-Tu sais que je vais partir? Dit Alex.

-Non, je ne savais pas.

Maï-Léa pouvait paraître rude et limite impolie, mais ce n'était pas son comportement qui la dérangeait. Ce qui la dérangeait c'était que ce gars avec qui elle n'avait jamais discuté, à part pour des travaux pratiques de groupes, vienne la voir. C'est évident, il veut quelque chose, sinon il ne se déplacerait pas.

-Je vais partir à Boston, aux États-Unis, continua Alex. Pour un voyage. Pour améliorer mon anglais et...

-Cool, tu pourras te gaver de hamburgers. C'est bon, ne me raconte pas ta vie, je m'en fiche de ça.

-Dis donc, la première de la classe se rebelle.

-M'appelle pas comme ça.

-Enfin bon passons. Revenons en à moi.

-Comme toujours, chuchota Léa.

-Qu'est-ce que t'as dit?

-Rien, donc tu veux quoi?

-Je me demandais, comme t'es une personne extrêmement généreuse, rempli de bon sens et de gentillesse...

-Va droit au but s'il te plaît! Je suis en train de perdre le fil du cours.

-Tu pourrais me prendre les cours jusqu'à ce que je revienne?

-C'est une blague? Dit Léa, sans la moindre once d'ironie dans la voix.

-Non, j'étais très sérieux, pour une fois.

-Il en est hors de question.

-Et pourquoi ça? Tu dis toujours oui à tout le monde! Pourquoi pas moi?

-N'essaies pas de....me faire passer pour une fille facile.

-C'est pas ce que je voulais dire...

-Alors qu'est-ce que tu voulais dire?

-Tu aides toujours tout le monde, en ce qui concerne les cours, donc je me suis dit que...

-Que je pourrais faire ça pour toi?

-Oui.

-Et bien non.

-Mais...

-Tu m'as adressé la parole combien de fois ce mois-ci? Non, combien de fois cette année? Encore mieux, combien de fois depuis qu'on se connaît, hein? Demanda Léa, dont la tension montait dangereusement.

-La question n'est pas là.

-Alors où est-elle?

-Mademoiselle Legrand et monsieur Morel, il est vrai que j'autorise les discussions en classe mais faites moins de bruit sinon vous serez sanctionnés! Cria le professeur.

-Désolé Monsieur Martin, dit Maï-Léa.

Tout le monde sait qu'il ne les sanctionnera pas. Ce professeur n'a jamais sanctionné personne d'ailleurs, ils ne risquaient rien.

-Bon, tu acceptes ou pas? Dit Alex.

-Pourquoi tu demandes pas à un de tes amis?

-Je leur fait pas assez confiance. Je sais qu'il y a qu'une seule personne dans cette classe qui prend toutes les leçons avec soin, et cette personne c'est toi.

-C'est déjà difficile d'écrire le cours avec le bruit que tout le monde fait. Alors en plus si je dois le recopier deux fois! Est-ce que t'imagines la galère?

-Oui, j'imagine. Mais je sais aussi que tu arriveras à surmonter cette épreuve, dit Alex avec ironie.

-Ça me fera deux fois plus de travail et me demandera deux fois plus de concentration!

-Je sais que tu peux le faire!

Toute la classe remarqua la petite discussion entre Alex et Maï-Léa. Ils n'avaient pas l'habitude de converser, alors forcément ça attirait l'attention. Cependant, personne ne cessait de parler, pour ne pas leur faire remarquer qu'ils étaient observés et donc les interrompre. Les conversations ne se sont pas arrêtées mais ont juste changé de sujet.

-Pourquoi je ferais ça pour toi d'ailleurs? Je ne te dois rien, fit remarquer Léa.

-Sois cool, je ne te demande jamais rien.

-Tu oublies la fois où tu m'as réveillé au milieu de la nuit avec des messages incessants.

-Tu devrais être contente d'être réveillée par un gars comme moi.

-Un gars comme toi?

-Oui, un beau gosse, dit Alex en souriant.

-Je ne dirais pas ça à ta place. En plus, c'était pour un devoir maison de mathématiques!

-J'ai eu vraiment du mal à le faire. Et on avait pas assez de temps.

-On avait eu toutes les vacances pour le faire. Et toi tu te décides à le commencer le jour même à 3 heures du matin.

-Je suis très occupé.

-C'est ça oui. Tout le monde l'est. Moi aussi je le suis. Donc je n'aurais pas le temps, désolé.

-S'il te plaît! Je ne te demanderais plus jamais rien!

-Mais attends, tu te fiches de moi?

-Pourquoi tu dis ça?

-Tu n'écris déjà pas les cours quand tu es là. Alors pourquoi tu en aurais besoin? Une soudaine envie de devenir un bon élève monsieur Morel? Ironisa Léa.

-Arrêtes de te moquer.

-Un élève model par hasard?

-Bon, qu'est-ce que tu veux?

-Je te demande pardon?

-Qu'est-ce que tu veux pour accepter de me prendre les cours?

-Je rêve là, tu veux m'acheter?

-Si c'est nécessaire...

-Je ne suis pas comme toutes tes copines moi, j'ai pas besoin de ton argent de gosse de riche.

-Je comptais pas te donner d'argent.

-T'allais faire quoi alors?

-Te payer en nature,chuchota Alex.

Il mit sa main sur la cuisse de Maï-Léa qui la retira immédiatement et lui donna une gifle. Une gifle discrète, qu'on ne peut pas entendre, certes, mais une gifle tout de même.

-Non mais ça va pas dans ta tête!

-Si ça va très bien, dit Alex.

-Tu me dégoûtes. T'es vraiment un pervers.

-C'est un compliment venant de toi.

-Je ne le prendrais pas comme ça à ta place.

-Alors....C'est oui? Dit Alex avec une mine d'enfant triste.

-Ok, si tu veux.

-Vraiment?

-Oui, c'est bon. Je t'écrirais les cours, ou je les photocopierais pour que ça soit plus simple.

-Merci beaucoup!

-Ou alors tu pourrais les photocopier, que ça soit pas moi qui me fasse défoncée par la vie scolaire.

-Tu sais, j'aimais bien ta première idée!

-C'est cela oui....souffla Léa.

-Merci Maï, t'es la meilleure! Dit Alex en repartant s'asseoir au fond de la classe.

Maï-Léa se reconcentre alors sur le cours, mais tout de même tourmentée. Pourquoi Alex l'avait-il appelée Maï? Seuls ses parents et son frère l'appelle comme ça, et encore c'était plutôt quand elle était toute petite.

-Il m'a appelé Maï. T'as entendu? Dit Maï-Léa.

-Ouais, répondit Violette, c'est louche. Après je ne sais pas comment était votre relation avant. Je suis arrivée que cette année moi..

-T'as écouté toute la conversation non?

-Non.

-Violette...

-Bon, ok, j'avoue. Je vous ai écouté.

-Alors?

-Bah quoi alors?

-Quel est ton avis? Je sais que tu en as un.

-Je pense...non, je pense rien du tout en fait. Juste que le prof devrait s'améliorer sur l'écriture.

Les deux amies rigolent ensemble. Sans se soucier de rien. Le genre de fou rire qui fait du bien.