Chapitre 2

Heya~
Bonne lecture et à mercredi uwu

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L'avion arriva à destination environ une heure plus tard que ce qui était prévu, à cause des problèmes techniques rencontrés durant le vol -ce que prétextèrent les membres du personnel par bienveillance.

Les correspondants américains attendaient les japonais avec une impatience non dissimulée, car la nuit était désormais tombée chez eux également alors qu'il aurait encore dû faire jour. Heureusement, ils ne pouvaient pas connaître les véritables raisons de leur retard.

Les deux professeurs de langues de l'établissement de San Diego -l'un du nom de Melville et l'autre de Rimbaud- les accueillirent avec le directeur, qui était d'ailleurs un homme plus qu'effrayant.

Il était assez maigre et arborait un sourire sadique troublant, alors que d'énormes cernes pendaient de sous ses yeux mauves. Sur ses cheveux, violets également, trônait une chapka prouvant le fait qu'il n'était probablement pas d'origine américaine.

Les élèves semblèrent tous hésiter avant de s'avancer, prenant enfin conscience de ce qu'ils vivaient. Naomi fut la première à se lancer, personne n'osant briser la glace. Elle lâcha son frère et s'en éloigna à contrecœur, mais rajouta tout de même à son intention un baiser qu'elle souffla dans sa direction, accompagné d'un clin d'œil.

Elle scruta d'abord le comité d'accueil, avant de s'arrêter sur une jeune fille aux cheveux roses et aux bagues exposées de par son immense sourire carnassier. Cette dernière s'avança également. L'air devint électrique. Les deux arrêtèrent de sourire et se dévisagèrent durant ce qui parut une éternité à tous les spectateurs. Cela commençait bien, visiblement deux pestes venaient de se rencontrer.

Puis, mystérieusement, elles changèrent toutes deux d'attitude en même temps. Elles arborèrent un sourire encore plus grand qu'à l'arrivée et repartirent bras-dessus bras-dessous, visiblement satisfaites de trouver quelqu'un qui leur était similaire. Naomi fit un dernier clin d'œil à son frère avant que les deux ne disparaissent dans une voiture qu'Atsushi n'aurait même pas pu rêver avoir un jour tellement elle devait coûter cher.

Personne ne parla durant encore deux minutes, comme ébranlés par cette rencontre fortuite. Au moins, il ne se retrouverait pas en cohabitation avec la cadette Tanizaki. Ce qui laissait Kyoka.

Après les deux demoiselles, tous commencèrent à avancer. Jun'Ichiro trouva son correspondant presque aussitôt, un certain Mark Twain. Au moins eux ne semblèrent pas vouloir se sauter dessus pour se crêper le chignon, et se saluèrent même cordialement.

Ranpo s'avança alors qu'il enfournait la dernière poignée de bonbon de son sac et le jetait nonchalamment en travers de la route. Il semblait insensible au problème écologique. Il traîna son énorme valise derrière lui, probablement remplie d'un stock de sucreries suffisamment conséquent pour la semaine, et s'avança vers un garçon en retrait. Grand, des cheveux légèrement frisés lui tombant sur les yeux, voûté, il semblait extrêmement timide.

Le jeune homme brun ne prit même pas la peine de le saluer et continua son chemin, ayant déjà identifié la voiture qu'ils allaient emprunter. Son pauvre correspondant mit un peu de temps à se rendre compte qu'il était parti et le suivit d'un pas hésitant.

Higuchi repéra une jeune fille habillée élégamment d'une robe et d'un chapeau blancs et verts, aux cheveux bruns et aux yeux bleus. La blonde sourit timidement, et l'autre le lui rendit avant de l'entraîner à sa suite.

Yosano, qui jusque-là avait consolé son meilleur ami de la perte de son précieux ordinateur, avisa celle qu'elle avait déjà vu en photo et qui confirma ce qu'elle pensait. La jeune fille était toute tremblotante et avait la peau si pâle qu'elle ne pouvait qu'être malade. Même la légère lueur laiteuse de la lune ne pouvait pas donner cet aspect à une personne bien portante.

Or la jeune scientifique rêvait de devenir médecin plus tard, elle allait donc pouvoir profiter de toute la semaine pour disséquer, enfin, plutôt tenter de soigner la pauvresse. Elle s'avança vers elle et lui fit un grand sourire sincère quoiqu'un peu sadique. Elle attendit qu'elle parte pour la suivre avec son énorme valise, qui contenait tout son matériel aussi bien scientifique que médical. Et aussi quelques vêtements, évidemment.

Kaiji, ayant enfin l'air de s'être à peu près remis de la perte de son bijoux technologique, se dirigea vers son partenaire, un jeune homme blond aux yeux bleu glace et portant une sorte de béret. Combien y avait-il au juste d'ethnies différentes dans ce pays, se demanda silencieusement Atsushi. 

Le blond salua son correspondant en retirant son chapeau, mais l'autre l'ignora presque, relevant à peine la tête. Ce qui fit grincer des dents l'américain, peu satisfait d'être traité de la sorte.

Oda se dirigea vers un garçon très grand aux longs cheveux noirs et aux cernes presque aussi grands que ceux du directeur, et qui semblait irradier la joie de vivre. Ironiquement parlant. Il fit un signe de la main à ses deux amis et ils partirent sans même se saluer au préalable. Pourtant l'auburn était quelqu'un de plutôt sociable, l'aura de son correspondant semblait l'avoir totalement démotivé.

Atsushi et Kyoka, qui était restée en retrait depuis l'arrivée, s'avancèrent vers les deux Akutagawa. Car cela ne pouvait qu'être eux, la ressemblance était frappante. Ils avaient le même regard gris, qui semblait à la fois vous transpercer et vous ignorer totalement. Le gris se dit qu'il valait probablement mieux être avec la jeune fille qu'avec Naomi, et que peut-être, malgré l'apparence peu ouverte qu'avaient le frère et la sœur, étaient-ils tout de même de bonne compagnie. Peut-être.

Ne restaient que Dazai et un jeune garçon roux, un chapeau marron sur la tête et relativement petit. Il semblait s'impatienter, car il commença à taper du pied.

-Bon, tu te bouges où tu veux que je te traîne avec une chaîne derrière moi ? finit par cracher le garçon au chapeau en anglais.

En réalité, le brun avait parfaitement compris, car il simulait et faisait juste semblant de ne rien connaître à la langue pour énerver son monde, aussi sourit-il innocemment en haussant les épaules et en secouant la tête négativement. Il n'avait certainement pas l'intention de faire d'efforts pour se faire comprendre. Même s'il était évident qu'il parlait presque parfaitement cette langue, ses parents lui ayant appris depuis sa plus tendre enfance.

L'autre soupira, déjà exaspéré. Il savait très bien que l'autre savait ce qu'il avait dit, il l'avait vu dans son regard. C'était l'avantage lorsque l'on parlait trois langues couramment.

Son père était un japonais qui était parti avec son meilleur ami et la femme de ce dernier créer leur propre entreprise ici, à San Diego. Il y avait rencontré sa femme, une française qui était venue faire ses études ici.

Bien qu'ils parlent anglais chez eux, le rouquin avait toujours insisté pour qu'on lui parle dans les trois langues, ayant un profond intérêt pour les cultures étrangères. C'était le seul de sa grande fratrie à les maîtriser, d'ailleurs.

Aussi n'avait-il absolument aucun intérêt à faire cet échange, et il l'avait bien entendu fait remarquer à son professeur de japonais, Arthur Rimbaud. Mais il y avait une personne en trop de l'autre côté. Personne qui, de plus, ne parlait pas un mot d'anglais.  Alors il avait finalement été forcé de prendre part à cet échange. Pour cet imbécile heureux qui simulait. Ce que cela pouvait l'agacer.

-Je pense que nous pouvons y aller, se força-t-il à répéter en japonais calmement et en comprimant ses émotions.

L'autre en face écarquilla brièvement les yeux, visiblement surpris et heureux que son correspondant parle sa langue d'une manière aussi fluide.

-Ça t'étonne tant que ça ? Ils ont équilibré en mettant les meilleurs avec les moins bons, c'est tout, sourit l'autre sur un ton à la fois moqueur et supérieur, avant de tourner les talons.

En effet, les deux Akutagawa ne devaient donc pas avoir des cas faciles non plus. Ils se connaissaient tous les trois depuis leur plus tendre enfance grâce à la relation de co-entrepreneurs qu'entretenaient leurs pères. Pères qui étaient d'ailleurs actuellement en voyage d'affaires.

Aussi, même si le frère et la sœur ne le parlaient pas couramment, ils comprenaient très bien le japonais. Et de toutes manières ils n'étaient pas très bavards. C'était probablement pour cela qu'ils s'entendaient bien, car Chuuya étant plutôt impulsif, le calme du frère et de la sœur ne faisait pas forcément de mal pour compenser.

-Non, je pensais juste que tu étais trop petit pour que je puisse t'entendre, rétorqua l'autre, un grand sourire scotché sur le visage. Le rouquin se décomposa immédiatement, arborant désormais une expression de haine farouche.

-Répète un peu pour voir, espèce de crétin momifié ?!

~

Dazai arriva enfin chez le rouquin après plusieurs longues minutes de marche. Ce qu'il détestait marcher, surtout avec une valise. La première chose qui le frappa fut le bruit qui émanait de la maison. Des cris semblaient fuser de partout à la fois alors qu'ils n'étaient encore qu'à l'entrée, comme si un monstre attaquait des enfants innocents. Peut-être était-ce le cas ?

-Vos gueules les mioches ! Tenez-vous un peu, c'est pas parce que maman est absente et papa en voyage que vous pouvez foutre le bordel ! hurla Chuuya en anglais, son cri résonnant dans toute la maison. Immédiatement le calme plat suivi, on aurait presque pu entendre un moucheron voler.

-Impressionnantes cordes vocales ~ commenta le brun, satisfait de voir que l'autre prenait la mouche à chaque fois. Même s'il se retint de lui faire remarquer son vocabulaire peu élégant, feignant toujours la non-compréhension.

-Toi aussi ferme-la, surtout si c'est pour ne rien dire !

Sur ces paroles, presque crachées, il prit l'escalier qui menait plus haut et se retourna en plein milieu, voyant qu'on ne le suivait pas.

-Tu attends de crever sur place ou quoi ?

-Peut-être bien~

Chuuya comprit que ses nerfs seraient mis à rude épreuve durant cette semaine. Il continua de monter, de toutes manières ce n'était pas son problème si l'autre comptait rester dans l'entrée. Encore qu'ils n'avaient pas véritablement besoin d'un nouveau porte-manteau.

-J'espère pour toi que tu ne fais pas de bruit en dormant, crétin, parce que tu vas être obligé de dormir avec moi, faute de place, ajouta-t-il alors qu'ils étaient arrivés sur le palier.

-Tu vas un peu vite tout de même, fit remarquer le brun d'un ton étonné et plein de sous-entendus avec un grand sourire.  Le rouquin se crispa immédiatement sur la poignée, l'idée de l'arracher pour l'envoyer dans la figure de l'autre étant soudainement très tentante.

-Dans des lits séparés, abrutie de momie retardée ! s'énerva-t-il, avant d'enfin actionner le mécanisme de la porte et d'entrer d'un pas rageur.

Il fit bien d'ailleurs, car cela lui épargna d'entendre le « dommage » prononcé par l'autre d'une voix vraiment dépitée alors qu'il avait le dos tourné.

~

Pour le plus grand malheur d'Atsushi, le trajet se fit dans le calme le plus plat, aucun ne lançant de conversation ou autre. L'ambiance était lourde et il se sentait vraiment mal à l'aise. Il avait pourtant cru remarquer que la mère était un peu typée japonaise, peut-être le parlait-elle ?

Toujours était-il qu'ils arrivèrent devant une maison luxueuse, qui renvoyait la petite demeure modeste du gris à une toile de tente tellement elle était immense. Ils pénétrèrent à l'intérieur, toujours sans s'échanger la moindre parole. Étaient-ils tous muets ou bien ?

Le frère et la sœur se séparèrent et emmenèrent chacun leur correspondant dans une aile de la demeure, puis il entendit pour la première fois Ryunosuke prendre la parole lorsqu'ils arrivèrent finalement devant une porte.

-Ta chambre.

Deux mots en japonais, puis il l'abandonna là, repartant dans le couloir et laissant un Atsushi pantois. Il avait une voix un peu rauque et grave, mais pas tant que cela non plus, comme s'il était en train de muer.

Il se décida finalement, après plusieurs secondes à souffler pour se déstresser, à ouvrir la porte. Il aurait tout aussi bien pu se retrouver dans un hôtel cinq étoiles qu'il aurait vu la même chose. Un espace plus grand que celui de la pièce à vivre chez lui, un lit double à baldaquin avec une grande étagère, une télé à écran plat sur le mur d'en face et une fenêtre imposante donnant sur un jardin avec piscine.

Cela finit de le déprimer. Comment faire pour accueillir le bicolore dans sa si modeste maison alors qu'il vivait dans tant de luxe ?! Il déballa ses affaires et les mit dans l'armoire prévue à cet effet, qu'il ne remplit même pas au huitième.

Puis il descendit manger, arrivant le dernier à table. Kyoka et Gin ne semblaient pas non plus avoir entamé la conversation, leur regard perdu dans le vide. Ryunosuke semblait, quant à lui, le sonder sans vraiment le regarder, et avec toujours un visage impassible. C'était réellement possible de faire plus malaisant ?

Seule la mère, sentant peut-être qu'il n'était pas à son aise, tenta un petit sourire en coin, ce qui lui confirma tout de même qu'il y avait peut-être des êtres humains ici. Il s'installa et commença à manger, comme les autres.

-Et donc, que fait-on de....

Il avait parlé d'une petite voix, mais voyant que personne ne tournait la tête de son repas, ses derniers mots moururent dans sa gorge alors qu'il pinçait les lèvres, désarçonné par le froid qui semblait avoir envahi la pièce. Les fenêtres étaient-elles ouvertes ?

Il tenta de se rassurer en se disant que ce n'était qu'une semaine. Une toute petite semaine.

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