C(r)amé.

Les prochains jours se suivent monotonement. Après l'autre soir avec Kévin, on n'en a plus jamais reparlé. Le lendemain, il s'était réveillé avant nous et s'était excusé de s'être pointé en pleine nuit avant de déguerpir brutalement.

J'étais vraiment gêné en me souvenant du regard qu'il avait porté sur Maël et moi lorsqu'il nous avait aperçu le matin même, en train de descendre de ma chambre. Une grimace avait déformé le maigre sourire de son visage, il ne s'habituera jamais au fait que maintenant j'suis avec un mec. J'ai fait mine de pas être blessé mais ça me déboussole, putain.

Je ne sais plus comment me comporter, ni comment réagir. J'ai l'impression que notre relation est sur un navire au bord de la noyade.

Les cours s'enchaînent ou plutôt, les examens. Heureusement qu'il est là pour m'aider. Mes notes se portent mieux depuis que j'ai commencé sérieusement à m'y mettre et à me concentrer au minimum en cours. Mon dernier bulletin était plus satisfaisant que le premier ce qui a décroché un sentiment de réussite chez mes parents.

J'me souviens ma mère me serrer dans mes bras tandis que mon père lisait les appréciations à voix haute, Gabriella levant les yeux au ciel face à tant d'agitation de leur part. Cette dernière jalouse mais intérieurement je sais qu'elle était contente et savait au fond d'elle, qui me tirait vers le haut.

Maintenant quand j'suis devant une feuille de contrôle, j'ai l'impression qu'elle pourrait me niquer à la moindre faible erreur de ma part. Elles me font stresser, suer des mains, ruminer, agite mes neurones alors qu'en début d'année, je m'en fichais complètement. Je me retiens de ne pas triturer mon Bic et je lance un regard désespéré autour de moi.

Le silence est le maître mot de notre salle de classe. Tout le monde est dans le truc sauf moi. Le prof semble corriger des copies à son bureau, Pronote ouvert sur la page des évaluations en grande fenêtre. Putain, pourtant j'ai révisé, je comprends pas. Pourquoi je bloque sur une question comme ça ? J'ai dû sûrement manquer de relire cette partie, ça ne me dit absolument rien. Je soupire légèrement, ça me fait chier. Kévin, à mes côtés, s'amuse à replier les rebords de sa copie et à dessiner entre les lettres qui alignent les questions.

On n'a pas les mêmes priorités.

— Hé... Pst.

Mon coude frôle celui de mon pote, il se redresse de sa table après ça. Il fronce les sourcils et me jette un regard interrogateur.

Je secoue la tête en lui demandant silencieusement pourquoi il n'en branle pas une. Il m'ignore alors, replaçant sa tête entre ses bras. Je sais pas quoi lui dire d'autre. On ne peut plus parler avec lui.

Surtout depuis ce matin. Un truc un peu chiant est arrivé. Apparemment, Camille sortirait avec un boug de sa classe.

Quand on a su ça, on était un peu choqué. Il est au bout de sa vie depuis. Je pensais pas qu'après tous les problèmes de Camille, elle réussirait à penser aux mecs par dessus le divorce de ses parents. J'dis ça comme si j'en avais la moindre idée de ce qu'elle était en train de traverser... J'me fais rire. En revanche, j'pensais qu'on était amis alors le fait qu'elle ne nous calcule plus n'a en rien à voir avec ses histoires de famille.

J'ai jamais trop compris pourquoi elle n'était pas revenue, même si les explications qu'elle a donné à Kévin étaient un peu bancales. De toute manière, je pense qu'elle s'est rendue compte qu'elle n'avait rien à faire avec lui. Depuis la soirée où il nous a cramé avec Maël et après s'être comporté comme un connard, Camille avait l'air énormément déçue. Je pense qu'au fond d'elle, elle ne s'attendait pas à ce que Kévin lui fasse autant la honte comme ça. Je n'ai jamais eu de conversation à ce sujet mais Cassandre aurait connu le goût de ça.

Je ne veux plus me mêler. Elle fait ce qu'elle veut de toute façon.

Les gens sont aléatoires. Ils changent et te lâchent du jour au lendemain. Est-ce qu'une fois notre diplôme en poche, on se calculera encore ? Je sais pas. Je ne reverrais certainement plus la plupart. Alors pourquoi on se prend la tête à quelques mois de la fin. Dans un mois, on clôture notre terminale et on n'aura plus besoin de penser à toutes ces merdes.

Ce qui m'intéresse, c'est l'énorme pelle que Maël devra me faire devant le lycée. En y pensant, j'ai une petite boule de feu qui se forme dans mon ventre. Elle est mêlée à l'envie et à la peur. Ça me fait kiffer autant que ça me fait flipper. Est-ce qu'il était vraiment sérieux ? Je repense à cette promesse au lieu de penser à la guerre que j'dois abattre sur ma feuille.

Déconcentré, je tente un regard vers lui. Quand il est dans son élément, il est... vraiment quelque chose. Parfois, j'ai l'impression que je ne me rends pas compte de la chance que j'ai.

J'suis loin de le mériter.

Foutu examen de merde. La sonnerie sonne et je balance mon stylo bleu dans ma trousse, saoulé. J'espère au moins avoir la moyenne.















— Vous avez vu ! Quelqu'un a niqué les murs du bahut.

Cassandre s'exclame en nous racontant la nouvelle comme si elle venait de se passer à l'instant alors qu'on le sait déjà tous depuis ce matin. Notre groupe s'accapare un banc tandis qu'elle s'empresse de nous faire des signes de main pour qu'on aille rejoindre l'attroupement devant les graffitis.

Mais putain, j'ai la flemme. Pourquoi faire ? Romain qui faisait parti des moutons curieux, nous rejoint en trottinant vers nous, le visage un peu rouge. En même temps, il semble textoter sur son téléphone.

— Vous ratez rien, le type qui a fait ça ne sait même pas utiliser correctement une bombe de peinture...
— Mais putain, en vrai, qui a pu écrire ce genre de bail... La dirlo' est furieuse, reprend Cassandre en prenant place à côté de Kévin, voyant que personne de décide de la suivre.

D'ailleurs, ce dernier ne la rejette pas à mon plus grand étonnement. Et même, il pose une main sur sa cuisse, s'amusant à déchirer d'autant plus son collant à résille bousillé. J'ai le coude posé contre le dossier du banc en bois, la paume de ma main retenant mon crâne. Je regarde la scène du coin de l'œil avant de tourner mon visage sur le téco. Maël qui se roule une clope. Ses doigts sont agiles et il fait ça de manière très pro. Il me fait pitié.

— J'vous jure les gars, il me dégoûte ce lycée.
— C'est toi, tu dégoûte.
— Tiens, tu m'parles toi aujourd'hui ? Et d'ailleurs arrête de niquer mes fringues, soupire Cassandre en dégageant violemment la main de mon pote.

Chien et chat.

— Elles sont déjà niquées, tes fringues.

Je lance un regard à Maël, mon genou touchant sa cuisse pour qu'il me fixe. Romain, d'un coup, s'exclame devant son téléphone comme s'il venait de recevoir quelque chose de compromettant. Il ne traîne pas avec son mec aujourd'hui lui ? Yanis et toute sa clique. C'est rare qu'il vienne avec nous désormais. Ça me fout un peu les boules en y pensant.

— Quoi ? je lui lance pour qu'il accouche.
— Rien, rien...
— Ton mec vient de t'envoyer un nude c'est ça ? ose Cassandre, faisant gravement soupirer tout le monde.

Le gars aux cheveux miel le prend à la rigolade, une mine mystérieuse sur son visage s'en suit. Je me retiens de faire une grimace un peu cheloue, j'veux pas m'imaginer ça. J'veux pas d'une image de Yanis souillée de mon esprit, le pauvre.

— Romain... ! Je vous pensais pas comme ça tous les deux en fait ! renchérit la gothique, faisant agiter Kévin.

Mon pote regarde autour de lui, comme pour éviter de commenter cette conversation. J'vois bien son malaise rien qu'à sa tenue, son pied tapant excessivement le sol et ses ongles griffant son front.

— Enfin, j'pensais pas Yanis comme ça surtout. Tu l'as vraiment dévergondé, lui qui est tellement timide là.
— C'est sûr que pour ça...
— Bon ! On va fumer ? Léo... ? me dérange Kévin, pour stopper tout.

Il me fait un signe de tête pour déguerpir ensemble, s'étant subitement redressé. Les regards se portent sur lui et sur Romain, ce dernier agacé, réajustant la lanière de son sac avant de froncer les sourcils.

— ... J'vous retrouve en cours, à plus.

Je balance rapidement ma tête vers l'arrière, retenant un long soupir. Que la journée se finisse. Maël, content d'avoir fini de rouler sa merde, s'exclame tout content. Son expression change quand il pose ses yeux clairs sur moi. Il voit bien que j'suis tendu et là il devient tout sérieux.

J'lui fait signe tout en rejoignant Kévin qui s'avance tout seul vers le portail. Cassandre rumine comme quoi elle n'a plus de clope et moi, je rejoins en premier mon pote. Je lui prête mon briquet avant de soupirer.

— Mec...
— Ouais c'est bon j'sais, lance-t-il comme s'il était au courant.

Faut vraiment qu'il apprenne à se détendre. On va plus jamais s'entendre s'il continue sur cette voie.

— Je sais, mais j'te jure que j'essaye. Je...

Maël et Cassandre arrivent, Kévin ferme sa gueule après ça, il ne veut pas en parler suite à leur présence ce que j'comprends. Il pose son pied contre le muret derrière là, il retient son coude d'une main, clope au bec. Il fume ça comme si c'était sa dernière, l'esprit pensif.

Je le fixe, un peu sur la même longueur d'onde. Lui et Romain, ça rame vraiment. Surtout depuis la dernière fois où ils se sont prit la tête. J'peux pas m'empêcher d'y penser, mes pensées me ramenant à ce fameux vendredi soir où Kévin nous avait invité chez lui pour qu'on joue à la console. On était que tous les trois, comme au bon vieux temps.

Assis en tailleur sur le canapé, je juge mes deux potes au sol qui se battent contre un même adversaire ciblé. C'est à mourir de rire, ou à pleurer. Ils ne sont pas du tout en concordance alors ils perdent la partie ce qui me fait rageusement râler Kévin.

Visiblement, ça le tenait plus à cœur que nous de gagner, n'étant pas de bonne humeur.

Puis on le sait, il est mauvais joueur depuis sa naissance. Alors rapidement, une espèce de dispute froide se met en place sous mes yeux un peu ahuris. Et ça recommence, bordel...

Putain gros, j't'avais dit de t'occuper de l'autre boug en priorité... Jamais tu m'écoutes, pour ça qu'on perd h24, râle ouvertement Kévin tout en re-programmant une partie.
Ah ouais, bah excuse-moi. C'est qu'un jeu mec, détends-toi un peu...

Romain soupire, plus qu'agacé. Il doit sûrement se regretter de s'être ramené ici alors qu'il avait déjà un truc de prévu avec les autres apparemment.

Ça me blesse un peu par ailleurs.

Même si en y pensant, il n'a pas hésité à annuler ces plans pour Kévin et moi. Même après ce froid entre eux, il reste toujours loyal envers notre ami en commun et ce même si ce dernier ne s'en rend pas forcément compte. Et j'pense qu'au fur et à mesure du temps, Romain en a plus qu'assez d'essayer de lui faire ouvrir les yeux. Moi qui le pensait patient, il est complètement en train de vriller.

Tiens Léo, j'passe mon tour, me fit-il en se relevant. J'veux plus jouer, j'me casse.
T'es sérieux là ?!

Tout en choppant la manette de la PS4, je regarde les deux se confronter du regard, ils sont debout maintenant, en face de moi. Je m'apprête à les séparer, essayant de pousser un peu Romain pour le ressaisir en premier.

Les gars...
C'est ça, bah va rejoindre ta meuf t'sais quoi ! Visiblement t'attends que ça depuis 'ta l'heure !

Alors que le garçon aux cheveux miel voulait se retourner pour enfiler son gilet avachi sur le dossier du canapé, il se ravise et se bloque, soupirant nerveusement en le menaçant du regard.

Kévin, putain commence pas...
Quoi... rigole amèrement son nouvel adversaire. Tu vas faire quoi ?
T'es vraiment qu'un sale con, j'sais même pas pourquoi j'me suis fait chier à venir. J'savais déjà...

La scène est tendue et j'essaye maintenant de m'occuper de Kévin qui, lorsque je passe ma main sur son bras, s'arrache directement comme pour pas que je le touche. Intérieurement, ça me fait mal qu'il me rejette encore une fois.

J'avoue ça, t'aurais du rester avec les autres. T'as d'autres amis maintenant, pourquoi t'as rappliqué alors ?! Hein !

Il silence s'en suit avant que Romain ne s'exclame, un peu à bout.

Kévin, tu changeras vraiment jamais...
Pff, ouais, c'est ça. C'est sûr que toi tu t'permets, c'pas moi qui vous cache des trucs dans l'dos en attendant ! rumine-t-il, touchant la corde sensible.
T'as raison, j'aurai dû peut-être continuer d'ailleurs.

Je les regarde se lancer des piques, les bras ballant et un peu inutile face à leur comportement. Je ne sais pas quoi dire, ni quoi faire. J'aimerai juste que ça s'arrête. Ou disparaître.

Ça commence à me prendre la tête de jouer à l'hypocrite avec toi, t'façon. J'en ai marre de devoir faire ça.

Il emploie des mots assez durs et sur le coup, Kévin se contente de lancer un léger rire sournois avant de suivre Romain jusqu'à l'entrée et qui s'empresse de se tirer, refermant son gilet tout en enfilant son sac à dos sur son épaule et ses chaussures.

Ne te sens plus obligé de l'faire, tu peux dégager de chez moi aussi ! C'est grand ouvert !
Putain mec, tu vas regretter tes paroles.

La porte d'entrée se referme dans un tambour résonnant et horrible après son départ. Je me sens affreusement mal, cette soirée est un véritable cauchemar. Je donnerais tout pour revenir en arrière. Tout. Pour que ce soit comme avant. Kévin, se retourne vers moi et son expression me prend les tripes.

Ses larmes inondent son visage et il essaye de les anéantir en se frappant la peau, enragé, les joues rouges, complètement furieux.

Je le déteste, putain ! Il en a rien à foutre de moi, lui aussi ! J'vais finir seul, bordel ! Comme d'hab'... Ils m'lâchent tous !

Sans dire quoi que ce soit, je le fais s'asseoir sur le canapé. Mes pouces servent de mouchoir, j'lui stoppe tout ce tsunami qui bouleverse son regard vide et triste. De la colère, il passe à la dépression. C'est toujours comme ça quand ils se disputent, lui et Romain.

Ça me fatigue.

Romain est devenu particulièrement dur. J'essaye de me mettre à sa place et en même temps, je le comprends très bien. Je sais qu'au fond de lui, il adore Kévin. C'est pour ça qu'il réagit comme ça. Lui qui ne s'énerve quasiment jamais, c'est toujours notre ami qui réussit à lui faire ressentir toute cette colère de merde.

Léo... Tu veux bien rester, ce soir hein... ?

Je soupire, pris au piège. Est-ce que je peux vraiment refuser ça ? Je ne lui réponds pas, il connaît déjà la réponse. Après quelques secondes, Kévin se calme, son chien s'étant rendu à ses pieds, la tête entre ses pattes. Même lui, a ressenti le malaise de son maître.

J'sais plus quoi faire pour qu'on arrête d'me prendre pour un con... lâche-t-il doucement, sa tête se calant sur mon épaule.

Et moi, je sais pas quoi lui répondre. Je me contente juste de tapoter son dos, pour le calmer. Je sais pas rassurer les autres. Je n'aime pas le voir comme ça. J'ai mal au cœur quand j'vois mes potes se disputer. Je ne peux m'empêcher de penser à Romain, un peu déboussolé. Au final, c'est toujours moi qui finit par consoler Kévin.

Même Camille m'a lâché... Romain me déteste, et les autres c'est pareil... Il m'reste que toi...

Je soupire, la gorge nouée.

Il te déteste pas...
Nan, il me hait même. Bordel, mais j'suis vraiment plus rien pour lui...? Jamais on se disputait avant, jamais... Ça m'saoule...

Ma présence le rassure, mon ami essayant de ravaler ses larmes après s'être redressé, ayant humidifié le col de mon t-shirt. Je ne dis rien, on se réfugie dans le silence et on reste éveillés un peu tard. Dans la soirée, en allant fumer ma clope, je contacte Romain pour lui demander si tout va bien de son côté. Il me répond qu'il est rentré chez lui et ne me pose pas plus de question sur Kévin. J'crois qu'il veut rien savoir pour le moment. Ses réponses sont froides, un peu sèches. Je soupire donc, mourant d'envie d'appeler Maël à minuit passée.

Le son de sa voix me donne presque envie de chialer, quand j'l'entends. Il se mélange au son du vent qui souffle dans mes oreilles, l'air frais de la nuit soumettant mon corps à d'innombrables frissons.

Il me manque. Quand je le lui dis, j'ai l'impression que mon cœur s'explose en plusieurs fragments. Je kifferai qu'il soit là, assis sur le rebord de la terrasse en ma compagnie. Mes yeux se perdent sur l'horizon en face de moi, une pluie d'étoiles et les lumières artificielles perdues tout au loin, des maisons, enseignes, lampadaires, feux de circulation, voitures faisant briller mes yeux d'une étincelle triste en faible.

J'ai envie d'être avec lui.






















La journée touche à sa fin, suite au dernier cours de sport. Après avoir salué les gars, c'est comme d'habitude que je rentre avec Maël. Ce soir encore, on se casse en moto. On l'a prend presque tous les jours depuis l'arrivée des beaux jours. C'est tellement une tuerie de rentrer des cours comme ça. J'en veux une, moi aussi.

On se sourit comme deux cons en manque, je me retiens de pas lui sauter à la bouche sur le champ. Mes mains triturent les lanières de mon Eastpak. C'est tellement compliqué, putain, pourquoi c'est aussi compliqué ? Si seulement l'un de nous deux était une meuf. 

Vie de merde.

— Youhou, Maël !!

À l'entente de cette voix qui l'appelle au loin, je me retourne vivement pour mettre un visage dessus. Quoi, encore ? Qu'est ce qu'elle veut ?

— Ah, Léa... souffle-t-il d'un ton las.

Elle me saoule cette fille. Les rumeurs sur elles disent vrai. Elle ne lâche jamais l'affaire. Depuis des mois elle court après Maël et ce dernier fait que la rembarrer, bien sûr, il n'est pas intéressé. Il m'a moi. D'ailleurs, j'ai la chaire de poule quand je l'entends prononcer son prénom.

Je déteste mes parents de m'avoir donné un prénom aussi ressemblant que le sien... Léa et Léo. Une lettre de différence entre le mien et celui de cette sorcière. Elle recale ses cheveux derrière son oreille tout en m'ignorant, faisant des aller-retour de regard entre lui et sa moto.

— Tu voulais me dire quelque chose ? demande-t-il alors d'un ton calme, ce qui m'énerve.

Léa finit par poser ses yeux sur moi, comme si j'étais la chose gênante du lot. Je fronce légèrement les sourcils en baissant mes yeux sur ma clope que j'ai entamé depuis la sortie des cours, tapotant sur cette dernière pour faire tomber ses cendres au sol.

— Je... En fait... Je sais déjà que tu m'as répondu mais... 

Maël la coupe, voulant faire taire au plus vite cette ambiance gênante. Je me retiens de rouler les yeux au ciel.

— On s'est déjà expliqué, c'est sûr. 
— Je sais mais... Sauf que c'est bientôt la fin de l'année et que j'ai toujours pas trouvé le courage pour te demander une dernière chose... Je...

Qu'est ce qu'elle est chiante. Pourquoi elle fait la fille timide tout d'un coup ? Elle joue nerveusement avec l'intérieur de sa joue tout en me lançant du coin de l'œil un regard assez insistant. J'ai capté que je gênais mais j'vais pas lâcher mon mec avec cette sangsue. Elle peut rêver. 

— Bon, je soupire. Maël...
— Tu peux m'attendre, s'il te plaît ?

Il est sérieux ?

Ah ouais. Putain, lui aussi il m'énerve. C'est quoi son problème ?

Il me regarde, me faisant un signe clairement pour me dire de l'attendre sur sa moto. D'accord. Je vois rouge, et je croise le regard de la nana en face de nous. Putain de Léa. Elle essaye de cacher son sourire en se pinçant les lèvres, toute contente. 

— Ok.

Je retiens de soupirer brusquement, déjà que ma réaction est limite. Je continue alors le chemin jusqu'à la moto, seul. Je ne veux même pas regarder en arrière, il m'a énervé. Toutes les fois où il a recalé Léa en face de moi, c'était pour quoi faire ? Et là maintenant, il m'dégage moi. Je termine ma clope avant de la jeter par terre, marchant d'un coup sec dessus. 

Je m'assois alors sur sa moto, attrapant mon téléphone de la poche de mon jogs. Curieux et un peu en colère, je tente un regard vers eux. Sale peste. 

Si seulement j'avais eu le courage de poser mon bras sur ses épaules. 

J'aurai pu. 

Au diable les autres. Dans un mois, il me roulera la pelle du turfu devant toi, Léa. Elle verra. J'pense que c'est ce qu'il va falloir faire pour te le sortir du crâne. 

Finalement, c'est après quelques minutes qu'ils se quittent mutuellement. Il revient vers moi, les yeux rivés sur son tel avant de me sourire comme si rien ne s'était passé. Son casque sous le bras, il me le jette et je manque de le rejeter sur son torse.

Je rumine intérieurement en enfilant la protection, l'odeur de Maël se ruant dans mes narines. Je glisse la visière teintée de noire sous mes yeux, je ne veux pas qu'il me regarde.

— J'me retiens pour pas t'faire des choses tellement t'es mignon, lâche-t-il soudainement, fouillant derrière moi pour sortir un deuxième casque.

Je l'ignorance. Je tourne la tête vers l'horizon, le visage tout rouge, caché par ce truc sur ma tête. Je réponds rien, il renchérit.

— Elle voulait juste que je l'accepte sur Insta.

Ah ouais ? Je me retiens de pouffer tandis qu'il chevauche la place du conducteur. Je me redresse un peu, j'ai même pas envie de m'accrocher à lui.

— Juste ça ? je réponds, saoulé.

J'irai la supprimer plus tard. 

Il se permet trop de chose ou alors, il le fait exprès. Je penche pour la deuxième option. Ça l'amuse de me voir m'énerver. Traître. Il fait démarrer sa moto en faisant rugir le moteur. Mes yeux se lèvent et je finis par accrocher mes mains à sa veste en cuir, en vain. J'ai la flemme de tomber. Son parfum me donne un peu le tournis, pourquoi sent-t-il toujours comme ça même après le sport ? Ce mec reste et restera un mystère à mes yeux.

C'est sous quelques regards ébahis et celui de Léa qu'on quitte le bahut, non pas discrètement. Une fois sur la route, je me penche davantage vers lui, me collant à son dos, la vitesse m'excitant énormément. Il slalome entre les voitures d'une agilité sans nom, je ne peux m'empêcher de mater ses mains cachées d'une paire de gant qu'il a enfilé tout à l'heure. Il tape le trajet en quelques minutes seulement, jusqu'à s'arrêter brusquement devant chez moi.

Alors que j'enlève mon casque, il fait de même avec le sien. Il coupe son moteur puis j'viens descendre de sa moto, me mettant alors à côté devant lui, toujours à cheval dessus. Mes yeux se perdent dans les siens et rapidement, on se bouffe la bouche quelques secondes, furtivement, rapidement. J'ai les frissons qui m'affaiblissent, sa langue sait de quelle manière ensorceler la mienne. 

J'en oublie même les voisins.

— T'es jaloux ? recommence-t-il, voulant remettre le truc de tout à l'heure sur le tapis.

Je lâche un soupir, il gâche tout bordel.

— Attends. Putain, râle-t-il tout en me retenant par le bras.

Il m'énerve avec elle. 

— J'la supprimerai, si ça t'saoule autant. Pardon.

Je tente un regard vers lui, je me retiens de rire. Je me laisse me tirer alors de nouveau, m'accrochant mes doigts au passage. Je suis de nouveau planté en face de lui en attendant qu'il se décide de faire quelque chose. Mes yeux sont ruées sur sa bouche qui s'agite, obnubilé par elles. 

Il parle trop. Il m'emprisonne dans une espèce de bulle lorsque sa main se glisse dans le bas de mon dos. Il me ramène davantage à lui et ses lèvres se dissipent alors dans le creux de mon cou. Sa langue fait n'importe quoi dessus et putain, j'apprécie ce qu'il me fait. Il me la peint de rouge et de bleu.

Je me rends même plus compte qu'on est dehors, devant chez moi, et que n'importe qui pourrait nous voir.

J'aurai kiffé que ce soit n'importe qui d'ailleurs. Pendant qu'il continue à me mordre comme un vampire, je tourne de la tête en me crispant, mes yeux croisant alors un visage familier.

Mes mains se ruent alors dans sa nuque et je m'empresser de dégager Maël qui est plutôt concentré dans son truc, ne captant même pas que j'essaye de le virer. J'ai du mal et il continue alors... comme un idiot... Mes jambes se mettent à trembler, j'suis à deux doigts de tomber. Qu'il arrête ça, putain... J'ai la respiration qui me bloque et le visage cramoisi de gêne.

— Maël... Att-Attends...

J'arrive à sortir ces mots en retenant de gémir, je voudrais qu'on me rappelle une pelle et qu'on m'enterre vivant six pieds sous terre. Quand ce con capte enfin, un hoquet de surprise s'empare de sa gorge et c'est après ça que j'me vire de lui, dégoûté. Comme s'il m'avait brûlé.

Un sac isotherme tombant par terre, une bouteille d'eau à moitié vide s'écrasant dans un bruit de plastique au sol. Des yeux noirs, qui me carbonisent à vif. Je suis mort. Je suis en sang, bientôt. Je ne sais pas comment je suis censé réagir alors je reste immobile, comme gelé et même Maël se la ferme.

Je n'arrive pas à identifier toutes les émotions mauvaises qui s'emparent de mon esprit, de mon corps et de mon cœur. C'est comme si je me retrouvais nu devant lui. Dénudée d'arme et de ma carapace.

Je me sens si honteux alors, devant les yeux de mon père.

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