Chapitre 20 ~ Chapelle en blanc
On dit que les relations basées sur l'amour ne durent jamais bien longtemps. La passion, l'excitation, le frisson, tout ça, ça finit par disparaître un jour. Par s'en aller. On ne ressent jamais vraiment la même chose à long terme.
On dit que les relations basées sur l'amour ne durent jamais bien longtemps...
Mais au fait, c'est quoi l'amour déjà ?
À chaque fois que mes yeux croisent les siens, que mes doigts s'entremêlent aux siens que mes lèvres viennent rencontrer les siennes, je me pose la question. À chaque fois. Je me demande ce qu'est « l'amour ». Je me demande si c'est comme on nous le décrit dans les films, la télévision, dans les livres ou dans une bonne vieille série gossip. Je me demande si c'est ce sentiment fort, puissant. Je me demande si c'est ces papillons dans le ventre et ces feux d'artifice dans la tête.
Je me demande si j'ai un jour, ressenti tout cela.
Ne peut-on pas être amoureux en étant juste « bien » avec cet autre ? Ne peut-on pas être amoureux en se sentant « complet » ? Je ne me suis jamais sentie aussi vivante que depuis que je connais William. Colère, jalousie, envie, luxure. À l'exemple des péchés capitaux, cet homme était la réincarnation du mal. Le diable en personne.
Mais je me sentais vivante. Je veux dire, avec lui j'étais bien. Je n'ai jamais éprouvé le besoin de lui dire que ce ne fut pas un « coup de foudre », non.
C'était un « coup de folie ».
Être amoureuse du voisin d'à côté était un réel défi.
Ce n'était pas tous les jours roses, mais rien ne l'était jamais vraiment. Rien n'est jamais tout noir ou tout blanc.
Mais ce n'est pas gris pour autant.
La vie, l'amour, les sentiments, tout ça...C'est comme un arc-en-ciel de couleurs.
On ressent la même chose, continuellement, mais toujours d'une façon différente, étrange et surprenante.
Je me surprenais moi-même. Ma jalousie naissante depuis nos vacances à la ferme ou même à l'idée que tout le service comptabilité soit passé sous son bureau, me rend folle, mais je sais aussi qu'il a eu raison en me disant « J'ai eu une vie ». Les gens ne peuvent pas juste s'attendre et se trouver.
On passe déjà la majorité de notre temps à nous chercher nous-mêmes alors trouver l'âme sœur.
D'ailleurs, c'est quoi un âme sœur ?
William était-il mon âme sœur ou était-il simplement ce petit caillou dans ma chaussure qui s'en ira un jour ?
C'est vrai que je me pose beaucoup de questions. Beaucoup trop. Mais je crois, je crois sincèrement même, que toutes ces questions sont devenues importantes. Comme vitales. Elles me permettent de rester ancrée et entière dans la réalité. Elles me permettent de me remettre en question et de ne pas me laisser emporter par le flot qu'est l'amour justement.
Ce n'est pas juste des câlins, des bisous, du sexe et des mots doux.
Mon dieu, non.
L'amour c'est un tout. Un gros fourre-tout, mais un tout. Dedans il y a tellement de choses que chacun adapte sa vision. Sa conception. Tout le monde aime, mais aime différemment.
On tombe amoureux.
On devient amoureux.
On ne sait pas trop.
Pourquoi « tomber amoureux » quand on peut seulement aimer quelqu'un ? Pour ce qu'il est, pour comme il est, pour ce qu'il promet d'être et de devenir.
Je me redresse, me relève, attrape ma chemisette tandis que William dort à côté. Après l'effort, le réconfort à ce que l'on dit.
On dit qu'à chaque artiste, il y a une muse.
Apparemment, on dit vrai pour une fois.
Et aussi étrange que cela puisse paraître, William est comme ma muse, ou tout du moins, il l'est devenu.
« Vanille & Chocolat » était bien, c'est vrai. J'en étais et en reste très fière.
Mais « You + Me » sera mieux.
Je le sens.
Je m'installe alors au bureau, allume l'ordinateur et m'apprête à écrire ce qui semble être l'une de mes meilleures œuvres quand soudain, ayant à peine commencé, je sens deux bras s'enrouler autour de moi tandis que ma tête va naturellement se caler sur son torse dévoilé.
« - Tu écris ?
- J'ai eu une idée. Tu m'as inspirée.
- Oh ? Je vais prendre ça pour un compliment.
- Pourquoi tu t'es relevé ?
- J'sais pas, j'ai tendu le bras naturellement et j'ai senti que t'étais plus là alors je me demandais où est-ce que t'étais passé quand je t'ai vue assise à ton bureau. »
Je l'ai dit, les écrivains, c'est un monde à part. Il ne faut pas essayer de les comprendre, il faut juste leur laisser le petit plaisir qui est d'écrire, et ce, à n'importe quelle heure de la nuit.
« - Tu ne veux pas te recoucher ?
- Non. J'ai fait un rêve plutôt...étrange. »
M'arrêtant dans ma tâche, je me retourne sur ma chaise et le dévisage, curieuse.
« - Un rêve étrange ? »
Il me lâche et s'assoit sur le lit en face.
« - J'ai rêvé que l'on se mariait. »
Oh.
« - Et ?
- Ça m'a donné des idées. »
Oh !
« - Ah bon ? Tu veux que l'on se marie toi et moi ?
- Ahaha ! Même si je ne suis pas contre l'idée, j'aimerais te proposer autre chose. »
Parce qu'il est évident qu'à trois heures du matin, nous allons parler avenir.
C'est tout à fait une heure pour faire ce genre de chose.
« - Je suis tout ouïe.
- Emménageons ensemble, Marguerite. »
Là, il m'intrigue.
« - On est déjà ensemble non ?
- Oui, mais c'est ton appartement et de l'autre côté c'est mon appartement, là je voudrais que ce soit notre appartement.
- Oh... »
C'est vrai que je ne l'avais jamais envisagé sous cet angle là. Ma maigre bourse scolaire, mes quelques boulots à droite ou à gauche et mes revenus littéraires ne me permettaient clairement pas de me payer un appartement de folie, mais celui que j'avais eu dans cet immeuble avait été le coup de pot que je n'ai jamais eu de ma vie. Il tombait parfaitement.
Et le quitter...Partir de cet endroit...
« - Tu veux que...Toi et moi...Enfin que nous...
- Je veux que nous emménagions ensemble. Toi et moi. Rien que tous les deux.
- D'accord. »
Je ne sais même pas si mon cerveau a pris le temps de réfléchir à sa question, ni même à ce que cela allait engendrer pour nous deux.
Un changement.
Une aventure.
« - C'est vrai ? Tu es d'accord ? »
Je vis alors tout son visage s'illuminer comme de temps en temps il s'illumine. J'ai vu ses yeux briller. J'ai vu son sourire s'élargir et enfin, j'ai vu joie. J'ai vu sa joie.
« - Oui. Emménageons ensemble. »
Ne dit-on pas que pour vivre heureux, il faut vivre caché ?
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