Chapitre 147 : Confrontation temporelle
Sans pouvoir intervenir, Resh venait d'être témoin d'une scène de son passé à l'époque où la princesse n'était encore qu'une enfant qui ne pouvait pas encore voler convenablement. Revoir ce passage de sa vie où il avait consolé Phindéréllia l'avait laissé de marbre, mais ce qui l'étonnait à présent était la présence de cette personne qui ne devait pas se trouver là.
Son double du passé était tout aussi étonné que lui et regardait Elyazra avec de grands yeux. Vu qu'il savait pertinemment comment il était à cette époque-là, il connaissait les pensées ce Resh-là vis-à-vis de la demi-dragonne. Elle devait être pour lui la plus belle femme qu'il n'ait jamais vue.
— Bon... Bonjour, bafouilla-t-il avant de se rendre compte de sa diction hasardeuse et de reprendre contenance. Je ne crois pas avoir le plaisir de vous connaître.
— Pas pour le moment, mais ça viendra, répondit-elle. Disons que je suis la protectrice de la princesse.
— Ho. J'espère que vous ne venez pas me réprimander pour le petit tour que j'ai fait avec mes flammes...
— Non, rassurez-vous, rit Elyazra. Tout est parti d'un moment d'inattention de ma part, je suis bien plus fautive que vous.
— Personne n'aurait pu réagir à temps et voler à son secours. D'ailleurs, en parlant de voler, vous n'avez pas d'ailes ? Vous n'êtes pas une fée !
— En effet, je ne suis pas une fée, mais la descendante de l'un des dragons qui a bâti cette ville. J'ai longtemps été seule, alors on m'a envoyée ici pour que je me familiarise avec la vie en société.
— Je vois. Dans ce cas, bienvenue ! J'espère que vous vous plairez ici et que vous resterez un moment.
Le Resh du présent avait envie de gifler son image. Comment pouvait-il être aussi aveugle et niai ? Celle qu'il avait en face de lui n'était pas gentille, c'était un monstre !
— En vérité, je suis venu vous voir pour vous demander ce que pensent les personnes de la princesse. J'aimerai avoir votre avis général et personnel sur elle.
— Que ce soit général ou personnel, la réponse est la même. Tout le monde aime cette petite, à part peut-être son père. C'est bien dommage. Elle est très maladroite, mais respire la joie de vivre et l'insuffle à quiconque se trouve auprès d'elle. Elle est aussi douée d'une très grande empathie. Je l'ai déjà vue pleurer parce que quelqu'un s'était fait mal, comme si elle s'était appropriée sa douleur.
— Et vous pensez que quelqu'un voudrait lui faire du mal ?
— Ça non ! Que ce soit la noblesse ou le peuple en général, la princesse est aimée de tous. Je peux même affirmer sans hésiter qu'elle est la personne royale la plus aimée depuis que les fées se sont installées dans ce royaume.
— C'est rassurant. Mais après ce que vous venez de me dire, j'ai quelqu'un à vous faire rencontrer.
À ces mots, Elyazra se tourna vers le Resh du présent. Celui du passé suivi immédiatement son regard et avança vers son lui futur. Même s'il ne savait pas qui il était, les traits de son visage étaient bien trop familiers pour qu'il ne le reconnaisse pas.
— J'ai un frère ? s'étonna-il en essayant de trouver une solution rationnel à son interrogation.
— Pas exactement, répondit la demi-dragonne.
— Quoi qu'il se passe ici, je ne trouve pas ça drôle, grogna l'autre.
— Resh, je vous présente la personne qui compte, plus tard, épouser de force la princesse, la violer et la soumettre. Qu'en pensez-vous ?
— Quoi ? Mais pourquoi ?
L'incompréhension se lisait dans les yeux et sur son visage alors qu'il regardait tour à tour la fée et la demi-dragonne. Il ne voyait tout simplement pas comment une personne pouvait souhaiter faire du mal à un être aussi pure et innocent que la princesse.
— J'ai mes raisons, se contenta-t-il de répondre.
— Je ne vous laisserai pas faire. Personne ne vous laissera faire ! s'emporta la fée du passé.
— Et pourtant, malgré ce que vous dites, vous n'allez rien faire pour l'en empêcher, bien au contraire. Cette personne n'est autre que vous dans le futur.
— Non... C'est impossible ! Jamais je ne lui ferai de mal. Jamais ! Si je changeai à ce point, je mettrai fin à mes jours ! Ma vie pour la princesse !
— Ça n'est pas le discours que vous porterez dans quelques années...
— Assez !
Ne pouvant en entendre plus, le Resh du passé s'envola et disparut dans les ténèbres. Elyazra, elle, disparut en une brume noire et emporta avec elle le palais. Une nouvelle fois, la fée se retrouva seule dans l'obscurité.
Après quelques minutes à baigner dans le noir complet, des faisceaux de lumière transpercèrent ce voile et le firent revenir à la réalité. Il était allongé au sol et son corps refusait de lui répondre. Au-dessus de lui, Elyazra le regardait, satisfaite de ce qu'elle venait de faire.
— Alors ? Qu'est-ce que ça fait de se retrouver devant son soi du passé ?
— Ça ne change rien. Je l'ai dit, j'ai mes raisons et celui que tu m'as montré avec ta pitoyable illusion ne les connaît pas encore.
Le visage jusque-la radieux de la demi-dragonne prit immédiatement une expression boudeuse. Elle quitta son adversaire qui ne pouvait de toute façon pas bouger et se rendit devant les tribunes.
— Shay, j'y arrive pas ! appela-t-elle comme un enfant le ferait devant un exercice trop compliqué à résoudre.
Vu que la menace était à terre, le dragon baissa la barrière et sauta à son tour dans l'arène pour se rapprocher d'Elyazra avec un sourire paternel.
— Un problème ma petite chérie ? demanda-t-il tel le parent qui viendrait en aide à son enfant.
— Oui ! J'ai essayé de faire comme toi et de lui faire comprendre que ce qu'il faisait n'était pas bien, mais ça n'a pas marché.
— Tu lui as montré quoi ?
— Je l'ai confronté à son lui du passé pour lui faire comprendre qu'à l'époque, il n'aurait pas accepté de devenir comme ça.
— C'était bien essayé, mais c'est un peu trop subtil. Je vais te montrer.
Sans en dire plus, Shay s'approcha de Resh et posa sa main sur son front. La fée s'agita immédiatement et cria à pleins poumons. Il parlait beaucoup dans cet état, mais la seule chose qui ressortait d'intelligible était ses plaintes, ses appels pour qu'on l'aide et ses prières pour que tout s'arrête. Après seulement quelques instants, il se tut et s'évanouit.
— Tu lui as montré quoi ?
— Comme pour les alchimistes, j'ai inversé sa position avec celle de Phi. La plupart du temps, le fait de ressentir ce que la victime endure est une très bonne leçon.
— J'aurai pu le faire moi aussi, bouda-t-elle en croisant les bras.
— Si vous avez fini de jouer avec lui, j'ai besoin d'aide de mon côté ! appela Syara.
Jusque-là absorbé par cet adversaire et la protection qu'il devait maintenir, Shay tourna la tête en direction de la beast et remarqua qu'elle peinait à retenir un gigantesque bloc de la paroi. Les lianes qu'elle faisait pousser ne cessaient de se rompre et de brûler au contact du feu. S'il ne faisait rien, le quartier où se trouvait Phi, Rael et Telak serait bientôt rasé.
Le dragon courut alors pour se placer à côté de la violoniste et tendit les bras en direction du bloc pour lui venir en aide avec ses propres pouvoirs. À cet instant, toutes les lianes se rompirent et la paroi s'effondra sur le quartier. Cependant, avant qu'il ne touche le sol, un dôme de lumière doré se forma pour protéger les habitations et les personnes qui étaient coincées à l'intérieur. Le bloc se fracassa dessus et glissa du côté où personne ne se trouvait.
— Bien joué, souffla Syara à Shay. Tu es arrivé juste à temps.
— Détrompe-toi, je n'ai pas eu le temps de lancer le moindre sort. Cette protection n'est pas de moi, répondit-il en fixant le dôme lumineux.
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