GetHighAndImagine

Avancement de lecture : Terminée

Avertissement : scènes érotiques (l'autrice le signale aux endroits concernés)

Contient quelques spoilers mineurs, ne lisez que la conclusion si vous souhaitez vous en prémunir.

Nous quittons la fantasy et retrouvons notre monde avec une charmante romance contemporaine.

Résumé : Alec et Kilian sont les meilleurs amis, liés comme deux âmes sœurs et pourtant contraints à se séparer. L'un s'engage dans l'armée, l'autre suit les traces de son père aux États-Unis. Huit ans plus tard, comment gèrent-ils leurs retrouvailles ?

Dans Alter Ego, nous suivrons deux personnages principaux dans la découverte de leurs sentiments mutuels. Au programme : émotions, blessures psychologiques et sensualité.

Sur la forme :

Le récit utilise une alternance de points de vue (à la première personne) entre Alec et Kilian. Un procédé très utile en romance pour explorer les sentiments et leur évolution des deux côtés. J'ai trouvé que chaque protagoniste s'exprimait avec justesse et lucidité sur son ressenti. L'enchaînement de l'un à l'autre était fluide et le découpage, pertinent.

Je n'ai rien à reprocher à l'écriture. Hormis quelques coquilles que je ne prends pas en considération parce qu'on en fait tous, je n'ai pas relevé de soucis de syntaxe. La narration se constitue en grande majorité de dialogues, ce qui dynamise une lecture dans l'ensemble aisée et agréable. La seule chose que je pourrais dire est extrêmement subjective (donc ça vaut ce que ça vaut), mais le style aurait pu montrer un peu plus de spécificité.

Ce que je veux dire, c'est qu'on a affaire à deux personnages aux personnalités bien différentes. Alec est relativement psychorigide, carré, strict, renfermé et pudique dans ses démonstrations affectives ; tandis que Kilian est chamboulé par ses émotions, peine à les maîtriser, se laisse facilement abattre et entraîner dans des spirales de négativité. Je le sais parce que le récit nous le dit, mais j'ai trouvé que cela ne se ressentait pas forcément dans la narration, dans leur manière de s'exprimer. Si je prends un passage, au hasard, et que je m'intéresse uniquement à l'écriture, sans regarder le contexte, je ne serais pas capable de dire si c'est Alec ou Kilian qui parle.

Spécifier des points de vue, ça peut passer par des expressions caractéristiques de l'un ou l'autre des personnages, des tics de langage, des intérêts qui ressortent de leurs introspections, des figures de style particulières, des comparaisons / métaphores en adéquation avec leurs goûts... Bien sûr, c'est un travail « optionnel », ce n'est pas l'absence de ce genre de détails qui nous empêche de savourer l'histoire. Néanmoins, je pense que ça pourrait être une bonne plus-value.

Sur le rythme :

Comme dit ci-dessus, le récit est fluide et se lit très bien, mais j'ai trouvé que le rythme n'était pas toujours très égal.

Certains passages de l'histoire m'ont paru assez statiques, avec quelques redites ou une légère impression de « tourner en rond » (légère, hein). Je pense à tout le questionnement autour de « est-ce que Alec peut accepter d'éprouver des sentiments pour un homme alors qu'il se sent résolument hétéro ». C'était normal que ça dure pour le besoin d'évolution, mais le challenge est quand même d'éviter les redondances. Par exemple, on a des dialogues avec différents personnages où les mêmes idées ressortent. On n'est peut-être pas obligé de montrer tous les échanges... Je me souviens notamment de l'annonce d'Alec et Kilian qui se mettent enfin en couple : dialogue pour en parler avec le frère et la sœur, puis conversation avec Elena, puis discussion avec le reste de la bande d'amis lors de la fête chapitre 27.

Chapitres 35 à 37 : quand Alec ne sait pas s'il peut pardonner à Kilian sa « faute ». Même si je comprends que tu voulais marquer que le processus était difficile et loin d'être instantané, je trouve qu'il aurait pu être légèrement abrégé, dans la mesure où l'on connaît déjà l'issue de la délibération (en tout cas, on s'attend très fortement à ce que les âmes sœurs se retrouvent). Dans le passage où « Alec se demande s'il peut aimer Kilian », il y avait par exemple des éléments déclencheurs pour le pousser à l'acception (la conversation Devon, la sortie en boîte...). Dans la partie à Paris, on aurait pu avoir, par exemple, des conversations directes avec le psy d'Alec, des échanges avec son groupe de soutien... Là, tout ceci était retranscrit de manière indirecte (le contraire de ce que j'ai relevé précédemment, finalement). Un peu de discours direct permettrait peut-être d'insuffler plus de peps et de montrer LE déclic qui fait qu'Alec accepte de revenir vers Kilian.

A contrario, certains évènements s'enchaînent rapidement, de sorte que je n'ai pas forcément eu le temps de les ressentir pleinement. J'ai noté ça au chapitre 11, entre autres, mais je pense que le souci vient avant tout des transitions.

> Il s'est remis très rapidement.

> Le "Tout à coup" surgit un peu brutalement...

> Même si le blackout fait que c'est plutôt réaliste que ses souvenirs se coupent ainsi, exposé de cette façon, on a un peu du mal à ressentir le malaise du moment. Il faudrait soit montrer que l'alcool commence à vraiment le tabasser (avec une narration qui part un peu dans les choux par exemple), soit marquer une rupture encore violente.

Sur les personnages :

J'ai beaucoup apprécié que tes personnages principaux soient très travaillés. Ils ont vraiment des caractères définis et différents. Tous deux doivent affronter leurs soucis psychologiques. C'était une belle idée que de faire en sorte qu'ils se soutiennent l'un et l'autre pour apprendre à les gérer.

Les personnages secondaires paraissaient plus lisses, en comparaison. Cela dit, j'ai beaucoup aimé Steve (clairement, c'est lui que Kilian aurait dû choisir xD), mais bon, ça rejoint l'impression que la plupart des persos secondaires sont « parfaits » (ils sont hyper conciliants et réagissent dans le sens qui arrange l'histoire...)

Bien sûr, le récit se concentre sur Alec et Kilian ; les autres personnages servent finalement « d'outils » pour les pousser dans une relation.

J'ai trouvé intéressants les passages où Alec et Kilian subissaient de plein fouet leurs troubles psy. Les crises de paniques d'Alec m'ont paru réalistes et bien décrites, particulièrement son retour à la caserne où il passe en mode « robot insensible » avant de craquer. De même que les down de Kilian qui se réfugie dans l'alcool : tout n'est pas noir, il simule l'entrain quand il est mentalement au bout du rouleau. Ce comportement collait bien avec le personnage.

Par contre, ce qui collait moins, c'était chapitre 30 : la discussion avec le père. J'ai trouvé Kilian très – trop – calme par rapport à la situation. Connaissant sa personnalité, je me serais attendu à qu'il perde pied, que sa détermination s'effrite, qu'il ait des difficultés à s'exprimer ou, s'il parvient à encaisser, que ça le perturbe énormément. Dans ce passage, il a eu, pour moi, la réaction que j'attendrais d'un Alec plutôt que d'un Kilian.

Autre comportement surprenant : de la part de Steve. Steve, ça a toujours été le gars super cool, compréhensif, ouvert d'esprit, bienveillant – extrêmement bienveillant ! Donc le voir, chapitre 34, prendre un rendez-vous avec psy pour Kilian sans prévenir ce dernier, c'était beaucoup trop bizarre pour moi xD Même si ça partait d'une bonne intention, pour aider son ami, je trouvais que ça matchait pas avec les caractéristiques établies pour Steve. J'aurais pu comprendre ça de la part d'un personnage pushy, intrusif, autoritaire – le genre chevalier blanc qui veut faire ton bien sans attendre le consentement – mais ce n'était pas du tout l'image que je me faisais de Steve (quand Kilian se bourrait la gueule en boîte, il n'a pas cherché à l'arrêter de force, par exemple). À la rigueur, il aurait pu légitimement conseiller à Kilian de prendre un rendez-vous avec un professionnel.

Pour terminer, je me permets un mini-avis personnel, histoire de ne pas déroger à mes manies x)
J'ai bien accroché au personnage de Kilian que j'ai trouvé attendrissant dans son fonctionnement, ses réactions...

Par contre, j'avoue ne pas comprendre le personnage d'Alec xD Il répète à volonté que ça va être compliqué pour lui de franchir le pas avec Kilian, qu'il est hétéro pur et dur, qu'il est pas sûr de pouvoir se lancer sexuellement, mais fait quand même montre d'une possessivité maladive vis-à-vis de Kilian (au point de le faire chier parce qu'une de ses élèves le dragouille). Après pourquoi pas, si Kilian décide de s'engager dans une relation exclusive avec ce gars, à lui d'assumer. Par contre, vu que le livre traite à fond de leurs divers problèmes et du travail qu'ils font dessus, j'étais un peu étonné qu'ils ne considèrent jamais sa jalousie excessive comme un problème.

Sur le fond :

La richesse d'Alter Ego, c'est de parler de troubles psy sur fond de romance. L'histoire nous sensibilise au PTSD et au trouble bordeline. Je n'ai pas de connaissances en psycho, mais j'ai eu le sentiment que l'autrice traitait ces problèmes avec justesse, bienveillance et espoir pour les personnes concernées.

Alter Ego se déroule, en grande majorité, sur la côte ouest des États-Unis. Nous baignons dans le décor idyllique des plages paradisiaques et du soleil permanent. Tout semble trop parfait : la belle maison avec piscine, les super soirées, les amis trop cools... C'est vraiment le rêve américain au travers d'un filtre Instagram. Et ce n'est pas un défaut ! Au contraire, j'ai trouvé que ce décor un peu « carton-pâte » (pardon pour l'expression xD) dessinait un contraste édifiant avec les problèmes que se trimballent Alec et Kilian. Plus le cadre est paradisiaque, plus le retour à la réalité sera brutal lorsqu'Alec devra rentrer. L'effet montagne russe est bien rendu.

Maintenant, c'est parti pour les pinaillages (désolé par avance) :

Chapitre 29 : Pourquoi Kilian n'accompagne-t-il pas Alec en France ? (parce qu'il y aurait plus d'histoire sinon xD oui, chut). Non, la vraie raison exposée est que Kilian est tellement focus sur sa personne qu'il ne songe même pas à cette possibilité et qu'Alec ne voulait pas lui proposer pour ne pas avoir l'impression de l'inciter. Ça ne m'a pas convaincu.

Deuxième chose : la visite chez le père. Alec a vraiment donné le pire conseil à Kilian en l'invitant à régler ses soucis avec son père juste au moment où il se cassait. Même si ça n'avait pas été quelqu'un qui se trimballe une peur de l'abandon aussi énorme que Kilian, ça aurait été quand même été maladroit d'exiger une telle visite après le rejet violent du père.

J'aurais une suggestion pour donner à Kilian une autre raison de rester aux États-Unis et de visiter son père (évidemment, t'en fais ce que tu veux, c'est toi l'autrice !) : lui faire miroiter la possibilité de réintégrer la boîte de papa.

Par exemple, la mère pourrait le contacter, expliquer qu'elle a discuté avec son mari, qu'il s'est adouci, qu'il veut parler à son fils. Par conséquent, Alec pousserait Kilian à ne pas manquer cette occasion de retrouver son poste. Kilian irait voir ses parents en y étant invité. Le début de la discussion pourrait être « positif » en mode « le père comprend que son fils ait pu s'égarer et commettre une bêtise », puis ça dégénérerait lorsqu'il demanderait à son fils « de cesser ce genre de bêtises ». Kilian rétorquerait qu'il s'agit de son identité, pas juste d'une phase, qu'il ne peut pas changer, le père renouvèlerait sa déception. Ça amplifierait le choc, parce qu'au lieu d'avoir un échec attendu, tu lui fais faire un nouveau tour de montagnes russes.

Chapitre 30 : Au lieu d'oublier son chargeur, Alec pourrait peut-être oublier son téléphone. Je ne sais pas comment c'est foutu dans les bases militaires, mais j'imagine qu'il y a quand même moyen d'emprunter un chargeur...

Conclusion :

Alter Ego est une belle romance, touchante et positive qui met l'accent sur les émotions et l'évolution des deux personnages principaux. J'ai lu l'histoire avec plaisir et facilité en seulement quelques jours. Si vous appréciez les romances MxM et que vous étiez passé à côté de celle-ci, je ne peux que vous encourager à l'ajouter à votre liste. Merci Mira de nous l'avoir partagée !