Chapitre 58: jamais deux sans trois (Elyazra)
Sur le chemin pour Léfarène, Elyazra marchait à un rythme soutenu, à la fois pressée de se rendre dans cette ville et anxieuse quant à ce qu'elle pourrait y trouver. Elle n'était pas entrée à Sendra, mais rien que les remparts lui avaient donné une idée de la taille que pouvait faire une cité. Elle qui n'avait connu que les petits villages et les maisons en plein milieu de forêt avait un peu peur de ce qu'elle pouvait y trouver là-bas. Même si elle aurait préféré se trancher un doigt plutôt que d'admettre qu'elle pouvait ressentir ce genre de sentiment-là, il était pourtant bel est bien présent en elle.
Plus elle avançait dans la forêt qui séparait les deux villes, plus elle se perdait dans ses pensées et imaginait ce qu'elle pourrait y trouver. Beaucoup de gens bien sûr, mais aussi des magasins, des lieux de réunions, des bâtiments démesurément grands et presque vide à l'intérieur.
Elle était si absorbait par ses pensées qu'elle ne vit pas le groupe de personne qui lui barrait la route. Armé jusqu'aux dents, l'un d'eux avait la tête recouverte de bandages.
— C...C'est elle, balbutia l'un d'eux.
— Mais non, sombre abruti ! Regarde-là bien, ça n'est pas une beast.
Elyazra continuait à avancer et, comme si de rien était, passa en plein milieu du groupe sans même se soucier d'eux.
— Ho, toi ! Interpella le chef.
Enfin, elle retrouva ses esprits et se retourna vers cet étrange personnage dont la tête ressemblait à celle d'une momie mal embaumée.
— Quand on te barre la route, la moindre des choses est de s'arrêter !
— Excusez-moi, j'étais ailleurs. Vous voulez quelque chose ?
— Oui. Absolument tout ! Ton argent, ton arme et tous tes objets de valeurs.
— Ha, j'ai compris ! Vous êtes des voleurs, c'est ça ? demanda-t-elle tout sourire.
— On est pas tombé sur une flèche, chuchota l'un d'eux à l'oreille d'un autre.
— Désolé, c'est la première fois que j'en croise. Attendez, je vais voir ce que j'ai pour vous.
Elyazra défit son paquetage et en sortit une bourse. En prenant un temps fou, elle choisit une pièce et leur montra, fière de sa trouvaille.
— C'est ça que vous voulez ?
— On veut tout ! s'énerva le chef, sa patience à bout.
D'une pichenette, la jeune femme envoya voler la pièce directement en face du bandit qui, instinctivement, lâcha son arme pour la saisir au vol. À peine avait-il refermé la main sur ce début de butin que l'expression sur le visage de la chasseresse avait changé et était passé de la gentille femme ignorante à la terrible psychopathe qui allait les faire souffrir.
Le chef put d'autant plus détailler ses traits, vu qu'elle se trouvait à présent juste en face de lui. Surpris, il essaya de reculer, mais reçut tout de même un prodigieux coup de coude en plein visage et s'étala de tout son long.
Lors de sa chute, il avait malencontreusement fait voler la pièce. Elyazra en profita pour la récupérer et fit deux pas en arrière puis scruta un à un ses futurs adversaires. L'un d'eux s'accroupit auprès de leur chef et tata son pouls.
— Il... Il est mort, s'horrifia-t-il.
— À qui le tour ? demanda-t-elle en sortant sa rapière.
Avec un cri de guerre digne d'un adolescent en train de muer, l'un d'eux chargea la chasseresse lame en avant. Il pensait avoir une chance en ne la voyant pas se mettre en garde, mais lorsque sa masse s'abattit sur elle, il n'écrasa qu'une épaisse fumée noire. Elyazra apparut alors derrière lui et abaissa le bras. Le bandit perdit la vie, décapité par une arme dont les blessures les plus graves ne venaient que d'entailles et d'estocs.
— C'est... C'est un monstre ! hurla l'un d'eux en prenant ses jambes à son cou.
— Vous êtes un danger pour ceux qui empruntent cette route. Je ne peux pas vous laisser en vie.
Une nouvelle fois, la chasseresse se téléporta et empala le cœur du fuyard. Les autres, paniqués, partirent dans tous les sens pour sauver leur vie. La plupart n'arrivèrent cependant pas à se sauver et moururent de la main d'Elyazra qui prenait un malin plaisir à se téléporter auprès juste devant eux pour que son visage soit la toute dernière chose qu'ils voient.
Elle allait pour tuer son quatrième bandit lorsqu'une épée para sa lame.
— C'est entre toi et moi, dit le satyre.
— Tu veux gagner du temps pour que tes amis s'enfuient ? Voyons de quoi tu es capable.
Immédiatement, la jeune femme fonça sur lui et donna un coup horizontal. Le bandit, malgré la vitesse de l'attaque, réussit à parer, mais grimaça tout de même en sentant la force qu'elle avait mise dans sa frappe. Avec un habile mouvement de poignet, il dévia la lame et contre-attaqua presque en même temps et la repoussa.
— Pas mal. Voyons ce que tu peux faire contre ça ?
Une nouvelle fois, Elyazra se rapprocha et effectua une série d'estocs en direction des organes vitaux de son adversaire. Le bandit n'était pas un débutant et elle s'en rendit compte lorsqu'elle vit qu'aucune de ses tentatives n'avait fait mouche.
Pendant une dizaine de minutes, les deux duellistes enchaînèrent les passes. La défense du satyre était impénétrable alors que la chasseresse, elle, avait une défense totalement ouverte, non pas pour l'attirer dans un piège, mais pour jouer.
Le satyre était bon. Il était même étonnant qu'il soit un simple bandit. Pourtant, à mesure que le combat avançait, Elyazra avait l'impression que ses frappes étaient plus lentes et que ses parades étaient beaucoup moins précises et assurées.
Alors qu'elle tentait une nouvelle fois de le trancher en deux, le bandit recula et jeta son arme à terre.
— Tu as enfin compris que tu ne pourrais pas gagner ?
— Je l'avais compris avant même que je pare ta première attaque. Tu es bien trop forte pour moi.
— Tu as donc résisté pour laisser à tes amis le temps de s'enfuir. Noble sacrifice venant d'un criminel. Inutile aussi.
— En effet. Il est évident que tu les tueras dès que tu en auras fini avec moi. Mais, avant de m'envoyer dans l'au-delà, pourrais-tu m'écouter ?
— Je me suis bien amusé contre toi, alors vas-y.
— Toutes ces personnes qui font partie de mon groupe ne sont pas mauvais. Ils n'ont juste pas eu de chance dans leur vie. Ils font les malins avec leurs armes, mais la plupart se couperaient un doigt s'ils essayaient réellement de s'en servir.
— Et alors ?
— Ce sont tous des enfants des rues qui mourraient de faim. Lorsque celui que tu as tué en premier les a rassemblés, il leur a promis une vie où ils pourraient manger tous les jours. C'est une offre qui ne se refuse pas. Ils ne sont pas méchants et, à présent que notre chef est mort, je suis sûr qu'ils ne recommenceront pas. Alors voilà ma dernière requête avant de mourir. Laisse-les partir.
— Émouvant, vraiment. Cependant, il y a certains points que je n'aime pas. Premièrement, comment m'assurer qu'ils ne voleront plus ?
— Tu n'as que ma parole.
— Deuxièmement, continua-t-elle. J'aime bien me battre contre toi et ce serait dommage de te tuer maintenant. J'ai donc un autre marché à te proposer. Je ne te tue pas et tu m'accompagnes ou que j'aille. Si tu acceptes, nous irons voir ensemble tes amis et tu leur expliqueras qu'il faut qu'ils arrêtent. Moi, je serais là pour être sûre que le message est bien passé.
— Et qu'est-ce qui me dit que ça n'est pas un piège pour que tu les retrouves et les tues ?
— Absolument rien, mais de toute façon, que tu acceptes ou non, j'arriverai à les retrouver. Dans le premier cas, tout le monde vit, dans le deuxième cas, tout le monde meurt. À toi de voir.
— Très bien, j'accepte de devenir ton esclave, souffla-t-il.
— Esclave, quel vilain mot. Je dirais plutôt ancien criminel qui purge sa peine à mes côtés en devenant mon serviteur.
— Si vous le dites... Notre camp est par là, si vous voulez bien me suivre.
Le satyre, accompagné de la chasseresse, quitta le chemin et s'enfonca profondément dans la forêt, en quête des bandits. La seule chose qu'il espérait à présent était qu'elle n'ait pas menti et qu'elle tienne parole.
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