en pleurs, c'était cinq mois après, elle craquait, sa soeur ayant été hospitalisée il y'a six mois, son coma ne montrait aucune amélioration, elle avait extrêmement peur car au bout d'un an les chances de réveil sont quasi-nulles [NDA : merci google :')].
J'avais répondu. Après son monologue sur l'état de sa soeur, elle était dévastée. J'avais alors eu peur qu'elle fasse une énorme bêtise et je lui ai dit :
"Promets moi une chose.
- Quoi ?
- Promets moi que si jamais tu as envie de te suicider tu m'appelles.
- Pourquoi ?
- Pour qu'on mette fin à nos jours ensemble.
- C'est promis, avait-elle acquiescé."

Ce qui était bien entre nous deux, c'est que la mort aussi bien que le suicide ne fut jamais un sujet tabou. Finalement sa soeur s'est réveillée sans encombres quelques semaines après.

Un autre serment avait vu le jour il y'a un an : "Si jamais l'une de nous meurt un jour, et que l'autre après avoir vécut un ou deux mois sans sa meilleure amie n'est plus joyeuse, elle a le droit d'arrêter de souffrir et de se suicider."

Tiendrais-je un mois telle était la question.

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Un grand merci à Emotional_skeleton qui m'a redonné l'envie d'écrire !
Si vous trouvez des fautes dites-moi en commentaires !

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