J'ai un côté sombre.
Une fois arrivé au domicile, je pousse avec une certaine précipitation la porte de chez moi. Mais je grogne deux secondes après en me rendant que quelque chose bloque derrière et, après être rentré, je dégage d'un coup de pied les converses roses de ma soeur. Sérieusement... Elle m'énerve à tout laisser traîner partout, on dirait que c'est sa maison et qu'elle y habite toute seule.
— Ciao, Léo.
Après avoir ôté mes chaussures et le sac toujours sur les épaules, je m'avance vers la cuisine et viens piquer un chocolat qui traîne dans une petite boîte, sur la table. Ma mère touille quelque chose au feu et ça sent divinement bon. Je m'approche un peu d'elle et je la vois sourire, retournant son visage parfaitement maquillé d'un trait noir au niveau des yeux et de son fameux rouge à lèvre. J'ai comme l'impression que ses vêtements ont imprégné l'odeur de la nourriture mais ça ne me dérange pas, je suis content qu'elle soit rentrée plus tôt que prévu. Je crois qu'en ce moment elle en a bien le besoin.
— Papa n'est pas là ? je dis finalement, me décalant sur le côté pour jeter l'emballage à la poubelle.
— Non, me répond-elle. Il est encore sur un chantier. Je ne sais pas s'il sera avec nous pour manger alors... Ce qu'on avait dit ce matin...
Reporter la discussion qu'on avait prévu m'arrange parfaitement. Je ne me vois pas leur parler de ce qu'il se passe au lycée et tout le bordel. Surtout avec ma sœur dans les parages. Adriana semble tout de même assez rassurée de me voir, j'ai fait l'effort de venir la saluer pour qu'elle ne se doute pas de quoi que ce soit. J'aime pas trop mentir à mes parents parce que bon, à ce qu'il paraît je suis pas un bon menteur ni comédien.
— C'est bon, t'inquiète. T'façon ça va tranquille au lycée.
Ma mère ne dit rien mais se contente de me sourire un peu. J'avoue que j'ai dû mal à savoir ce qu'elle en pense vraiment. C'est une personne qui peut paraître assez froide aux premiers abords, elle est calme et ne se laisse pas guider par ses émotions.
Après avoir indiqué que je monte dans ma chambre, c'est affalé dans mon lit que je me retrouve. Flemme de changer de vêtement alors je reste comme ça, mes pensées se souvenant tout de suite de ce qu'il s'est passé il y a moins d'une heure... Maël m'a parlé et m'a avoué qu'il y a probablement un truc, un truc qui s'passe entre nous deux. Et je ne vais pas mentir, je le sens aussi. Je ne sais pas ce qu'il se passe avec moi et j'peux pas mettre de mot sur ce que je ressens vraiment, je sais seulement que j'aime passer du temps avec lui. Ouais, je l'avoue. J'avoue aimer quand il me parle, quand il s'intéresse à moi, il est sympa et il ne semble jamais juger personne. Car en y pensant, je l'ai vu cool avec tout le monde. Mais... Pas comme avec moi, c'est différent.
Il m'a dit de rentrer doucement. Et puis il est parti, sans rien de plus. Je l'ai regardé se diriger vers les arrêts de bus avant de disparaître de l'autre côté de la rue. Je crois que c'est son frère qui est venu le chercher... Je n'ai pas osé lui proposé de le raccompagner et j'en regrette presque. Je sais pas pourquoi mais, je sentais qu'il avait envie que je dise quelque chose. Sauf je n'ai rien dit. Je l'ai laissé parler lui, aucun mot ne voulait sortir de ma bouche. Maël m'aime bien et maintenant, je ne sais pas comment me comporter avec lui. Nous laisser du temps ? Mais du temps pour quoi ? Pour nous ignorer, nous éloigner ? Le châtain m'a bien expliqué que ce n'est pas ce qu'il voulait. Et j'crois qu'au fond, moi non plus. J'ai peur de m'avouer et de dire qu'il m'a changé, depuis qu'il a commencé à me parler. Je n'arrive plus à regarder les filles comment avant. Leurs visages fins, leurs lèvres, leurs corps attirants, leurs longs cheveux... J'arrive à les trouver belles, d'une certaine façon, mais je sais pas. Quelque chose me bloque. Et ne parlons pas des mecs... Les mecs ne m'intéressent vraiment pas. Je ne me vois mater leurs physique car je n'ai rien à dire dessus. Mais Maël... C'est pas pareil. Je sais que c'est un mec, un vrai et ça, ça ne pourra jamais changer. Et pourtant, je me sens attiré par tout ce qu'il dégage. Il ne le fait pas exprès, parfois. Je sais bien qu'il s'amuse à mes toucher les doigts car il doit avoir un problème avec ça, certes, et je sais tout aussi bien que quand il me regarde, ce n'est pas pour rien. Il essaye de me brûler avec son regard, à chaque fois, je ne sais pas ce qu'il souhaite vraiment faire mais c'est sûrement ça. Maël m'a fait quelque chose, je ne suis plus comme avant. Et ça me fait chier car maintenant, Romain commence à se douter de quelque chose. Mon meilleur ami n'est pas dupe, loin de là. Il voit bien que quelque chose se passe entre lui et moi. Au fond je pense que si je me confierai, il ne me dira rien. Je veux dire, je pense qu'il m'écoutera. J'ai bien remarqué que Romain n'est pas comme Kévin, un peu dégoûté par tout ce qui touche à l'homosexualité.
Et c'est un bien grand mot. Bien trop grand pour moi. Ça me tue de devoir penser à ça car je ne me sens pas pédé, gay, homo... Je ne le suis pas car je n'ai jamais éprouvé ce sentiment auparavant pour un gars, me sentir aussi faible à un regard de mec, aux yeux d'un mec. Jamais et je sais ce que je dis. Je pense me connaître le mieux que quiconque. Peut-être que c'est une passe, au final ? Tout le monde en a déjà eu dans sa vie, sans exception alors...
Je soupire fortement, passant mes mains sur mon visage. J'ai envie de le voir. C'est horrible de penser à ça, surtout maintenant. Mais j'en ai vraiment envie. Est-ce-que lui aussi ? Après m'avoir sorti tout ça à la gueule, je ne sais pas trop... Maël doit sûrement se sentir bizarre à l'instant même, il est dans la même situation que moi. Situation à laquelle nous ne pouvons pas échapper. Pourquoi c'est si compliqué ? Dans les histoires, ça a l'air simple tout ce bordel. Les deux personnages ressentent ce qu'ils ressentent et ils se mettent directement ensemble, comme si c'était une évidence. Mais pour moi, je ne sais pas si c'en est une. Peut-être que si j'arrêterai de réfléchir, j'irai mieux et les questions cesseraient de se bousculer dans ma tête. Comment il fait pour paraître aussi calme, lui ? C'est dans son caractère j'imagine. Je l'envie un peu.
Maël... Qu'est ce qu'il m'a fait ce mec, vraiment. J'essaye de me torturer l'esprit pour pouvoir y sortir une réponse plausible mais rien. Rien. Il est juste arrivé, lui, un jour, en début d'année, avec sa moto et aux côtés de Clarisse. J'avoue avoir été un peu jaloux la première fois que je l'ai vu. La blonde qui traîne avec un motard aux allures de beau gosse, nouveau qui plus est, ne m'inspirait pas spécialement confiance. Mais j'avoue l'avoir regardé plus lui qu'elle. Clarisse n'était qu'une lubie. Une simple envie de l'avoir juste pour faire genre de sortir avec quelqu'un. Lui et Matt, je pense que c'était différent. Maël se cherche, il veut tester. Et moi, je reste à rien faire. Comme si j'attendais que je me réveille un beau matin et que je me rends compte que je suis redevenu comme avant, un Léo qui aime les filles.
Un bruit de poing contre ma porte me fait sursauter. C'est ma mère et elle me demande de descendre à table. Elle va faire la même chose dans la chambre à côté, celle de ma sœur. Entre temps je descends et m'installe, posant mes coudes sur la table. Les deux arrivent bien vite et on commencer à manger, dans un calme olympien.
⁂
Le lendemain, c'est directement vers Yanis et sa bande que je me dirige. Je sors une clope et la glisse entre mes lèvres avant de leur faire une poignée de main. Mathis est aussi présent mais le nez dans des feuilles de cours et pour être honnête, je sais pas comment il fait pour arriver à se relire. Je souris un peu, mes yeux rivés sur son écriture tout en enflammant le bout de ma cigarette. Je range le briquet dans la poche de mon jogging, la fumée s'échappant par ma bouche ainsi que par mon nez.
— C'est quoi cette merde ? je lance en direction du plus petit qui se ronge les ongles.
— Eum... De la chimie. J'ai tout ça à apprendre en moins de dix minutes.
— ... Et toi tu décides de réviser maintenant quoi, à la dernière minute ?
Un petit rire s'échappe de ma gorge, ma clope se dirigeant à nouveau entre mes lèvres. Je dis ça mais j'suis aussi du genre à réviser aux derniers instants. Enfin... C'est quand même rare que je jette un coup d'œil à mes cours.
— Ouais mais... Je connais toutes les formules au moins et puis de toute fa-
Mathis élève un peu plus fort sa voix, essayant sans doute de me sortir une excuse. Mais je ne l'écoute déjà plus car il arrive. Mon regard est maintenant focalisé sur lui. Encore. Il est là, à traverser la cour avec son casque de moto noir coincé sous son bras. Aujourd'hui, il a légèrement envoyé ses cheveux vers l'arrière et ça dévoile tous les piercings qu'il porte à l'oreille ainsi que son joint qu'il a bloqué juste au dessus. J'ai l'impression que le temps ralentit quand il marche, faisant retourner certains yeux sur lui. La fumée s'échappant doucement de mes lèvres, je prie intérieurement pour qu'il tourne son visage en ma direction mais bien vite, une présence se bloque devant moi.
Romain, le sourire aux lèvres, attend que je lui tende mon poing. Un peu étourdit, je réponds à son tchek, en retard. Kévin apparaît quelques instants après, descendant d'une belle BMW blanche. De loin, il semble énervé car il claque plutôt brutalement la portière. Le conducteur, sûrement choqué de son comportement le klaxonne et on voit la vitre teintée se baisser. Alors, mon ami marche à reculons et lui offre son plus beau doigt d'honneur. On peut l'entendre jurer d'ici, quelques gens se retournent même pour téma la scène.
— Il s'passe quoi là-bas ? je lance alors que tous les gars regardent déjà vers la voiture.
— J'sais pas gros... Mais Kévin a l'air bien remonté, répond Yanis en fumant sa clope.
— Ouais bah faîtes comme si de rien n'était, ça va encore plus le vénère, nous chuchote Romain tandis que le grand s'avance enfin, arrangeant son bonnet sur sa tête.
Il arrive vers nous les sourcils froncés on le salue normalement, faisant genre y'a rien. On entend la voiture redémarrer plutôt bruyamment, sentant que le chauffeur est en colère. Il soupire en nous demandant d'un ton plus calme une clope et je me dépêche de lui tendre mon paquet ainsi qu'un briquet. Kévin l'allume bien vite en levant son visage vers le ciel.
— Désolé les gars... C'est juste mon daron. Il me casse les couilles...
— C'est bon frère.
Romain passe sa main amicalement sur son épaule et j'peux pas m'empêche de la rajouter moi aussi, de l'autre côté. On le secoue un peu et il rigole enfin, un léger sourire s'installant sur ses lèvres par la suite.
— Hum... Et du coup... Vu que je suis revenu chez moi, j'me demandais si ça vous disait de venir les gars, après les cours ? On se fait un FIFA avec quelques bières. Rien que nous trois. Comme avant.
Kévin nous lance un regard suppliant tandis que Yanis et sa troupe s'avance vers le lycée pour nous laisser ensemble, je suppose. Le garçon aux cheveux miels hoche vivement la tête en lui faisant une accolade.
— Bien sûr qu'on vient, je lui dis et ça semble lui faire plaisir.
Je sais bien qu'il a besoin de nous en ce moment, ça se voit que ça ne va pas avec ses parents et ça me saoule pour lui. Je préfère le Kévin heureux et drôle, parfois casse-couille aussi. Mais j'veux pas qu'il soit triste ou quoi, il le mérite pas. La sonnerie approchant à grand pas, on se décide d'avancer vers la classe de maths.
Le professeur arrive rapidement et je me dirige comme d'habitude, vers les tables du fond. Je peux pas m'empêcher de jeter un coup d'œil sur Maël quand il s'avance vers notre table habituelle, les mains dans les poches. Ses cheveux plaqués légèrement en arrière lui va si bien, pourquoi il ne vient pas comme ça tous les jours ?
— Salut... me lance-t-il en prenant place sur la chaise d'à côté.
Je ne me lasserai jamais de son parfum qui me marque encore à l'heure actuelle.
— Salut.
Je ne sais pas quoi lui dire d'autre et pourtant j'en ai envie. Lui, commence à sortir ses affaires tandis que je me tords les doigts sous la table.
— Je... C'est cool, tes cheveux.
Je frotte mes lèvres entre elles, le regard toujours rivé sur lui. Je vois le châtain sourire tandis qu'il écrit en haut de sa feuille quelque chose. Et puis, il plante enfin ses yeux dans les miens. Il hausse un sourcil en me montrant ensuite son visage de profil.
— Si ça plaît à Léo c'est que ça passe, dit-il tandis que j'inspecte visuellement tous ses détails.
J'ai l'impression qu'on voit mieux son visage comme ça. Il montre mieux ses oreilles percées. Ses bijoux brillent un peu avec la lumière et je trouve ça beau. Sur moi je trouverais ça hideux mais sur lui, ça donne un style. J'observe la ligne de sa mâchoire, presque coupante si j'ose y poser mes doigts. Ses lèvres ressortent un peu quand il est comme ça, on voit bien qu'elles sont pulpeuses mais pas trop, le juste milieu, les lèvres parfaites quoi. Son nez est fin même s'il possède une légère bosse qu'on peut voir quand il est de côté mais ce n'est pas dérangeant. Je m'arrête là, je crois que je suis resté bien trop à le fixer. Mais aussi, pourquoi il me fait ça ? Je suis sûr qu'il en joue, de sa beauté.
Durant le cours, j'essaye de me concentrer sur ce que le prof raconte à la classe mais franchement, plus les vacances approchent et plus j'ai dû mal à tenir. Vivement demain et qu'on prenne une pause méritée.
— Hm... C'est 2, la réponse ici. T'as oublié de le passer de l'autre côté.
La chaise de Maël bouge, la faisant crisser contre le sol. Le coude sur la table et le menton dans la paume de ma main, je baisse le regard sur ce qu'il est en train de me corriger. Ses doigts fins et longs, entourant un critérium, se baladent sur ma feuille. Je regarde plus sa main que ce qu'il est en train de me modifier, pour être franc. J'essaye de ne pas me concentrer sur son épaule qui frôle la mienne.
— Et du coup si on fait ça... On ne tombe pas sur -10.
Je fronce les sourcils en enlevant mon coude de la table, laissant maintenant glisser ma main entière contre le bois. J'ai rien compris à son truc. La différence d'écriture est frappante : la sienne fait adulte alors que la mienne semble à celle d'un enfant sortant de la maternelle.
— Si tu continuerais de prendre des cours avec moi t'aurais pas fait cette faute, affirme-t-il en tentant un regard en ma direction.
Je soupire en levant les yeux au ciel avant qu'ils ne rencontrent les siens.
— Ouais bah... T'as pas essayé de me proposer qu'on se voit pour faire des maths.
— Je rêve... souffle-t-il en jetant un coup d'œil au tableau. T'attends que je t'invite en fait ?
Il me dit ça en écrivant une phrase du cours, son regard se baladant vers le professeur ainsi que sur moi. Je peux pas m'empêcher de sourire en regardant vaguement la salle, c'est presque comme si ça s'affichait tout seul sur mes lèvres. J'entends Maël laisser passer un rire silencieusement.
— T'es pas possible... continue-t-il en souriant lui aussi, comme si je l'avais contaminé.
Je fais l'effort de chopper mon bic quatre couleurs et de noter les dernières phrases du cours. Mon dos appuyé contre le dossier de la chaise, je suis tout le contraire de Maël qui lui, se tient plutôt droit et ses yeux se plissent quand il ne pige pas directement un truc qui est écrit.
— Du coup, tu penses m'inviter quand ? je lance plus doucement, un peu peur de le déranger dans sa concentration extrême.
— Hm... J'sais pas. Faut que je regarde ça sur mon planning.
Je laisse un « pff » s'échapper de mes lèvres tandis qu'il continue de sourire, passant sa langue sur son palais. Il se fout de moi, comme s'il avait d'autres cours personnel.
— C'est bien. Mais j'espère que ça sera dans la semaine.
— Et pourquoi, plutôt pressé ?
Je ne le suis pas. J'ai sorti sans y réfléchir deux fois alors je ne dis rien ce qui confirme ses doutes. Je l'entends bouger un peu, il sort son portable de sa poche. Je jette un regard à son écran et fronce les sourcils quand il ouvre le calendrier.
— Demain soir. Pour bien finir la semaine, me lance-t-il rapidement avant de verrouiller son iPhone.
Je note ça dans un coin de ma tête, de toute façon, je ne risque pas de l'oublier. La sonnerie retentit alors que je ne m'y attends pas du tout, me pressant de ranger mes affaires. Maël fait de même et je l'attends avant de me lever de la chaise. Mais rapidement, il se dirige vers Cassandre et je me stoppe. Bon... Alors je vais vers Kévin qui me lance un haussement de sourcil.
— J'trouve qu'il a grave la classe comme ça.
— Quoi ? De qui ? je l'interroge tandis que Romain passe son bras autour de mes épaules, prit encore d'un élan d'affection.
— Bah... Maël ! Genre, si j'étais du côté sombre, j'me laisserai grave envoûter...
— Envoûter, ah ouais d'accord... Depuis quand tu parles comme ça toi ? s'incruste Romain en levant un peu le menton, lui faisant un signe de tête.
Le bras de mon meilleur ami toujours posé sur moi, je tourne légèrement mon visage pour tenter un regard vers lui. Il rigole d'un truc avec la gothique, pressant le pas pour sortir de la classe. Alors que les deux passent devant nous, on se met automatiquement à les suivre afin de partir également de la salle.
— Merde, on a quoi là les mecs ? s'interroge subitement Kévin qui ralentit, réfléchissant à toute allure.
— Anglais. Pourquoi ? Fallait faire un truc ?
Je passe mon regard du brun à celui qui a les cheveux dorés. Romain secoue négativement la tête puis enlève son bras de mes épaules. Ouf. Vu que ce n'est que l'interclasse, la porte de la salle est déjà ouverte alors on rentre. Ne pouvant m'en empêcher, je cherche du regard le châtain et il semblerait que lui aussi car quand il me voit, il me fait signe d'approcher vers lui. Je me décolle légèrement de mes potes et me faufile entre les tables pour le rejoindre. Il me lance un haussement de sourcils tout en me montrant fièrement sa place : à côté du radiateur. Chanceux. On est au fond en plus, la place idéale. Je tire la chaise du côté couloir et me laisse tomber dessus. Je rêve où je viens de m'asseoir encore à côté de lui ? Je regarde les gens qui prennent place et voit Romain qui se met avec Kévin, vers le milieu. Après avoir enlevé sa veste, le châtain s'assoit aussi et croise ses bras contre la table.
L'appel finit enfin et la professeure commence le cours. Exceptionnellement, cette classe est composée que de table à deux ce qui m'arrange car j'ai l'impression que moins de gens nous regardent comme ça. Maël cogne son bras contre le mien et je tourne directement mon visage vers le sien. Il me tend un stylo et arrache une page de son cahier. Je le laisse faire tout en laissant mon regard se reporter sur l'enseignante qui est face au tableau, nous dévoilant ainsi son dos. Et maintenant, je comprends mieux pourquoi tous les mecs se sont mit devant.
Madame Lorens est une vraie anglaise venue tout droit d'Angleterre. Elle parle très bien français et j'crois que son accent en fait craquer plus qu'un. Mais bon, personnellement, je pense qu'il y'a mieux... Son chignon parfaitement coiffé, ses jupes droites et moulantes s'arrêtant à ses genoux et son petit tailleur noir ne me font aucun effet. Au début de l'année, un peu. Mais quand je passe mon regard sur ses fesses, je les remonte directement sur ses cheveux en me traitant d'obsédé. C'est une prof, quoi.
— Alors elle doit sûrement être célibataire, avec un chat à la maison... commence Maël en chuchotant en mon oreille. Puis, elle doit désespérer seule devant ses copies chaque soir car elle ne trouve aucun homme aussi parfait qu'elle...
Il est si près de moi que j'arrive à entendre sa respiration sortir par son nez. Elle s'échoue contre mon oreille et me procure des légers frissons. Bordel... J'écoute pas trop ce qu'il me dit, là de suite, je voudrais juste le regarder et qu'il me parle d'autre chose. Qu'il me dise, pourquoi moi. Qu'il me parle de ce qu'il en pense et de me jurer qu'il ne rigole pas avec moi. Car je suis sérieux et je veux qu'il m'en dise plus.
— Ok... J'ai quelque chose sur le visage ? me demande-t-il en fronçant un peu les sourcils.
— Non. J'pensais juste à un truc.
— Bon... Partage moi ta pensée alors.
Je brise le contact visuel et attrape le stylo qu'il m'a prêté. Je joue un peu avec avant de le regarder à nouveau. Mon ventre se tord en pensant à ce que je vais lui dire.
— C'est... C'est un truc par rapport à toi.
Je mords l'intérieur de ma vie et mon pied commence à taper légèrement le sol plusieurs fois de suite. Mon voisin de classe, lui, s'arrête d'écrire et semble m'offrir toute son attention. Ses yeux pétillent un peu et il sourit légèrement. Je crois que j'adore quand il sourit.
— Tu me rends presque curieux, souffle-t-il en cognant son épaule contre la mienne.
Puis, elle ne se décolle pas pour autant. De toute façon nos chaises sont rapprochées depuis le début. Je pose mon coude contre la table avant de jeter un coup d'œil à l'enseignante. Madame Lorens ne nous regarde même pas, on dirait qu'elle s'en fout.
Je sens son regard sur le profil de mon visage et je me tends quand ses doigts viennent se poser sur le dos de ma main. Il baisse le regard sur cette dernière et moi aussi, il caresse maintenant les os de cette partie de mon corps. Je ne fais rien pour arrêter et le laisse faire, me sentant soudainement un peu fiévreux. De mon autre main, je passe mes doigts sur mon front tout en jetant un regard aux gens de la classe.
— Ça te revient ? Le truc par rapport à moi...
Il chuchote ses paroles, comme si personne ne devrait les entendre. Je baisse à nouveau mes yeux sur ses doigts qui glissent maintenant contre ma cuisse. Je lève mon visage vers lui tout en les resserrant. Il hausse un sourcil en ne s'arrêtant pas pour autant, la pressant entre sa main. Ça me fait bizarre qu'il me touche ici, il n'avait jamais osé auparavant. C'est clair que si la prof m'interroge à l'instant même, je saurai même pas quoi répondre. C'est comme si Maël ne voulait plus lâcher notre moment, ses doigts ne remontent pas trop haut et j'ai l'impression que lui aussi, ça le rend bizarre. Ils frottent légèrement ses lèvres entre elles, comme s'il avait peur que je me lève d'un seul coup.
Quelqu'un qui toque à la porte soudainement nous fait relever les épaules et Maël, surpris, enlève précipitamment sa main de ma cuisse, me laissant un vide à présent. L'enseignante fait claquer ses talons au sol pour aller ouvrir, se retrouvant nez à nez avec un pion. Ce dernier nous annonce que notre professeur de chimie est absent et qu'on termine plus tôt que prévu. Des soufflements de satisfaction s'élèvent dans la salle ce qui demande à Madame Lorens de hausser le ton pour se faire entendre.
— Cet événement me donne presque envie de te proposer de sortir à 15H30.
Je tourne légèrement ma tête vers Maël qui s'est laisser tomber contre le mur, la classe devenant plus silencieuse une fois le surveillant parti. Il me propose de sortir, encore, et moi je suis prêt à accepter. Sauf quand je me rappelle que Kévin nous a proposé de venir chez lui tout à l'heure. Je ne sais pas trop quoi lui dire mais mon envie de dire oui est presque trop irrésistible. Je croise mes bras contre la table, venant coincer ma nuque contre la paume de ma main.
— Alors ? me lance-t-il, toujours les yeux sur moi.
— ... Ouais, ok.
— Cool ! On s'rejoint devant ta voiture, toute à l'heure.
Et comme s'il avait prédit la sonnerie, cette dernière s'élève dans tout le lycée et Maël s'échappe bien avant moi. Je reste bloqué quelques instants. Ce con est parti sans que je lui rende son stylo... Bon. Je le glisse dans ma trousse et j'me dis que ce sera une bonne excuse pour me mettre à côté de lui au prochain cours. Mais pour l'instant, je dois penser à une autre excuse que je vais devoir sortir à Kévin, si au cas où je n'arrive pas à l'heure chez lui. Qu'est ce que je suis en train de faire sérieusement ?
maël : au fait on ira en ville, j'ai des sous à dépenser :)
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