PARTIE 1 : Neymar le mortel : Le bal
«Encore un bal, toujours des bals», maugréa Neymar en sautant de son cheval.
Le jeune homme était le seul et unique fils de la famille da Silva Santos, ancienne lignée de nobles datant encore de la Renaissance, et était donc contraint à assister à tous les bals, réceptions, cérémonies et autres formalités totalement futiles qu'organisaient ses parents, les ''amis proches'' et surtout la famille rivale Messi. Ce bal où sa présence était tellement réclamée était prévu à vingt heures dans la somptueuse demeure des Messi et le jeune Brésilien n'avait aucune envie de s'y montrer.
«Allez Neymar, on prévoit de belle demoiselles là-bas».
Celui qui venait de parler était Thiago, fidèle ami de Neymar. Il appartenait à la suite des da Silva Santos étant lui-même Brésilien. Comme il le mentionna, sa principale occupation était la chasse aux belles demoiselles mais pour toute réponse, son compagnon lui accorda un bâillement.
«Je peux t'assurer que je les ai vues tes belles demoiselles Thiago, de jolies pies qui ne font que piailler les jours durant. Pas vrai Marcelo?
- Hum».
L'interpelé était le plus âgé du trio et avait donc une plus grande expérience dans la vie que ses deux autres amis. Ayant failli terminer son existence dans une abbaye, il avait une toute autre approche aux plaisirs mondains.
«Vingt ans et déjà ennuyé? demanda-t-il. Jamais je n'aurais pensé entendre ''encore un bal, toujours des bals'' de ta part, toi célèbre charmeur de dames.
- C'est que moi contrairement à vous, souffla Neymar, je dois aussi écouter les interminables conversations que mène mon très cher père avec les autres invités.
- Et de quoi ces conversations s'agissent-elles? s'intéressa Thiago quoique il connaissait déjà la réponse.
- De marque de cigarettes, d'infertilité des épouses, d'arboriculture et de hausse ou baisse des prix».
Ses deux compagnons pouffèrent de rire.
«Combien coûte alors une paire de chaussettes en laine couleur bleu aujourd'hui?
- Explique-moi comment dois-je faire pousser mon cèdre!
- Écoute, écoute Mme Hernandez a eu combien d'enfants à ce jour?
- Et les cigares, vous les oubliez! Où sont mes cigares!
- Ce n'est pas drôle», râla Neymar en essayant en vain de faire taire le ricanement de ses amis.
Le trio entra dans le vestibule où les conviés étaient accueillis par Jose Messi et son fils aîné Lionel. Fidèle à son habitude, l'héritier portait un complet bourgogne orné de boutons dorés, une cravate et des chaussures vernis noires et une chemise couleur crème. Poussant un dernier soupir d'agacement, Neymar prit un air amical et s'avança vers ses hôtes la main droite tendue.
«Bonsoir, Neymar! Quel plaisir de vous voir! Comment se porte votre chère mère»? sourit Jose Messi lui serrant la main.
Jose était un brave vieil homme respecté de tous. Au cours de sa jeunesse il avait servi dans l'armée en tant que lieutenant chef, avait gagné des batailles avec un effectif d'hommes deux fois inférieur à celui de l'ennemi et avait réussi à réconcilier sa famille avec les da Silva Santos. Depuis lors, les relations entre les deux familles étaient excellentes, à part pour quelques querelles qui avaient lieu de temps à autre entre les alliés de Lionel et ceux de Neymar, et des fêtes communes étaient souvent organisées.
- À merveille je vous remercie, elle viendra un peu plus tard, répondit le jeune homme.
- Ah oui? Comme c'est bien! Voilà un bout de temps que je ne l'ai pas vue. Et votre père? Je ne le vois pas avec vous.
- Il arrive, je suis juste sorti un peu plus tôt.
- Ou est-ce plutôt ton père qui t'a envoyé en avance sachant que tu traîneras en route»? chuchota Thiago à voix basse mais assez fort pour que son ami puisse l'entendre.
Cependant le jeune Brésilien l'ignora et alla saluer Lionel avec un doucereux sourire aux coins des lèvres. Comme tous bons dauphins issus de deux royaumes différents, les deux jeunes gens s'haïssaient pleinement. Néanmoins cette fois-ci, ils n'échangèrent que des ''bonjours'' très polis avant de se séparer.
«Tu aurais pu parler plus fort Thiago, on ne t'entendait pas très bien», railla Neymar en donnant un léger coup d'épaule à son ami.
Le trio monta les escaliers qui menaient à la salle de bal. Sur les marches bavardaient deux jolies jeunes filles brunes habillées dans de longues robes de soirée scintillantes aux jupes bouffantes. L'une d'elle leva la tête afin de voir les nouveaux venus et empoigna son amie par la main.
«Regarde il est là»!
L'exclamation ne resta pas sans réponse, Neymar se retourna et adressa son plus beau sourire aux deux demoiselles qui rougissant, cachèrent leur visage derrière leur éventail de plume.
«Incorrigible, secoua la tête Marcelo.
- Bein quoi? J'ai juste souri.
- Et après on va les retrouver à ton bras n'est-ce pas?
- Cela doit être bien d'être héritier avec toutes ces jeunes filles qui défaillissent qu'à ta vue, rêva Thiago, je voudrais échanger de corps avec toi un jour. Beau, élégant avec un titre!
- Si ce n'est que le titre, je te l'offre avec plaisir avec toutes les responsabilités et les devoirs qui viennent avec, rit Neymar.
- Ah non! Je voudrais aussi ton physique! Grand, élancé, aux yeux verts beaucoup mieux que ma physionomie totalement banale»!
Une brillante lumière éblouit les jeunes gens alors qu'ils entrèrent dans la salle de bal éclairée par une dizaine de lustres en cristal où plusieurs invités se rassemblaient déjà autour de la table d'apéritifs. Malgré sa mauvaise humeur de tout à l'heure, Neymar jeta un regard enjoué autour de lui. Comme d'habitude, il entendit des gloussements causés par son arrivée et regarda du côté d'où ils provenaient.
«Neymar»?
Le jeune homme avait soudainement arrêté de parler et fixait intensément l'endroit vers lequel il s'était tourné.
«Oh, elle»...
Elle était assise entre deux autres filles, souriante, les yeux rieurs, de belles petites mains, de fines jambes, de magnifiques cheveux noirs. Elle le regardait aussi à travers ses longs cils soyeux. Elle ne rougissait pas contrairement à ses amies, ne gloussait pas.
«Joli spécimen, pas vrai, fit un clin d'œil Thiago, c'est Soledad Nieves Messi Cuccitini, jeune sœur de Lionel. Je pense que c'est sa première sortie aujourd'hui, c'est la première fois que je la vois à un bal.
- Elle est ravissante, commenta Marcelo, je ne peux rien dire mais je vois que notre Neymar n'arrive plus à s'en détacher les yeux. Hein Neymar?
- Hum, quoi? bredouilla le Brésilien se retournant lentement vers ses amis.
- Allo Neymar! Ici la Terre»!
Marcelo et Thiago éclatèrent de rire en se tapant les mains mais le jeune homme ne leur prêta aucune attention et sourit rêveusement.
«Bon calmons nous, réussit à prononcer Marcelo en s'essuyant les larmes, il va falloir que tu l'oublies.
- Pourquoi? s'étonna le jeune homme quelque peu irrité par cela.
- Peut-être parce qu'elle est la sœur de Lionel qui prendrait une joie folle à te clouer à un mur si tu venais à toucher à sa Soledad?
- Moi, me clouer? Qu'il essaye donc mais je ne garantis pas qu'il ne repartirait pas sans une balle dans le front.
- Laisse le, s'interposa Thiago, ce n'est pas comme si un Lionel tué est une mauvaise chose».
Après cela la conversation changea rapidement et d'autres convives se joignirent au trio. Thiago pour remplir l'atmosphère commença à conter sa dernière conquête auprès des femmes. Pendant ce temps, la jeune Soledad continuait de jeter des regards furtifs du côté du beau Brésilien qui avait attiré son attention et celle de ses amies.
Pour la charmante Argentine, ce bal représentait sa première grande apparition publique, elle avait déjà assisté à quelques petites réunions familiales mais celles-ci dépassaient rarement les trente personnes. Ce bal était donc pour elle sa première sortie dans le monde mondain. Vu l'importance de l'évènement, sa mère passa toute la matinée à lui faire réciter ce qu'elle devrait prononcer quand tous les invités seraient réunis et les quelques formules de politesse qui pourraient lui servir lors du bal. Elle retravailla chaque danse avec elle quoique sa fille était une danseuse née et valsait avec la légèreté et la grâce d'un cygne glissant sur l'eau. Elle la mit en garde contre les coureurs de jupons qui essayeraient de la séduire.
«Je ne dis pas qu'il faut que tu ignores les jeunes hommes qui seront présents, au contraire à ton âge c'était tout ce que je faisais, mais ne te bourres pas la tête avec cela», lui répétait-elle tout au long de la journée.
Ses amies, tout au contraire, lui menaient un tout autre discours.
«Prends toujours celui qui est le mieux entouré, cela veut dire qu'il a de l'influence et de la popularité.
- Pas plus de vingt-cinq ans, plus ils sont jeunes mieux c'est mais qu'ils soient toujours plus âgé que toi.
- Si tu le vois faire la cour aux autres filles demandes toi s'il en vaut la peine et si ta réponse et oui, prouve lui qu'il n'y a que toi qui mérites son attention.
- Ne t'effraies pas si tu apprends qu'il est un habile tireur ou épéiste et qu'il a de l'expérience dans ce domaine, ceux-là sont toujours ceux qui accomplissent le plus de prouesses au nom d'une femme».
Soledad flottait dans cette mare de conseils les uns opposés aux autres depuis plus d'une semaine déjà. Le choix de la robe qu'elle allait porter s'étala sur plusieurs jours avant de finalement s'arrêter sur une. L'habit choisi était une longue robe bleue, couleur qui lui allait le mieux, avec un dégradé partant du bas de la jupe flottante. La fine taille de la jeune fille était resserrée par une ceinture en dentelle et le cou dégagé par un léger décolleté. Le haut était décoré par un fleurage cousu dans des fils argentés, ses oreilles ornées par des diamants et ses cheveux noirs relevés par des fleurs jaune pâle mettant en valeur leur noirceur. Ses chaussures étaient couleur or avec un petit talon lui permettant de danser librement. Ainsi était la jeune fille au début de ce bal.
Assise entre ses deux amies, Silivia et Dolores, elle observait les nouveaux venus et écoutait les commentaires que faisaient ses amies. Quand c'était une femme qui entrait, les remarques allaient à propos de sa robe ou de sa coiffure, pour un homme c'était son attrait. Étant de caractère très accueillante et bienveillante, elle ne critiquait jamais en mal et même les personnes les plus asociales ou désagréables se plaisaient d'être à ses côtés.
«Préfères-tu quelle robe, Soledad? Celle d'Isabella ou plutôt celle que porte Maria?
- Hum, laisse-moi regarder... Je dirai que le rouge de Maria fait bien ressortir sa peau mate...
- Le voilà! s'écria soudainement Silvia en fixant la porte d'entrée d'où venait d'entrer trois nouveaux invités.
- Oh, c'est vrai mais je ne pensais pas le voir de sitôt, s'étonna Dolores.
- Qui»? s'intéressa l'Argentine en se retournant vivement du côté de l'entrée.
Ses yeux rencontrèrent le regard d'un jeune homme qui lui aussi s'était tourné dans leur direction. Brusquement son cœur battit plus vite.
«Oh mon Dieu, comment peux-tu ne pas savoir! souffla Dolores dans l'oreille de son amie. C'est Neymar, fils des da Silva Santos, meilleur cavalier et tireur de la région et surtout le plus grand séducteur que tu puisses t'imaginer! N'importe quelle fille t'avouerait avoir un penchant pour lui. Personnellement je le trouve tellement attrayant!
- Oui, mais il est le mien», rétorqua Silvia en poussant légèrement son amie.
Soledad ne quittait pas son regard du Brésilien qui la dévisagea avec attention. Une étrange sensation de bonheur remplit son cœur et quand il se retourna, interpelé par un autre jeune homme avec lequel il était venu, une vive déception s'éprit d'elle.
«C'est vrai qu'il est beau, soupira la charmante Argentine.
- Eh, mais je vois que même notre Soledade n'a pu résister à son charme! s'exclama Silvia. Avoues que tu voudrais bien danser avec lui!
- Moi? Oh non, je...», bredouilla la jeune fille en détournant rapidement son regard de l'endroit où se tenait encore il y a quelques instants la raison de sa soudaine fébrilité.
Heureusement pour elle, au même moment, son père entra accompagné de Maximiliano da Silva Santos et tout le monde se tourna de leur côté. La majorité des invités était à présent réunie et Jose Messi, jetant un regard autour de lui, prit la parole :
«Ma fille, Soledad, fait son entrée dans notre monde aujourd'hui».
Soledad se leva et fit une révérence remerciant avec un sourire les convives venus la féliciter. Du coin de l'œil, elle aperçut Neymar s'avançait vers elle et de nouveau l'étrange sensation de bonheur l'envahit. Arrivé devant elle, il s'inclina et prit sa main.
«Mes compliments Mademoiselle, sourit-il en portant sa main à ses lèvres, j'espère que le bal vous plaira.
- Merci».
La jeune fille sentit une chaleur la pénétrer et sourit à son tour.
La musique commença à jouer et le bal débuta. Soledad rejoignit ses amies et se plaça à côté d'eux ; selon la tradition, les demoiselles ne devaient jamais prendre la première danse réservée aux mariées ou, s'il y en avait, au couple qui venait de s'engager. En seulement quelques secondes toute la salle se remplit de robes multicolores virevoltantes, de jeunes hommes en chasse pour la parfaite partenaire et de coquettes en mode caprice.
«Avec qui penses-tu danser Dolores? interrogea Soledade son amie.
- Je ne sais pas mais ce garçon là-bas, montra l'interpellée, je le trouve si mal.»
L'ambiance était à la fête et la troisième danse arriva aussi rapidement que la deuxième et la quatrième que la troisième. Dolores valsait au bras de ce garçon qui n'était pas si mal et Silvia alternait de cavalier à chaque danse. Soledad quant à elle, accepta plusieurs invitations et tournoya dans des rondes mais gardait tout de même l'image du beau Brésilien en tête. Le bal battait à son plein et durait déjà depuis plus de deux heures quand la jeune fille se retrouva enfin seule ; elle quitta une quadrille et s'assit à l'écart pour reprendre son souffle. Ses deux amies continuaient de baller au bras d'élégants partenaires, son père entretenait un groupe d'hommes et sa mère discutait avec d'autres femmes sur un divan. L'Argentine ferma les yeux et se laissa emporter par le doux rythme de la musique.
«Belle soirée n'est-ce pas»?
Soledad rouvrit ses yeux et découvrit Neymar se tenant devant elle, un sourire aux lèvres.
«C'est votre premier bal?
- Oui, affirma-t-elle en hochant la tête.
- Cela vous plait?
- Énormément, avoua la jeune fille, j'aime beaucoup la musique et la danse et les arcs-en-ciel de couleur formés par la multitude de robes. Tout le monde est tellement joyeux!
- Moi aussi c'est ce que je préfère le plus lors des fêtes : l'atmosphère festive, dit le jeune homme en regardant autour de lui, tout le monde danse, tout le monde rit...».
Le jeune Brésilien contempla la charmante Argentine. Depuis le début du bal, elle ne quittait plus ses pensées.
«Je sais que ce n'est pas votre premier bal, loin de là, mais y aller vous souvent?
- Presque chaque fois qu'il y en a.
- Oh, vous devez donc connaître presque tout le monde alors! Moi aussi je voudrais participer à toutes les fêtes organisées!
- Je ne dénie pas que plusieurs visages me sont familiers, rit Neymar.
- Mais le mien est nouveau! s'exclama joyeusement Soledad.
- Nouveau et surtout ravissant», rajouta le jeune homme.
Soledad sourit et baissa les yeux. C'était la première fois qu'un homme lui parlait ainsi. Elle releva son regard sur le Brésilien et le dévisagea. Il était vêtu d'un boléro de velours noir aux boutons dorés avec une chemise blanche à jabot au col redressé. Son cou était resserré par une élégante cravate rouge foncé et sur son épaule droit était cousu d'un fil doré les armoiries de sa famille: deux s entrelacés surmontés d'une couronne.
«Da Silva Santos», murmura-t-elle observant le blason.
Le jeune homme sourit.
«Neymar da Silva Santos à votre service», se présenta-il en s'inclinant profondément devant la belle Argentine.
Les premières notes d'une valse remplirent la salle de bal.
«Vous permettez»? demanda-t-il en tendant la main.
Soledad accepta en prenant la main qui lui était tendu et se leva. Le couple se dirigea vers la piste de danse et se mit en position. Doucement, elle posa son bras sur l'épaule du jeune homme qui la prit délicatement par la taille.
«Un, deux et trois».
La musique se mit à jouer. Pour un moment, Soledad oublia tout autour d'elle, les autres invités, ses amies qui s'ils la voyaient, allaient l'assaillir de questions et la taquiner pendant une semaine, le bal lui-même. Elle n'entendait plus que le doux murmure de la musique et se laissa mener au lent rythme des notes aux bras de la personne qu'elle sentait déjà aimer de tout son cœur et espéra que ce moment durasse à jamais. Quant à Neymar, il ne voyait plus que le joli visage de sa partenaire et pour la première fois tomba amoureux.
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