29. Une décision difficile
Rowena adorait son fils, qu'elle couvait comme une louve, même si la confrontation avec la dure réalité des soins aux nourrissons pouvait s'avérer difficile.
Lorsque les pleurs intempestifs d'un bébé affamé la tirait du sommeil, elle en venait à regretter d'avoir insisté pour l'allaiter.
Elle le faisait, néanmoins, en pestant, contre Léo qui dormait à poings fermés, le dos tourné, ou du moins faisait semblant, un mince sourire narquois aux lèvres.
Elle se sentait frustrée, de devoir rester à la maison, alors qu'elle aspirait à entrer dans la vie active.
Elle avait travaillé dur, pour entrer au bureau des Auror, et cette naissance imprévue, lui ôtait toute chance d'y parvenir.
Meredith et Mia s'étaient proposées, pour garder Ariès à tour de rôle, mais Rowena refusait d'abandonner son bébé.
Elle s'en voulait de l'avoir repoussé, durant sa première semaine de vie, et tentait de rattraper le temps perdu, passant son temps à le rassurer.
Dès qu'il pleurait, elle le prenait dans les bras.
Lové contre sa mère, dans un porte bébé ventral, elle l'emmenait partout avec elle.
Les mois passaient, et Rowena ne se lassait pas de voir les changements qui s'opéraient chez son enfant.
Ses premiers sourires, ses premiers rires, ses premiers gazouillis, elle le photographiait et le filmait, pour que Léo puisse en profiter.
Ariès venait d'avoir dix mois.
Assis sur un tapis, il jouait avec des cubes, qu'il tentait de monter comme une tour.
Les cubes tombaient pour le plus grand plaisir de l'enfant qui éclatait de rire.
Assise sur le canapé, Rowena tentait de lire un roman mais les rires de son fils l'empêchait de se concentrer.
Les cubes s'envolèrent soudain et tournoyèrent quelques secondes autour de la tête de l'enfant, avant de retomber bruyemment autour de lui.
Rowena laissa échapper son livre, et se rua sur son fils.
- Tu es un petit sorcier. C'est ton père qui va être content. En fait, c'est toute la famille qui va se réjouir.
Ce soir là, Rowena attendit le retour de Léo pour lui annoncer la nouvelle.
Bientôt toute la famille apprit qu'ils comptaient un sorcier de plus, et Méredith organisa une petite fête pour l'occasion.
Ariès grandissait vite, trop vite, aux yeux de sa mère.
Ils fêtèrent ses un an.
Le Royaume uni était en paix, et Rowena, Léo et Ariès, profitaient de chaque moment passés ensemble.
Ils s'aimaient, ils étaient heureux.
Mais quelques jours après l'anniversaire de Ariès, Rowena commença à se sentir mal.
De violentes nausées, la prenaient au réveil, elle se sentait fatiguée, bien qu'elle ne fasse pas d'effort particulier, elle dormait peu, et n'avait pas d'appétit.
Elle se décida à consulter un médicomage.
Elle confia Ariès à sa mère.
Elle était livide, lorsqu'elle quitta le cabinet médical.
Elle entra dans un pub et commanda un whisky.
Elle se répétait en boucle sa conversation avec le praticien.
- Vous êtes enceinte, félicitation.
- Que quoi ? Non. Ça c'est impossible. Nous avons fait ce qu'il fallait pour éviter ça.
- Un oubli ça peut arriver, vous savez, il suffit d'une fois.
- Je. ne. peux. pas. être. Enceinte ! C'est impossible. J'ai déjà un enfant, il a un an à peine.
- Et bien vous en aurez un deuxième. Au moins vos enfants pourront rapidement jouer ensemble.
- Vous êtes sûr de ne pas vous être trompé ?
- Sûr à cent pour cent. Vous êtes enceinte d'un mois et demi.
Dans le pub, Rowena se prit la tête dans les mains. On n'aurait pas pu lui annoncer une pire nouvelle.
Elle avait reprit l'entrainement, revu ses sortilèges, et se sentait enfin prête à travailler. Un nouvel enfant allait une fois de plus tout remettre en question.
Elle n'avait pas envie de se replonger dans les couches nauséabondes, les tétées, à toutes heures, et le confinement dans l'appartement.
Et puis ce dernier était trop petit pour une famille avec deux enfants.
Sans compter Léo. Merlin, que dirait il ?
C'était sa faute, pourtant. Elle lui avait fait confiance, il lui avait assuré qu'il connaissait parfaitement les sortilèges de protection. Il avait plus d'expérience qu'elle, elle l'avait cru.
Elle oscillait entre colère, et désespoir.
Elle ne pouvait pas garder cet enfant. Elle devait avorter.
Cette conclusion lui tordit l'estomac. Au fond d'elle tout au fond, elle n'en avait pas envie. Mais elle savait que c'était la seule chose à faire. Avorter, puis reprendre le cours normal de sa vie, comme si rien ne s'était passé. Juste un mauvais moment à passer.
Elle prit une gorgée de whisky, et repoussa brutalement son verre.
Mais que diable était elle en train de faire ? Elle buvait de l'alcool alors qu'elle était enceinte !
Elle paya sa commande et quitta le pub.
Elle récupéra son fils, passa sous silence la raison de son absence, et rentra chez elle.
Elle s'occupa de son enfant, lui donna son bain, et le fit manger.
Elle agissait machinalement, comme un automate. Mais dans sa tête, les pensées se bousculaient.
Elle s'en voulait, à elle, à Léo, au médicomage, à la terre entière.
Ariès sentait l'irritation de sa mère, et il était grognon, et colérique.
Lorsqu'enfin il fut calme et endormi, Elle prépara un repas et mit la table.
Mais elle était incapable d'avaler quoique ce soit.
Elle s'installa dans un fauteuil, et attendit le retour de Léo.
La nuit tomba sans même qu'elle s'en rende compte.
Léo rentra tard. Son groupe traquait des trafiquants de Blue Dreams, une drogue a base de Belladone, qui avait déjà fait de nombreuses victimes.
Il était fatigué.
Il trouva étrange l'obscurité qui régnait dans l'appartement.
Il alluma et la vit.
Il fronça les sourcils.
- Rowie ? Pourquoi tu es assise dans le noir ? C'est Ariès ? Il ..
- Va bien. Il dort.
Léo se sentit aussitôt soulagé.
- Que se passe t'il ?
- Il faut que je te parle.
- Oui.
Il s'assit sur la table basse, devant elle.
- Je t'écoute.
Elle déglutit. Elle avait pensé toute la journée à ce qu'elle lui dirait, mais à présent, elle cherchait ses mots. C'était si difficile.
- Je suis enceinte.
Voilà, elle l'avait dit.
- Quoi ? Non, c'est impossible. On s'est toujours protégé.
- Ah oui ? Pas si bien que ça, apparemment.
Il se leva d'un bond.
- Tu en es sûre ?
- le medecin que j'ai consulté avait l'air de l'être lui.
- C'est pas possible, Rowie, on ne peut pas avoir un autre enfant, pas maintenant ! Ariès a tout juste un an. On ne voulait pas d'enfant et maintenant on va en avoir deux ?
- C'est ce qui se passe, quand on prêtend connaître les sortilèges de protection.
- Je les connais, Rowena. J'étais sûr de moi.
- Oh ça pour être sûr, tu l'étais, et voilà le résultat.
- Que veux tu que je te dise ? J'ai fait une erreur.
- C'est le moins qu'on puisse dire ! On devrait peut être utiliser des contraceptifs moldus, ils ont l'air de savoir ce qu'ils font, eux.
Il ne répondit pas.
- Tu vas le garder ?
Elle redoutait cette question, qu'elle savait pourtant incontournable.
- Ai je le choix ?
Elle n'avait pas besoin d'être Legilimens, pour voir à quel point il était stressé.
- Et bien ..ououi, c'est ton corps, c'est ta décision.
- Comme c'est commode hein ! C'est à moi de décider, alors que je vois nettement que tu veux que j'avorte ! Tu n'as même pas le courage de me le dire en face ! Tu fais comme si j'avais le choix, alors que toi et moi, on sait que je ne l'ai pas.
Oui, Léo, je vais avorter. Pas parce que c'est mon choix, mais parce qu'il n'y a aucune autre solution !
Nous avons déja un enfant, nous ne pouvons pas en avoir un deuxième, pas maintenant, c'est trop tôt.
Il poussa un soupir de soulagement.
- Je suis désolé, mon coeur. Je sais que c'est en partie de ma faute, et si je pouvais...le faire à ta place.
- Oui, mais tu n'es pas à ma place.
- Non, je sais.
- Je vais me coucher, je suis fatiguée.
- Oui, je... Je vais...je reviens.
Il sortit, et claqua la porte derrière lui.
Les hommes ! Gronda Rowena.
Par moment elle aurait souhaité en être un. C'était si facile pour eux. Pas de grossesse, pas de nausées, de jambes lourdes, de fatigue, de décision impossibles à prendre.
Elle était furieuse. Il avait fui, c'était si facile, elle aurait aimé fuir, elle aussi, disparaitre, mais il y avait Ariès, et maintenant ce bébé qui grandissait en elle.
Tout comme son fils, il n'avait rien demandé, il était là à cause de leur négligence. Avait elle le droit de mettre fin à son développement ? Il n'était qu'un minuscule embryon, à peine plus grand qu'une tête d'épingle. Un amas de cellule sans cerveau, sans ame, ni conscience.
Mais elle n'avait pas vécu de grossesse, avant lui.
Elle n'avait pas vu son ventre s'arrondir, ses seins s'alourdir, elle ne l'avait pas senti bouger en elle. Elle n'avait pas créé de lien avec Ariès, dans son ventre.
Toutes ses gestes, que font les femmes enceintes, parler à leur bébé, leur chanter des chansons, leur lire des histoires, pour qu'il se souvienne de sa voix, à la naissance, créer un lien si fort, que le bébé saurait qu'il est aimé, même s'il n'était pas désiré.
Quelque part, en dépis du fait qu'elle avait pris la seule décision envisageable,celle d'avorter, elle songeait qu'elle adorerait vivre cette grossesse.
Bien sûr il y en aurait sûrement d'autre, une qu'elle aurait choisi d'avoir. Qu'ils auraient mûrement réfléchi. Mais elle posa la main sur son ventre. N'empêche, elle aurait bien voulu que cela se passe autrement.
Elle s'endormit sur le canapé.
Léo était furieux.
Il entra dans un pub, et commanda une bouteille.
Il ruminait sa colère.
Il avait préféré partir, plutôt que de lui dire des choses qu'il regretterait plus tard.
Pourtant à y regarder de plus près, c'etait lui le fautif. Elle avait raison. Dans son excitation, sa hâte, il avait sûrement commis une erreur en prononçant son sortilège contraceptif.
Quel crétin.
Elle avorterait, bien sûr, parce que c'était la seule chose raisonnable à faire.
Il adorait son fils, ne regrettait pas sa naissance, bien au contraire, mais il ne voulait pas d'un autre enfant. Son travail l'accaparait, il n'avait même pas le temps de profiter d'Aries qui grandissait si vite, trop vite. Il ratait bien trop de chose. Ses premiers sourires, ses premiers pas, ses premiers élans de sorcier, ses premiers pas.
Il ne voulait pas faire la même chose avec un autre enfant.
Et puis recommencer les couches, les pleurs la nuit, entendre Rowena râler, la voir fatiguée, se plaindre d'être coincée entre ses quatre murs, non il ne voulait pas revivre ça.
Mais c'était à elle de prendre la décision. C'est elle qui devrait le porter, lui donner la vie, l'élever, en sacrifiant sa carrière, encore, c'était donc à elle de choisir si elle se sentait prête à renoncer à sa vie active, pour être une mère au foyer avec deux enfants à élever.
C'était profondément injuste.
Il s'en voulait d'être là, à boire seul, au lieu d'être près d'elle, de la soutenir.
Elle avait besoin de lui, il n'avait pas le droit, de la laisser seule face a cette décision cruciale pour eux .
Il paya, et rentra.
Il la trouva endormi sur le canapé, et sourit, attendri.
Il la souleva délicatement.
- Léo ?Demanda t'elle d'une voix ensommeillée.
- Oui, je suis là. Viens, on va se coucher, il est tard.
Il la déposa dans le lit, la déshabilla, et la recouvrit, mais juste avant, il observa son ventre plat, et soupira.
Quelque soit la décision qu'elle prendrait, il la soutiendrait. Il serait là, pour elle, pour eux. Parce qu'il en avait fait le serment. Pour toujours et à jamais.
Il posa sa main sur le ventre de son épouse, en un geste protecteur.
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