M A E L

— T'es vraiment beau Maël, aujourd'hui ! Enfin, c'est pas que tu ne l'es pas d'habitude mais...
— Ah ben, merci hein... 
— Euh, ouais... T'as p't'être pas des choses à faire toi au pire ou...?

Voici quelques minutes que notre invité se trouve assit sur une des chaises de la table à manger. Ma sœur, Gabriella, n'a pas hésité une seule seconde pour lui servir un verre de soda sous mon regard un peu blasé. Non mais. On dirait qu'elle est plus contente que moi que Maël se trouve à la maison alors que, pas du tout. À vrai dire, je pensais qu'elle allait nous laisser tranquille mais qu'est ce que j'espérais, elle est obligée de faire son intéressante maintenant. Comme d'habitude, de toute façon.

— Ouais, si... lâche-t-elle finalement après avoir bu une gorgée de Coca. Ça va, j'ai capté. Enfin bon, je vais vous laisser du coup...
— Hmm, bah c'est bien... je réponds en lui faisant un signe de tête style dégage s'il te plaît.
— Roh...! Oui ! J'ai compris, arrête ! Bon... J'y vais, j'y vais ! Et ah, tu diras à mama que j'dors chez Marie ce soir, tu peux ?
— Eum... Ouais, ouais. Si j'oublie pas.

Gabriella me lance un léger sourire avant de se retourner vers Maël qui nous regarde depuis tout à l'heure, les coudes posés sur la table. Ma petite-sœur ne peut s'empêcher de lui faire un smile de l'enfer, enfin, elle lui montre toutes ses dents avec en prime, ses rails de train. J'dirais pas que c'est une des meilleures vues à voir mais bon, faut bien dire la vérité et ce qu'il en est : c'est sacrément moche.

— Bon du coup, hein... J'espère qu'on se revoit bientôt, Maël. J'suis trop contente que tu sois passé, en tout cas ! rajoute-t-elle avant de s'approcher de lui pour faire la bise et, enfin, monter dans sa chambre pour se préparer.

C'est ça, ciao. Sérieusement... Je ferme les yeux avant de lâcher un long soupir, un peu dépassé par tout ça. C'est horrible comment je me sens quand ma sœur traîne dans les parages quand il y a Maël. Je sais pas mais j'me sens grave chelou. En fait, depuis qu'elle sait ce qu'il se passe quelque entre nous deux — après avoir bien forcé la chose t'sais, vraiment une sale garce cette nana — et ben, ça me tend qu'elle tourne autour de lui. Le garçon, lui, ça ne semble pas vraiment le déranger. Il n'arrête pas de dire qu'il trouve ma sœur « amusante » non mais franchement, faut qu'il revoit la définition sur son Larousse parce qu'elle est loin, très loin d'être ainsi.

On continue de se fixer quelques instants avant qu'il se lève pour s'approcher subitement de moi. Tranquille, oui. Il sent le parfum et un peu la clope aussi, j'sens bien qu'il a fumé avant de venir. Je louche sur sa bouche qui me tente d'ici, de toute façon il fait pareil avec moi. Il attend la mort pour le faire. Le dos accoudé contre les rebords du plan de travail de la cuisine, je ne change pas pour autant ma position et vient même me serrer un peu plus. Son corps se rapproche comme dangereusement du mien et j'ai l'impression qu'il veut qu'on fasse ce que je pense mais au final, pas du tout. Vraiment. D'une main volatile, il vient chopper un fruit posé dans un panier en corde tout juste derrière moi. Le châtain se recule après avoir attrapé cette foutue pomme et s'éloigne de moi tout en venant croquer dedans, comme si de rien n'était. Je le déteste, c'est un fait.

— Enfoiré va, je souffle.
— Euh... lâche-t-il après avoir mâché. Surveille ton langage, j'suis pas ton pote moi. 

Je retiens un autre soupir avant de me frotter énergiquement le front. Des bruits se font entendre à l'étage, je me demande ce que ma sœur fabrique putain. On dirait qu'elle vient de casser un truc ou qu'elle est tombée comme une grosse merde. Tellement qu'elle est idiote, ça ne m'étonne pas que ça se soit ça en fait.

— Ouais. Mais en vrai vas-y, tu veux pas qu'on bouge plutôt ? Genre j'sais pas, je propose en le regardant manger.

Le garçon fait mine de réfléchir avant de hocher de la tête dans les secondes qui suit ma question.

— Bonne idée. En plus, mon outfit est trop beau pour que j'reste dans une maison.
— ... Genre, grosse blague.
— Ben quoi ? Ta sœur a approuvé, en tout cas. Tu sais quoi, je trouve qu'elle a du goût cette petite.
— Grosse blague fois 2. Du goût, ouais... je hausse les sourcils. Bref vas-y, c'est bon ?
— Vas-y. Tu sors comme ça ?

Quoi, comme ça ? J'essaye de ne pas me décaler lorsqu'il se relève de nouveau vers moi, d'une démarche quelque peu furtive. Ses yeux clairs tombent dans le bleu des miens avant que je finisse par rompre le contact visuel et de les baisser vers ses doigts qui tirent la ficelle défaite de mon jogging Nike. Euh, ouais. Le coin de ses lèvres s'étire en un sourire et je le repousse, faut pas qu'il me touche là, comme ça. Il s'est cru chez qui ? Ma sœur peut descendre à tout moment en plus, non mais, j'imagine même pas la tête qu'elle fera s'il voit la main de Maël près de ma... Wesh, il abuse de ouf par contre.

— J'suis désolé mais tu sors pas en jogging, comme ça.
— Ah. Depuis quand tu m'dis comment j'dois m'habiller toi ? J'te dis d'arrêter de mettre tes hauts qui t'collent, là ?

En vrai je mens parce que ce genre de pull qui remonte sur son cou, vrai, ça lui va beaucoup trop bien. Enfin, parce qu'il a la corpulence pour. Ni trop fin comme un ficelo et ni trop musclé, genre dégueulasse là. J'sais pas, c'est bien sur lui et c'est tout. Moi si je m'habille comme ça, j'ressemble à une merde, vraiment. Alors les gens qui jugent les joggings, j'vous emmerde bien profondément. Sauf Maël, exception exceptionnelle. On n'est pas tous mannequin comme Gautier. 

— T'aimes pas mes cols roulés... ? rajoute-t-il en fronçant faussement ses lèvres. Pourtant je trouve que ça me va bien, à moi.
— Ouais, tu trouves parce que tu t'sens frais tout le temps... C'est différent.
— T'veux pas m'dire que ça me va, tu sais j'ai compris. De toute façon, je sais que tu me trouves super dedans.
— Dis pas ce que j'ai pas dit. 

Quelle princesse. Le châtain roule des yeux et me demande gentiment d'aller enfiler un truc mieux. J'comprends pas, c'est la première fois qu'il m'ordonne de changer mes fringues. Genre ça y est, il m'trouve plus beau ou quoi. Enfin bon, j'crois que j'ai pas trop le choix quand il me fixe de cette manière. Il mériterait vraiment une baffe par moment, j'suis sûr qu'il sait qu'il est insupportable quand il s'y met. Lorsqu'on quitte la cuisine pour monter dans ma chambre, on croise Gabriella finalement apprêtée, un peu trop bien d'ailleurs pour qu'elle aille juste voir sa « bff » comme elle dit. Des chaînettes qu'elle a attaché sur les passants de la ceinture de sa jupe blanche s'entremêlent et provoquent un bruit métallique quand elle marche. Un crop-top rose pâle accompagne son ensemble et bien sûr, des converses de la même couleur. Elle a attaché ses longs cheveux noirs en une queue de cheval haute, un bandana blanc sur sa tête pour se donner un style mais elle m'fait plus penser à une fermière qui va traire ses petites vaches, là. 

— T'es sérieuse, cette tenue ? j'ose dire tandis qu'elle passe à côté de nous avec un air fier collé au visage. Oh, j'te parle.
— Roh, lâche-moi. T'es qui ? J'porte ce que je veux et maman s'en fiche, elle m'a déjà vu comme ça façon ! s'explique-t-elle finalement, en bas des escaliers.

Ma sœur croise ses bras tout en faisant un demi-tour comme si elle s'croyait à un défilé là. Avec sa jupe plus courte que mon avenir, c'est vraiment pas des blagues. Maël se mord les lèvres pour ne pas rire. Je n'aime pas trop la savoir habillée comme ça bizarrement, euh, d'habitude j'm'en fiche mais là, je sais pas... J'ai l'impression que c'est trop.

— De toute façon, c'est mon corps ! Je peux même sortir en culotte si j'en ai envie !
— Eh, abuses pas quand même... je souffle, à bout.
— Ben... ! Non. Mais Maël est d'accord avec moi, je suis sûre... Hein ? Genre, j'm'habille comme je veux, j'suis grande maintenant.
— Euh... Ouais mais évites quand même de te trimballer en slip dehors, juste un conseil... répond-il, plus forcé qu'autre chose.

Gabriella soupire, ses yeux se levant vers le plafond avant de nous laisser comme deux cons dans l'escalier. 0 effet sur elle, têtue comme j'sais pas quoi. Bref, c'était pas important ça. J'me demande si parfois elle a pas des problèmes à se vexer comme ça, même moi j'étais pas comme ça à 15 piges. Elle abuse. 

— J'suis désolé, la vérité. Elle est chtarbée, je me justifie comme si c'était ma faute d'avoir eu cette merveilleuse sœur à supporter.
— En vrai j'ai compris c'qu'elle voulait dire mais elle l'a mal exprimé, c'est tout.

Là n'est plus le sujet. La porte d'entrée se claque dans un bruit sourd après avoir entendu Gabriella hurler qu'elle s'en allait. Bon débarras. Une fois dans ma chambre, Maël prend place sur mon lit, tranquillement. Il chantonne doucement une musique en regardant les objets aux alentours, comme si c'était la première fois qu'il voyait ça alors que pas du tout. 

— Mec, j'comprends vraiment pas pourquoi tu m'fais chier pour me changer là... je rage, sortant des fringues lambda de mon armoire sans vraiment y prêter trop attention. J'suis pas assez bien pour toi comme ça ou c'est comment ?
— Ah... Mets juste autre chose que tes trucs Adidas ou Nike, j'sais pas.
— Et si j'ai que ça ? C'était très bien là, on va pas aller j'sais pas où non plus.
— Bon bouges, finit-il par dire, son corps se tenant à présent derrière moi.

Je l'écoute et me laisse tomber sur le matelas, le faisant légèrement grincer sous mon poids. Ma tête se glisse sur un de mes coussins et je relève ce dernier contre le dossier de mon lit. Là j'ai une vue parfaite sur le dos de Maël qui, contrairement à moi, fait un effort et attention en sortant mes habits.

— C'est dingue d'avoir autant de survet.
— Bah, écoute. C'est la vie les survet, tu peux pas comprendre parce que c'est pas ton style.
— Pas mon style mais quand même... lâche Maël avant de soupirer. Oh, tu t'souviens de ce cargo ?

Le châtain se tourne vers moi qui est toujours allongé. Je lève un sourcil en le regardant tendre un pantalon avec des empreintes militaires, un truc qui traîne toujours vers le fond de mon placard et que j'mets très rarement. Mouais. J'sais plus. Sûrement, p't'être. Enfin, j'vois pas pourquoi il me demande de me souvenir de ça. Sous mon manque de réaction, il se reprend.

— T'avais mit ça quand on est allé voir les films d'horreur avec les autres. J'm'en souviens parce que ça m'avait choqué de te voir avec autre chose que ton Nike.
— Ah ouais... Et ben. C'est bien. Bah donnes ça, j'vais le mettre.
— J'attendais que tu le dises. Tiens.

Son sourire me contamine, j'sais pas pourquoi. Genre ça lui fait si plaisir que je porte ce truc ? Bon. Je me relève finalement avec flemme après m'être étiré en baillant, choppant au vol le bout de tissu. Mon jogging gris glisse le long de mes jambes et je ne peux m'empêcher de jeter un coup d'œil vers Maël qui s'est retourné, de nouveau concentré à chercher des fringues. Prit d'une envie soudaine et parce que j'en ai marre de pouvoir mater sans toucher, mon torse vient buter son dos et ça ne manque pas de le surprendre. Mon menton se pose sur son épaule et mon nez respire son odeur bien à lui, l'odeur de Maël. 

— Salut, chuchote-t-il en me laissant dans cette position plutôt agréable, j'vais pas mytho.
— Yo.

Je murmure à mon tour comme si j'voulais pas briser ce silence qui s'installe calmement entre nous. Les seuls bruits qui ont le droit de combler le calme de la pièce n'est que le froissement des habits qu'il soulève, qu'il range et puis qu'il plie. J'ai l'air p't'être ridicule d'être en boxer, en t-shirt et en chaussette derrière lui comme ça mais j'sais pas, j'ai pas envie de me décaler pour autant. Mes doigts viennent longer le long de sa taille, remontent sur ses côtes et les courbes de son torse que je ressens comme s'il était quasi à nu avec ce haut qui lui colle à la peau. 

— Tu devais pas porter des trucs plus larges, avec ton piercing là...

En y pensant, je ne l'ai pas remarqué quand il était en face de moi. Peut-être qu'au final, il l'a enlevé ?

— Hm, j'ai mit un pansement dessus. J'en avais marre de porter que des sweats...
— Genre.

J'suis à peu près sûr qu'il voulait se faire beau gosse pour moi, à porter ça. Vraiment, c'est trop. En plus avec ses colliers, là. Stylé. J'en profite pour remonter une main et d'attraper un fil argenté sur mon index, le faisant doucement rouler sur la pulpe de mon doigt. 

— Genre, quoi.
— Rien, rien.

Sans que je l'en empêche, Maël finit par se retourner vers moi. Son regard percute directement le mien et je n'ai plus qu'une envie, c'est de poser ma bouche sur la sienne. Je lève légèrement mon menton et vient appuyer son front à l'aide du mien, son visage étant proche du mien. Je le vois grimacer et bien sûr, d'une manière complètement fausse. Il va pas me faire croire qu'il est en sucre car c'est totalement faux. J'ai besoin d'attention, la vérité j'arrive pas à croire que j'm'avoue ça. 

— Aïe... se plaint-t-il encore, ce qui me désespère.
— Non, pas aïe.
— Tu sais c'est quoi la douceur ?
— Nan. Jamais entendu parler de c'mot. Tu m'apprends ?

Je me recule doucement de son visage, histoire de mieux le voir. Mes yeux fixent les petites mèches plus blondes que châtain dues à son ancienne coloration. J'admire ce faciès que j'connais à forcer d'autant le reluquer, dont je connais les détails, les détails qui font de ce mec, Maël. Mon pouce s'applique à tracer sa joue dénuée d'imperfection, sa peau qui est douce là, vas-y j'crois que je vais finir par piquer ses crèmes qu'il s'applique nuit et jour. Si ça rend comme ça, même après le rasage, j'dis ouais. Faut qu'il me dise ses secrets pour être beau. 

— J'réfléchis et j'te rappelle. En attendant, veuillez enfilez un pantalon. Aller.
— Putain. Ces manières que t'as. T'es insupportable. 

Je ne manque pas de soupirer et avant de l'écouter, je lui vole quand même un instant la propriété de ses lèvres. Les miennes rencontrent les siennes à peine quelques secondes mais qu'il considère ça comme un avant-goût, j'en ai pas fini avec lui. Puis sous son regard, j'enfile le cargo qu'il m'a demandé de mettre et au final, j'me matte sur un vieux miroir accroché sur la porte de mon armoire. C'est bien comme ça. En vrai, c'est pas mal ce truc, je devrais le porter plus souvent. Il a raison, quand il veut. 

— Vas-y, enlève moi ce haut qui doit sûrement t'servir de pyjama et mets ça.

Ah, sérieux. J'ai vraiment pas le choix depuis tout à l'heure. Il est si autoritaire que si je dis que j'veux pas il va grave mal me regarder. Et j'avoue, pas envie que ça arrive. Je sens son regard qui se promène sur mon torse, à ce stade là j'crois qu'on se gêne même plus. On a bien vu pire l'un comme chez l'autre, genre... Bref. Pourquoi j'pense à ça maintenant, faut vraiment que j'calme mes hormones. Ces temps-ci, j'ai l'impression de vouloir que ça. Pas besoin d'expliquer avec des mots plus explicites, on a tous compris.

— Bien, beau gosse. Tu mets ça avec tes baskets noires là, et t'es ready.
— Ouais. Du coup, c'est bon là t'es sûr ? je lui demande pour qu'on soit clair, je ne me changerai pas encore, c'est mort.

Déjà que j'ai fait ça pour lui, ça va quoi. Qu'il ne me demande pas la lune non plus, la flemme de la lui ramener de toute façon.

— C'est cool. On peut y aller maintenant.

Enfin. Après être descendu de ma chambre, on part enfiler nos chaussures et j'fais un tour rapide dans le salon pour voir si je n'ai pas oublié de fermer des fenêtres, ou quoi. Je pense à prendre un double des clés — ainsi que celles de ma voiture — après avoir enfilé ma veste et suite à ça, on quitte la résidence. Une fois dans l'Audi, je démarre mon bijou et je n'allume pas le chauffage, bizarrement il ne fait pas froid dehors. Un soleil hivernal séjourne au dessus de nos têtes et il suffit pour ne pas nous faire trembler lorsqu'on défile dans les rues bondées du centre-ville. On sait pas où on va, mais on va.

Il y a du monde aujourd'hui vu que c'est le week-end et surtout, le week-end du début des vacances. Alors déjà, la plupart des étudiants se retrouvent. D'habitude je déteste cette ambiance, genre quand il y a trop de monde mais avec le mec à côté... Honnêtement, il pourrait m'amener partout, j'en ai rien à foutre. J'le suivrai, qu'il le veuille ou non. J'suis un mec casse-couille quand je m'y mets, pas besoin de le démontrer par a+b car ça s'voit en fait. Il me fait rire à trimballer ses sacs en carton, se trouvant dedans des habits qu'il a prit le temps d'essayer sous mes yeux, dans les différentes cabines d'essayages. L'idée de vouloir m'y incruster m'aurait bien tenté mais trop de gens autour. Sinon, c'est sûr que je me serai pas gêné. D'un ton plaintif, il me demande de m'aider à les porter sauf que wesh, j'suis pas sa servante mais vas-y, aujourd'hui j'suis galant. Juste aujourd'hui. Le voir de bonne humeur comme ça, j'ai pas envie d'effacer le sourire qui orne ses lèvres depuis qu'on est ensemble. Sérieux, qu'on fasse plus souvent ça. 

Après presque deux heures de marche et de recherche des vêtements parfait pour le mannequin ici présent, on se pose à une terrasse. Rapidement, une jeune serveuse vient prendre notre commande vêtue d'un petit tablier avec l'enseigne du café. Maël prend un Virgin Mojito sans alcool et je décide de prendre pareil que lui car je conduis. En plus, j'adore ça. Il a du goût. Le parasol de notre table est rangé ce qui me réjouit parce que le soleil qu'on est en train de se taper là, vraiment c'est le meilleur. Je m'adosse plus confortablement sur ma chaise, m'allumant une Marlboro tandis que le garçon en face de moi vapote tranquillement sa e-cigarette.

— Tu m'as crevé avec tes magasins, toi. T'es pire qu'une meuf, putain.

Le châtain laisse échapper la fumée qu'il vient d'inhaler avant de secouer de la tête. Son regard est perdu sur la circulation en face de nous, sur ces gens qui passent, sur ces voitures qui défilent à faible allure.

— Tu te fatigues vite. Après j'comprends, c'est l'âge...
— J'te rappelle que j'ai juste un an de plus que toi, fais pas trop l'malin. T'es malade, toi.
— Ben justement. C'est ça qui est grave ! Putain.

Finalement, ses yeux se tournent pour m'observer avant qu'il me fasse un clin d'oeil et j'avoue que j'comprends pas vraiment la raison, genre il me drague ou bien. Ah, bon. Au moins nos boissons arrivent, là. C'est bien, ça commençait à faire long pour ce qu'on vient de demander, quand même. Ou c'est peut-être moi qui est trop impatient, ouais. 

— Et voilà votre commande... Profitez-bien, nous adresse la brune avant de retourner faire son boulot.
— Génial, merci !

Trop poli ce mec, ça me donne envie de lui donner des baffes. Je me demande encore comment j'arrive à le supporter par moment. J'ai l'impression de dire cette phrase tout le temps, mais la vérité... Ouais, trop différent. Je goûte sans plus attendre à ma boisson, boisson glacée qui j'avoue, n'est pas la meilleure à boire en décembre mais franchement, ça passe crème là avec c'temps.

— Bien, bien, c'est bon, je juge en levant les yeux sur Maël.
— Pas mal, mon cher.
— Ah, stop. Ces manières, n'importe quoi. Arrête-toi.
— Quoi ? Mais tu les aimes mes manières...
— Pas du tout.
— J'te connais maintenant, tu peux faire genre j'vais pas te croire.

Mais oui, mais oui.

— Ah ouais, tu me connais. C'est ça.
— Ben... J'espère un minimum, ouais. Quoi, t'as encore des petits secrets inavoués ? me demande-t-il, d'un ton curieux. Dis les moi.
— J'ai pas de secret, moi. Enfin avec toi, j'pense pas.

La paille de son verre vient se coincer entre ses deux lèvres enduites de labelo. Après une gorgée, il me répond. Arrête d'être beau, idiot. Sois moche deux secondes. On dirait qu'il peut pas, genre être comme les gens normaux ?

— Et toi ? je lance tout en attrapant une deuxième clope de mon paquet à moitié rempli. T'en as à m'avouer ?

Maël fait mine de réfléchir tout en continuant de boire son mojito. J'enflamme le bout de ma cigarette, le regard toujours rivé sur son faciès pâle. 

— Hmm, non. J'ai pas de secret moi, Léo. Tu sais bien.
— Ouais. Et genre... Même ça. Fin, t'as vu. C'pas un secret pour les autres ? je rajoute, émettant ma dernière phrase d'un ton plus léger.
— Tu parles de nous ?

J'essaye de rester blasé à sa réponse, me contentant de hocher de la tête. Ouais c'est ça. De nous.

— Ben... J'le garderai secret jusqu'à que tu ne veuilles plus que ça le soit. Ça aussi, tu le sais.

Vraiment, ah. Sa réponse me réchauffe un peu, ça me touche, j'vais arrêter de faire l'insensible deux secondes mais... Oui, ouais. Le fait qu'il me dise ça me fait plaisir et ça me prouve encore que j'ai raison d'avoir cette confiance avec Maël. Putain, en quelques mois il a réussit alors qu'encore hier, il sortait de nulle part. Je comprends pas le monde, par moment. Enfin, bon. Mon manque de réponse le fait continuer.

— J'te l'ai déjà dit, de toute façon. Tu comptes pour m... Bref. T'as capté, ok ? J'vais pas faire n'importe quoi, sur ma vie.

Ouais, finis pas ta phrase. Si je sens mes joues me brûler, je te jure que tu finiras la tête contre la table. J'essaye de cacher ma gêne en tirant une taffe sur ma clope et lui, à s'occuper la bouche avec le bout de sa paille qu'il mordille et qu'il tord dans tous les sens possible.

— On a l'air cons j'te jure, lâche-t-il après avoir pouffé, ignorant mon regard.

Ouais, c'est ça. Lui aussi, il s'est gêné tout seul. Il est bête. Et j'avoue que j'trouve ça mignon, faut qu'il arrête de me transmettre toutes ses émotions d'ailleurs. Après comme il dit, on a l'air de deux idiots. 

— Ouais, mais... Ça va le faire, je reprends en toussotant à la fin de ma phrase, attirant son attention.
— De ? demande-t-il alors bêtement.
— Wesh... Nous. C'est tranquille. Non ?

Je tire une dernière fois sur ma clope avant de l'écraser contre le cendrier présent au milieu de la petite table. Je vois les yeux de Maël suivre du regard mon geste, ses coudes se posant sur la surface du bois.

— Hmm, oui. J'suis bien avec toi. Donc, tranquille.
— ... Ouais. Donc tranquille.

Son sourire fait et fera toujours fondre mon coeur qui est devenu bien faible depuis qu'il a fait la rencontre de ce mec. La vérité, j'me suis jamais senti aussi bien dans un truc. Même si c'est la première fois de ma vie que... Que ouais, j'fais ça avec un mec ben, j'capte même plus au final ce détail qui n'a plus son importance. Les mots s'arrêtent là mais les regards continuent d'exister. On fume, on boit jusqu'à en avoir marre de cet endroit qui m'empêche d'être au calme avec lui. Les personnes se font de plus en plus nombreuses. Après quelques minutes, je me bats avec Maël pour payer et au final, on finit par faire moitié-moitié du coup on paye nos commandes séparément. Des gamins. Je me retiens de lui faire une tape sur la nuque lorsqu'il donne son billet à la serveuse puis, attrape ses sacs et on se dirige vers l'Audi garée sur le bas-côté de la rue, près du trottoir.

— Oh ! J'kiffe cette musique !

Je regarde le châtain s'ambiancer sur le son qui vient tout juste de commencer à la radio, comme si elle n'attendait plus que nous. Ça me fume. Puis, c'est sur ces notes que je prends la route, ne sachant même pas où aller. Bon, là... Nous sommes fin après-midi, le début de la soirée ne fait que de commencer. Et j'vais mentir, je me vois pas rentrer chez moi maintenant. Je veux profiter et passer du temps avec Maël, genre là on est trop bien pour qu'on se sépare. Je tire le pare-soleil, ralentissant, accélérant sur les routes au rythme de la circulation parfois dense, parfois pauvre. La vitre légèrement baissée m'envoie ces courants d'air que je kiffe ressentir lorsque je roule. Je ne peux m'empêcher de jeter des coups d'oeil en sa direction par moment. Il en a pas marre d'être beau ? Ah, sérieux. Que j'arrête.

Dire que c'est à moi.

— J'ai faim, je lance tout en quittant la route pour venir m'incruster sur la voie du drive du Mcdo.

J'ai même trop faim, ouais. Vu le sourire qu'il me lance, je pense que l'idée du fast-food américain lui convient parfaitement. Deux voitures sont devant nous et on ne reste pas longtemps à attendre nos commandes. C'est plutôt cool. Maël ne peut s'empêcher d'attendre qu'on soit posé et vient piquer une frite brûlante de son paquet. J'en veux aussi. Tout en regardant la circulation devant moi, mes doigts attrapent son poignet et c'est pour bibi. Ben ouais, me fixe pas comme ça. Le châtain soupire légèrement mais je sais qu'au fond, il s'en fiche.

— On se pose au parc, hein. On va être bien.

Il est tellement grand ce parc qu'on peut trouver toujours un endroit tranquille, c'est ça que j'aime. En plus, il fait beau alors que demander de plus. Vraiment, je prie pour que ce temps dure encore longtemps mais je doute. On verra. Après quelques minutes de route, je finis par me garer dans un parking à proximité.

Des groupes de personnes, des enfants accompagnés de leur parents, des couples et des vieux se sont décidés de profiter de la température rare pour ce mois-ci. Je comprends. Avec nos sacs, on se cale entre deux gros arbres qui ne présentent tristement plus de feuilles. Maël se laisse tomber sur l'herbe ayant été chauffée toute la journée par les rayons du soleil. Je le suis dans son mouvement, me mettant en tailleur avant de distribuer à chacun nos hamburgers. Ah, j'suis trop bien posé. Je trouve que j'ai eu une bonne idée. Par contre... Ça me fait rire comment il mange. Il en a plus rien à foutre de son « outfit » comme il dit. N'importe quoi ce mec. Il se retient de râler lorsque un morceau de salade tombe sur son haut, finissant par le jeter loin de nous.

— Bref, lâche-t-il, dégoûté.

En vrai, on mange dans le calme et j'avoue que ça apaise, genre y a pas besoin qu'on se parle ou quoi que ce soit. J'adore. Les regards qu'on se lancent et puis les petits sourires suffissent. Les bruits ambiants tel que... Ben déjà, les quelques gosses qui tapent dans un ballon plus loin, les oiseaux bien sûr et le courant du vent qui siffle contre nos oreilles, toutes ces choses banales m'apaisent clairement. Je suis juste bien là, en fait. Ça me déprime quand je pense au fait que je vais devoir rentrer après. Enfin, c'est pas si j'avais quelque chose de prévu ou quoi mais ma mère apprécierait que je sois à la maison, avec ma tante et mon oncle qui sont venus d'Italie. Je pense aux fêtes de fin d'année, j'espère que je pourrais m'éclipser ne serait-ce que pour le nouvel an. Noël, j'pense que c'est mort et que j'vais devoir rester. Ça va être d'un ennui... J'imagine déjà. Le grand repas avec des discussions qui partent dans tous les sens, en italien en plus. J'ai une de ces flemmes, c'est ouf. Je me demande ce qu'il va faire, lui.

— Tu penses à quoi ? me demande-t-il alors, jetant son emballage vide dans un des sacs.

Je coince une clope entre mes lèvres, louchant sur la flamme qui flambe le bout. Je réponds après avoir tiré une taffe, laissant la fumée s'échapper de mes poumons.

— Rien... Fin j'pense aux fêtes, et tout.
— Ah oui. Du coup, t'as des choses de prévues non ?
— J'sais pas. Ben t'sais là j'ai de la famille chez moi. Mais je pense pas que je vais faire grand-chose. Donc, à voir.

Maël me recopie dans mes gestes, venant voler une cigarette de mon paquet que j'ai jeté entre nous, l'allumant à l'aide de mon propre briquet.

— Et toi ? je continue.
— Ben... Moi non plus, je sais pas trop. Je suis juste en train de penser au fait que mon daron va bien nous faire chier, ma mère et moi. Il va vouloir qu'on se voit, non mais sérieux.
— Chiant lui.
— J'te jure. On n'a pas envie de le voir mais il va pas pouvoir s'empêcher de se montrer, juste pour bien gâcher le truc. En plus il sait qu'on veut pas mais non, il est borné ce type.

On fume tranquillement et moi, je me contente de l'écouter parler. Je sens bien que discuter de son père ne lui plaît pas spécialement, moi je me souviens de la dernière fois, quand je l'ai vu. J'aimerai ne plus jamais le recroiser. La vérité, je préfère largement sa mère. L'autre, il fout les jetons.

— Ah, et il y aura sûrement mon frère aussi. Ça me déprime rien que d'y penser...
— Hm. Je me souviens. Je l'ai déjà vu lui, une fois...

Tout comme son daron, j'ai pas envie de le revoir non plus. Il m'a bien fait flipper celui-là, en y pensant il fait pas du tout le même effet que Maël. On dirait pas qu'ils font parti de la même famille, pour de vrai.

— Ouais, voilà. Ben lui, c'est sûr qu'il va squatter. Et ma mère n'est pas capable de le dégager, à chaque fois il fait des conneries et j'sais pas, elle a pas la force on dirait.

En même temps, c'est aussi son gosse au fond mais bon. J'suis pas avec eux pour pouvoir dire quoi que ce soit. Je me rappelle qu'on m'avait un peu raconté l'histoire mais que dire, son frère c'est un cassos quoi. Pour ça que je dis que Maël et lui sont grave différents. Le châtain est de loin d'être un raté, ou j'sais pas quoi.

J'aime bien parler avec lui. On discute d'autres sujets et pour une fois quand on parle du lycée et de tout ce qui tourne autour de ça bah, ça me dérange pas. Je ne calcule plus ce qui se passe autour de nous, je ne calcule plus l'heure qui est en train de se dérouler à une vitesse fulgurante. Le ciel s'assombrit peu à peu, le coucher du soleil se met doucement en place. Les gens quittent les lieux, rentrent chez eux et nous on reste toujours là, à commencer à s'cailler un peu le cul à moitié allongés au sol. Je veux bouger mais en même temps non car j'suis calé ici avec lui. Un grave frisson prend possession de mon corps et Maël ne manque pas de le remarquer alors, sa voix me demande :

— Tu veux qu'on y aille ?
— Mais j'ai pas envie de rentrer, je soupire.
— On n'est pas obligé de rentrer.

Je regarde aux alentours de nous, il ne reste plus grand monde. Quelques promeneurs avec leur clébard, des joggeurs... Et nos deux personnes.

— Et tu veux aller où ?
— Hm... Je sais pas mais en tout cas... Regarde.

Il a toute mon attention. Le voilà qu'il trafique une poche de sa veste avant d'en sortir précieusement un petit sachet d'herbe. Ah ouais, le con. Il avait ça sur lui toute la journée ? N'importe quoi. Je souris légèrement avant de laisser passer un soupir.

— On peut pas aller fumer chez ma mère et je suppose que chez toi non plus...
— T'as compris.
— On a qu'à s'poser sur le parking, dans ta voiture. Ou comme tu veux.

Où il propose moi j'irai. Tant que j'suis avec ce mec, ça me va. Alors, c'est dans ma voiture qu'on ira. Quand on la rejoint, Maël est déjà en train de rouler sa weed. Un joint qu'on va se partager, je suppose. Après faut pas que j'abuse sinon on risque de passer la nuit ici... Pas que j'ai jamais dormi dans une voiture mais c'est pas le plus confortable. Je mets juste le contact histoire de faire démarrer la radio, connectant mon Spotify ensuite. Je pense pas que le châtain kiffe mes musiques ou quoi mais j'mets quand même ma playlist préférée, étant composée d'une bonne centaines de sons rap. Le mec à mes côtés laisse la portière ouverte puis, après avoir allumé le pétard, il prend son temps pour tirer sa première taffe. Ses paupières se ferment un court instant et il recrache la fumée hors de l'habitacle. Quand il fait ça, moi, j'ai l'impression que tout s'accélère en moi.

Depuis la journée je m'abstiens, je sais même pas comment c'est possible pour que je réussisse alors que la seule chose que je veux, au fond, c'est de marquer ses lèvres qui n'arrêtent pas de me tenter inconsciemment, je veux les marquer puis les embrasser comme il se doit, comme il le mérite. Maël me tend son joint qui m'a l'air assez chargé, pour le coup. Ses yeux se plissent lorsqu'il me fixe, ça l'a directement détendu. Je m'apprête à effectuer son même geste, coinçant le bâtonnet contre ma bouche, faisant cavaler la fumée toxique de cette dernière dans mes poumons. J'ai l'impression que ça fait longtemps que j'avais pas fumé, enfin, ça quoi. Ça ne m'avait pas spécialement manqué mais le faire avec Maël, si. Je me rappelle des premières fois où on s'invitait dans nos chambres, chez nous, quand j'suis allé dans son lit pour fumer. Et la première fois quand on s'est embrassé, on était carrément sous l'influence de cette chose que je tiens entre mes doigts. Putain...

— Ça va...?
— Approches, je lâche et il s'exécute.

Son sourire ne quitte pas ses lèvres qui, j'suis sûr, n'attendent plus que je leur fasse des folies. Il me tente depuis tout à l'heure et puis c'est finalement dans cette voiture que je vais lui faire savoir que lui, Maël, m'appartient de plus en plus chaque jours et à chaque fois plus fort, au fur et à mesure que les secondes, les minutes et les heures qui nous relient à chaque fois qu'on ensemble. Ma main libre se porte contre sa mâchoire, mes doigts finissant leur chemin le long de son cou. Il pourrait roucouler ou ronronner sous mon toucher, je sais l'effet que j'lui fais. Il est beau sous cette lampe qui est toujours allumée au dessus de nos têtes. Je ne vois plus que lui, le reste étant plongé dans l'obscurité de la nuit qui commence à devenir de plus en plus pesante. Mon visage veut faire la rencontre du sien, s'en approcher plus et faire unir nos deux bouches dans un baiser que j'pourrais faire durer toute la soirée.

Nos yeux se perdent dans les iris de chacun et pendant que je reste un peu de marbre dans ma contemplation, Maël profite pour piquer le roulé qui se consume un peu entre mes doigts. Il ramène cette connerie pile à l'endroit que je veux faire vibrer. Il inspire calmement et son regard ne quitte une seule seconde le mien. Un nuage de fumée nous sépare cependant et suite à la disparition de cette vapeur, cette dernière m'indique le départ pour venir l'embrasser. Mes lèvres n'attendaient plus que les siennes, les siennes plus que les miennes. Tout en douceur, comme si on ne s'était pas revu depuis 50 ans, j'le fais comme ça. Mais rapidement il dérape, il m'entraine avec lui. J'agrippe son corps, sa taille à défaut de pas pouvoir tirer son haut. Je recule au max l'accoudoir qui sépare nos deux sièges, perdant presque le souffle à forcer de partager ce baiser qui m'rend dingue. C'est vite, c'est bon, c'est parfait et c'est Maël. Sa langue n'hésite pas à venir saluer la mienne et sa jumelle se laisse emporter par toutes les sensations qu'il me fait passer, subir, aimer. Il y a rien qui peut surpasser ce sentiment, rien, putain de merde. J'pourrais faire ça toute ma vie, en fait, j'comprends pas comment il fait pour me rendre...

Accro. Ouais, et même maintenant. C'est grave quand même ce que ça fait là, dans tout l'corps.

Mon cœur s'affole comme jamais il s'est affolé, ce malade. J'espère que j'vais encore tenir, c'est compliqué avec toutes les dingueries que Maël réussit à me faire avec facilité, je n'imagine même pas quand ce sera plus. Il est parfait, c'est pas possible. La perfection n'existe pas, j'ai toujours dit ça, à tout le monde. Mais moi, quand je le vois là et quand il me fixe de cette façon, quand on fait toutes ces choses banales, futiles, quand on parle, quand on se regarde, quand on fume, c'est inexplicablement impeccable, incomparable car je ne mélange rien de tout ça au comparable.

J'échangerais ma place en or pour rien au monde. Aller vous faire foutre, vraiment. J'ai l'impression de rien avoir vécu, de rien avoir découvert avant que je ne rencontre ce mec. Dire qu'au début, il me cassait les couilles. Et maintenant, on laisse nos bouches se chevaucher comme si elles voulaient prendre, avoir le contrôle sur nous. Nos front se frôlent par moment et mes joues, quand il les touchent, doivent lui brûler le bout de ses doigts. Maël marque une pause, me laisse reprendre ma respiration, putain, j'ai l'impression vraiment d'être un malade à avoir le soupir si fort. Heureusement qu'on est entre nous. Je profite de ce moment pour le fixer encore, encore et encore comme si j'voulais me souvenir de chaque détail de son faciès. Il a vraiment des yeux revolver. Il fait pareil avec moi et je me demande vraiment ce qu'il me trouve, parfois j'me pose de réelles questions. Mais j'préfère pas trop y penser. On dirait qu'il a capté car pour me faire changer les idées, il glisse le pétard entre mes deux lèvres et je tire, instantanément. L'effet que lui, lui plus cette merde me provoquent pourrait me suffire, vraiment. J'ai encore moins envie d'arrêter les choses maintenant. C'est grave d'être comme ça. Il m'embrasse avant même que la fumée s'évapore entièrement de mes poumons car, elle trouve issue dans les siens. Mon ventre m'envoie ses fameux signaux bizarres que j'commence à connaître par cœur maintenant.

Sa bouche mouillée me rappelle la chance que j'ai d'avoir ce mec dans ma bagnole, un soir paumé dans un parking vide. L'air frais de la nuit pénètre dans l'habitacle de mon Audi mais nos deux corps suffisent pour réussir à nous réchauffer. Le son de la musique me fait doucement planer, puis quand c'est en rythme avec ce que je suis en train de vivre, je ne peux que me sentir bien. Viens, on reste ici toute la nuit. J'en serai capable. Ou genre j'sais pas, j'ai envie de me casser, de prendre la route, l'autoroute, aller loin et je ne sais où avec Maël, putain, je kifferais vraiment faire ça. Sur un coup de tête, sur une envie. Je suis sûr qu'il serait d'accord avec moi car qu'est ce qui nous retiendrait ici. Le châtain finit par mêler ce qu'il reste de ce joint avec notre baiser avant de le jeter à l'extérieur.

Je manque de sursauter lorsqu'il claque sa portière après son geste. Ses deux mains sont enfin libres et peuvent venir me toucher comme il se doit et comme j'aime. Sans même perdre de temps ou juste une simple impatience, je le sens déjà se promener sur la peau de mon ventre, me faisant frémir littéralement. Vraiment, y a que lui qui arrive à me faire ce genre de truc, à l'intérieur. J'attends pas plus et vient le recopier, je frôle son dos, touche l'emplacement de sa colonne vertébrale, mes ongles veulent même se planter. Je colore doucement son grain de peau par la légère rougeur de mes traces et il aime, comme d'habitude. Je ne sais pas où tout ça va nous mener mais clairement, j'veux pas qu'il se détache de moi. Il est fort, trop fort. Et beau, trop et vraiment trop beau. Ça ne devrait pas exister, enfin, je sais pas.

Si Maël ne serait pas là, comment j'aurai pu découvrir de ce qu'il arrive à me faire ? Rien n'est bien si ce n'est pas lui qui le fait. Je m'occupe de son cou comme si c'était la chose la plus précieuse au monde. Mes lèvres, mes baisers se perdent sur cette partie du son corps qu'il m'offre en premier. Il sent bon, ça m'incite à continuer à faire rougir cet endroit et ce, par mes propres soins. Ma langue explore et accompagne son existence en laissant une ou deux marques pour montrer que je suis là. J'essaye de me contenir malgré que ses soupirs eux, me demandent dans un autre langage, plus intime, de continuer. Si on était plus à l'aise, je l'aurais sûrement allongé là et j'serais sûrement au dessus de lui. Clairement, je suis arrivé à un stade ou je pense déjà à ça, à comment on pourrait finir si on laisse les choses continuer comme ça. L'idée n'est pas encore prête et dans mon esprit, je pense que je réalise pas et que je n'assume pas encore. Dans celui de Maël, je ne sais rien. Je ressens bien qu'il s'adapte à moi et... Il prend plus vite ses aises, rien que le fait qu'il s'amuse déjà à me caresser près de là où il faut pas.

— Attends... je lâche en déposant un dernier baiser dans son cou, mon visage se positionnant en face du sien.
— Désolé si j'vais trop vite mais...

Les chuchotements de Maël se mettent en pause, comme s'il n'osait pas m'avouer la suite de ses pensées. Mais moi, j'attends que ça. Je veux qu'il me dise tout et même si sa main me déconcentre un peu là, j'vais pas mentir. Bordel, quoi.

— C'est parce que tu m'emballes trop...
— Dis pas ça maintenant, j'arrive à sortir d'un coup.

J'perds mes moyens. J'ai envie de le faire taire et qu'on puisse continuer à faire ce dont on a envie mais en même temps, ça m'fait des trucs quand il m'dit des trucs comme ça.

— Mais pourquoi ?

Je retiens un soupir, question idiote...

— Parce que... Parce que ça va se finir comment ça va s'finir et j'ai pas envie de faire ici, comme ça...
— Hmm. Ta voiture est précieuse, je comprends...
— C'pas ma voiture mais wesh... Dans un parking, comme ça...

Non mais sérieux... C'est quoi le regard qu'il est en train de me lancer, là ? Pourquoi il me fait ça maintenant. Alors, j'ai conscience que c'est moi qui a commencé à l'embrasser, que j'ai voulu — un peu, de base — l'emballer comme il le dit mais putain, j'arrive pas à croire que je me dégonfle maintenant... Je sais pas pourquoi, mais je crains qu'il y a quelque chose, il peut avoir plein de trucs qui peuvent se passer et honnêtement, j'me sens débile à m'imaginer des tas de scénarios dans ma tête. Genre. Ah.

— Léo... J'te ferai rien si tu l'sens pas.

Les lèvres de Maël s'échouent avec une tendresse inexplicable sur les miennes. C'est différent de tout à l'heure, c'est bon, j'ai envie qu'il recommence. Ses mots, il a toujours les bons à croire qu'il sait tout et qu'il arrive à lire en moi. C'est à la fois bizarre mais agréable. Je ne laisse pas son baiser sans réponse car j'exerce le même, j'essaye de le recopier et d'y faire parvenir tout ce que je ressens. Ma voix butte sa bouche dans un murmure par la suite.

— On va autre part... Mais pas chez moi, chez moi c'est mort. Tu l'sais.
— Et chez moi, il faudra pas faire du bruit...

J'veux être dans sa chambre avec lui. J'm'en fiche qu'on ne doit pas faire de bruit, j'veux juste son putain de corps contre le mien. J'sais pas, c'est tout.

— Me fixe pas comme ça, j'ai capté... J'ai capté que tu voulais faire des trucs dans ma chambre, rigole-t-il doucement et il a entièrement raison.
— Arrête de lire dans mes pensées, bordel. Mais c'pas ma faute si toi aussi, tu...
— Hmm ?

Je me mords subitement la lèvre, j'comprends pas pourquoi je me suis bloqué. Maël n'attend plus que ma réponse qui tarde, qui tarde et qui tarde. Mais aller, après un soupir, je finis par laisser échapper mes mots, mots tant attendus.

— Tu m'emballes aussi, voilà. Putain...
— Tu attends quoi pour démarrer ta voiture ?

Ah ouais, il est vraiment comme ça lui. On s'en fiche. Décidément. Je laisse un sourire un peu gêné se dessiner sur mes lèvres avant que ma bouche réussisse à se plaquer contre celle de sa jumelle, celle du garçon. Idiot. J'avoue que j'me sens un peu excité, l'effet qu'il a eu pendant de longues minutes sur moi n'est pas encore passé. Fais chier, quoi. Je finis par tourner les clés afin d'allumer la voiture, cette dernière grognant doucement son moteur et les feux éclairant automatiquement devant nous. On quitte les lieux dans un départ quelque peu sportif, j'avoue que là ça commence à se ressentir, la beuh et tout cette merde... Faut vraiment que je fasse gaffe à ma conduite, putain, rien qu'un joint ça me met dans cet état. Heureusement que la circulation n'est pas si dense que ça, ça va on va dire... Le trajet se fait dans le calme, sous le son éternel de ma playlist qui ne s'est pas terminée. Je n'entends pas Maël une seule seconde, trop occupé à regarder par sa fenêtre légèrement ouverte, faisant circuler un courant d'air frais mêlé à la pollution de la ville. Je kiffe cette odeur, on la connait tous quand on roule de nuit, comme ça. Putain, j'adore.

Quand j'arrive à la résidence de Maël, je remarque que les lumières chez lui sont encore allumées. Il n'est pas non plus très tard mais quand même, il fait déjà nuit. En rentrant, je croise sa mère, Adèle. Cette dernière était concentrée sur un film qui passait à la télévision avant qu'on la dérange. On échange quelques mots et sans soucis, elle ne dit rien lorsque le châtain lui indique que je passe la nuit ici. Au contraire, elle sourit même et nous souhaite une bonne nuit. Wesh, trop gentille sa daronne. Je l'adore de plus en plus, genre ma mère elle aurait trouvé ça super bizarre déjà. Enfin, quand ça concerne Maël c'est autre chose puisqu'elle l'adore avec ma chère sœur.

Enfin bon, j'avoue que j'vais éviter d'y penser. D'ailleurs j'ai pas rappelé à ma génitrice que Gabriella dormait chez sa pote et moi chez Maël. Je tchek mes messages tout en laissant le châtain se déshabiller devant moi, sans que j'y prête attention. Non mais attends, là...

— Qu'est ce que tu fais sur ton portable ? Regarde-moi.

Ma daronne m'a envoyé 3 messages pour me demander où j'étais ainsi que ma sœur. Gabriella, elle, m'a envoyé 5 messages en me disant des trucs bizarres, avec des emojis bizarres, je n'ai pas envie d'essayer de comprendre.

Plus maintenant que j'ai eu la merveilleuse idée de finalement, reluquer le mec qui se trouve en face de moi. Dénudé de son t-shirt, il me fixe comme si j'étais plus que son unique proie, la dernière unique sur Terre et que j'étais simplement... Sien. Cette façon, cette démarche, j'aime tout. Cette peau, la peau de son torse que je finis par embrasser, ne pouvant résister au fait d'être aussi proche de lui, de son corps, de tout. Moi, assis sur le bord de son lit et lui debout en face, il s'occupe de glisser ses doigts sur mon crâne. Toucher qui se perd sur ma nuque, qui me brûle, qui me tease. Ça commence. Je sais pas ce qu'il risque de se passer cette nuit, mais sûrement des choses qui ne devraient pas se savoir. Cette nuit, elle sera à nous. Il me montrera des choses et j'essayerai de montrer les miennes même si, faut se l'avouer, je n'aurai jamais la même aise que Maël. Je me suis piégé avec ce mec, et c'est un fait mais cet effet là, l'amour mes couilles, se relie parfaitement bien avec ces quatre lettres.

M A E L.

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