III Rafi ... Que l'assaut commence

Sur le toit de l'un des plus haut bâtiments de l'ancienne ville, je me rapproche sans bruit d'Armand qui contemple la ville déserte sous nos pieds où près de 200 vampires attendent ses prochains ordres. Parmi eux, seuls une cinquantaine sont des alphas et à peine 10 sont nommés commandants, soit une vingtaine d'adversaires que l'on pourrait considérer comme respectables ou brillants à mes yeux à peu près, dont le colonel à mes côtés et moi-même.

- Pourquoi les anciens ont choisis de nous envoyer au front avec si peu de forces ? Grogne Armand en se faisant la même réflexion que moi.

Les anciens ... un Conseil composé des 8 membres les plus forts de l'Ordre, chacun à la tête d'une des 8 grandes citadelles des vampires, sont aussi terribles qu'énigmatiques. Ce sont les scientifiques qui ont inventés le Virus et les 8 premiers vampires de l'Histoire, et leurs décisions ne sont pas toujours prévisibles ni compréhensibles. Cette question ne m'est pas destinée, mais je choisis d'y répondre quand même, comblant le silence pesant dans lequel se muraient les 10 commandants des troupes derrière moi depuis que nous étions arrivés ici.

- Parce qu'ils savent que tu va foncer dans le tas comme un gros bourrin et détruire les principales défenses sans attendre ? Dis-je d'un ton ironique en lui tirant la langue lorsque Armand se retourne vers moi.

- Rafi .... 

Je le vois serrer des poings, songeant sans doute si se défouler sur moi en attendant avec impatience les prochains combats est une bonne idée ou non. 

Je sais qu'il ne le fera pas, pas avant un tel instant fatidique, pas avant un assaut, d'une part pour ne pas m'affaiblir si j'ai besoin de combattre à fond, d'autre part pour avoir la conscience tranquille car, en public, étant son second, je devrais faire semblant d'être faible par rapport à lui. Le voilà, notre grand secret : en réalité, nous avons le même niveau de force, mais la politique de pouvoir ne m'intéresse nullement. Je préfère l'ombre où je peux observer les coulisses et les secrets de la citadelle. Je pourrais même faire tomber un ancien ou deux mais vaux mieux pas trop s'attaquer à plus fort que soi, je ne suis pas complètement fou après tout, surtout que toute l'autorité du Conseil serait derrière lui, ce serait bon pour un aller dans les geôles des humains en tant que cobaye ou esclave. Je ne me fais pas d'illusions, les humains ont beau être source de nuisance pour la vie, les vampires, arrogants comme ils sont, ne pensent pas toujours qu'ils agissent aussi horriblement qu'eux en éliminant volontairement toute trace de ceux qui se dresseraient devant eux.

Je sens alors plus que je ne le vois, le frisson de peur agiter les rangs dans mon dos à ce moment-là, je regarde l'origine de leur nervosité et pense : Ah Armand est vraiment effrayant, et énervé, c'est pire. En plus, il ne le fait pas exprès, ce n'est pas comme ça qu'il deviendra aimé par les vampires ... alors qu'il ne pense qu'au bien de l'Ordre ! 

Je l'avais déjà aperçu humain, avant sa transformation, et ce n'était qu'un gamin de 19 ans plutôt petit, dur et renfermé qui faisait un peu penser à un chef de gang dans une école quelconque. Aujourd'hui, dépassant les 1 mètre 90, son corps se taille tout en muscles et ses épaules demeurent carrés en permanence comme s'il portait un lourd passé avec lui. Je lui avais déjà dit qu'il ressemblait à un noble déchu d'ailleurs ... Une brise se lève et des mèches blondes viennent me cacher la vue, je les remets en place et manque de faire une remarque sur la coiffure d'Armand. Ses cheveux noirs sont impeccables lui, je me demande combien de temps il passe devant la glace pour se montrer aussi imposant à chaque instant, en plus ils mettent en valeur le gris ardent de ses yeux. Son visage fin arbore toujours une expression froide et une impression de puissance se dégage continuellement de lui, comme s'il retenait un tigre en cage. 

Je décide de le titiller un peu et effectue une révérence souple, comme une marque d'obéissance absolue, ce dont il a horreur car cela lui rappelle sans cesse les lèches-culs de son père  :

- Oui mon colonel ?

- Quand est-ce que nous sommes supposé attaquer ? Dit-il en regardant au loin les remparts de la cité d'Askalon qui nous tend les bras.

- Dans pas longtemps, cela doit faire une heure environ que les éclaireurs sont partis, nous attendons qu'ils reviennent.

- Mmmm.

Je le laisse dans ses pensées et décide d'aller voir comment va le moral des troupes, histoire de me distraire un peu. Je contourne les 10 vampires alpha qui discutent tactiques et femmes à retrouver en rentrant, si ennuyeux, et me laisse tomber dans le vide vers le sol qui se rapproche à grande vitesse. Je pourrais dire que j'ai encore réussi une réception parfaite mais je ne possède pas un ego surdimensionné, c'est simplement naturel pour moi, après 3 ans d'entrainement, de savoir utiliser à mon avantage tous les profits qu'apporte la transformation.

Je m'avance parmi les décombres de l'ancienne ville d'Askalon et repense à sa renommée nationale avant qu'elle ne meure à cause du virus. Après la Grande Dévastation, ceux qui n'ont pas réussi la transformation sont morts, ceux qui ont réussi ou n'ont pas contracté le virus se sont regroupés en communauté : à l'Est pour les humains, à l'Ouest pour les vampires. Et les grandes constructions humaines qui, autrefois, étouffaient la planète sont petit à petit recouverts par la nature qui reprend ses droits. Je m'approche et aperçoit à 3 mètres une pousse d'Aconitum Napellus qui essaye de survivre entre les herbes sauvages qui l'entoure, autrement dit, un simple laurier rose qui me fait "coucou" du coin de l'œil. Je m'approche en mimant un air horrifié :

- Oh là là ! Ma petite chérie, ça va ? Tu dois souffrir du manque de soleil ! Je vais te sortir de là, tu va voir, mmmm ...

Avoir l'air débile est mon passe-temps favori, après tout, c'est bien plus drôle que faire l'intelligent parmi des gens susceptibles, ou seul aussi. Je sors une petite éprouvette de la besace que je porte toujours sur mes hanches, sous mon manteau officiel, et récupère le germe du laurier à l'intérieur avec un sourire ravi.

- Papa va te ramener à la maison !

Je chante doucement en avançant vers les soldats avec une allure bien gaie, presque dansante, avant qu'un mouvement sur ma droite me fige sur place. Je me redresse en fronçant les sourcils, puis voit l'unité d'éclaireurs revenir en courant vers notre QG occasionnel, je m'en serais désintéressé aussitôt si je n'avais pas remarqué l'inquiétude dans les yeux du meneur.  

Je m'interpose et demande d'un ton sans appel, imitant Armand, ça passe toujours dans ces cas-là, me dis-je en rigolant intérieurement :

- Que se passe-t-il ? 

- Nous avons été repérés ! Les détecteurs sont bien plus développés et les gardes plus vigilants que la dernière fois ! Une Escouade nous poursuit depuis la cité ... s'essouffle un des éclaireurs.

Je suppose le plus inexpérimenté d'après son grade, le rang est donné en fonction de l'expérience et du talent, il faut être un vampire alpha aussi.

- Alors l'alarme va bientôt être sonnée ....

DDDDDDDDDRRRRRRRRIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIINNNNNNNNNNNNNNNNNNGGGGGGGGG  

Quand on parle du loup ... 

Je rigole : 

- Le plan A est fichu, on ne fera pas dans la discrétion et la finesse ce coup-ci.

Puis me tourne vers les éclaireurs, paniqués. Ils doivent penser qu'ils ont fait quelque chose de mal ... Oh pour sûr, ils seront punis, par mes soins sans doute, mais pas tout de suite, on a encore besoin d'eux.

- Allez tout rapporter au colonel, tout de suite !

- Mais ... et l'Escouade ? demande un deuxième éclaireur, un nouveau cette fois, ça se voit à son air perdu.

Je souris d'un air sadique, ah la la, j'aime trop me battre et gagner, ça finira par me retomber dessus.

- Elle ne va pas tarder à arriver par ici, n'est-ce pas ? Je m'occupe d'eux ... Dîtes lui de lancer l'assaut immédiatement et que ça vient du lieutenant colonel Rafi Stinger.

- Roger !

Que la fête commence ... 

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