Partie 3
"Voilà ce que j'attends de toi..." lui dit-il.
Elle sent à nouveau sa main autour de son oreille gauche, ses doigts courant sur sa cicatrice et envahissant l'arrière de sa tête.
Elle sent surtout la chaleur de son ventre dont le mouvement de respiration lent et régulier éveille encore bien facilement la virilité de l'homme sous elle.
"Tu dois être là quand j'ai envie de toi..." reprend la voix grave contre son oreille.
Mais elle s'immobilise. Le jour n'est même pas levé. Et les bras autour d'elle la réchauffent comme promis. Peut être qu'il va consentir à la laisser un peu tranquille, au moins encore un petit moment, alors qu'elle se sent chavirer dans une somnolence tiède.
"Tu dois surtout éliminer le ver d'Alexandria..."
.
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Daryl écoute, incrédule.
Emma murmure d'une voix qu'il ne lui connaît pas. Si basse, si grave, comme étrangère, possédée.
Et sa dernière affirmation lui fait froid dans le dos, tuant instantanément tout l'effet, pourtant bientôt incontrôlable, qu'elle peut lui faire.
Par gestes lents, il ramène la couette vers eux avant de décaler Emma à côté de lui et de l'envelopper dans la grande couverture. Dans la lueur extérieure, il découvre son visage détendu, les yeux clos, comme assoupi.
Pourtant c'est bien elle qui prononce ces mots. C'est bien elle qui fait des phrases cohérentes même s'il a du mal à les entendre. Alors la gardant tout près de lui, il tente sa chance.
"Qui est le ver d'Alexandria... ?"
Emma fronce les sourcils, les yeux toujours clos. La voix a changé, mais elle est toujours là, dans son oreille, tout contre elle.
"Tu dois t'occuper du ver d'Alexandria, ma douce... pour nous.
Que dois tu faire au ver d'Alexandria... ma douce... répète Daryl.
Il retient un frisson de dégoût de devoir abuser son amie, mais il comprend qu'il n'a pas le choix, pour la survie du groupe.
La même voix...différente. Mais Emma soudain comprend pourquoi. Le grand homme l'interroge. Aucun doute. Pour s'assurer qu'elle n'oublie pas. Il joue un genre de jeu de rôle, ça doit l'amuser. Ce serait bien son genre, tordu qu'il est. Mais c'est quand même lui. Elle n'a qu'à lui montrer qu'elle a bien compris, lui dire ce qu'il veut entendre.
"L'éliminer... répond-elle de bonne volonté.
-Eliminer qui ?
-Le ver...
-Pour qui ?
-Pour toi, mon amour...
-Qui suis-je ?
-Mon amour...
-Qui es-tu ?
-Je suis Negan...
-Qui est le ver d'Alexandria ?
-Rick Grimes...
-Que dois tu faire au ver ?
-L'éliminer d'Alexandria
-Le feras-tu ?
-Oui
-Pourquoi ?
-Pour mon amour
-Quand ?
-Avant que tu ne viennes me chercher
-Quand dois-je venir ?
-Dans quelques jours... j'espère...
-Combien ?
-Je ne sais pas...
-Qui va venir te chercher ?
-Toi
-Qui suis-je ?
-Mon amour...
-Qui es tu ?
-Je suis Negan...
Daryl est mortifié. Les questions lui sont venues naturellement. Il ne s'attendait pourtant pas à ces réponses. Il ne croit définitivement pas à ces conneries de démons surnaturels possédant des gens. Mais il croit à la manipulation mentale. Il pense comprendre, du moins entrevoir, tout ce que Negan a infligé à son amie.
Il resserre son étreinte autour d'elle, serrant les dents de colère et retenant ses mots, en attendant le jour.
Son corps est enfin réchauffé. Elle a dû répondre correctement à toutes ses questions parce qu'il semble disposé à la laisser s'endormir un moment, l'ayant faite glisser sur le matelas, lui permettant de prendre une position plus confortable et naturelle. Il l'a même recouverte, une première. Même s'il la garde toujours dans son étreinte, celle-ci semble différente, moins pesante.
Elle ne peut lutter davantage et sombre dans le sommeil, profitant de ces instants qu'il consent à lui donner.
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"Je te dis que c'est toi qu'il veut ! s'écrie encore Daryl levant les bras au ciel.
Il ne sait plus comment convaincre son ami.
-Elle ne peut rien contre moi Daryl...
-Je sais ce qu'elle a dit !*
-Tu sais surtout ce qu'elle était en train de te faire ! moqueur.
-Elle somnolait à moitié !
-Je ne te savais pas aussi pervers mon vieux...
-Mais putain... ! J'te dis qu'il lui a retourné l'cerveau ! Il l'a programmée pour qu'elle s'en prenne à toi !
-Alors dis moi quand ? que j'me fasse beau... ?
-Elle en sait rien... penaud
-Dis moi alors comment ? Que j'équilibre ma force ?
-J'en sais rien... j'ai pas pensé à lui d'mander !
-Alors on va la laisser venir ta minette, d'accord ? lui souriant gentiment en lui donnant une tape sur l'épaule avant de s'éloigner.
Il l'entend faire quelques pas dans son dos, soupirant de découragement. Il a attendu des heures entières avant que le jour se lève et qu'il puisse voir le flic. Et le moment venu, celui-ci ne l'a pas pris une seconde au sérieux.
"Emma..."
Daryl se retourne vers la rue, toujours planté sur le seuil de la porte 101, où l'a reçu Rick, qu'il entend saluer la jeune femme qui s'éloigne rapidement vers le nord.
Intrigué de sa direction, Daryl lui emboîte le pas, à distance. Il la voit entrer dans le jardin d'une de ces maisons inhabitées. Il réalise qu'il n'est sans doute même jamais venu jusqu'à cette limite de la ville. Emma fait le tour de la bâtisse et disparaît au coin du mur. Daryl entre à son tour. Mais arrivé à l'extrémité de la maison, sans surprise, il se retrouve une nouvelle fois en joue du 357. Ces histoires de jardin sont devenues visiblement un jeu entre eux, qui va sans doute finir par être mortel.
"Tu veux encore tenter ta chance ? demande-t-il bien plus provocateur et en colère qu'il n'aurait pourtant pensé.
Elle baisse son arme, le regard noir, se dirigeant vers son aire de jeu improvisée.
"C'est toi qui as fait tout ça ?" découvre Daryl
La jeune femme ne lui répond pas et s'applique à tirer, touchant la première canette qu'elle vise.
"Je sais qu'tu peux parler Emma... lâche-t-il en se plantant à côté d'elle, regardant les cibles, ne se laissant pas impressionner.
Elle lève les yeux vers lui, les sourcils froncés d'incompréhension, tandis qu'il la regarde.
"Alors dégage !" articule-t-elle sans qu'un son ne sorte, montrant sa bouche d'un doigt, avec un sourire sarcastique.
-Tu peux toujours t'brosser chérie..." regardant à nouveau devant lui, croisant les bras.
Poussant un soupir sonore, elle remet le semi automatique à hauteur de la tête de l'homme qui tourne encore le regard vers elle.
"T'as vraiment que ça comme argument, Terreur ? demande-t-il presqu'amusé.
Dans une respiration, il parvient à dévier ses deux bras tendus devant lui, qu'il désarme, la faisant tourner sur elle-même pour lui tenir les poignets relevés très haut dans son dos, la tenant étroitement contre lui.
Il se penche à son oreille, tandis qu'il la sent se cambrer sous la douleur de ses bras tenus de sa poigne de fer.
"Vas-y ! Engueule moi ! Traite moi ! Je t'écoute... fais toi plaisir... murmure-t-il à son oreille. T'es p't être une vraie caïd avec un rôdeur... Mais Rick ne te fera pas de cadeau... et moi non plus."
Fronçant encore les sourcils d'incompréhension, elle se dégage tandis qu'il la laisse se retourner pour lui faire face.
"Quoi ?!" articule-t-elle.
-Tu sais parfaitement de quoi j'cause, te fais pas plus conne que t'es...
Emma lui envoie une claque retentissante sur le bras avant de secouer la tête, signifiant encore son incompréhension.
"Dis moi ce qui s'est passé avec l'aut' connard..." somme le chasseur, à bout d'argument lui aussi.
Il voit le regard d'Emma s'emplir de surprise, de terreur aussi, mais surtout de lumière.
"Pas toi" articule-t-elle en secouant la tête.
-Je sais que Rick te tane avec tout un tas de questions... tendant les bras vers elle, se voulant conciliant.
-Je peux pas... avant de baisser la tête.
-Je t'pose pas de question. Dis moi juste... les choses... sentant à nouveau la gêne lui serrer la gorge.
Mais Emma recule en secouant la tête, et s'enfuit en courant.
En formulant tout haut cette demande, Daryl se demande s'il est vraiment capable d'entendre ses réponses. Alors en la voyant détaler, il prend le temps de pousser un soupir avant de s'élancer à sa suite.
Une fois dans la rue, il réalise qu'elle a pris plus d'avance qu'il n'aurait cru. De toute manière, il sait d'avance où elle court se réfugier.
Arrivé devant la maison 101, il ralentit sa course pour entrer dans la maison de son amie. Mais son regard est attiré par un mouvement bien au delà, après le virage à angle droit de la rue. Il distingue Emma qui court toujours la-bas.
"Qu'est ce que tu fous, putain ?!" maugrée-t-il en se remettant à courir.
Il accélère encore quand il la voit en train d'ouvrir le portail de la ville. Il rage surtout que personne ne soit là pour l'en empêcher.
"Emma !" l'appelle-t-il en courant.
Mais la jeune femme ne tient pas compte de son appel.
Il a encore quelques mètres à parcourir alors qu'elle referme le grillage sur elle, lui offrant son joli sourire et son petit majeur levé à son attention, avant de s'évader encore à travers les arbres.
"Reviens bordel ! Où tu vas comme ça ?!" crie encore le chasseur en ouvrant à nouveau le portail. Y a personne pour monter la garde ici ?! gronde-t-il tandis que Gabriel accourt pour le seconder.
En voyant l'homme de foi arriver vers lui, il évalue son équipement et, passablement agacé, il ouvre à nouveau le grand panneau.
"File moi ton arme, tendant la main vers l'homme noir. " attrapant le beretta qu'il passe à sa ceinture.
Il délaisse le portail pour s'élancer vers le bois bordant la muraille.
"Et fais toi remplacer quand tu vas pisser bordel de merde !!!"
Le chasseur reprend sa course à travers bois, apercevant rapidement la jeune femme courant toujours, zigzaguant entre les troncs pales.
Qu'est ce qui lui prend de sortir de la ville ?! Qu'est ce qu'elle veut prouver en faisant ça ? Est ce qu'il l'a vraiment vexée en remettant en cause sa capacité à se défendre seule contre des rôdeurs ? Il ne voulait que la faire réagir... mais pas comme ça.
Est-ce qu'elle veut vraiment partir, en fait ? Le psycho lui a peut être lavé les méninges bien plus profondément qu'il ne pense. Même si Rick ne semble pas du tout convaincu par sa théorie. Sauf qu'il ne l'a pas entendue parler, cette nuit. La voix n'était pas celle d'Emma. Pas vraiment du moins. C'était flippant, sans mentir.
Et si elle courait le retrouver, lui ?!
Peut être que sa petite ingérence nocturne a déclenché quelque chose chez Emma qui l'oblige à changer ses plans meurtriers contre le flic. Au risque de mettre sa propre vie en jeu si elle n'a pas exécuté le souhait du détraqué à la batte.
Tout à ses pensées, Daryl réalise qu'il ne distingue plus le mouvement de la veste en jean bleue entre les troncs d'arbres gris. Alors il ralentit, l'inquiétude pour Emma surpassant l'agacement contre lui-même, même la fureur contre le psychopathe.
"Emma, c'est bon, j'ai plus envie d'jouer...sors de là..." s'obligeant à hausser le ton pour qu'elle puisse l'entendre, continuant à avancer rapidement, à l'aveuglette.
Par réflexe, il pose sa main sur son torse, ne trouvant pas la sangle de son arbalète sous ses doigts. Il pose son autre main sur l'étui de son long couteau à sa taille et dégaine le 92FS que Gabriel lui a cédé.
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Emma est essoufflée et ses yeux trouvent ce gros tronc couché au sol, parfait.
Elle l'enjambe avant de s'asseoir, trouvant juste à côté une grande malle métallique. Du genre de celles de l'armée. Amusée, elle ouvre le couvercle.
"Mon ange..." articule-t-elle avec un sourire.
Parmi les barres chocolatées, elle sort une des bandes dessinées et la feuillette en se concentrant sur sa respiration.
"... envie d'jouer... sors de là" la voix de Daryl résonne plus proche.
-Viens m'chercher mon p'tit bonhom... pense-t-elle en levant la tête.
Elle n'a entendu aucun craquement, aucun grognement. Le cadavre est pourtant bien en face d'elle à quelques mètres. Il ne semblait pas l'avoir vue non plus, mais ils se détectent mutuellement avec son mouvement de tête.
Elle repose le magazine dans la caisse et prend encore le temps de refermer le couvercle, ne voulant pas risquer de détériorer le trésor de Carl.
Le rôdeur a fait quelques pas hésitants vers elle tandis qu'elle se lève, braquant le long canon sur la tête dodelinante. Bon exercice. Le coup part et son écho se répète à travers les troncs. Quelle merde ce silencieux !
"Emma !" entend elle encore derrière elle
"Shit... !" continuant à avancer sur le nouveau corps ambulant qui se présente encore juste devant elle.
D'où sortent-ils tous, là ?!
Ils ont sans doute été attirés par les braillements de Daryl. Et son coup de feu ne va pas les encourager à continuer leur chemin.Tant mieux. Elle est sortie pour se secouer un peu, pour mettre en pratique ses heures de tirs. Pour fuir Daryl surtout. Mais il est encore collé à ses basques visiblement.
Pas grave, elle va lui démontrer qu'elle n'a pas besoin de lui, qu'il faut qu'il s'éloigne d'elle. Il ne semble pas comprendre qu'elle n'est plus la même, qu'elle a viré poison. Mais il ne comprend rien à rien. Il est même revenu dormir dans sa maison ! Il n'a pas été jusqu'à occuper son lit. Mais elle sait qu'il est dans les murs, à portée de voix. Elle aurait du le sortir dès la première nuit, mais elle était tellement loin, tellement épuisée. Il faudra qu'elle parvienne à être ferme. Le plus tôt possible. Pour son bien. Pour lui.
D'abord, le rôdeur qui s'approche encore.
Emma prend le temps de regarder rapidement autour d'elle, réalisant qu'elle était seule dans la zone une minute auparavant et que là, ils surgissent de partout. Elle remet son 357 dans son holster. Elle sera plus efficace avec sa lame et il y aura peut être moins de piques assiettes à sa petite sauterie improvisée.
Son bras se plante dans la tempe du rodeur en face d'elle quand elle sent un poids se poser sur son dos, puis une tête qui s'approche de son oreille gauche, vite suivie par une intolérable pestilence.
De dégoût, Emma attrape la tête de sa main gauche, pivotant rapidement sur elle-même pour essayer de le déséquilibrer, sans succès. Tenant la tête morte contre la sienne, la maintenant une seconde immobile, le temps que sa lame vienne se planter dans l'oeil du cadavre grâce à sa main droite, tandis qu'elle sent les dents glacées sur poser tout sur son cou.
En même temps, ses yeux découvrent une autre rôdeuse face à elle, tout prêt, qui suivait celui qu'elle a déjà sur le dos.
"Hey ! Laidron !" entend-elle.
Elle voit la femme morte tourner encore la tête, attirée par la voix rauque derrière elle.
Emma se fige, regardant la tête aux cheveux longs et gris tourner encore sur elle-même, lui faisant à nouveau face, le visage en charpie.
Elle sent une pluie tiède et lourde sur son visage, alors qu'elle cligne des yeux dans un réflexe.
Une inspiration, et la panique prend à nouveau le contrôle. Elle fait un pas en arrière pour s'enfuir encore, mais elle s'empêtre avec les jambes du mort qu'elle maintient toujours contre elle, dans son dos, et tombe à la renverse, s'étalant sur le corps putride dans des craquements d'os et de tissus humides, décomposés et puants.
La cime des arbres emplit son champ de vision, son bras gauche toujours replié, les doigts immobilisés, emmêlés dans les cheveux de la tête du rôdeur à côté d'elle.
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