Deux mois plus tard

Léa se rend aujourd'hui, samedi à la bibliothèque pour ramener des livres, et pour en prendre d'autre. Elle marche d'un pas rapide dans la rue. En effet, elle ne doit pas perdre de temps car elle doit être rentrée chez elle pour 18h, et il est déjà 17h, surtout que sa maison est plutôt loin de la bibliothèque.

Cependant, un imprévu de taille vient de se dresser devant Léa. En passant devant une place, elle ne pensait pas tomber sur cette personne.

-Maï! Mais qu'est-ce que tu fais ici? Dit Florian, son frère.

-Je vais à la bibliothèque. Je l'ai dit à papa avant de partir. Et toi, qu'est-ce que tu fais ici?

-Ecoutes, dit-il en lui prenant l'épaule. Pas un mot aux parents, okay?

-Je suis pas une balance! Tu me prends pour qui?

-Sérieusement Maï.

-Je t'ai pas déjà dit de ne pas m'appeler comme ça?

-Mais t'es tellement chou! Surtout avant, quand t'étais toute petite! Ça me rappelle le bon vieux temps!

-Bon, tu te dépêches.

-Ehhh oh du calme Usain Bolt!

-Je dois rentrer pour 18h! Depuis ce qu'il s'est passé, j'ai un couvre feu.

-Ce qu'il s'est passé?

-La fille du collègue de papa qui s'est faite agressée.

-Ah oui mais quand même. T'as vu comment elle s'habille. Et puis toi tu ne marches pas dehors à 01h du matin! S'exclama Florian.

-Je dois faire ce qu'ils disent. Donc? Tu réponds?

-J'y viens j'y viens! Depuis quelques temps, je suis en couple.

-Et alors?

-Bah, c'est tout.

-Et c'est ça que tu gardes comme un secret d'État?

-Je te demande juste de ne pas le dire aux parents.

-Pourquoi? T'es majeur tu fais ce que tu veux non? Demanda Léa.

-Oui, mais si ils l'apprennent... Maman va en faire tout un plat, elle va le raconter à tout le monde au téléphone et... Je veux juste attendre, okay?

-Mais juste, pourquoi tu me racontes tout ça? Tu m'as toujours pas dit ce que tu fais ici, dit Maï-Léa perplexe.

-Elle habite ici, Alice. C'est pour ça que je suis là. Je suis venu la voir.

-Très bien. Alors à tout à l'heure!

-Oui! On se retrouve à la maison. Mais dis aux parents de ne pas m'attendre pour dîner.

-Ok, à plus.

-Attends Maï!

-Oui? Dit Maï-Léa en se retournant.

-Fais quand même attention.

-À quoi?

-Tu sais de quoi je parle.

-Eh bien, non je ne vois pas.

-Ce quartier Maï, dit Florian en se rapprochant.

-Quoi ce quartier?

-Il n'est pas.... très très sûr. Il y a beaucoup de trafic par ici.

-Trafic de...?

-Je ne vais pas m'éterniser sur ça.

-Je te rappelle que tu viens voir quelqu'un qui vit à côté d'après ce que j'ai compris. Et le soir en plus!

-C'est pas pareil... Enfin bref. Simplement, ramènes vite tes livres et rentres directement à la maison, d'accord?

-Je ne suis pas une allumeuse qui...

-Je ne t'ai jamais traité d'allumeuse! Et je ne dis pas non plus que tu ressembles à la fille du collègue de papa! Je veux juste que ma petite sœur rentre bien à la maison.

-Si ça t'aide vraiment à dormir, repondis Maï-Léa.

-Maï, je ne rigole pas.

-Arrête de m'appeler Maï c'est agaçant!

Le frère et la soeur se séparent et vont dans des directions différentes. Léa continue alors son chemin vers la bibliothèque municipale.

Léa accélère encore le pas en regardant sa montre, et surtout en remarquant qu'il ne lui restait que 30 minutes, sans compter les 15 minutes nécessaires pour rentrer chez elle. Mais ce n'était pas sans compter l'autre imprévu qu'elle voit devant elle.

Sur le même trottoir, seulement une dizaine de mètres devant Léa, se tient un garçon qu'elle a déjà vu. Seulement il ne fait pas une activité totalement banale. Il est en train de tendre une enveloppe à un autre garçon qui paraît à peine plus vieux que lui, celui-ci lui tend une liasse de billets en échange.

Il n'a pas vu Léa. Et elle ne veut pas qu'il la voit. Parce que tout simplement, s'il la remarque, elle va forcément vouloir lui poser des questions. Des questions auxquelles elle regrettera plus tard d'avoir eu des réponses. Aussi, il lui demanderai des cours, qu'elle n'a pas encore photocopié. Donc non, Léa voudrait ne pas aller lui parler, et qu'il ne vienne pas vers elle non plus.

Seulement, la jeune fille n'arrive pas à décrocher son regard de ce garçon. Ce garçon si mystérieux qu'elle connaît depuis 6 ans maintenant. Six ans, c'est étrange quand même. Connaître une personne depuis six ans mais ne rien savoir d'elle. Il est vrai qu'elle n'avait jamais vraiment voulu en savoir beaucoup à propos de lui. Il ne s'était jamais intéressé à elle non plus, se justifia Léa en y repensant.

Les yeux de Maï-Léa se porte tout d'abord sur le visage du garçon qu'elle connaît. Enfin, qu'elle croit connaître. Après quelques secondes de réflexion, elle en déduit que c'est bien lui. Alex, avec ses traits fin, sa mâchoire carrée, ses cheveux bruns relevés. Oui, c'est bien lui. Il n'a pas changé en partant aux États-Unis.

Il paraît quand même différent. Différent de celui qu'elle voit cinq fois par semaine depuis le collège. Différent de celui qui passe les heures de cours à plaisanter avec ses amis, mais qui obtient cependant des bons résultats. Ce Alex qu'elle voit en ce moment en face d'elle a le visage dur, la mâchoire contractée et les sourcils froncés. Il n'a pas l'air de crier, mais de parler sérieusement, voir avec colère, en remuant ses mains.

Puis le regard de Léa se dirige vers le garçon en face d'Alex. Il a l'air un peu plus vieux qu'elle, mais a un visage jeune. Il est en train de regarder l'enveloppe qu'Alex lui a tendu peu de temps auparavant. Il glisse sa main à l'intérieur pour saisir l'objet qui s'y trouve. Quand il sort sa main de l'enveloppe, Léa croit rêver. Enfin, ce serait plutôt un cauchemar dans ce cas-là. Le garçon tient une arme dans sa main droite. Un pistolet. Quelque chose de très dangereux, qui peut ôter la vie à quelqu'un. Mais pourquoi Alex détenait-il cela? Et pourquoi est-ce qu'il l'échange à ce garçon contre de l'argent? Et surtout pourquoi faire tout cela en pleine rue, la journée, quand n'importe qui peut les voir?

Tant de questions. Mais Léa ne veut pas avoir de réponses. En fait, elle ne bouge plus. Elle est tétanisée. Elle n'a rien pu faire après le cri qu'elle a malencontreusement lâché en voyant le pistolet et avoir directement mis sa main devant sa bouche.

Les deux garçons se tournent alors vers le cri qu'ils ont entendu. Vers la fille qui les fixe depuis quelques minutes sans qu'ils ne la remarquent. Vers Maï-Léa, la camarade de classe d'Alex. Celui-ci la reconnaît immédiatement et court vers elle, sans dire un mot au garçon avec qui il parlait.

En le voyant arriver en courant, Léa part dans la direction inverse et accélère le pas vers chez elle. Tant pis pour les livres de la bibliothèque, elle les rendra en retard. Elle se retourne discrètement, pour vérifier si peut-être Alex n'aurait pas abandonné sa poursuite. Mais Maï-Léa se retrouve nez-a-nez avec lui. Elle soupire, se rendant compte qu'elle arrivera trop tard chez elle.