La fin de semaine arrive finalement. À la sonnerie de la dernière heure, j'me fais pousser de tous les côtés par les connasses de ma classe. Je bouge brusquement mon épaule tandis qu'une fausse blonde me la tape et je lui lance un regard noir pour la redescendre.

— ... Oh désolé, haha ! s'exclame-t-elle en réajustant la lanière de son sac à main sans marque.

Puis elle file rapidement avec son groupe de pote, rigolant comme des dindes. Sérieusement ?

— Pourquoi les gens sont comme ça ce soir ? je lance au final, m'arrêtant sur le côté pour attendre les gars.
— À ce qu'il paraît, y'a soirée chez je sais pas qui, un mec des sportifs... Hyper riche d'ailleurs, vous verrez sa baraque ! Piscine intérieure mon pote ! Tu t'rends compte ?

Bah ouais, c'était obligé... Kévin crève d'envie d'y aller et ça se voit. Perso' j'sais pas, j'ai pas envie d'aller chez quelqu'un. On s'avance vers le devant du bahut, mon pote continuant à nous décrire comment est ce mec. Mais j'vois vraiment pas qui c'est et en vérité, j'm'en tape un peu. Tout en traversant la cours, ma tête se tourne finalement sans que je ne le veuille et capte Maël, son dos posé contre un lampadaire, sourire aux lèvres, une clope entre ses doigts. Il discute avec la pionne de je ne sais pas quoi, cette dernière à l'air bien heureuse de lui parler. Non mais n'importe quoi celle-là.

J'crois qu'il sent que je le fixe tout le long et tandis que la meuf vérifie un truc sur son téléphone tout continuant de discuter, le châtain me lance un regard, ne bougeant nullement. Je brise le contact visuel, me concentrant sur ma clope qui me parait soudainement bien plus intéressante. Attends mais depuis quand je baisse le regard ?

— Du coup avec Vanessa toi ?

Suite à ma question posée un peu trop précipitamment, Romain tourne son visage vers moi et quitte la conversation avec les gars. Il fronce légèrement ses sourcils en amenant sa cigarette électronique au bec.

— Bah ça va ouais, tranquille. Et toi ?
— ... Quoi moi ? c'est à mon tour de froncer les sourcils.
— Avec le mec qui est en train de s'avancer vers nous...

Mon pote murmure quasiment sa phrase, reprenant part au groupe à mes côtés et faisant comme si de rien n'était. Je peux pas m'empêcher de pivoter ma tête sur le côté et bien évidemment, j'suis pas choqué de voir Maël s'avancer vers nous — surtout vers moi — de sa démarche assurée. Il me lance un haussement de sourcil avec un petit sourire sur le côté.

— Salut.
— Salut... je réponds, amenant ma cigarette entre mes lèvres, mon regard se plantant dans le sien.
— Eh, eh, eh mec ! Même pas j't'ai croisé aujourd'hui toi !

Kévin sort légèrement de l'attroupement de mec, faisant attirer tous les regards sur le châtain. Ce dernier le salue, poing contre poing mais mon ami ne peut s'empêcher de lui faire une accolade en plus, ce qui surprend légèrement Maël.

— Je te trouve vraiment trop cool comme gars. Faut vraiment que tu traînes avec nous, ça nous fait trop plaiz' ! continue ce dernier, ses mains sur ses épaules, appuyant dessus pour paraître le plus sincère possible.
— Ouais, t'inquiète... Tranquille.

J'ai envie de rire intérieurement, il ne sait plus où se mettre. Mais bien rapidement, Romain rattrape Kévin et on s'dit tous à la semaine pro.

— Mais... On va pas à la soirée...?
— J'viens pas moi, je lance en secouant négativement ma tête.
— T'es pas drôle ! Romain, tu viens toi j'espère ? dit d'un ton plaintif Kévin, croisant ses mains entre elles.
— J'sais pas gros, j'dois voir Vanessa... Bon, on vous laisse ! Rentrez normalement, y'a les gendarmes à la sortie de la rue.

Après avoir fait un signe de main envers les gars, je me retrouve bien vite solo avec Maël. Téléphone dans la main, il jure en regardant l'heure.

— Merde, j'devais déjà être rentré là...
— Y'a quoi ? je demande tandis qu'il soupire, saoulé.

Je jette ma clope au sol et l'écrase, le portail à notre gauche se refermant brusquement par le concierge. Le vieux nous regarde un peu bizarrement, se demandant sûrement c'qu'on fout encore là.

— Mon frère, il m'demande où je suis.

Et pourquoi ça l'intéresse tant que ça ? Je me redresse du muret, jetant mon Eastpak sur mes épaules.

— Il est pas un peu chiant ?
— Si, ouais... Mais là j'dois vraiment y aller, cette fois. J'suis désolé, mec.
— Ah ouais non, t'inquiète.

J'vois pas pourquoi il s'excuse. Il me lance un sourire triste avant de commencer à reculer légèrement, finissant par me faire dos. Je le regarde s'éloigner de quelques pas mais Maël se retourne alors, d'un seul coup. Il est à quelques mètres de moi mais j'peux l'entendre encore.

— Et au fait... C'est vraiment cool de passer du temps avec toi. Faut remettre ça, ok ?

Je n'ai pas le temps de dire quoi que ce soit car il part vraiment pour de bon, accélérant même le pas pour arriver à sa moto. Je peux le voir de là, les arbres ne le cachant que très peu de ma vue. Maël met son casque rapidement et démarre en trombe, laissant derrière lui une fumée grisâtre.

Une fois définitivement seul je soupire et commence à prendre le même chemin que lui, plus tranquille avec les mains dans les poches. Je repense à ce que m'a dit Romain. Il s'imagine quoi lui, d'ailleurs ? Il croit vraiment que moi et Maël on pourrait genre... Ouais non, c'est mort là, je préfère même pas m'imaginer. C'est du délire, j'suis pas comme ça et je serai jamais de ma vie de ce bord. Et le châtain non plus d'ailleurs, il me l'a même avoué et il a refusé de sortir avec Matt. On n'est pas comme ça nous, on n'est vraiment pas comme ça... J'dois vraiment en douter ou quoi ?

Une fois arrivé chez moi, je dis bonjour vite fait aux parents et monte dans ma chambre. Une fois dedans, je m'empresse d'allumer mon Macbook et ouvre Google. Je mets navigation privé et soupire fortement en tapotant sur mon clavier lumineux.

comment savoir si on est hetero bi ou gay

Je fais défiler les liens qui sont à l'écran, le menton dans la paume de ma main. Je tombe sur quelques vidéos à titre putaclic qui me donne pas du tout envie de cliquer, j'finis par rentrer sur un site expliquant chaque orientation et je découvre qu'il y'en a des milliards. Sérieusement, y'a des trucs c'est la même merde ! Ils abusent à inventer quarante milles trucs. J'appuie sur retour et retape au clavier.

comment savoir si un mec nous kiffe

Beaucoup de liens m'agressent les yeux et je finis par cliquer sur un blog Skyrock tout pété. Putain, ça existe encore ce genre de truc ? Bon... Je commence à lire l'article, un peu blasé. La meuf a fait ça sous forme de liste et a souligné en gras les raisons qu'un gars nous kiffe.

1) — S'IL vous regarde dans les yeux et qu'il ne détourne pas le regard (et que le garçon accompagne tout ça d'un sourire) très probable qu'il soit intéressé ! Surtout s'il vous regarde beaucoup !!!!
2) — S'IL vous pose des questions sur votre vie !! C'est qu'il s'intéresse à vous ;) <3
3) — S'IL vous propose de sortir, franchement là, c'est qu'il vous aime grave les filles ! Très grand signe :p
4) — S'IL vous touche "accidentellement" le bras, la main, la jambe....
5) — S'IL fait le premier pas avec vous c'est tres important ! Cela montre qu'il veut vraiment vous voir et rester avec vous.

.....

Je ne lis pas plus, zieutant vite fait les autres raisons puis ferme brusquement le laptop. Ouais bah peut avoir des exceptions, elle se trompe carrément la nana. Je laisse tomber mon dos contre le matelas, soupirant bien fort. Je crains vraiment de chercher ça sur internet. J'me fais vraiment passer pour un cas désespéré, truc de dingue. J'attrape mon iPhone qui traîne dans les draps et le déverrouille. J'ai pas de notification, ça me fait sentir terriblement seul. Je repense à la fête chez le mec. Je devrai y aller ou pas ? J'sais pas... J'ai vraiment la flemme... En plus je le connais pas alors j'vais p't'être me faire virer sans même pouvoir y rentrer, surtout si j'y vais solo.

J'ouvre l'application la plus connue de tous, Instagram, et traîne un peu dessus. Je like les bonnes meufs et matant tous les détails qui font d'elles des nanas. J'aime les filles. Vraiment. Elles sont belles. Rapidement, mon doigt glisse sur l'écran et me fait apparaître un corps de mec musclé, photo sponsorisé en plus. Il est bronzé et trop de tatouages sont sur son torse. Je trouve pas ça attirant, merci Dieu ! Enfin... Ouais non, je me vois pas caresser des abdominaux, dans les deux genres d'ailleurs. Les meufs qui en ont c'est tellement moche.

Je regarde vite fait mes notifications, j'ai une demande d'abonnement. Je l'accepte sans m'en rendre compte de qui c'est, c'est seulement après que j'fais gaffe. Je me mords l'intérieur de la joue en jurant. Tout de suite, une des autres raisons que la meuf a cité me revient en tête :

— S'IL vous suit sur les réseaux sociaux... C'est que votre profil l'interesse et qu'il veut vous stalker >:)

Je tape sur son profil, il n'a rien publié depuis la dernière fois. C'est pas le genre de Maël de faire ça, stalker. Je réfléchis pas plus et mon pouce vient passer sur le bouton "s'abonner". Bah quoi ? Je jette par la suite mon portable, me levant rapidement de mon lit. J'ouvre la porte, descendant en bas. Au salon, ma mère et mon père regarde un film d'action. Ils retournent un peu leurs visages vers moi.

— Ça va fiston ?
— Ouais tranquille. J'vais juste chercher un truc à bouffer.

C'est comme ça que je choppe un paquet de chips et remonte dans ma chambre. Je me jette dans mon lit, faisant éclater le paquet entre mes doigts. J'allume Netflix et tape un épisode. Je zappe l'intro et me cale entre mes coussins, ramenant le Macbook sur les jambes. Je cherche mon téléphone qui, entre temps, m'affiche une notif. Tout en amenant une poignée de chips dans ma bouche tel un gros porc, j'ouvre le message. Bien sûr.

maelgaut : f4f

Je mâche bruyamment et galère à tapoter d'un doigt à l'écran.

leobggg09 : jte comprends pas
leobggg09 : il sert a r mon insta

Sa réponse se fait rapide, j'ai même pas l'temps de regarder ce qu'il se passe à l'écran. Alors, pause.

maelgaut : j'avoue puis c'est quoi ces photos en mode mec de la cité ?

Bah il comprend pas que c'est le style.

leobggg09 : ca attire les meufs

Ouais bon, je mens un peu. De toute façon je n'accepte que mes potes sur cette application, j'aime pas vraiment ce système mais je me suis inscrit juste parce que les gens me le demandait. Limite je devrai supprimer mes publications, non ?

maelgaut : peut-être pas que les meufs tiens

J'ouvre son message mais bug complètement dessus. J'appuie lentement sur les touches du clavier.

leobggg09 : j'accepte pas les pd

maelgaut : sur tes 498 abonnés tu dois bien avoir un pd ;)

leobggg09 : ouais du coup pk tu me parles ? ct quoi l'embrouille avec ton frero

Maël prend du temps à répondre et j'en profite pour continuer ma série. Mais ça ne dure que quelques minutes.

maelgaut : j'en étais sûr qu'il n'était pas capable de garder une meuf :) du coup il va encore traîner chez nous je sais pas combien de temps, ça me gave.

leobggg09 : mais jsp il bosse pas ton frere pour se payer un appart ou quoi ?

Enfin j'dis ça mais j'suis sûr c'est un gros branleur. Rien que la dernière fois j'suis venu chez eux, même pas capable de nettoyer une maison. J'aurai péter un plomb si je devais hébergé un type comme ça chez moi. Limite rends-toi utile non ?

maelgaut : non mdr

J'ouvre sans message mais n'y répond pas, ne sachant que dire. Ce type m'énerve un peu sans que je le connaisse. Finalement la soirée passe sans plus rien d'autre qui s'passe.

Samedi matin, c'est ma mère qui passe l'aspirateur qui me réveille. Je grogne en passant ma tête sous mon coussin, les sourcils froncés. Je déteste quand elle fait ça, c'est abominable. C'est seulement quand elle ouvre sans gêne la porte de ma chambre que je me relève rapidement, énervés, les yeux encore fermés.

— Bordel !

Bien sûr, elle n'entend pas avec le vacarme du truc. Je soupire brusquement et dégage de ma chambre, seulement vêtu d'un caleçon. En sortant, elle me crie de m'habiller. Je me dirige d'un pas rapide à la salle de bain et m'envoie de l'eau au visage. J'suis sûr il est pas même pas midi, moi qui voulait faire la grasse mat bah c'est un peu raté. J'attends un peu que ma mère finisse dans ma chambre et qu'elle parte réveiller ma sœur.

Une fois de retour dans ma pièce, j'attrape mon tel et remarque qu'en fait, il est midi passé. Et que j'ai un message qui vient de Romain.

de romain : mec ils prevoient une soirée horreur au ciné ce soir faut qu'on y aille ptn 👹👺😈

Je souris en tapotant ma réponse. J'adore les soirées comme ça qu'ils mettent au ciné d'la ville.

à romain : ça marche gros 🤜🏼🤛🏼
à romain : t'as prevenu kev aussi?

La réponse de mon meilleur pote ne met pas trop de temps à venir.

de romain : ouais ! alors y'a yanis qui dit qu'il vient avec un de ses potes mathis et mael aussi 🙃🙂

Cool. Au moins y'a pas les meufs qui vont crier à nos côtés.

à romain : je passe a quelle heure vous prendre?

de romain : 19h30 le premier film commence à 20h15
de romain : on téma les 3 nn?

C'est vrai qu'ils passent à chaque fois trois films de plus en plus flippants. Pour moi c'est ok, de toute façon on est en week-end.

à romain : tout est bon pour moi

de romain : ok a toute mec !

Je ne réponds plus et rien et branche mon tel au chargeur. Je souris inconsciemment et ouvre mon armoire, chopant un jogging qui traîne et un t-shirt blanc. J'enlève quelques vêtements, les jettent en dehors de mon armoire, regardant qu'est ce que je peux bien mettre pour ce soir. C'est le bordel maintenant derrière moi et j'crois que si ma mère rentre, elle me défonce. Un truc au motif militaire me fait de l'œil au fond et ça m'fait directement penser à Maël. Je choppe le cargo légèrement ample et le tend devant devant moi. Putain il date trop ce truc, j'savais même pas que j'avais ça encore. Mais ça va, il passe. J'vais mettre ça avec mon gilet noir et ce sera parfait. Je referme mon armoire d'un coup de pied puis me retourne et rage quand je vois ce qui se trouve sur mon lit et par terre. Faut que j'range cette merde maintenant.

⁂

— Maman, la clé steuplé ! J't'ai déjà dit que je rentrais tard ce soir !

Je rigole en voyant Romain toujours à la porte de chez lui, je klaxonne pour qu'il se dépêche. Sa mère m'a enfin entendue et elle me fait un signe de main que je lui rends, assis au volant, fenêtre ouverte. Cette dernière lui tend finalement sa clé. Mon meilleur pote lui fait la bise rapidement et trottine jusqu'à la portière avant côté passager et une fois dans la bagnole, je démarre en trombe. Romain rigole légèrement. Il sent bon le parfum.

— Putain, j'ai même pas attaché ma ceinture !
— On est en retard, un peu. Y'a encore Kévin à récupérer... je lance, dépassant un vélo.
— Ouais, j'sais. Il m'a envoyé un message, j'lui réponds là. Et Yanis est déjà sur place avec Maël ! continue-t-il tout en tapotant sur son écran.

Je hoche la tête et prend la route pour me rendre chez Kévin. Ce qui est cool c'est que c'est sur la route, on prend juste un détour par un lotissement. Et bien vite, ce dernier est à son portail, yeux rivés sur son nouveau iPhone 11, bonnet sur la tête. Quand il voit mon Audi noir mat, je le vois sourire et il se place à l'arrière.

— Tu l'as acheté au final ? s'écrit Romain en retournant sa tête vers le grand qui s'attache la ceinture.

Je regarde dans les rétros en faisant ma marche arrière, jetant un coup d'œil à Kévin ensuite.

— Ouais, il est pas mal non ? dit-il excité par son téléphone, le donnant à Romain.
— De fou gros. Mais ça fait grave bizarre, faut que je m'y habitue au modèle, répond ce dernier, le tournant dans tous les sens.
— Je préfère quand même mon XR, je réponds au final, regardant la route devant moi.
— Bah vos gueules, j'suis toujours bloqué au 7 moi ! se plaint faussement celui au siège d'à côté, rendant le portable à Kévin.

Ce dernier rigole et on commence un peu à parler des films qu'on va regarder ce soir. Romain flippe un peu de son côté, se rongeant les ongles. Je peux pas m'empêcher de rigoler en voyant ses réactions lorsque Kévin lui lit les résumés.

— Mais putain c'est toi qui a proposé, mec ! je dis au final en souriant, m'arrêtant à un feu rouge.
— Ouais mais j'sais pas j'voulais sortir quoi, se justifie-t-il en ouvrant la fenêtre pour s'allumer une clope.
— Non mais moi j'suis content, continue Kévin en se laissant tomber sur le dossier de la chaise, ça va être cool. Maël a pu se ramener du coup ?

Je garde mon regard fixé sur le feu tricolore toujours bloqué sur le rouge.

— Ouaip il voulait grave venir quand il a su que Léo allait s'ramener.

Romain me fait un coup de coude discret et un clin d'œil tandis que passe la première, faisant avancer lentement ma voiture, savant pertinemment que le feu va bientôt passer au vert.

— Mais genre, les préférences... En vrai j'suis pas choqué parce qu'il le téma toujours lui au lieu de nous, répond Kévin qui pose ses bras sur le haut du dossier du siège de Romain, près de l'appui-tête.
— De fou. Moi j'suis sûr ils se sont déjà vus sans nous, ces petits bâtards.

Le brun derrière nous réajuste son bonnet sur la tête en rigolant, montrant ses dents blanches ainsi que son piercing à la langue. Je lance un regard blasé à Romain après avoir redémarré et ce dernier hoche la tête en mode j'ai raison. C'est dingue on peut rien leur cacher.

— Non, sérieux ?! se reprend Kévin, écarquillant les yeux.
— Vous faîtes chier, la vie de moi.
— Bah mec, va pas nous dire le contraire. On est tes meilleurs potes on sait tout nous, lâche Romain en recrachant la fumée de sa clope à l'extérieur.

Je hausse les sourcils en soupirant. J'ai rien avoué de toute façon, j'en ai pas besoin car ils devinent tout déjà. C'est incroyable.

— Du coup vous vous êtes vus quand ?

J'ai envie de le frapper à faire son curieux, Romain. Ils sont lourds un peu. Je garde une main sur le volant, suivant la circulation, ma tête se cognant contre l'appui-tête.

— On s'est croisé par hasard à chaque fois. C'tait pas important de toute façon, je réponds, las.
— Mh, mh...

Je jette un coup d'œil vers Kévin à partir du rétro intérieur et lui fait un doigt d'honneur. Je me fais klaxonner car le mec derrière moi à cru que je lui faisais à lui. Je jure tandis que les deux se marre à côté de moi.

— Vous êtes cons.
— Mais c'est toi ! rigole Kévin en lançant un regard à l'arrière, vers le conducteur de la Jeep, un gros vieux aux look rock.

Je soupire en regardant les embouteillages du soir devant moi. J'attrape mon téléphone et voit que j'ai 0 notification. J'sais pas pourquoi j'm'attendais à en recevoir une.

— Maël nous a payé les tickets pour les 3 films et nous a choisit une rangée de place derrière. C'est un amour, dit Romain les yeux baissés sur son portable.
— Oh cool, mais attendez ça veut dire qu'on est en retard ?
— Eh ouais, ça m'fait chier là... je soupire en mettant mon cligno pour passer de l'autre côté, une blondasse en 208 me laissant passer.

Bizarrement cette file là avance bien plus vite et ça m'arrange. Après un rond-point, je suis les panneaux pour arriver au grand cinéma. Je me gare vite fait en deux trois mouvements et on sort bien vite. Il fait déjà nuit et je rabats ma capuche sur ma tête. Pas le temps de s'allumer une clope qu'on rentre tous à l'intérieur. Les gars nous font signe qu'ils sont déjà rentrés de l'autre côté et je vois Maël parler au mec de la sécurité en montrant nos billets.

— Vous avez pas de sac ? C'est bon, passez.

Yanis, bonnet lui aussi sur la tête ainsi que son pote fait un tchek à toute la bande. Tandis que je me retourne vers Maël qui me fixe les mains dans les poches, je lui souris un peu. Il porte un col roulé moulant et il a mit par dessus une chaînette argentée autour de son cou. Un jean bleu foncé légèrement monté et ample entouré par une ceinture noire simple et avec ses fameuses bottines militaires. Il tient sa veste en cuir de motard sur son avant bras et j'ai l'air d'une merde à côté de lui.

— J'ai pas un peu le même pantalon ? me lance-t-il, baissant ses yeux sur ma tenue.
— Si ouais mais il rend bien non ?
— Pas mal.
— Bon, vous v'nez ?

La voix de Romain me fait sortir de notre conversation et on s'avance vers les 4 devant nous. On passe devant le bar qui sert un peu de tout, surtout des pop-corn et des boissons. On s'prend chacun un grand paquet.

— C'est en quelle salle la soirée au fait ? je lance, attrapant déjà une poignée de pop-corn sucré.
— 13, me réponds Mathis en souriant, vous m'gardez ça les mecs, j'vais aux chiottes.

Au final Romain et Kévin y vont aussi, du coup on les attend sur un banc capitonné en velours noir, moi au milieu, Yanis et Maël à mes côtés.

— Du coup ça va toi ? commence Yanis qui a croisé ses mains, tournant son visage vers moi.
— Ouais et toi ? On s'croise plus trop au lycée.

Le bouclé sourit tristement tandis que Maël sort son téléphone et du coin de l'œil je le vois ouvrir sa messagerie. Je veux trop voir à qui il écrit mais ne je me force à regarder droit devant moi, mâchant mes pop-corn.

— Mais cette sortie ciné, c'est cool que Romain a proposé franchement. Au bout d'un moment c'est chiant de rester dans son coin, tu comprends ? Ça m'fait du bien.

J'écoute d'une oreille ce que le bronzé me dit, j'suis beaucoup trop assommé par son parfum qui se dirige tout droit dans mes narines lorsqu'il bouge légèrement à mes côtés, venant coller sa cuisse à la mienne. Maël pose sa main sur sa jambe, ses doigts ornés de bagues légèrement écartés.

— En plus vous voir, c'est plutôt bien. Genre, en dehors du lycée. C'est une autre ambiance t'as vu ?

Je secoue ma tête affirmativement en regardant quelques secondes Yanis qui lui, fixe un point invisible sur le plafond. J'ai déjà oublié ce qu'il m'a dit, mon regard se baissant maintenant en sentant le petit doigt du châtain caressant le côté de ma cuisse. C'est léger mais j'arrive à sentir quelques picotements à cet endroit là. Je le sens sourire tandis qu'il regarde son doigt, sachant très bien ce qu'il est en train de faire. Rapidement, il vient rajouter son annulaire mais je n'ai pas le temps de le dégager qu'il le fait tout seul, Mathis se ramenant devant nous, secouant ses mains encore trempées. Ok, il s'est passé quoi là ? Ce dernier nous sourit légèrement et nous fait un signe de tête vers les portes grandes ouvertes. On peut voir des gens rentrer et ressortir, sûrement pour partir chercher de la bouffe ou aller aux toilettes.

— On y va ? Romain et Kévin vont sortir dans deux secondes.
— Ouais allez go, dit Yanis en se relevant plutôt rapidement, s'avançant déjà avec son ami.

Maël se redresse le premier et il hausse un sourcil en tournant son visage vers moi voyant que je ne bouge pas, un léger sourire aux lèvres.

— Quoi ? me lance-t-il plutôt doucement.
— Pourquoi ?

Je reste toujours immobile tandis que la porte des toilettes à côté de nous s'ouvre d'un seul coup. Je garde mon regard sur Maël qui lui, lance un coup d'œil aux mecs qui sont revenus.

— Bon, vous faîtes quoi encore là ?
— C'est bon on arrive, se justifie Maël en faisant un geste de main pour qu'ils avancent.

Romain croise ses bras et secoue négativement sa tête, nous laissant seul. Kévin le suit aussi, haussant les épaules en notre direction.

— On devrait y aller.
— Ouais, c'est bon, je me lève à mon tour plutôt précipité.

Sauf que le châtain attrape mon bras dans mon envol et je sans sa main s'enrouler autour de mon biceps. Sa bouche se rapproche de mon oreille, son souffle s'échoue contre cette dernière et moi je garde le regard fixé au sol, dans le flou.

— Tu m'en veux pas au moins ? murmure-t-il en se décalant quelques secondes après.

Je vois pas de quoi de toute façon. Je tire un peu pour qu'il me lâche, pas violemment mais juste pour briser un peu le rapprochement. Ça me fait bizarre qu'on soit si près, en public et à côtés des gens qui circulent autour de nous.

— Non, j'arrive à dire finalement, levant mes yeux bleus vers les siens.

Je l'entends sourire mais je ne brise pas le contact visuel. Je crois que le premier film va bientôt commencer, en plus.

— Alors tu viens d'accepter que je continue. Allez, on y va.
— De quoi ? je lance, fronçant légèrement les sourcils tandis qu'il s'avance vers la salle.
— Viens et tu verras.

Même pas qu'il se retourne et me voilà comme un con, avec mon paquet de pop-corn dans les mains. Je soupire et marche moi aussi en direction de la pièce déjà plongée dans le noir, l'écran affichant encore quelques pubs à la con. Je suis Maël, j'arrive encore à le voir, des lumières plantés au sol illuminants ses longues jambes. Et une fois au dernier rang, je me place à la dernière place qui reste, aux côtés de Maël. Je suis tout au bout, collé au mur bien évidemment. J'suis un peu tendu lorsque je me cale contre le siège rouge qui bouge légèrement. Le compte à rebours s'affiche à l'écran et je ne sais pas si c'est les films de ce soir qui vont me faire le plus flipper.