Il n'est pas gay.

maelgaut : salut leo :)

Je relis je ne sais combien de fois ces deux petits mots avant de me laisser tomber sur le dos, contre mon matelas. S-u-p-e-r. Je rebondis légèrement sur mon lit tout en ramenant l'écran de téléphone au dessus de mon visage. Qu'est ce que j'ai encore foutu... Je ne réponds pas immédiatement et tape plutôt sur son compte. Je descends toutes les photos et remarque que j'ai, je dis bien sans faire exprès, aimer une de ses publications. Putain de merde, quoi ! Quel con, comment j'ai pu ne pas le remarquer d'ailleurs ? Je retourne en arrière et voit qu'il m'a écrit autre chose. Au secours.

maelgaut : c'est pas grave, je ne dirai à personne que tu matais tout mon compte :)

Je me vois bien lui mettre un foutu « vu » mais mes doigts me démangent affreusement.

leobggg09 : va te faire foutre je matais rien du tout je suis tombé sur toi en MATANT clarisse plutôt

J'ai trop honte sa mère. Je décide de mettre mon iPhone en silencieux et de poser l'écran contre le lit, histoire de ne pas entendre et voir ses messages. Je suis un abruti ou quoi ? Il va s'imaginer des choses maintenant, c'est foutu pour moi. Je soupire en préparant mes fringues pour demain. Ouais, j'suis le mec à dormir le plus possible alors je me lève juste dix minutes avant de partir donc il faut que tout soit prêt, pesé, emballé parfait. J'ouvre les deux portes de mon armoire et pique des fringues au pif pour les jeter sur la chaise d'à côté. J'ai sport le lendemain puis c'est pas comme si j'avais envie de venir bien fringué pour quelqu'un. Vraiment... Je le faisais pour Clarisse mais vu que c'est terminé, m'habiller le plus laidement possible m'éviterait de me faire embrasser au milieu de la cours par une autre meuf du bahut. Putain, j'ai encore la scène dans la tête et le goût de son gloss à la cerise chimique.

Et voilà. Voulant ensuite me diriger vers les chiottes, je ne résiste pas à la tentation de voir si ce con m'a répondu. Et bien sûr qu'il l'a fait. No life ou quoi ? M'étonnerait pas.

maelgaut : quelle excuse bidon
maelgaut : en attendant tu m'as like, je devrai moi aussi like une de tes photos ? jsp t'es pas hyper beau

leobggg09 : arrête de jalouser

Même à distance il ne peut s'empêcher de me faire chier, c'est dingue ça. Je pose mon iPhone pour partir me doucher ce que je fais rapidement car Gabriella tambourine à ma porte, sûrement pour se laver aussi.

— Bouges toi Léo ! Y a un live de mes idoles qui va commencer dans quelques minutes, je vais tout rater putain ! s'écrit-elle, énervée.
— Ouais bah j'en ai rien à foutre de tes noich !
— C'est pas des chinois !

Je rigole en passant le jet d'eau sur mon corps, un bonheur de l'entendre rager de l'autre côté. Putain c'est pas possible, c'est la petite sœur de Maël. Aussi chiante que lui, ça craint. Je devrais peut-être la lui envoyer par La Poste, ils s'entendraient à merveille. Je me sèche et m'habille en quatrième vitesse. Quand je sors, une furie me bouscule brusquement l'épaule. Je peste contre elle mais pour une fois, Gabriella se contente de ne rien dire. Je l'entends fermer à double tour la porte en bois blanc et finit par me diriger dans ma chambre.

Quelle folle. 

C'est une fois dans mes draps et la lumière éteinte que j'ouvre mes notifications. Le pire c'est qu'il continue. Je me demande si je devrais le bloquer ou pas.

maelgaut : sur quoi je devrais jalouser ?
maelgaut : le seul truc que je voudrais te voler c'est ton audi car faut avouer que j'ai bien aimé le petit tour la dernière fois hihi

leobggg09 : ouais première et dernière fois

Il est chiant. Alors que je veux quitter l'application, sa notification passe tout en haut de mon écran. Je sais pas pourquoi je m'attarde.

maelgaut : pas si sûr :)

leobggg09 : t'as pas compris
leobggg09 : tu refais ça j'te jette sur le trottoir rien à foutre

maelgaut : pas aussi sympa avec ton voisin de maths :(

leobggg09 : fais pas ta victime la vie

maelgaut : ciao

Quelle conversation de merde. Je ne sais quoi répondre à ça alors je soupire et ne prend pas le temps lui répondre, fermant cette application. Il faut vraiment que j'arrête de lui parler.

Le lendemain, dans les vestiaires du gymnase, tout le monde est excité parce qu'ils annoncent une sortie à certaines classes de terminale dont la notre. Personnellement je ne sais pas si je vais venir, souvent c'est assez nul à chier faut se l'avouer. Sortie historique en plus, ah ouais non.

C'est vraiment pas mon délire. 

— Vous venez les gars, hein ? nous interroge Kévin tout en baissant son jean pour enfiler son short sport Nike, Romain toi tu viens mon pote ?
— Ouais, moi j'viens. Mais j'sens bien la sortie musée naze... lance ce dernier tout en s'aspergeant de déodorant.
— Léo... Te défiles pas, mon frère. Je te connais. Viens ! Au moins on rate les cours, quoi. Réfléchis !

Je lève légèrement les mains en l'air tout en souriant. C'est pas ma faute si j'aime pas ça, les sorties. Mais il a raison sur un gros point. Un coup contre la porte nous rappelle que le prof nous attend. Les gars sont tout aussi pires que les filles. Je sors en premier avec certains nerds de la classe puis vient m'asseoir contre le sol du gymnase devant le professeur qui écrit je ne sais quoi sur son calepin. Les mecs finissent par s'approcher au fur et à mesure, Kévin et Romain se posent à mes côtés. L'appel débute enfin mais quelque chose cloche : Maël n'est pas là. Enfin, sauf quand sa voix s'exclame soudainement dans le gymnase.

— Désolé, m'sieur ! Panne de réveil... lance-t-il appuyé légèrement contre le mur.

Tout le monde le regarde, il semble un peu essoufflé. Je ne peux m'empêcher de sourire, moqueur. En plus il le remarque car il me sourit en retour. Quel con... Je me fiche de lui, au cas où.

Qu'il ne croit pas. 

— Bon... C'est pas grave, fait le prof d'un air blasé. Va te changer.
— Pas b'soin.

Le faux blond pose son sac contre une porte peinte en bleu — celle des vestiaires — et vient vers nous. Les regards se retournent vers le professeur sauf le mien. Aujourd'hui il porte un jogging Adidas, des chaussures de la même marque et un sweat tout noir avec une capuche. Bon niveau fringue, il s'améliore. Je ne suis pas surpris quand il s'assoit à côté de nous, à côté de moi surtout. Il salue Romain et Kévin d'un coup de tête.

— Gautier... Maël... Ok, parfait ! Tout le monde est là, c'est bon ? s'exclame finalement le prof en croisant ses bras contre son torse avant de continuer. Alors aujourd'hui on va faire volley, c'est pourquoi nous nous retrouvons au gymnase. Comme vous le savez, la semaine prochaine se sera musculation et ensuite nous reprenons avec le football. D'accord ? Compris ?!

Certaines filles se plaignent à l'entente du mot « musculation » et l'enseignant reprend rapidement, ne voulant pas que les chuchotements deviennent de plus en plus agaçants.

— Oui mesdemoiselles, vous ferez toutes musculation à part accident ou dispense ! Et je vous signale que c'est ce sport qui compte pour le bac ainsi que le volley. Alors vous avez intérêt à vous bouger ! Allez, cinq tours de gymnase ! En avant !
— Monsieur... Je peux pas, j'ai mes problèmes de fi-
— Cinq tours de gymnase, Anna ! Ou bien voulez-vous savoir votre magnifique note pour le bac ? Du nerf un peu et on arrête de chouiner ! termine par s'écrier le prof qui donne un coup de sifflet pour nous annoncer le départ.

Ce mec est un vrai tirant. C'est pas cool pour l'autre mais c'est pas mes affaires. En fait, tout le monde s'en fiche sauf ses deux amies qui sont prêtes à l'accompagner à l'infirmerie.

Anna est à deux doigts de chialer quand tout le monde commence à trottiner. Les mecs qui se la jouent trop sprintent déjà et on peut y compter Kévin dans le lot. Ce dernier slalome entre les personnes et semble être dans son monde. Moi, je commence doucement car je ne veux pas ressembler à un bœuf au troisième tour. Je sens une présence derrière moi et qui accélère pour se placer à mes côtés. Je sens son parfum d'ici et ça m'étouffe légèrement. Qui se parfume avant d'aller faire du sport sérieusement ? Je ne prends pas la peine de lui jeter un regard. Maël s'amuse à me pousser sur le côté.

— Connard va...

Je ne peux pas m'empêcher de lui faire pareil, mais bien plus fort. Il rigole légèrement avant de se positionner normalement tandis que moi j'essaye de me concentrer sur ma respiration ainsi que sur ma course. J'accélère pour le dépasser mais il me suit, bousculant une nana de notre classe qui râle sans se gêner.

— Putain, f-f-fais gaffe...! réussit-t-elle à dire, totalement essoufflée.
— Shit, j'suis désolé ! s'exclame le blond qui se retourne pour lui faire face, faisant un signe de paix, trottinant ainsi vers l'arrière.

Il termine vite par se remettre dans le sens exact, finissant tranquillement nos tours ensemble. Bien évidemment, certains se sont arrêté avant sinon ils allaient faire un « malaise », je cite.

Bande de faibles. Bougez un peu votre graisse. 

— Bien ! C'est excellent pour ceux qui ont respectés les règles. Les autres, courez, entraînez-vous. Au bac vous devrez vous échauffer tout seul alors je compte sur votre autonomie pour le faire correctement.

Je ne vois pas passer les deux heures de sport. Moi qui pensait que j'allais être une merde en volley, finalement je me débrouille plutôt bien. C'était marrant d'envoyer des ballons dans la tête de Romain, lui au contraire n'y arrivait vraiment pas.

Et puis finalement, ce n'est qu'en cours de français qu'un pion s'incruste pour nous distribuer les fiches à compléter pour la sortie. Je lis vaguement les indications, un bâillement me prenant soudainement.

— C'est une sortie qui se déroulera au centre historique de la ville, votre professeur d'histoire géographie ainsi que votre professeure de français ici présente vous accompagnera...

Cette dernière pose ses mains sur son cœur en nous regardant, visiblement très heureuse de nous y emmener. Personnellement, je ne suis pas très content mais bon.

— Ça va durer toute la journée, continue le surveillant tout en posant une feuille sur chaque table. Les gens internes vous aurez un pique-nique tandis qu'aux externes, vous devrez bien évidemment ramener le votre. Alors le bus part d'ici à huit heure pétante, soyez là à moins le quart. On ne veut aucun retard alors si le bus part, tant pis pour vous !
— Et on rentre à quelle heure au juste ? lance un mec de la classe tout se balançant sur sa chaise, les yeux fixés sur le bout de papier.
— À dix-sept heures et demi. D'autres questions ? Bien, bonne fin de matinée à tous.

L'enseignante tape dans ses mains et indique aux majeurs de signer maintenant le papier. Mon regard fait le tour de la classe et s'arrête finalement sur l'autre. 

— Bien, vous avez jusqu'à jeudi pour me rendre ce papier. Commençons le cours !

Pause midi, sans transition.

— Des nouvelles de Clarisse ?

Je jette un regard à Romain qui tient une Winston entre ses doigts. Il finit par tourner son visage vers le mien et il regrette presque de m'avoir posé cette question vu comment je le regarde.

— Ok... En fait, c'est vraiment fini quoi ?
— Bingo, dis-je simplement en lui piquant sa cigarette pour l'amener à ma bouche.

Il hoche silencieusement la tête, ne disant plus rien. Kévin s'est totalement endormi sous les légers rayons de soleil, sa casquette rabattue sur ses yeux. Le vieux rap qui provient de l'enceinte du groupe d'à côté nous berce légèrement. Je rends la clope à Romain.

— Et du coup... Elle s'appelle comment déjà ta meuf ? J'ai oublié.
— Vanessa, me répond-il simplement, écrasant sa clope contre le bitume.
— Et... je continue. Ça se passe bien ?

Je vois mon pote aux cheveux miel sourire et j'imagine que oui. Après tout, s'il se met avec quelqu'un c'est qu'il aime vraiment. Toujours. Il fait jamais comme moi ou genre Kévin. Au moins il ne suit pas nos mauvais exemples, c'est cool.

— Ouais. Mais c'est rare qu'on parle de ça, nous deux. Tu trouves pas ? J'sais pas.

J'ai seulement envie de m'intéresser un peu à sa vie amoureuse même si ça me concerne certainement pas trop. 

— Ça te dérange ? je demande après quelques secondes de vide.
— Non, c'est pas ça. Juste que je sais pas trop quoi dire. On est seulement ensemble et ouais, ça se passe bien. 'Fin normalement, quoi.
— Ok, mon pote.

Je ne m'éternise pas plus sur le sujet. Si Romain me dit que ça va c'est que ça va. De toute façon je l'aurai vu à sa gueule. Je ferme les yeux à mon tour, profitant des derniers rayons de soleil. Non parce que je sens que le mois d'octobre va me saouler avec les pluies et les inondations.

Je resterai chez moi, j'ai la flemme de me noyer.

Alors que j'suis à deux doigts de m'endormir, quelque chose ou plutôt quelqu'un réussit à me faire ressentir un léger froid qui traverse ma peau. De l'ombre. J'ouvre mes yeux un par un et je vois, même pas j'suis surpris, Maël se tenir devant moi. Il cache tout mon soleil cet enfoiré et j'veux l'insulter juste pour ça.

— Salut Maël, lance Romain en sa direction, lui faisant une poigne de main auquel il répond.
— Salut les mecs. Bon j'suis franc, j'suis venu ici pour vous demander une clope et du feu...

Il essaye de gratter quoi là ?

Il croise ses mains entre elles et il semble plus le quémander à Romain qu'à moi. Je ne comprends pas ce mec. Des fois il me parle normalement et après il ne me regarde plus. Il est chelou. Mon pote soupire légèrement en levant ses sourcils, sortant finalement son paquet et son briquet de la poche.

— Putain, merci mec... On avait plus rien à fumer avec Matt là-bas, souffle-t-il en attrapant une cigarette qu'il allume bien rapidement, rendant ensuite le briquet à Romain.
— Ah, ouais... Bah pourquoi vous venez pas ? propose ce dernier mais je lui offre un coup de coude discret pour qu'il ferme sa gueule.

Romain, sérieux, je t'apprécie mais ferme là.

Maël semble avoir vu mon agacement et pose son regard curieux sur moi. Moi je ne le regarde pas, m'intéressant faussement aux gens en face de moi. Il reprend bien vite la parole :

— C'est juste que... Il veut qu'on reste que tous les deux, avoue-t-il en scrutant notre réaction à nous deux, la clope au bec.

On est heureux pour vous, donc.

Finalement, je ne peux m'empêcher de lancer un regard à ce Matt qui se tient contre un arbre, un bouquin à la main. M'énerve ce type.

— Vous êtes ensemble ? finit par dire soudainement Romain, sans aucune pointe de jugement dans la voix.

Maël le sent sûrement mais il hausse les épaules.

— J'sais pas trop... Mais il veut genre qu'on reste tout le temps collé ensemble. J'crois qu'il me kiffe grave...

Le faux blond retourne alors discrètement son visage pour regarder en ma direction, c'est à dire toujours vers ce mec aux bouclettes. Il le fixe quelques maigres secondes et se retourne vers nous, répondant à Romain qui a les sourcils relevés, attendant une suite à sa phrase.

— ... Mais j'sais pas moi. J'veux dire j'suis pas gay alors bon.

Suite à sa révélation, je jette un coup d'œil à mon pote assit à mes côtés puis le lève sur celui qui me cache le soleil depuis tout à l'heure. Il ment et je le sais. Il est gay. Pourquoi ils s'embrasseraient sans aucune gêne devant nous ? Allez, il va pas me faire croire que c'est normal. 

— Mais... commence à dire Romain qui s'est légèrement redressé, jetant un coup d'œil à Kévin pour voir s'il dort toujours. Il t'attire au moins ce gars ?

Je lève les yeux au ciel, ne voulant pas plus écouter cette conversation de gros con. Mais je n'ai visiblement pas le choix. Super, j'ai envie d'étouffer mon ami de l'avoir lancé sur ce sujet.

— Bah... Franchement j'en sais rien. Il est mignon et tout... Mais vas-y je me le vois pas du tout en train de lui rouler une pelle, rigole-t-il finalement à sa propre phrase, fumant sa clope.

Romain rigole un peu avec lui et j'suis le seul à rester blasé. Il a des problèmes de mémoire, un problème à son cerveau ou ? Les deux. Parce que je me souviens parfaitement de cette scène perturbante de la dernière fois, sa bouche était collée à celle de Matt. Alors vraiment, on n'est pas né de la dernière pluie quoi. Il va pas nous faire croire ça quand même.

Je me relève finalement de par terre collant alors mon dos au muret, sortant un paquet de clope de mon gilet. J'crois que ça va bientôt sonner et je compte bien m'en fumer une avant d'aller en Enfer. Mon regard croise celui de Maël après l'avoir allumée, j'ai l'impression que ses yeux gris veulent transpercer les miens. Voulant qu'il arrête de me reluquer ainsi, je lui fais un signe de tête vers bouclette qui nous regarde depuis un bon moment.

— J'crois il t'attend.

Il laisse un léger rire s'échapper de sa gorge avant de s'éloigner de nous.

— Ouais... On se voit en cours de maths, Léo.

Et puis c'est comme ça qu'il part, quelques minutes avant que ça sonne. Je le regarde s'en aller et une fois auprès de Matt, il se pose entre ses cuisses, son dos quasiment collé au torse de l'autre. C'est une position de couple ça, il va pas me faire imaginer l'inverse... Bon Dieu, retirez moi la vue. Retirez moi la vue.

— Non mais... Tu le crois toi quand il dit qu'il est pas gay ? je jette en direction de Romain, mon regard toujours rivé sur eux.
— J'sais pas, j'm'en fou. Pourquoi tu me demandes ça ?
— Comme ça.

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