Fanfiction sur Mcfly et Carlito
À l'horizon, le soleil pointait le bout de son nez, laissant l'opportunité à sa collègue la lune d'aller se reposer un peu. Ses rayons chauds s'abattirent sur la France, léchèrent le bitume des trottoirs, éclairèrent les toits des maisons et réveillèrent par leur douceur infinie les habitants qui s'extirpaient difficilement de leur sommeil, écartant la brume opaque qui entourait leur cerveau, afin de commencer et affronter la journée bien remplie qui s'annonçait.
Parmi eux se trouvait Mcfly – vidéaste populaire auprès des jeunes malgré sa petite trentaine – misérablement vautré dans son canapé en cuir blanc, un sac de chips dans sa main droite, une boisson gazeuse d'une marque quelconque dans l'autre. La bouche pleine, le regard fixé sur son téléviseur, il ne remarqua pas immédiatement que son téléphone, posé à quelques centimètres de lui, vibrait joyeusement et annonçait la venue d'un message de la part de Carlito, son meilleur ami.
Non. Carlito n'était pas son meilleur ami, leur relation était beaucoup plus complexe, elle ne se limitait pas qu'à un fil, plutôt à une multitude de cordes robustes qui étaient entrelacées et indétachables. Carlito était... Carlito était son super méga meilleur ami et rien de changerait cela.
Ce n'est que lorsqu'une publicité passa que Mcfly coula un regard à son téléphone et arqua un sourcil en voyant qu'il avait reçu une notification. Après avoir déposé sa nourriture – il était censé être en régime, mais il avait fini par craquer (encore) – et s'en empara. Un sourire naquit sur ses lèvres face au nom qui s'affichait sur son écran et, avec ses doigts graisseux, il répondit au message de Carlito avec une multitude de cœurs – des cœurs bleus évidemment, loin de lui l'idée de mettre des cœurs d'un rouge ardent, ce serait un affront puisqu'ils n'étaient que super méga meilleurs amis.
Toutefois, répondre avec des cœurs, bleus certes, alors que le message était « Je suis bloqué dans les chiottes. Mcfly, vient me délivrer, je crois qu'il y a une araignée qui me fixe pour voir avec quelle sauce elle me dévorera ! » était assez bizarre, voire même plutôt stupide. Bref. Notre héro se leva de son canapé et chancela dangereusement. Son buste se pencha en avant et ses talons se détachèrent du sol. Le souffle court, il moulina des bras pour recouvrer un semblant d'équilibre et lorsque cela fut fait, il déplia son mètre soixante-douze et s'étira longuement, faisant craquer toutes ses articulations. Ensuite, il se rendit dans sa chambre où sa femme dormait toujours et retira son t-shirt gris délavé pour le remplacer par un pull où figurait le beau et doux visage de Carlito. Seulement parce qu'ils étaient amis.
Il effleura du bout des doigts le crâne chauve de Carlito qui figurait sur son vêtement et mit par-dessus une veste jaune canari, presque fluo. Pour compléter le tout, il enfila un jean vert sapin – il fallait se l'avouer, Mcfly n'avait aucun goût pour la mode -et se passa une main dans ses cheveux pour les coiffer, bien que le résultat ne fut guère concluant : des mèches qui partaient n'importe où, certaines tombaient mollement devant ses yeux tandis que certaines étaient plaqué sur sa tête. Il haussa des épaules, satisfait de cette horreur capillaire, et embrassa avec douceur le front de sa femme, alla s'assurer que ses enfants allaient bien et partit pour sa journée de travail.
·
Les mains croisées derrière son dos, Carlito faisait les cent pas dans leur pièce habituelle de tournage, le muscle de sa mâchoire tendu au maximum. Bon sang, mais où était Mcfly ? Pour la huitième fois en une demi-heure, le youtubeur dégarni jeta un regard lacéré à l'horloge accrochée au mur, avec tant d'insistance qu'elle aurait pu exploser. Il en avait marre. Marre d'attendre, marre d'être toujours le numéro deux, marre d'être toujours dans l'ombre de son meilleur ami. Un peu comme Mario et Luigi, Carlito était délaissé et les gens oubliaient souvent qu'il existait. Pourquoi s'intéresser au maigrelet alors que le plus rondelet des deux était beaucoup plus marrant et charismatique?
Il en avait aussi marre de sous-entendre sa détresse à Mcfly et que celui-ci ne daignait pas comprendre. Le message qu'il avait envoyé ce matin, celui où il disait être enfermé dans une toilette, n'était qu'une métaphore, une méthode un peu nulle de visualiser son état d'esprit. Les chiottes, cette prison étroite, était en fait son esprit. L'araignée représentait sa peur de ne pas être à la hauteur, mais aussi sa détresse qui menaçait de le dévorer d'un instant à l'autre.
Il leva la tête, détacha ses mains l'une de l'autre et se laisse choir à même le sol, en position assise. Carlito était un homme toujours souriant, mais ce n'était qu'une façade, un moyen de tromper son entourage. Alors qu'il s'apprêtait à envoyer un nouveau message à son meilleur ami, la porte s'ouvrit en grand et Mcfly déboula dans la pièce, une pomme à la main, histoire de faire croire aux gens qu'il faisait attention à sa ligne.
— Désolé d'être en retard, dit-il en croquant dans son fruit, tu as réussi à sortir des toilettes tout seul ?
Carlito grimaça. Oui, il avait vraiment réussi à duper son entourage. Il se releva avec facilité – au moins, lui prenait sa remise en forme au sérieux – et fit la bise à Mcfly, comme chaque fois qu'il le voyait.
— Oui, j'ai appelé Lucas pour qu'il vienne me sauver.
Mensonge, mensonge, mensonge et encore mensonge. Il n'avait même pas appelé Lucas, il ne se souvenait même pas de son numéro. Mcfly hocha la tête et ses mains lui démangeaient de retirer sa veste pour faire voir à Carlito son nouveau pull à son effigie. Il était sûr que cela allait lui plaire.
Déposant sa pomme sur son bureau, il réajusta la caméra, histoire qu'elle soit de la bonne hauteur.
— On doit tourner quelle vidéo, déjà? lança-t-il par-dessus son épaule en essuyant la lentille de l'appareil.
Carlito soupira. Un bloc-notes, voilà ce qu'il était. Il s'approcha de son ami et extirpa son téléphone de la poche arrière de son jean. Il apprit à notre Mario 2.0 qu'ils allaient tourner avec Fabien Ollicard.
— Avec Fabien ? On va encore faire des trucs de mentaliste dans la rue ?
— Non, tu ne suis vraiment rien, c'est fou ! On va faire le concours d'anecdote avec lui, les abonnés attendent cet épisode avec impatience.
Mcfly hocha la tête et l'idée que ce soit faux ne lui traversa même pas l'esprit. Il aimait tellement Carlito qu'il lui vouait une confiance quasi-aveugle. Pourquoi pas totalement? Le youtubeur rondelet était incapable de garder ses yeux fermés plus de cinq secondes, il finissait toujours pas les ouvrir parce qu'il avait peur du noir. C'était triste, oui.
— Et il est censé arriver quand ? voulut savoir Mcfly en reprenant sa pomme.
Carlito l'ignorait. Ce n'était écrit nulle part. Il fronça des sourcils, son front se plissa et il approcha son téléphone devant son visage. Mcfly le regarda faire, puis, sans faire de bruit, sorti son OnePlus pour faire un petit snap. Il était mignon, notre Carlito, lorsqu'il était concentré de la sorte.
Si seulement Mcfly savait que Carlito se voyait comme un bloc-notes à l'effigie de Luigi qui se faisait courser par une araignée géante chevauchée par leur cinq millions d'abonnés. Il tomberait de haut...
— Sûrement cet après-midi.
— « Sûrement » ? Tu n'es pas certain ?
Carlito acquiesça et Mcfly croqua une nouvelle fois dans sa pomme et, en voyant qu'elle était terminée, il la jeta dans la corbeille sous le bureau. Son estomac commença alors à gronder. Il avait faim. Malgré les chips de ce matin, le tiramisu pendant le chemin, les croissants en bas de l'immeuble et le fruit, il avait la dalle. Il se demandait s'il était possible de perdre du poids tout en mangeant comme un porc. Ça l'arrangerait beaucoup.
— Du coup, je peux te montrer mon pull pour faire passer le temps ?
— Quoi ? s'étonna Carlito en se frottant le crâne. Ses cheveux lui manquaient.
— Je peux te montrer mon pull ? répéta Mcfly, toutes dents dehors.
Carlito était désarçonnée. Le bloque-notes qui était en lui se recroquevilla et s'enveloppa dans ses pages. Mais qu'est-ce que Mcfly racontait ? Il était habitué à entendre ses conneries, toutefois il lui arrivait d'être surpris et perplexe.
— Pourquoi tu veux me montrer ton pull ?
Mcfly leva les yeux au ciel. Son méga super meilleur ami était parfois sur ses gardes. Il avait beau se présenter comme une personne à l'aise derrière la caméra, il était assez renfermé dans la réalité. Sans être timide ou introverti, il ne donnait pas sa confiance facilement. Il en avait reçu, des couteaux dans le dos, il ne voulait plus jamais subir cela.
— Parce qu'il est beau. Allez, Carlito, il est vraiment beau, mon pull !
— D'accord, montre-le moi, mais je te jure, si c'est un truc bizarre, je te lance cette figurine Pop au visage.
— Comme tu es violent, siffla Mcfly.
Je suis Luigi, je suis de nature violente, malgré mon aspirateur qui ne sert pas à grand-chose. Carlito ne fit pas part de ses pensées et regarda Mcfly tandis que celui-ci retirait sa veste jaune canari. La bouche du youtubeur s'ouvrir alors que ses yeux se posèrent sur son visage déformé par les formes de son ami.
— Mais... qu'est-ce que, bafouilla-t-il.
— Il n'est pas trop beau ? s'extasia Mcfly, tout fier de son pull.
À ce moment précis, il ressemblait à un enfant qui venait de se réveiller entouré d'une centaine de paquets cadeaux.
— Mcfly ! Je suis nu sur ton pull !
Ah oui, ce détail. Il est vrai que Mcfly n'avait pas choisi la meilleure photo pour faire honneur à Carlito, il avait plutôt pris la pire de toutes. Le postérieur pâle de notre Luigi était la chose la plus visible, il faut dire qu'elle prenait pratiquement toute la place dans le pull.
— On ne voit que ta craque de fesse, objecta Mcfly en baissant la tête sur son habit, dévoilant son magnifique double-menton.
On ne voyait que ça, oui. Enfin, le visage rouge de Carlito était aussi très visible, c'était la deuxième chose qui accaparait l'attention. Il devait être en train de s'étouffer quand la photo a été prise à son insu.
— Pour la voir, on la voit. Bon sang, remet ta veste, je n'arrive pas à croire que tu aies mit ce pull.
— Je voulais te faire honneur, riposta le youtubeur rondelet en remettant sa veste comme l'avait demandé Carlito. C'est parce que je t'aime que j'ai fait ça.
Carlito le fusilla du regard.
— Moi aussi je t'aime, David, mais ce n'est pas une raison suffisante pour porter un pull où je suis à poil !
— Un peu, oui. Je ne vais pas porter un t-shirt où mon voisin du dessous est nu, cela n'aurait aucune logique.
— Parce que c'est logique d'imprimer une photo de moi et la mettre sur un vêtement.
Un petit « oui » fut la seule réponse que Mcfly pu donner. Il avait cru bien faire, il ne comprenait pas pourquoi Carlito était aussi sur les nerfs. Il savait que son ami avait quelques problèmes depuis quelques temps, mais pas de cette envergure. Il était rouge de colère, et cette vision le fit frissonner.
— Raphael, est-ce que tu vas bien ? demanda doucement Mcfly en s'approchant de Carlito, de sorte à ce que leurs pieds se frôlent.
Carlito ne répondit pas. Il détourna le regard, serra des poings et prit une profonde inspiration. Mcfly avait posé la question, il allait enfin pouvoir se vider le cœur, lui dire que non, ça n'allait pas, qu'il se sentait perdu, qu'il n'en pouvait plus, que c'était trop pour lui. Il allait enfin extérioriser toutes les émotions négatives qui obscurcissaient son âme.
Il baissa la tête et l'angoisse s'enroula autour de lui comme pour le tenir captif. Soudain, il étouffa. Il écarquilla des yeux, chercha à demander de l'aide, mais rien ne voulut sortir de sa bouche. Ce qu'il ressentait était étrange. Il pouvait respirer, ses poumons se remplissaient d'air, mais sentit qu'il se noyait dans son chagrin.
L'angoisse raffermit sa prise autour de son corps et l'araignée de ses cauchemars apparut devant lui. Il secoua la tête, rouvrit les yeux et c'était Mcfly qui était face à lui, un air soucieux collé au visage. Bon sang.
— Raphael ? Qu'est-ce qui se passe ? Tu peux tout me dire, tu sais ?
Mcfly posa sa main sur l'épaule de son ami, mais celui-ci s'écarta en reculant d'un pas. Derrière Carlito, l'angoisse le fixait d'un œil mauvais, comme pour l'intimer de se taire.
— Ne t'inquiète pas, David, je vais bien.
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