Rencontre



Forêt Grüne, aux abords du fleuve Triade.


Grattant ses pattes sur la terre meuble de la forêt, le jeune renard s'étire. Bien que calme, sa nuit fut assez courte et la fatigue engourdit un peu ses pattes. En quête d'une activité capable de combler la vaste journée qui s'annonce, le petit élu entame une longue balade. C'est là que lui vient une idée, il ira au village. Renard rusé dit-on, aujourd'hui il sera renard inconscient.

Le pelage soyeux, le renard s'avance à vive allure à travers arbres et buissons. Lors de sa première excursion en territoire humain, il ne s'était pas aperçu de la distance les séparant, lui et sa famille, de la terre des hommes. Ne sachant pas évaluer la distance lui restant à parcourir avant d'atteindre sa destination, il fait une pause pour se repérer. À son départ le soleil était beaucoup plus bas, combien de temps a-t-il marché, il l'ignore. Mais il a la vague impression d'être proche de son but. Comme pour confirmer ses réflexions, plusieurs individus apparaissent devant lui. Le porteur d'améthyste le regarde. À sa taille plus qu'imposante il reconnaît l'homme, pourtant il lui semble que ceux qu'il a en face de lui sont plus petits. Son œil brille de joie, il commençait à désespérer et pouf... des petits d'hommes. Le jeune renard s'avance alors en remuant la queue. Les humains ne lui veulent aucun mal... cette phrase en tête, il s'approche encore et encore d'eux, confiant. Puis les enfants le voient.

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Il commence à manquer de souffle. Ses pattes ne le porteront plus longtemps. Il bifurque à toute vitesse derrière un rocher. Il glisse habilement sous un buisson de houx. Il grogne de rage. Essoufflé, il trébuche au contact d'une racine. Cette brève chute, suffit aux hommes pour diminuer la distance qui les sépare de lui. Alors il se demande pourquoi déjà il est dans cette situation.

Il y a un peine un quart d'heure, lui, le renard, jappait gaiement entouré de jeunes humains, apparemment eux aussi heureux de sa présence, lorsqu'elle est arrivée : une mère amicale à première vue. Puis un cri de cette femme retentit et s'en est fini de sa joie avec les enfants. Paré de fourches, de pelles et de faux, les hommes du village l'ont prit en chasse. C'est l'élu, lui seul qui s'est embourbé dans ce pétrin.

C'en est fini de ce jeune renard, se répète-il. Au moment où il s'apprête à se laisser tomber dans la poussière, il repère un trou dans la roche. Sans la moindre hésitation, il s'y glisse. Malgré l'étroitesse de l'embouchure, un petit effectif d'humain le suit toujours dans la grotte. Cette fois il a l'avantage, il fait sombre et la grotte est certainement parsemée de cachettes en tout genre. Le porteur d'améthyste s'autorise alors à s'asseoir. Erreur ! Une pelle vient s'abattre à quelques centimètres de sa patte extérieure gauche. D'un bond, il se relève et se met à courir de plus belle. Dans sa course folle, il heurte alors une grande masse brune. Cette odeur... lui est inconnue. Mais ce grognement grave émanant de cette immense chose poilue, elle, lui est familière: Le danger! Arrivant à l'assaut armé de sa pelle, l'homme rencontre également la masse brune devant lui. Il devient blême et la panique l'emporte. La montagne de poils se redresse alors sur ses deux pattes arrières et cette fois, plus aucun doute ne dure. Il n'y a pas plus maladroit. Le jeune renard prend conscience de sa faute, il vient de réveiller un ours en pleine hibernation. Esquivant une patte enragée, il se faufile derrière ce monstre de colère abandonnant à son sort ses poursuivants.

Les cris et les grognements cessent. Il débouche par une entrée beaucoup plus volumineuse. Il est brièvement aveuglé par la lumière de début d'après midi. Sentant l'odeur tant aimée de l'eau, le renard rejoint le ruisseau.

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Le museau plongé dans l'eau fraîche de la rivière, le jeune renard se désaltère. Se redressant, levant le chef en quête d'odeurs, il cherche une proie potentielle qui lui servirait de dîner. Son museau est recouvert de petites perles d'eau, elles-mêmes recouvertes par la lumière du soleil. Sa pause finie, le jeune canidé profite de la vie, le regard dirigé dans le bleu du ciel, il contemple au-dessus de lui plusieurs oiseaux déferler. Il se met alors à suivre des yeux les ombres des volatiles furtivement posées sur la toison verte des grands arbres proche du ruisseau. Son estomac commence à crier famine suite à sa matinée plutôt mouvementée.

Désaltéré, il quitte le bord du ruisseau et retourne dans l'épaisse forêt verdoyante, en quête d'un déjeuner. Il ne sait pas trop où il se trouve, il a couru longtemps et est assez certain d'être suffisamment éloigné du village. Il n'a plus de repère dans ce coin si éloigné de son terrier d'origine.

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Ses coussinets effleurent à peine le sol, pourtant des légers sillons de terre s'élèvent derrière lui. Il fonce à travers toutes les clairières et dans des endroits suffisamment dégagés il se surprend à fermer ses paupières pour mieux sentir le contact du vent dans sa fourrure rousse voir dorée au soleil. Avec ses poils roux ondulant avec la vitesse, la marque de Freia n'est pas très visible pour ceux ignorant son existence, pourtant elle demeure faisant de lui LE renard. Puis le terrain devient plus ardu et chargé de verdure. Raisonnable, il ralentit sa course pour reprendre une marche discrète. Silencieusement, le jeune renard se déplace sur les feuilles mortes, zigzaguant entre les taillis. Ne voulant pas prévenir de son arrivée ses futures victimes, le porteur d'améthyste rôde discrètement, attendant qu'un lièvre ou qu'un lapin sorte de son trou. L'élu est patient, mais le temps passe et toujours rien. Renoncer n'est pas dans ses habitudes mais des centaines et des centaines de fourmis ont pris possession de ses pattes et il commence à s'ennuyer. Quand... plusieurs bruits de branches cassées l'alertent.

Étonné qu'un animal, même maladroit, fasse autant de bruit, il se cache à l'ombre d'un buisson épineux, inquiet de découvrir ce qui sortira de la bruyère. L'œil vif, l'odorat attentif et l'ouïe aux aguets il se tapit dans l'ombre. S'il espérait un rongeur, il ne semble pas déçu de voir apparaître un petit marcassin. Son regard violacé brille et le prédateur salive à l'idée de savourer la tendre chair de ce très jeune sanglier, son esprit de prédateur lui fait remarquer que jamais même ses géniteurs il n'avait goûté à un de ces omnivores. Apparemment confiant, il s'apprête à refaire une grosse erreur. Faisant basculer son poids sur ses pattes arrières le porteur d'améthyste bondit, mordant férocement son adversaire à la gorge.

L'épaisse peau du marcassin résiste sous les jeunes crocs du rouquin, mais légèrement blessé, le jeune sanglier pousse plusieurs cris déchirants. De lourds grognements résonnent de l'autre côté de la clairière. Furieuse, la laie fonce en direction du prédateur. Un coup de dents et le jeune renard lâche sa prise. Un autre coup dans le flan et il s'écroule. Voulant venger son petit, la mère mord, encore et encore, la fourrure du canidé. À bout de force, n'arrivant plus à lutter, le jeune renard veut renoncer. Il baigne dans son propre sang et quand bien même elle arrêterait de l'assener de blessures, il ne survivrait sans doute pas dans cet état. Tout semble perdu, puis dans un flash lumineux, c'est fini, une mystérieuse sauveuse a fait son apparition et d'un regard lourd de reproche a mis en fuite la laie et son jeune marcassin. Jetant un regard d'incompréhension vers son héroïne, le renardeau la regarde puis sombre dans le noir total...

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À son réveil, il sent une odeur qui lui est étrangère. Lentement il se retourne et voit désemparé, une magnifique louve blanche. Ne sachant plus quoi penser à la vue de sa sauveuse, censée être une rivale en tant que louve, il laisse tomber sa tête sur le sol terreux. Puis, se remémorant les événements de la veille, il se redresse cherchant sur son pelage les dégâts que la laie lui a causés. Ne trouvant nulle part la moindre blessure, le jeune prédateur se laisse à nouveau choir sur le sol. Il n'y comprend rien. Le porteur d'améthyste porte alors ses yeux violets interrogateurs sur la louve à la fourrure si lumineuse et aux yeux dorés. Il le sait, il le sent, cette créature se dressant devant lui n'a rien d'animale. La louve qu'il voit est comme entourée d'une aura divine. D'une léchouille affectueuse sur le museau, elle lui répond, renvoyant les souvenirs passés.

Plusieurs moments de ses vies antérieures lui viennent, pourtant même en prenant confiance que ces images font parties de lui, il les voient plutôt comme des rêves, des rêves appartenant à d'autres. Le jeune renard voit dans son esprit de nombreux éléments de son passé et de ses sauts de corps en corps. Cette sensation de chaleur lors de toutes ses naissances, le froid s'emparant de son corps lors de ses morts et l'inquiétude qu'il ressentait à chaque fois qu'il entrait dans une nouvelle enveloppe, se questionnant sans cesse sur son futur, ne sachant jamais si cette fois serait la bonne. L'âme en lui parcourait son être, lui insufflant du courage, lui rappelant sans répit son destin.

D'un air maternel, la louve le regarde de ses yeux dorés et d'un pas presque aérien se recule. Dans un nuage brumeux, la belle canidé revêt son apparence divine. Alors, le regard tourné vers le ciel, elle s'évapore dans sa silhouette de femme blonde. Le jeune élu, voyant sa déesse, venue à son secours, s'envolant dans son royaume, et prenant en compte qu'elle a dû utiliser une immense partie de ses pouvoirs pour venir sauver son élu, le renard pousse un grognement sonore.

Sachant désormais quoi faire, il se relève déterminé. Il retrouvera son messager et ensemble ils rendront vie et magie à la terre. Elle redeviendra ce monde dans lequel s'unissaient hommes, animaux et créatures.

L'élu regarde les cieux et se jure de réussir sa mission.

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