Confidences et danse.

L'ambiance est chaude en ce vendredi soir. La musique résonne de partout et les lumières rouges, vertes et bleues se balancent de partout dans la pièce principale. Accoudé au bar, j'fais tourner le reste d'alcool dans mon verre, les yeux rivés sur le fond. Il doit être 23:00 passée et je me sens pas encore totalement déchiré. Pourtant, je le veux terriblement. Je lance un regard au mec qui sert des verres et me rend compte que c'est le même de la dernière fois. Viking me fait un signe de tête en mode il m'a reconnu. Il s'approche de moi et s'accoude lui aussi, sans que je le lui demande.

Putain, le chieur. 

— Alors, elle était bonne la blondasse ?

Je fronce subitement les sourcils en lui jetant carrément mon verre pour qu'il me resserve. Non mais il est sérieux ce con ? Même moi j'parle pas comme ça. 

— Non mais tu te rappelles avec qui j'ai parlé y'a deux semaines t'es un fou toi, je crie pour qu'il m'entende en tapotant mon doigt contre ma tempe.

Espèce d'attardé va.

Il se retourne avec un sourire aux lèvres pour choper une bouteille de whisky derrière lui et fait couler l'alcool dans mon verre. Ses gestes sont précis et on pourrait croire qu'il a servi toute sa vie. Il s'est un peu amélioré depuis la dernière fois. Ses doigts font glisser finalement ma boisson contre la surface du bar et je la chope rapidement, tel un clochard assoiffé.

— T'as une tête qu'on retient, mon joli.

Il me fait quoi celui-là ? Je sais que je suis beau gosse mais bon désolé j'suis pas gay. Et même un gay trouverait ce gros lourd de barman tout horriblement laid. Il est boutonneux, ses sourcils sont épais et j'aime pas ça, sa bouche est aussi fine qu'une aiguille et sa moustache non rasée me dégoûte. Je ne réponds rien et laisse couler. Bon dieu, quelle situation de merde. Première fois qu'un mec me dit ça. Pourquoi ils sont tous comme ça ? Je tourne ma tête pour jeter un regard à la fête derrière moi. Ils foutent quoi les autres ? Ils ont dit qu'ils me rejoindront au bar mais j'crois que Kévin a sûrement dû trouver une meuf et Romain bah... Aucune idée. J'espère qu'il est pas en train de tromper sa copine ce con.

Non, c'est Romain. Jamais mon sang ne ferait une chose pareille.

Je finis bien vite mon je ne sais combien de verre et le fracasse presque contre la table. Metallica me le chope pour sûrement m'en remettre mais je l'ignore quand je sens mon téléphone vibrer dans ma poche. Plusieurs fois à la suite même. Et merde...

— Et sinon t'es célibataire ?

Ça vient d'Instagram. Je passe ma main sur mon front en ouvrant les messages.

maelgaut : je t'attends t'es où
maelgaut : en retard pour le premier jour de cours
maelgaut: fais gaffe jsuis capable de foutre des devoirs sup
maelgaut : t tombé en panne ?

Et merde, fait chier bordel ! C'est vrai. Putain, j'ai totalement zappé que j'ai accepté ses fichus cours. J'ai dû le faire de force le jour suivant, ce con avait changé de place pour se mettre à côté de Dorian, un mec qui m'énerve avec sa tête de gosse de riche. Je me rappelle de leurs sourires qui me narguaient tout le long du cours de maths. Maël m'avait même pas donné les cours qu'il me gardait, ce fils de... Bref.

C'était sans doute une petite vengeance personnelle.

leobggg09 : dsl jsuis a la soiree de kev

Putain j'ai du mal à écrire. Il l'a vu. Il a répondu.

maelgaut : ok j'arrive

Je plisse les yeux en rapprochant mon tel de mon visage. C'est une blague ? Maël va se ramener genre là maintenant ? Je veux tapoter une réponse mais trop la flemme alors je laisse tomber l'iPhone dans ma poche. Je soupire en passant mes mains sur mon visage. J'me sens pas bien tout d'un coup. 

— Du coup, t'es célibataire ou pas ? crie à nouveau une voix en face de moi.
— Putain, oui. Enfin, non. Ta gueule.

Viking me tend un nouveau verre, quelque chose de différent de tout à l'heure. Il a une couleur chelou et j'suis sûr que ce gothique pourrait me droguer sans que je le sache. Je refuse silencieusement, ma tête se retournant sur un mec complètement torché qui se jette sur le tabouret à côté.

— Toi, tu m'files un truc ou quoi ! Bouge... J'suis soif. 

Je profite que l'attention du barman se tourne vers ce fou de service et je dégage d'ici. Je me retrouve bien vite sur la piste de danse que je dois traverser pour rejoindre le jardin gigantesque de la maison de Kévin. Des bras me frôlent certains m'attrapent mais je me débats et slalome entre cette putain de masse humain. Ça pue l'alcool, mon haleine doit pas être mieux d'ailleurs, et la transpiration. Bordel de merde. J'arrive finalement à l'extérieur et j'dois avouer que j'ai galère pour ouvrir cette putain de baie vitrée.

— Je connais Kévin, c'est mon pote on est dans la même classe j'vous dis !
— ... On le fait rentrer ou pas celui-là ?

Je rigole en regardant la scène qui se passe à mes côtés, par dessus le grillage. Tiens, ça me rappelle quelque chose. 

Maël a l'air de s'énerver tout seul et passe presque rageusement les mains dans sa tignasse décolorée. Je sors une clope, toujours aussi amusé jusqu'à que je le vois finalement regarder en ma direction. Cramé. Ma cigarette et moi. Son énervement semble disparaître quand il m'aperçoit, comme si j'étais une divinité suprême. Les bouledogues le laissent passer au final et il rompt le contact visuel. Je me demande d'ailleurs pourquoi il s'incruste à la soirée de Kév alors qu'il ne l'apprécie pas. 

Quoi ? Ça se voit et puis c'est tout. J'crois pas qu'il l'aime. Mais mon pote ne s'en rend pas compte, il est légèrement débile sur les bords parfois. Mais on lui en veut pas.

Je fume tranquillement ma clope et l'air frais me fait du bien, sur le coup. Il n'y a personne ici et bizarrement, je préfère ça. Un peu de solitude. J'sais pas mais je trouve pas l'envie de m'amuser ce soir. Je deviens dépressif ou quoi ? J'entends d'ici les cris des gens qui, la plupart, sont totalement déchirés et bourrés. Ça devrait être moi, ça, à l'heure actuelle.

Alors que je laisse mon regard se lever sur le ciel étoilé au dessus de moi, j'arrive à entendre la musique quelques secondes un peu plus forte puis, elle redevient comme avant, rien qu'un léger son coupé par un mur. Je sais très bien qui est venu me rejoindre à mes côtés, sur les escaliers de la petite terrasse. Je ne le regarde pas et lui non plus. Je commence à avoir froid maintenant. Je tremble légèrement dans mon gilet fin, serrant mes jambes contre moi. Maël semble à l'aise et j'entends son briquet s'allumer, sentant la fumée de sa clope venir chatouiller mes narines, camouflant ainsi son parfum assez fort. Je devine qu'il vient d'en mettre, dans le creux du cou.

— C'est l'éclate par ici, dit-il de sa voix grave et je devine presque qu'il commence à être enrhumé.
— Mh.

Je ne peux résister plus longtemps et tourne mon visage vers lui. Le faux blond, enfin si j'peux encore l'appeler comme ça car sa couleur soleil a quasiment disparue, me fixe à son tour. Je préfère son châtain, j'ai du mal avec les couleurs sur les mecs. Je vous raconte pas quand Kévin s'est ramené avec la coupe de Jul, j'ai failli crever sur place. Ou quand Romain a piqué une crise et s'est coloré les cheveux en rouge pétard. 

— Les teufs de Kévin ont toujours un truc en plus mais ce soir j'ai pas envie, je confie en retournant mon visage vers le grillage.

Maël bouge légèrement ses épaules pour se réchauffer, sa veste en cuir ne semble pas lui tenir si chaud que ça. Il ne l'a même pas fermé et je suppose que c'est pour se donner un style.

J'essaye pas de comprendre.

— Ah ouais ? J'sais pas, j'vais que chez mes potes de mon ancien bahut d'habitude.

On commence à avoir une discussion normale ? Sans sourires moqueurs, juste sérieuse. J'écrase finalement ma clope contre le bitume et la jette dans un pot à fleur qui traîne par là.

— C'était en plein centre ville et généralement on n'allait jamais chez eux, genre ça s'passait toujours en club. J'en connaissais un, son père il est propriétaire de boîte et on avait le privilège d'aller en carré VIP, c'était dément, j'te jure... Ces cons avaient des sous, j'en profitais tu vois.

Même pas je me doutais que Maël était du type profiteur. Après faut pas se mentir, j'aurai fait la même. Pourquoi se priver des choses qui viennent directement à nous ? Il a bien raison de profiter de ces bourges. Pour le reste, ils servent à rien. Je fixe sa clope qui se consume au fur et à mesure qu'il me parle. Il discute de son ancienne école et genre quand il m'en parle, j'ai l'impression que c'est comme dans les séries. Et je vois très bien de laquelle il me parle, y a une l'école privée en plein centre-ville. Gros lycée de riche même si j'avoue que chez nous aussi, y'en a certains qui se cachent et d'autres pas. Je repense à Clarisse et à son frère. Ils ont des mauvaises notes pour qu'ils soient ici ou quoi ?

Ou alors, ils se sont fait jartés ce qui m'étonnerait même pas d'eux. 

— Et pourquoi tu t'es cassé de là-bas ?
— On m'a choppé avec un sachet de beuh, les fils de... J'crois c'est un mec qui m'a balancé, me lance-t-il en me regardant rapidement, sa clope au bec.

Ah ouais. Pas de chance.

Je souris faiblement, j'avoue que c'est la merde de se virer pour ça. En tout cas, je me demande comment il est rentré dans cet établissement... M'enfin, personnellement, je prendrais jamais le risque de transporter ce genre de truc, j'ai pas envie de me faire engueuler par les darons. Il évoque d'ailleurs ce sujet, continuant sur sa lancée :

— J'te raconte pas mon père quand il est venu au lycée pour me chercher. Il voulait me tuer sur place, rigole-t-il sûrement en se remémorant la scène.

Tu m'étonnes. N'importe qui aurait tué son gosse. Je repense à mon père, lui qui déteste tant ce genre de merde, il m'aurait fait ma fête.

Putain qu'est ce que j'aimerai me blottir dans ma doudoune là. J'ai froid mais sourit suite à la phrase de Maël, glissant mes mains dans les poches de mon gilet. J'le trouve sympa, bizarrement. J'sais pas si c'est dû à mon humeur ou quoi, mais je le trouve drôle à partir de ce moment de cette soirée à l'air humide.

— T'as froid ? dit-il en écrasant sa cigarette, ses yeux regardant ma tenue puis, sourit. Ah ouais, j'comprends mieux.
— Ta gueule... J'avais rien à mettre.

Il mate ma dégaine.

— ... Ouais, la même. J'suis venu en express ici. J'sais même pas pourquoi.

Personne ne sait pourquoi. Il soupire légèrement suite à sa remarque et ne dit plus rien. Il est venu en moto en plus. Il est venu vite, en y pensant. J'aimerais savoir.

— On rentre ? 

Maël se lève et tremble légèrement, sûrement un frisson qui a dû le secouer. Je le suis dans son geste et il ouvre la baie vitrée pour que je rentre en premier, l'air chaud et presque puant m'attaquant directement. Limite je préférais dehors.

Une fois à l'intérieur, je remarque que la musique a changée, des airs latino s'échappant des chaînes hifi accrochées aux murs. Je le sens derrière moi et ses doigts viennent pousser doucement mon dos pour que j'avance. Tout pique. Je soupire quand j'dois de nouveau traverser les danseurs. Puis finalement, je trouve que ça a été plus simple avec Maël dans les parages. Je le conduis au bar où Viking se trouve en pleine discussion avec une fille aussi laide que lui. Désolé mais c'est la vérité. Tandis que je m'assois sur le même tabouret que tout à l'heure, le châtain se pose sur celui à côté de moi, faisant attention à ne pas toucher la surface du bar qui a l'air bien dégueulasse, un air écœuré au visage. Il pose ses doigts sur son menton en matant les bouteilles chacune illuminées par une led de couleur différente derrière elles. Metallica nous remarque finalement et il fait un signe de main vers la nana qui sourit, montrant son sublime appareil dentaire. Ironie, bien sûr.

— Vas-y, j'vais prendre un Monaco. Faut bien que je réussisse à rentrer chez moi après.

Le barman ne répond rien et me regarde bizarrement. Tu veux ma photo ou quoi ? Je lui fait un signe de tête pour qu'il me donne comme d'habitude. Mojito menthe. Il fait celle de Maël puis la mienne.

— Pas de Virgin ? T'es venu en Audi ? me lance-t-il finalement, son verre collé à ses lèvres.
— Ouais.

Il hausse un sourcil en buvant sa gorgée de bière, un air bizarre collé au visage.

— Et tu vas rentrer comme ça ?
— Quoi, comme ça ? je l'interroge, reposant le verre contre le bois.
— Bourré ?

J'suis pas bourré. Je me sens pas bourré. Je secoue la tête négativement. Viking veut s'incruster dans la conversation en mode gros lourd quand je sens finalement un poids sur mes épaules. Une haleine alcoolisée me parvient jusqu'à mes narines. Je me fais secouer de tous les côtés, ma tête se met à tourner et mes doigts viennent se poser sur mon front. 

— Putain, Léo ! T'étais où mon gars, même pas tu viens saluer le poto ! s'écrit alors Kévin, son nez frottant ma joue et ça fait rire Maël à mes côtés.

Son geste me surprend même pas, quand il est à l'envers il devient très affectif et surtout très tactile. Habitué avec lui. Mon pote remarque au final le gars à côté de moi et il lui fait la même chose, s'écriant encore plus fort :

— Maël ! Mais t'as ramené ton cul ! J'suis gavé bien avec mes potes là ! Kévin pose maintenant ses deux bras sur nos épaules, nous rapprochant ainsi avec le décoloré.

Ces dernières se touchent brusquement et je retourne mon visage vers le plus grand, lui criant à l'oreille pour qu'il m'entende :

— Mec, arrête t'es lourd !
— Venez danser !

C'est gênant. Je soupire en décollant calmement mon épaule de Maël. Ce dernier semble s'en foutre, terminant la dernière gorgée de son verre. Il l'a bu à la vitesse de la lumière. Il s'essuie les lèvres avec le dos de sa main et se lève, me lançant un signe de tête vers la piste.

— On y va ? propose-t-il.
— Je déteste danser.

Et c'est la vérité. En plus j'sais pas du tout faire ça. J'préfère rester assis au bar ou sur l'un des canapés. Maël lève ses yeux vers le ciel. 

— Moi j'y vais. À plus, se penche-t-il à mon oreille pour que je l'entende alors que je pouvais très bien l'écouter de là où il était.

Je passe ma main sur ma nuque, dégageant les frissons qui parcourent ma peau et part du bar. Viking a reprit la conversation avec l'autre fille et j'ai plus rien à faire ici. 

Je contourne rapidement quelques gens pour venir me poser sur l'un des fauteuils, légèrement de travers avec mes jambes posées contre l'accoudoir. Je cherche du regard des personnes que je connais et aperçoit Romain s'approcher de moi. Il était porté disparu lui. Il n'est pas aussi torché ce qui me rassure, il sait garder le contrôle de soi. Je cogne mon poing contre le sien et il s'assoit confortablement sur le jumeau de mon fauteuil.

— T'étais où ? je lance en sa direction, les yeux rivés sur la piste de danse.
— Des mecs là-bas, ils sont cool.

Je quitte le centre d'attention en face de moi et je regarde là où il me montre. Des gars habillés à l'américaine, je ne les connais vraiment pas. Ou du moins je me souviens pas de les avoir vu au lycée. Je hoche la tête pour moi même quand le son change enfin, du rap US s'installe dans toute la pièce. J'aime bien le mood.

— Et toi, t'étais où ? continue finalement Romain, se penchant plus vers moi.
— Dehors. Avec Maël.
— Sérieux ? Il est venu ?

Je réponds pas et lui fait un signe de tête pour qu'il regarde devant lui, le châtain dansant à présent avec une personne inconnue. Perd pas de temps. Cette dernière est bien vêtue et même si elle a des airs de Clarisse, elle s'habille bien mieux qu'elle. Une robe noire classe lui colle au corps et des petites bottes à la militaire sont à ses pieds. Un tatouage tribal remonte jusqu'à sa cuisse et Maël lui attrape finalement la taille, l'amenant contre son bassin.

— Bah, il s'amuse c'est le principal !

Je ne peux m'empêcher de regarder ailleurs, on dirait qu'un coup de vent est passé et a bloqué mes yeux sur eux. Je ne vois qu'eux. Ils iraient bien ensemble. J'ai besoin d'un verre. Je me lève brusquement et attrape une bouteille qui traîne sur la table basse en face de nous. Je me remets comme j'étais et fait couler l'alcool dans ma gorge, le coin de mes yeux regardant leurs bouches unies. Le rire de Romain et d'une fille de notre classe ne me fait pas tourner la tête immédiatement vers eux, j'suis encore concentré sur des conneries. 

— Salut, Léo ! s'approche quand même la nana qui vient me faire la bise et je louche sur ses seins.
— Euh... Salut.

Elle me sourit et je quitte enfin son décolleté du regard, maintenant tourné sur Maël et sa meuf. Ils semblent s'embrasser toujours mais j'ai du mal à le voir car des gens se sont posés pile dans mon champ de vision dont cette Alicia. Alicia est dans notre classe et franchement, rien à foutre d'elle.

— Vous voulez boire un truc les mecs ? propose-t-elle surtout à Romain car c'est le seul qui la regarde.
— Euh ouais, répond-il. Nous on prend deux bières.
— Oki, je reviens. Bougez pas les gars !

Elle dégage enfin et je pose mes doigts contre ma tempe, m'accoudant contre ma jambe remontée sur l'accoudoir. Des mecs qui ont sûrement prit un peu de cocaïne se laissent tomber sur le canapé d'à côté en rigolant comme des tarés. Je jette un regard vers eux mais je me retourne bien rapidement quand je sens une ombre se former sur moi. Maël attrape mon bras et me fait me lever d'un coup, je cogne son torse mais je me dégage rapidement. Tout va si vite. Je fronce les sourcils tandis que Romain se lève vers lui, tout sourire. Mais son regard reste bloqué sur le mien. Il ne lâche pas mon bras et je ne prends pas la peine de le dégager. Limite ça me dérange pas. 

Quoi.

— Allez, viens ! Venez les mecs, ils passent ma musique préférée en plus !

Je lance un regard à Romain qui semble tout excité, levant son bras en l'air signe d'accord. Je rappelle rapidement qu'on doit attendre quelqu'un mais Maël n'est pas de cet avis, m'entraînant sur la piste. 

Je suis à deux doigts de me prendre des bras et des mains dans la gueule mais je survis. Il nous ramène vers le milieu. Je jette un regard pour voir si Romain nous a suivi et je fronce les sourcils quand je vois que non. Putain... Me voilà solo avec lui. Cet idiot a sûrement fait exprès. Il va me le payer.

Je me tourne finalement vers le plus grand et je le vois me fixer, tout souriant, me montrant ses dents droites alignées. Je me surprends de penser qu'il a un beau sourire à cet instant précis, il bouge ses épaules et exécute de légers mouvements sur le côté. Il a l'air en pleine connexion avec la musique, c'est limite flippant. Maël semble chanter du bout de ses lèvres la musique qui passe, connaissant sans doute les paroles par cœur. Je ne l'entends pas, mais je regarde si intensément que je ne remarque plus que les détails qui font de lui sa personne si étrange.

— Allez, détends moi ces épaules et laisse-toi aller..., il s'approche de moi posant alors ses deux mains sur lesdites épaules.

Il ne me lâche pas, le visage penché vers moi. Je suis obligé de lever à chaque fois les yeux sur lui, il m'énerve à me dépasser d'une demie tête. Son regard accroche le mien et son sourire ne le quitte pas. Ce soir, je vois un autre Maël. Un Maël cool et plutôt sympa. Ou c'est moi qui est trop aveugle pour le remarquer le reste du temps ? Je sais pas trop. Je sais plus trop, pour faire dans la sincérité.

— N'imagines plus personne autour... imagines seulement... nous ? il pouffe à sa phrase, ses lèvres revenant toujours à mon oreille.

À chaque fois qu'il est prêt de moi son parfum m'enivre, mais là je ne sais pas si c'est l'alcool qui me fait cet effet. Je secoue ma tête et mes épaules, le recopiant dans ses gestes. Ça me fait sourire car j'ai l'impression qu'on joue au miroir. Il hoche la tête, satisfait, et enlève ses mains de moi pour les garder près de soi. Maël ferme les yeux et moi je profite de cet instant pour le regarder, les néons venant se croiser aléatoirement sur son visage. Mais ils les gardent pas très longtemps fermés, son regard se plantant dans le mien et je ressens encore ces foutus frissons dans ma nuque. Ok, j'suis définitivement bourré. Une nana s'incruste à mes côtés, sûrement en manque car elle roule son fessier contre moi.

Je reconnais le mauvais sourire de Maël qui la pousse sur le côté mais elle revient vite vers moi, à se coller telle une sangsue. Il lui arrive quoi ? Ils leur arrivent quoi, même ? Je le regarde rapidement tandis qu'il fixe froidement la brunette. Il ne doit pas l'aimer. Mais je ne comprends pas pourquoi. On continue à danser quelques minutes et la fille a carrément dégagé Maël pour se planter devant moi. Ses lèvres, sûrement refaites car elles sont gonflées bizarrement sont enduites de gloss rouge. D'habitude j'aime ça mais j'en veux pas, je lance un regard désespéré au châtain qui s'est posé à mes côtés. Il semble l'apercevoir et il se penche vers l'oreille de la nana, lui chuchotant quelque chose que seule elle doit entendre. Elle met sa main ornées de bagues contre sa bouche et son regard sur moi change tandis qu'il continue à lui parler. Elle dégage bien vite et je m'énerve, me demandant qu'est ce qu'il lui a dit. Vu son regard, elle n'a pas dû apprécier.

— Tu lui as dit quoi ? je crie à son oreille en attrapant son épaule.

Il tourne son visage vers moi et je sens que Maël mate mes lèvres. Genre comme dans les moments romantiques dans films. Mais c'est rapide car il replante ses yeux dans les miens. Putain de gênant.

— J'ai dit que t'étais en couple et pouf, débarrassée ! il pouffe, fier de lui.

Idiot de service.

J'enlève ma main de lui et lui sourit tout de même. Je commence à être de bonne humeur et j'veux pas que ça s'arrête. C'était bizarre ce moment mais il se remet devant moi et tout le monde est content.

Un peu plus tard, les gens commencent à partir peu à peu et la maison de Kévin se vide doucement. Mit à part ceux qui se sont déjà écroulés de fatigue, bien trop alcoolisés pour bouger. En parlant de mon pote, il est totalement torché. Il tient mon épaule et celle de Maël jusqu'à qu'on le jette sur son lit. Quelle galère pour monter à trois sur ces escaliers à la con... Y'en a trop ! La meuf de Romain est venue le chercher du coup ils nous a abandonné, ce lâche.

— Les gars... Venez on dort tous les trois dans mon lit... Il est giga grand mon lit et j'veux Maël au milieu ! continue de parler mon ami tandis qu'on le déshabille.

Le châtain lui enlève ses chaussures et moi je l'allonge. Un vrai bordel ce mec...

— Maël, déshabilles moi ! Non, arrête Léo, pas toi, t'es trop brusque !
— Putain tu casses les couilles frère, je déboutonne sa chemise violemment.

Mon voisin de classe vient prendre le relais tandis que je choppe ses poignets pour qu'il arrête. Il se calme de suite et je lève les yeux au ciel, jetant un coup d'œil à sa chambre. Des feuilles à rouler et du tabac traînent sur son bureau, y'a aucun bouquin de cours, des vêtements sont au sol, c'est Bagdad ici... Kévin quoi. Maël commence à lui enlever son pantalon et je regarde mon ami qui s'endort, à mon plus grand bonheur.

— Léo... Maël... Dormez ici...

Je secoue négativement la tête en lui mettant sa couette par dessus. J'ai envie de le filmer pour lui montrer son état demain. Quel boulot, bordel.

Je me retourne finalement sur le décoloré qui est prêt à partir. Je le suis, ferme la lumière et la porte. On est plongé dans le couloir noir et je viens toucher son bras pour m'assurer qu'il est près. Bordel, on voit rien là... Finalement la lumière automatique s'allume au niveau des escaliers et on arrive à la porte d'entrée.

— Putain, regarde moi tous ces torchés... Il n'a pas de parents, Kévin ? me chuchote Maël, son visage se tournant vers moi tout en ouvrant la porte.

Je le suis et il la referme derrière moi. L'air froid me frappe une fois dehors. Je me les gèle. C'est pire que tout à l'heure.

— Si, mais ils sont jamais là. En deux ans j'les ai jamais vu. J'sais pas c'qu'ils foutent.
— Woua, chelou.

Les mains dans les poches et les épaules soulevées, on s'avance dans la rue où des voitures sont garées en créneau. Quand je remarque la mienne, je m'arrête et Maël fait de même. Le moment gênant.

— Bon... À lundi ? je dis, sortant les clés de ma poche, allumant le bolide, la main sur la poignée.

Alors que je veux m'engouffrer dans l'Audi, Maël retient la portière et se penche un peu vers moi. La nuit est calme, personne ne passe. Il doit être aux alentours de 3:00 du matin facile. Il chuchote.

— C'était vraiment cool, Léo.

Euh... D'accord. Je n'aime pas spécialement mon prénom mais la façon dont il le dit, avec le timbre de sa voix, je peux m'empêcher d'apprécier. Il roule malicieusement sur sa langue.

— Euh, ouais. Tu vois, c'est cool ici aussi, je rigole légèrement en prenant place sur le siège en cuir.

Maël sourit et je le regarde, admirant la façon dont ses pupilles se dilatent lorsqu'il reprend.

— Tu vas pouvoir rentrer ? me dit-il, d'un ton plus sérieux.
— Oui. Et toi ?
— Ouais. Ça va.

On dirait qu'il n'a pas envie de partir.

— Tu... Tu veux que je te ramène ? j'hésite, me taisant un moment après, réalisant ce que j'ai dit.

Le décoloré semble surpris suite à ma proposition et il rigole légèrement, putain son rire. Je tourne mon visage vers le volant tandis qu'il se penche un peu plus vers moi.

— Viens chez moi.

Je retourne vivement ma tête vers lui. Chez lui ? À cette heure-là ? Je jette un coup d'œil au tableau de bord. 03:28. Viens chez moi.

— Laisse ta voiture là. Ça va pas déranger Kévin. La moto est à quelques mètres d'ici...

Je déglutis et sous son regard, je me lève sans même pouvoir contrôler mon corps. Qu'est ce que je fous sérieusement ? Il ferme la portière et attrape les clés de ma main, éteignant ma bagnole. C'est comme si j'étais son pantin qu'il guide sans pouvoir me toucher.

— T'es pas en état de conduire de toute manière, continue-t-il, remettant les clés dans ma poche.

Sur ce point, il n'a pas tort.

Je suis Maël et on arrive bien vite là où est garée la moto. Il me fait signe de monter à l'arrière tandis qu'il s'installe devant, ne prenant pas la peine de mettre un casque. Ni moi. Je suppose qu'il y en a qu'un de toute manière.

— Pas b'soin de te dire que tu dois t'accrocher ? rigole-t-il, mettant le contact.
— T'vas rouler vite, toi ? je l'interroge, légèrement suspicieux car je n'ai jamais prit la moto.

J'ai pas peur mais je ne me suis pas préparé mentalement à ça. J'entends son rire pendant qu'il fait gronder le moteur. Bordel de merde. Mes doigts accrochent sa veste en cuir un peu bousillée, cette veste qui porte son odeur mélangée à celle des Marlboro. J'ai rien dit. Puis ça démarre. Je n'entends plus que le son du vent et de la Ducati de Maël. Quelle soirée...

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