Vengeance
Un flocon tomba sur la croupe du cheval. Le sol était couvert d'un fin tapis blanc brillant sous la pâle lueur bleuâtre de la lune. L'air était froid, glacial. Le souffle chaud de l'animal sortant de ses narines enveloppait sa tête d'une légère brume. Craquant doucement, les branches dénudées se balançaient au gré du vent qui faisait voler la neige autour de leurs arbres et dans le ciel couleur mauve.
Neymar craqua ses doigts gelés qu'il gardait protégés dans de souple gants en cuir et regarda l'homme qui se tenait devant lui avec amusement et lassitude.
C'était un grand gaillard à la barbe qu'il portait broussailleuse et aux cheveux noirs avec de petits yeux cruels et farouches de chacal. Il était vêtu d'habits trop larges pour lui malgré sa taille imposante et ses bottes étaient sales et usées ce qui le faisait lorgner avec envie les riches vêtements du jeune noble assis sur un resplendissant cheval noir devant lui. C'était un voleur de ceux qui n'ayant rien réussi dans la vie sombrèrent dans la délinquance pour continuer de mener leur existence sans dessein.
«Votre argent, je le répète», siffla-t-il d'une voix vulgaire et éraillée en levant un vieux pistolet sur le jeune homme.
Neymar sauta de son cheval et s'approcha lentement du brigand jusqu'à ce que sa poitrine touche le canon de l'arme pointée sur lui. Il posa sur le voleur un regard amusé et moqueur, ses yeux émeraude scintillant d'un éclat surnaturel.
«Je vais vous tuer»! s'écria le bandit avec un léger tremblement dans la voix qu'il essaya néanmoins de contrôler.
Le vampire le dévisagea avec étonnement avant d'éclater de rire en découvrant ses longs crocs aiguisés. Le brigand poussa un cri d'horreur et appuya sur la détente en reculant mais Neymar esquiva le coup avec une vitesse surhumaine et l'attrapa par les épaules.
La pleine lune n'était pas encore arrivée et devait avoir lieu que dans plusieurs semaines mais la soif le saisit instantanément par la gorge et brouilla ses pensées. Il sentit l'odeur du sang chaud circuler dans les veines du scélérat, ce sang au goût salé et oh! combien délicieux! Sans donner le temps au bandit de se débattre, il planta ses crocs dans son cou et ferma ses yeux d'extase lorsque le précieux liquide coula dans son corps.
Le malheureux voleur essaya encore de se dégager de ses bras mais le vampire resserra sa puissante étreinte en l'étouffant ; après quelques instants, il tomba mort sur la neige, aussi blanc et froid qu'elle.
Neymar observa le corps s'affaisser lentement de ses bras avant de soupirer de délice. Il sortit un mouchoir finement brodé de sa poche et essuya le mince filet de sang qui s'écoulait de ses lèvres avant de remonter sur son cheval, réchauffé et les forces intensifiées.
Il s'était entièrement remis de ses atroces brûlures, sa peau était de nouveau lisse et d'un teint mat et à part pour sa marque sur son épaule droit qui continuait toujours de l'élancer, rien ne pouvait faire croire qu'il avait été brutalement torturé. Rien à part que cela s'était arrivé et que le désir de vengeance, aussi fort et éprouvant que sa soif de sang, ne le quittait plus depuis. Ce fut une libération pour lui lorsque Soledad lui exposa non seulement son accord mais sa propre envie de talion. Lionel était son frère après tout et il n'avait aucune idée comment aborder ce sujet délicat.
Neymar vérifia son pistolet accroché à sa ceinture, il était chargé, et accéléra le pas de sa monture. Son plan était bien simple : s'infiltrer dans la maison de Lionel et le tuer d'une balle entre les yeux.
À minuit pile, il arriva devant la demeure des Messi. Il attacha son cheval à plusieurs centaines de mètres de la somptueuse maison et se dissout dans le noir comme il avait l'habitude de le faire. Armé d'un pistolet et d'un poignard qui au contact de son corps devinrent eux aussi invisibles, il se dirigea vers le côté de la demeure où se trouvait la chambre de Lionel. Avec légèreté, il grimpa le mur en s'accrochant aux fines fentes et entra par la fenêtre restée entrouverte.
Lionel était assis à son bureau encore vêtu d'un pourpoint et d'une cravate et semblait être occupé à trier différents papiers.
Sa colère fut terrible lorsqu'il apprit que son prisonnier eut réussi à s'évader et dans un excès de fureur, commanda l'execution des gardes qui étaient chargés de sa surveillance durant cette nuit. Une semaine plus tard, il avait à peine retrouver son calme et la seule personne qui ne craignait pas à l'approcher était son fidèle ami et complice Àngel. Malgré tous ses problèmes familiaux, Lionel devait continuer de s'occuper du domaine qui lui appartenait et des diverses affaires d'argent.
Irrité, il feuilletait rapidement la longue liste de documents qui attendaient son agrément ou son refus au moment où Neymar posa pied dans sa chambre.
Dès qu'il le vit, son tortionnaire, son assassin, l'être qui avait souillé son nom à jamais, la haine s'éprit violemment du jeune vampire et il s'avança vers lui en sortant son pistolet de sa ceinture. Plus qu'à quelques pas de lui, il s'arrêta et sortit de l'obscurité en braquant son arme contre la tête de l'Argentin.
«Te voilà finalement à ma merci, prononça-t-il d'une voix qui trahit sa fébrilité, finalement prêt à recevoir ce qui t'était dû il y a quatre mois jour pour jour».
Lionel posa ses papiers sur la table et se leva lentement de sa chaise sentant le contact froid du pistolet contre sa nuque.
«Neymar, murmura-t-il entre ses dents.
- Oui, Neymar dont tu pensais t'être débarrassé avant d'avoir su qu'il avait revécu, Neymar que tu avais injustement accusé d'avoir enlevé Soledad alors qu'il avait sauvé son honneur et sa dignité, Neymar que tu avais chargé avec un effectif d'hommes vingt fois supérieur au sien mais qui avait tout de même réussi à abattre la moitié, Neymar que tu avais rabaissé par pur plaisir mais dont les affronts n'avaient quand même pas pu faire plier et Neymar, enfin, que tu avais essayé de briser, de faire livrer la personne qui lui est si chère mais qui avait supporté la douleur et l'humiliation, qui s'était relevé pour avoir finalement sa vengeance aujourd'hui.
- C'est impossible que Fernandez avait pu vouloir du mal à Soledad. Tu mens.
- Je ne te demande pas de me croire, cela ne changera rien même si tu le ferais, je te dis juste les faits».
Lionel garda ses yeux rivés sur ses mains pendant que le vampire parla. Il allait mourir, il le comprit aussitôt. Sans armes pour se défendre qui lui auraient été tut de même inutiles, sans possibilité de s'enfuir ou d'appeler à l'aide, il était rien face à ce vampire immortel. De la manière la plus lente qu'il pouvait, il se retourna et fixa son éternel ennemi.
Un éclair passa dans ses yeux. Sous son pourpoint, il portait une chemise blanche comme pour le duel il y a quatre mois. Avec déception, il constata que les lésions recouvrant son visage s'étaient cicatrisées et que ses yeux avaient retrouvé leur éclat.
«Tu vas donc me tuer, parla Lionel en défiant du regard le pistolet qui était à présent dirigé sur son front, alors que je suis désarmé. Ne penses-tu pas que cela nous met sur un pied d'égalité?
- Non, car pour que ce soit juste, je devrai te faire prosterner à mes pieds bras et jambes ligotés mais même là, je serai encore trop clément, répondit Neymar en secouant la tête. Je t'offre une mort respectable et digne de ton nom alors que tu ne la mérite pas. Accepte-la car c'est la seule que je t'offre ou meurs maudit.
- Tu es un mauvais perdant, Neymar. J'avais gagné ce duel qui respectait le code de noblesse. Ce n'est pas de ma faute si Soledad est arrivée au moment où tu devais tirer. Tu as raté ton coup alors que je t'ai atteint à la poitrine. Tout s'est déroulé conformément aux règles mais tu refuses d'admettre le fait que pour une fois tu n'as pas été vainqueur.
- C'est vrai, sourit le vampire, je n'abandonne jamais mais chacun à ses défauts».
Un regard mauvais passa dans les yeux de Lionel.
«J'espère que tu sais déjà ce que tu diras à Soledad quand tu reviendras tout content et satisfait de ma mort.
- Oh, pour cela tu n'as pas à t'inquiéter, même moi j'en ai pas dû m'en faire! C'est elle qui m'a prié de vengeance».
Lionel se mordit les lèvres et lança un dernier regard autour de lui. Sa chambre était sombre avec la faible lueur de la bougie posée sur son bureau comme seule lumière. Il était perdu. Avec dédain, il rejeta sa tête en arrière, croisa ses bras sur sa poitrine et lança un regard rempli d'aversion sur le jeune vampire.
Neymar comprit son geste et mit son doigt sur la détente. Cette fois-ci il n'allait pas rater son tir.
«J'espère que ton épaule te rappellera de moi, vampire», cracha l'Argentin.
Une détonation retentit et Lionel s'écroula sur le sol. N'attendant pas que les serviteurs accourent alertés par le bruit, Neymar sortit son poignard et se pencha au-dessus du corps inanimé de l'Argentin.
«Pour que toi aussi, tu te souviennes de moi en Enfer», murmura-t-il en gravant deux s entrelacés sur son front avant de s'échapper par la fenêtre.
Neymar atterrit silencieusement sur l'herbe et se dissout instantanément dans le noir. D'un pas rapide, il s'éloigna de la maison de laquelle commençaient déjà à provenir des cris horrifiés et sauta sur son cheval.
Lionel tué, il ne restait plus qu'Àngel. Par chance, il ne vivait pas très loin de son acolyte ce qui laissait amplement de temps au vampire avant le levé di soleil.
Une sensation d'accomplissement enveloppa Neymar qui lui rappela fortement le sentiment qu'il ressentait après s'être rassasié. Le fait d'avoir laissé ses initiales ne le préoccupait aucunement même s'il savait que cela pouvait faire naître des doutes sur sa supposée non existence. Quelle importance s'il allait quitter la région.
«Si j'étais vous, je rebrousserais chemin», retentit soudain une voix.
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