Chapitre 29 ~ Jeu de mains, jeu de vilains
William et moi avons su régler nos différends comme deux adultes responsables, de façon courtoisie, polie et bien sûr...indiscutable.
« - Je te laisse t'occuper des formalités bien sûr. »
Inutile de préciser que la manche au « Pierre, papier, ciseaux » me revenait de droit.
Et ce n'était pas spécialement pour plaire à William, mais bon, il fera avec.
*******
« - Marguerite ?
- Oui Jessica ?
- Victor veut te voir. »
« Victor veut te voir » sonnait comme une convocation chez le principal à l'école. Ce stress, cette tension et cette impression d'avoir commis une faute irréparable.
Je me suis retrouvée assise là, dans son bureau, à attendre qu'il termine une réunion avec des journalistes et des blogueurs littéraires, le tout avec cette culpabilité en moi.
Détends-toi Marguerite, tu n'as rien fait. Tu ne le connais même pas ce bonhomme. Tout ce que je sais de « Victor » est qu'il est le second éditeur de la maison, qu'il est amical et ouvert selon les filles et que selon Jessica, niveau sex-appeal, il n'est pas loin de valoir William. Rien que ça. Deux beaux jeunes hommes travaillant avec une armée de femmes.
Clichés.
Lui aussi il se tape les secrétaires ?
De mon siège et tandis que la porte de son bureau était grande ouverte, j'avais une vue surprenante sur le bureau de William dans lequel je le vis assis en compagnie de Rose. Sans doute se fait-elle virer. Elle a le sourire pourtant. Je la vois avec ses petits gestes et... Hôte tes sales pattes de mon copain, toi là-bas !
Ah si je le pouvais, je lui lancerais un livre à la figure.
« - Ah ! Vous voilà ! Eh bien dis donc, si l'on m'avait dit que j'allais avoir une telle journée, je ne l'aurai pas cru ! Ahaha ! »
Un grand blond pénètre dans le bureau, tout sourire, éclatant de joie. Maintenant je comprends mieux les rumeurs qui circulent à son égard.
« - Je crois que nous n'avons pas encore eu l'immense plaisir de se rencontrer. Je suis Victor. Victor Mauroy. Je suis enchanté.
- Marguerite...
- Bien, bien...Je peux vous tutoyer ? Cela nous mettra plus à l'aise, non ?
- Je vous en prie. »
Il referme la porte de son bureau d'un grand coup de jambe et s'installe en face de moi, se vautrant dans son fauteuil.
« - Vois-tu Marguerite, j'ai un petit souci, mais pour ça...J'aimerais que tu m'aides.
- Oui bien sûr ! En quoi puis-je vous...t'aider ?
- C'est très simple. Peux-tu m'expliquer comment une auteure comme toi, a-t-elle fini directrice marketing ? N'est-ce pas...Fleur ? »
Vous vous rappelez de toute cette pression et de cette peur immense que je ressentais au tout début ? Elle vient de doubler.
L'expression si ouverte et si joyeuse de son visage venait de changer pour un masque plus sombre et autoritaire.
On dirait que la vilaine Marguerite va réellement se faire punir.
« - La fuite de ton roman m'a beaucoup fait rire et grâce à deux trois copains dans le milieu informatique, j'ai pu remonter jusqu'à ton poste de travail. Donc...Tu m'expliques ?
- Cela vous a fait rire ?
- Oui. J'ai beau travailler avec William, il est évident que cette cruche assise en face de lui avec laquelle j'ai vaguement échangé n'est pas « Fleur ».
- Vous...Tu....vas me sanctionner ? Pire ! Me renvoyer ? »
Il finit par éclater de rire, se tenant fermement l'estomac.
« - Ahaha ! Te renvoyer ? Non ! Pourquoi le ferais-je ? Certes je n'approuve pas ce qui s'est fait, mais cela n'est pas motif de renvoi. »
Ouf. Sauvé.
« - Mais cela peut clairement être un motif suffisamment grave pour que nous venions à rompre tout contrat d'édition entre toi et la maison. »
Ça tombe bien, l'ami, c'est ce que je veux.
Récupérer mes droits.
« - Donc si tu me disais, Marguerite, ce que tu cherches vraiment à faire ?
- C'est-à-dire ?
- Eh bien, tu as dû y réfléchir non ?
- Un peu, je l'admets. Je tiens à seulement à montrer que Rose, n'est pas l'auteur et je veux que l'on déclare ce qui est vrai.
- Hmm...Je vois. »
Faisant mine de réfléchir, il se lève et ouvre alors la porte de son bureau, pointant celui de William du doigt.
« - Dis-moi..Que crois-tu qu'ils font ces deux-là ?
- Je n'en sais rien...
- Tu vois Marguerite, le souci c'est que les décisions ici, elles se prennent à plusieurs. William n'est pas le seul décideur de la maison, on est un petit groupe, un petit comité et là, actuellement, il donne à « Fleur » l'itinéraire qu'ils vont faire durant le voyage promotionnel de « Vanille & Chocolat ». »
Pardon ? Je n'ai pas bien entendu.
« - J'aurais sans doute été d'accord avec sa demande si cela n'intervenait pas en pleine campagne, mais malheureusement, il faut se faire à l'idée que ta demande sera étudiée plus tard.
- Vous n'avez pas le droit de faire ça !
- Oh si...J'ai tous les droits. »
Retournant vers son bureau, il me sort une copie de mon CV ainsi qu'une copie du contrat que j'avais précédemment signé avec la maison avant la sortie de « Vanille & Chocolat ».
« - Tu vois ce petit paragraphe en bas de la page 3 ? Il me donne ce droit. Tu nous as laissé les droits sur, pour l'instant, l'intégrité de tes romans. Ils nous appartiennent à nous, plus qu'à toi. Donc si nous décidons d'envoyer un éditeur et son auteur, aussi faux soit-il, en tournée de dédicace, nous le faisons. À toi de respecter ta part du marché. Inutile de publier sur le web pour te venger ou de crier au scandale. Les règles sont les règles Marguerite. Tu as signé le contrat, tu l'assumes. »
J'avais eu le pouvoir de me transformer en Hulk, je crois qu'actuellement, je l'aurai fait et j'aurai démoli le bâtiment ainsi que le grand sourire trônant sur le visage satisfait de Victor.
C'est un scandale.
« - Maintenant, tu m'excuseras, mais j'ai du travail et...je crois que toi aussi. »
Il m'invite à sortir tandis que je me remets à peine de la nouvelle.
Je venais de me faire avoir. Avoir en beauté. Dans les règles de l'art.
Victor refermant alors la porte de son bureau, mon regard se perd sur l'échange doux et mielleux entre William et Rose tandis que cette dernière se retourne et me fait un grand signe de la main.
C'est décidé. Je vais me la faire.
« - Jessica.
- Quoi ?
- Prête-moi ton agrafeuse »
On va voir si ça vole bien une agrafeuse.
Je la lance aussi fort que je le pouvais, sous les regards ébahis des gens se trouvant dans la pièce principale, tandis qu'elle frôle de peu le visage d'un William consterné.
« - Mais Marguerite...ça ne va pas ?
- Tais-toi ! »
J'ai besoin..J'ai besoin de sortir d'ici.
Je retourne dans mon bureau en courant, attrape mon sac, ma veste, mon téléphone et au moment même où je m'apprêtais à sortir, William me rattrape.
« - Arrête !
- Va te faire.
- Marguerite arrête-toi ! »
Ah ouais ? Tu en es sûr ?
« - Tu le savais n'est-ce pas ? Depuis le début ou je te demande cette simple petite chose, tu le savais non ?
- Oui, je le savais...
- Et toi, t'étais là, te pavanant en me faisant croire que c'était possible.
- Je t'ai dit qu'il fallait attendre et tu n'as rien écouté. Où est-ce que tu vas ?
- Je sors.
- Tu es au travail.
- Je m'en moque !
- Marguerite !
- Tu n'as qu'à retourner avec ta pouffe ! »
Et me voilà partie.
J'en voulais au monde. Au monde entier. Je me sentais trahie. Trompée. Bafouée. J'avais l'impression d'avoir été le dindon de la farce, le bouffon du roi...Tout. Tout ce qu'il faut pour amuser la galerie.
Ma pauvre Marguerite...Que tu es naïve.
Tu as cru que ça marcherait ton petit plan foireux ? Bien sûr que non.
Rien ne marche comme tu veux.
Rien ne marche jamais comme tu veux.
Je suis rentrée à l'appartement, j'ai préparé un sac et j'ai refermé la porte derrière moi.
J'avais besoin de m'éloigner de tout ça.
Sans laisser un mot, une note et en prenant grand soin d'éteindre mon téléphone, je suis partie, aussi loin que je le pouvais.
Et je crois que c'est comme ça que j'ai atterri à la ferme chez ma tante.
Mais quitter une catastrophe ne veut pas dire qu'une autre ne nous arrive pas droit dessus...
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top