On pourrait renverser le monde.

Eclipse de 4 mois.

Les mois ont filés à une allure indescriptible. La vérité, c'est que je n'ai rien vu venir. Personne n'a rien vu venir. Durant ces semaines, une fin de saison et le début d'une autre, une multitudes de choses se sont passées, bonnes comme mauvaises. Je vais raconter ça rapidement, parce qu'un rappel est nécessaire. 

Après la première rentrée de l'année, suite aux vacances, tout s'est enchaîné super vite et surtout depuis le fait que Kévin est maintenant au courant pour Maël et moi. Après ce qu'il s'est passé à sa fête, il a réussi à présenter ses excuses et y a rien qui puisse me rendre plus heureux que ça. J'supportais plus cette ambiance de merde. On soupirait, on se fuyait, on se regardait de loin, du coin de l'œil et je savais pas à quoi on jouait.

Maintenant, certes. J'ai retrouvé mon ami, même si... Je sens que ce n'est plus comme avant. 

Malheureusement.

Bien qu'il me dise que c'est de l'histoire ancienne et qu'il regrette de s'être comporté comme il l'a fait, j'arrive à ressentir cette distance qu'il met entre nous. Elle est légère mais assez pour que je la ressente. On est toujours collé ensemble, ça bouge pas, sauf que les regards qu'il pose lorsque je me retrouve avec Maël n'est plus comme avant. D'ailleurs Maël pense comme moi, et Romain me dit que je me bourre le crâne avec ça. Je me prends trop la tête d'après lui. Il me dit d'oublier et que quoi qu'il arrive, Kévin restera notre pote même s'il s'est égaré. C'est vrai, c'est un fait. Sauf que j'demandais juste de retrouver mon ami moi, et la finalité ne me convient pas. Ou plus. Il manque quelque chose.

On peut pas tout avoir, et ça je l'ai bien vite compris.

Peut-être que quelque chose s'est brisé entre nous trois, et c'est sans doute cette petite marque de confiance.

P't'être que je fais tourner les événements un peu trop autour de moi. Faut pas oublier que Kévin a eu énormément de soucis avec sa famille et il s'est définitivement séparé de Camille.

Sans succès, retour à la Case Départ, c'est son nouveau statut IG depuis qu'il est célibataire.

Je me souviens quand on nous l'avait annoncé avant d'aller en cours, la dernière fois. Limite, j'avais prit ça pour de la rigolade et je pensais que ça allait être réglé assez rapidement, voir même dans la journée.

Sauf qu'on est bientôt en mai et rien n'a changé. Rien. Rien n'a évolué entre ces deux-là. Vraiment rien. Nada. 

Vous voulez savoir pourquoi, j'imagine... On voulait tous savoir, au début. Les absences de Camille se sont multipliées, tellement multipliées qu'elle ne venait plus en cours ces derniers temps. On a apprit quelques jours plus tard que ses parents se sont séparés, divorcés en fait, et qu'elle n'avait plus le goût à rien. Cette merde a basculé beaucoup de chose dans sa vie. J'la plains. Elle s'est séparée de Kévin peu de temps après, si ce n'est même avant, cette période a tellement été merdique pour nous tous que j'me souviens même plus de comment ça s'est vraiment passé, tout s'est enchaîne de façon bizarre.

En tout cas, je n'ai plus jamais vu Kévin et Camille en train de se rouler des pelles comme dans le bon vieux temps. Le temps où tout était plus facile. Dire que sans cette sortie scolaire de début d'année, ils se seraient jamais parlés ces deux-là.

Il a chialé sur mon épaule de nombreuses fois, dégoûté de sa vie et de la tournure des choses. Le week-end dernier, il nous a même invité Romain et moi et la soirée ne s'était pas terminée sans qu'il ne fonde en larmes, encore. Bien sûr que ça m'a fait chier de le voir dans cet état, comme n'importe quel pote. J'aime pas l'voir comme ça, même s'il m'a blessé et que j'ai cette espèce de pique au cœur quand on se sourit, nous deux. Mais il est faible et anéanti, sans personne autour de lui, il n'a que nous, ne voyant l'ombre de ses parents que quelques rares fois dans le mois. Alors, ça me fout le mort et j'me dois d'être là pour lui. Kévin a été un véritable enfant ces derniers temps, j'vais pas mytho, sans sa meuf, il était pire qu'une épine coincée dans la paume d'une main mais j'lui ai déjà répété qu'on va rester accrochés lui et moi. Romain s'est joint à nous bien évidemment, son bras ayant entouré Kévin pour le serrer dans une étreinte.

C'est tout ou rien avec lui.

Enfin bref, j'ai p't'être assez parlé de Kév. D'ailleurs il est à côté de moi là, en train de se taper un pétard un peu trop chargé. Il me le refile rapidement après avoir tiré une longue taffe, je choppe le bâton nocif du bout des doigts et l'emmène à mes lèvres. Ça me relaxe direct. Je croise le regard de mon fraté après ce geste, il me sourit faiblement avant de répéter machinalement encore et toujours, des cernes de fatigue dessinées sous ses yeux clairs.

— Merci, fréro.

Romain n'est pas en pause avec nous, il traîne de plus en plus avec les autres types de l'autre lycée. Je les ai vu une fois, de loin. C'est les skateurs. Il est toujours accompagné de Mathis et de Yanis, notre trio s'est un peu dissout au fil du temps à cause d'eux. C'est casse couille. Franchement, je les kiffe hein mais rendez nous Romain, wesh. J'vais croire qu'on va devoir le partager semaine A et semaine B. J'dois me coltiner les plaintes de Kévin h24 ces temps-ci tandis que l'autre vit sa meilleure vie avec le gars qu'il kiffe — c'est même plus secrètement à ce stade — tranquille. Moi, j'suis bloqué. Quelle chance. Du coup, j'passe mes pauses qu'avec Kévin et Maël, Cassandre et Bastien quand ils se pointent. 

Si seulement l'autre pouvait débarquer solo...

Rien n'a vraiment changé de ce côté-là. La gothique et Kévin arrivent à se voir de temps en temps, quand ils sont dans leur mood tranquille. Ça dépend des jours, parfois c'est limite s'ils peuvent se regarder, ça finit en tirage de veuch et tout le reste. Des vrais cons, y'a des moments où c'est la honte.

Et quand c'est pas l'un, c'est l'autre. Je n'énumérerais jamais assez toutes les questions que mon ami me posait par rapport à ma relation avec Maël... Après notre « réconciliation ». Quand je disais que quelque chose nous manquait désormais, c'était par rapport à ça. J'ai l'impression que malgré le fait qu'il fasse des efforts, il n'arrive pas à comprendre. Genre, ma relation. Je ne sais pas s'il y arrivera un jour, très honnêtement. Je l'espère, parce que putain, je me sentirais plus léger. Mieux dans ma peau. J'me sens jugé avec Kévin. Je l'aime, c'est mon gars, mais bordel c'est tellement plus comme avant. C'est comme si tous les jours, je devrais l'affronter, lui et ses pensées bizarres. 

Quand j'pensais finalement au loup, c'est là qu'il débarque... Et pas solo, comme je l'avais espéré. Il est accompagné de ses deux amis, j'vais plus les citer vas-y ça m'a saoulé.

Mais ouais c'est vrai que j'ai pas parlé du plus important, du coup... Maël et moi, on s'est fait une promesse il y a quelques temps.

On s'est dit qu'on finirait le lycée ensemble. C'est notre objectif. On s'est dit que, malgré tous ces gens, qui représentent d'ailleurs la plupart des embûches sur notre chemin, on finirait l'année avec notre bac' en poche. Il s'est juré de le passer avec moi et que lorsqu'on aura enfin notre diplôme, il me roulerait une giga pelle devant tout le monde. Gros fou. Ça m'avait fait rire mais mon rire s'est vite calmé quand j'ai capté qu'il était super sérieux. Espèce de gros malade. On était bien défoncés ce jour-là quand on s'est promit ça, nos p'tits doigts liés... Je m'étais incrusté chez lui ce vendredi soir et... Vas-y comme d'hab, on n'a pas arrêté de se chercher, ça n'a pas changé en 4 mois.

Ça a toujours été spécial entre nous deux, de toute façon. Dès le départ, notre relation n'était pas normale. Il me saoulait, j'pouvais pas me le blairer avec sa dégaine. Il jonglait avec ses deux facettes, quand c'était pas le mec j'm'en foutiste c'était le mec parfait, il arrivait à maîtriser cet équilibre nickel qui charmait tout le monde et ça m'énervait tellement. Voilà ce qu'on est maintenant. Deux cons, ensemble. Si j'pouvais lui chopper la main maintenant et ce même devant la mine dépressive de Kévin, j'le ferais.

Et non, en 4 mois je n'ai pas prit une seule once de courage. Maël me dit que c'est pas grave.

Et que ça va venir, petit à petit. Il m'arrive de le toucher, légèrement, par moment, en public, lorsque son contact me manque. Ça me manque assez régulièrement. Je le quémande à ma façon. En privé, ce n'est pas la même chose. Le jour, la nuit. Tout ce que je contiens durant des journées entières, je lui renvoie en pleine figure.

Puis nous deux, Maël et moi, ça fait des putain d'étincelles.

En 4 mois, j'me trouve un peu plus confiant vis-à-vis de notre relation intime. Je me déchaîne, on se défoule, on vit comme on a toujours voulu vivre, cachés entre 4 murs. Je raconte ça mais depuis la première fois où il a déposé ses lèvres sur les miennes... Ça a été du grand n'importe quoi. Des montagnes russes. Depuis le début, il m'a fait des choses. Trop de choses. Il m'a jamais laissé de marbre. C'est une vérité. Il est trop fort, et moi trop faible. Il déchiffre le hiéroglyphe que je suis en quelques secondes.

De difficile, j'suis passé à facile entre ses mains.

La dernière fois, au creux de mon oreille il m'avait sortit une phrase très bâteau.

— À deux, on pourrait renverser le monde.

Cette phrase elle est comme, genre... Marquée en moi. On pourrait renverser le monde. Quand je me la répète, dans mon crâne, ça me donne envie de crever tellement c'est trop. D'un point de vue extérieur, j'aurai trouvé ça trop ringard. C'est sorti d'un script de film à l'eau de rose tout pété mais vu que c'est lui qui m'le dit, j'aime. Ces satanés sentiments qui ne cessent de me tourmenter n'arrivent plus à me quitter et même que par moment, ils s'aggravent et me laissent une douce sensation dans le cœur. Il pourrait me le renverser. Il m'a fallut du temps pour comprendre et foutre une définition sur ce que je ressentais, bien que l'avouer de vive voix m'est impensable. 

Il le sait, de toute façon. Pourquoi le lui chuchoter ? J'attends d'être sous sa  manipulation la plus totale. Ça va être dans longtemps.

Au fait. Maël s'est fait blond. Comme en début d'année. Samedi dernier, j'avais reçu un snap de lui en train d'attendre chez le coiffeur. J'l'ai harcelé de réponse et il m'avait même pas répondu. Seulement quelques heures plus tard, j'avais reçu un selfie avec sa grosse tête de blondinet. C'est vrai, ça lui va bien et bien sûr que j'ai mytho pour qu'il arrête de faire son gros bg. Sauf qu'à ce stade, j'suis même plus crédible.

Voilà ce qui explique pourquoi je le compare à un rayon ces temps ci. Ça y est, il fait beau, on est en sweat, tranquille, p'tit gilet ou veste légère, p'tite casquette en train d'apprécier ce doux soleil au bord du muret du bahut. La bronzette entre midi et deux, c'est c'que je kiffe.

— Voilà qu'on retrouve nos deux toxicos préférés, souffle en premier lieu Cassandre, au milieu des deux garçons.

En 4 mois, Cassandre n'a pas changé. J'crois qu'elle est devenue même de plus en plus chiante. Et son style, c'est de pire en pire. J'ai l'impression qu'elle choppe ses vêtements dans une poubelle ou à la récup'. J'vois pas dans quelle boutique complètement censée pourrait se trouver ce genre d'accoutrement mais soit, si ça lui plaît.

— Voilà qu'on retrouve la blédarde de service... Vas-y Cassandre, commence pas. 

Aujourd'hui, ils s'entendent pas. Bastien remonte ses lunettes en soupirant face à leurs gamineries et j'me mets à hausser les sourcils d'exaspération en le regardant, compatissant. Ouais, mon gars. Et lui non plus, il n'a pas vraiment changé. Toujours aussi intello. Toujours des 20. Quoi que ça y est, il se débloque un peu plus. Socialement. La preuve, j'arrive à entendre le son de sa voix.

— Non Cassandre, non... Je ne mettrais jamais entre vous deux, je te l'ai dit déjà, soupire-t-il à nouveau, ne sachant plus où se mettre face à ces deux lions.

Maël se fout à côté de moi, tout sourire, son coude me cognant gentiment, j'bloque mon regard quelques secondes sur sa beauté. J'oublierai pas le fait que tu m'as abandonné à midi, sale con. J'te pardonne mais j'oublie pas. Même si j'aime bien rester avec Kévin — en ce moment, j'en peux plus mais oklm — j'aime encore plus quand tu squattes dans mes parages. 

— Mais prends ma défense à moi, Bastien ! Solidarité masculine ou quoi ! C'est quoi ça... s'égosille alors Kévin, tirant une nouvelle fois sur son joint.
— Pff. Tu rêves. Si tu crois que mon meilleur pote s'allierait avec toi... 
— Hé... soupire à nouveau le lunetier.
— Cassandre... Tiens, prends ça. Ça va te détendre. 

Kev' lui tend alors ce pétard pour couper court, d'ailleurs ce dernier va être faire le tour de la cours s'il continue de le partager. 

— Cet échange, c'est l'signe qu'on fait la paix ?
— Ouais. On fait la paix, lance-t-il une dernière fois. Par contre Bas', faut t'arrête de laisser cette folle te contrôler par contre. Fais tes propres choix, mec. Ok ?

Le pauvre. Ses épaules sont remontées et il refuse le oinj que lui tend son amie. Toujours l'autre il lui fait des leçons de morale parce qu'il préfère défendre Cassandre plutôt que lui. À chaque fois, Bastien ne sait où se mettre et j'avoue c'est marrant à voir. Marrant mais un peu gênant pour lui.

J'écoute plus trop leur conversation sans queue ni tête, me concentrant plutôt sur Maël qui reluque ses réseaux sociaux. Je regarde ouvertement par dessus ses épaules et stalke son fil d'actualité. C'est bon, y a rien de chelou, c'est un homme de confiance. En vrai j'm'en fou, il peut regarder ce qu'il veut. J'rigolais. C'est juste que ça me fait rire de stalker les réseaux de son/sa mec/meuf. C'est un truc que je comprendrais jamais, genre ma sœur. Cette dingo m'a avoué que c'était son activité favorite dans la vie, la dernière fois. J'savais pas si c'était du sérieux ou pas, alors j'ai rien dit.

L'heure sonne et on se dirige en cours. Maths, je kiffe. Pour faire dans la sincérité, j'les préfère quand c'est l'autre mon professeur privé. J'ai pas raconté, ouais j'sais, y'a trop de trucs. Mes moyennes ont augmentées depuis que je me mets sérieusement à réfléchir et depuis que j'utilise mon cerveau hyper intellect. Bon, dans les matières scientifiques c'est pas trop ça mais c'est mieux qu'au début où j'faisais 0 effort du style rendre feuille presque blanche. J'ai amélioré mes notes dans toutes les matières sauf en anglais et la physique chimie, j'comprendrais jamais rien à ça. J'suis une galère. L'anglais, vaut mieux pas que j'en parle. Y'a pas à apprendre, j'peux juste pas. C'est du chinois et Maël me dit qu'on va regarder des films et des séries en sous-titré pour que ça m'aide.

Spoiler, on l'a toujours pas fait. Il est toujours dans ses bouquins de mathématicien lui. J'en ai marre, c'est de pire en pire. Je sais bien que le bac approche mais il me manque moi. Quand on se voit, obligé on passe par la case révision avant de se bécoter en despi sous une couette. Au final, c'est p't'être comme ça que j'ai pu augmenter mes notes sans vraiment le vouloir. J'suis au final « forcé » de réviser et de faire quelques devoirs.

J'en ai marre, il est trop fort.

Et ouais quelques devoirs sont faits, faut pas abuser mais quand ça prend toute la page d'un agenda, j'vais zapper la moitié.

Après tout, j'reste Léo Armanetti.

Maintenant que les beaux jours sont au rendez-vous, Maël prend de plus en plus souvent sa moto. C'est comme ça qu'on rentre chaque soir et il me casse les couilles à faire n'importe quoi la route. J'suis toujours obligé de m'accrocher à sa veste en cuir, totalement ouverte, osef de la sécu', il préfère dévoiler son débardeur noir en dessous. Il est taré ce mec. Encore plus que moi au volant, et limite il fait exprès. Quand il me dépose enfin chez moi, j'lui offre un coup dans l'épaule puis dans sa tête protégée avant de lui rendre son casque. J'espère que ça a bien résonné là-dedans et qu'il a la tête qui tourne.

— Conduis normal, putain !
— Mais c'est toi qui parle ? Quoi, t'as eu peur...

Il ne manque aucune occasion pour me faire chier.

Après tout, il reste Maël Gautier.

— Pff, comme si j'pouvais avoir peur, je lui réponds en vissant ma casquette sur la tête. Aller, j'y vais.
— Attends, wesh.

J'peux squatter un peu chez toi ? Voilà ce qu'il va me demander. On parie ? 100 balles. Je fais mine de pas l'écouter, mes pas m'éloignant de lui.

— Y'a tes parents, là ?

C'était presque ça mais on a tous capté le délire. C'est tout comme. Dos à lui et prêt à pousser le petit portillon pour rentrer chez moi, je laisse un faible sourire déformer mes lèvres. Pff.

— Sans doute... je lance, le ton mystérieux.
— J'peux rentrer ?

J'avais oublié qu'il s'en fiche, c'est un sans gêne. Il les a vu plus d'une fois.  

Je rentre dans mon jardin puis je referme après moi. À ton avis. Je lui fais désormais face, ne pouvant m'empêcher de le reluquer, toujours à cheval sur sa moto. Moto qui d'ailleurs est complètement rayée sur le côté, ah c'est vrai, j'ai pas raconté que ce con s'est ramassé il y a pas longtemps en rentrant des cours.

C'était il y un mois, il a mal prit un rond-point et il a glissé, accidentant son véhicule, heureusement qu'il n'a rien eu lui et que personne n'était engagé, il s'était bien protégé avec sa combi, pas comme aujourd'hui. Ça lui a pas servit de leçon. Je me souviens que cet idiot a prit un snap avec une légende « Oups 🤭 » en m'envoyant sa putain de moto par terre, il m'avait fait si peur ce jour-là. Je l'ai détesté. Il s'est cru drôle sur le moment et j'l'avais bien engueulé, j'avais l'air d'un fou au téléphone, j'crois que c'était un peu notre première dispute.

Dispute qui a duré 5 minutes à tout casser, puisque je ne peux pas lui en vouloir plus longtemps. Surtout quand il a commencé à me demander pardon d'une p'tite voix. Ouais, j'suis un faible. C'est moi, j'suis vraiment mal tombé.

— Je rentre alors.

Comme si tu avais besoin de mon autorisation. Maintenant, c'est chez toi aussi. Il laisse sa moto en face de chez moi, devant le petit panneau « Interdiction de stationner », Maël ne se faisant pas prier pour me rejoindre. Je joue avec le trousseau de clé avant d'ouvrir la porte d'entrée, nous engouffrant alors dans ma demeure. Cool, il n'y a personne. Intéressant comme plan. En même temps, on a fini grave tôt aujourd'hui.

— J'aime bien quand y a personne chez toi, dit-il en brisant ce petit silence paisible.
— Pourquoi ça m'étonne pas ? je souris.
— On va pouvoir réviser en paix !

Réviser, ouais. Si tu veux. Je me tourne vers lui après avoir jeté mes TN, dégagé mon gilet, mon visage s'approchant dangereusement du sien. Je respire son air et il respire le mien, son sac tombant à nos pieds dans un bruit sourd, ce dernier chargés de manuels et cahiers de tous sujets relous puis lourds.

— J'vais pouvoir te réviser, ouais.
— Ah ouais ? souffle-t-il, ses mains se déposant autour de mon visage.

Ouais.

Je kiffe quand il m'agrippe comme ça. Je lève mes yeux bleus pour plonger mon regard dans le sien, je le quémande, je le demande autant qu'il m'intimide. Il arrive à me foutre des frissons rien qu'en me matant de cette manière, sa manière, la manière de Maël.

Et même après tout ce temps, je sais pas si j'aime et ou je déteste ses manières.

— T'as perdu ta langue, il reprend sous mon silence d'or.
— Viens la chercher.

Mes doigts passent en dessous de sa veste en cuir froide, mes ongles retrouvant bien rapidement les bords de son haut qui remontent légèrement sur son ventre, je le lui tire pour le coincer contre moi. Debout, dans l'entrée, nos corps s'entrelaçant à notre façon, sans réfléchir, l'envie prenant le dessus sur nos pensées, nos actions se déroulant naturellement, comme toujours, comme depuis le début, ces petites choses que l'ont exécutent n'étant que le fruit de nos désirs cachés.

Sa langue sur la mienne, il vient enfin m'embêter. J'peux pas m'empêcher de lui offrir un gémissement, mes sourcils se fronçant en le laissant me bouffer la bouche, mon cerveau complètement bousillé, à sa merci, me laissant emporter par Maël et par tout ce qu'il m'fait. J'pense même plus correctement, j'arrive plus. J'deviens débile. Son odeur, il sent la clope et le parfum, elle me rend ouf, il me rend p't'être un peu trop dingue surtout quand termine le tout en me mordant les lèvres.

Putain de baiser. Signé M.

Enfin, si j'peux appeler ça un baiser. J'étais plutôt un goûter à ses yeux. Ça tombe bien, il est 16h00. C'est toujours comme ça avec lui. Nous deux, on sait jamais profiter l'un de l'autre comme deux êtres normaux. En même temps, on est tout sauf normaux. En 4 mois, on a pu s'expérimenter à deux, il connaît mes faiblesses, mes points forts puis en retour, j'ai analysé les siens. Et c'est de la folie. Il sait comment me faire kiffer et j'sais comment le faire faiblir, Maël qui veut toujours garder le contrôle et manger le petit con que je fais. Mais cet après-midi, j'pourrais bien le laisser faire. J'suis joueur, et lui encore plus. Son p'tit tour en moto m'a un peu excité, j'avoue.

Il me fait trop faiblir quand il roule comme un danger public, en fait.

Entre deux révisions, entre la physique et la géo, entre un coussin et une couette de lit mal tirée, entre des murs, entre moi et lui, entre lui et moi, j'pourrais l'interroger sur ses connaissances à l'aide de mon corps envieux du sien, la fièvre me montant à la tête et aux joues quand il fait monter la tension de deux crans entre nos deux êtres chamboulés de désir jugé pire qu'illégal.

— T'as quinze minutes pour me faire n'importe quoi, je chuchote alors entre deux baisers fougueux et simplement maladroits.

J'ai une confiance. Parce qu'en quinze minutes, Maël est capable de me faire toutes les conneries qu'on a apprit, à deux, en 4 mois.

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