La Prophétie du trône


Malgré sa grande détermination qui l'avait poussé à l'apprentissage de manier l'épée, ne serait-ce que se trouver devant un vulgaire voleur brisait cette motivation. C'est comme s'il revenait un peu sur terre, faisant face à la vérité crue: autant voulait-il sauver les gens, il n'avait pas l'expérience suffisante pour se prendre pour un héros.

Le brigand respirait cette confiance, un sourire presque arrogant qui se permettait de retenir un rire. Un gamin, ça n'était qu'un gamin. S'il est capable de voler le panier "d'une vieille mamie", il est certainement assez habile pour se débarrasser d'un jeune à ses trousses. C'était ce qui de lisait si aisément dans les yeux brillant du voleur, qui bien malgré qu'il n'était guère costaud, possédait l'avantage de la vie malhonnête et cruelle qu'il menait. Il était maître de son jeu de lame, contrairement au félin.

Pendant un moment pourtant, Alan eut l'impression brève de pouvoir se débrouiller. Les lames dansèrent dans les airs, mais le jeune homme n'arrivait qu'à exercer des élans saccadés, ralentis par une maladresse qui rendait les coups facilement parables. Et autant la lame de l'épée puisse briller, elle n'avait guère le reflet de l'âme de son propriétaire, qui peinait. On aurait dit qu'il se défendait plus qu'autre chose...

La crapule lâcha un ricanement mauvais, profitant d'un coup mal ajusté qui pointa le ciel pour se baisser, assénant une rude jambette au félin qui perdit l'équilibre, tombant sur le derrière. D'un mouvement de pied, le voleur éloigna l'épée d'Alan qui ne lui aura servi que pour se protéger, ce dernier la suivant du regard alors qu'elle glissait hors de sa portée. Un amer goût de honte vint se glisser dans la gorge du jeunot, alors qu'il recula en levant les yeux vers le voyou qui le pointant de sa faucille scintillante. Le voleur se léchait les lèvres, ses dents pointues lui donnant un aspect plus hostile. De ce point de vue, Alan pu même reconnaître un loup sous la capuche, un loup dont la fourrure était grise, presque d'un vieux bleu sale.

- On fait moins l'malin comme ça hein, gamin?

Alan se sentait assez stupide. Il jetait un regard à son épée au loin, le loup lui barrant la route d'un élan de scimitar qui, s'il avait pu atteindre son museau, aurait fait bien des dommages.

- Tu rêves éveillé. Je sais ce que tu es, p'tit gars. Tu ne reprendras pas cette épée. Ta peau de lâche, elle se revend au marché de Volbec. Le seul droit que tu auras, c'est d'en décider le prix!

La lame de sa faucille s'approcha soudainement de la gorge d'Alan, se dernier relevant le menton par réflexe de sécurité. Il allait mourir bêtement, tout ça pour une histoire de voleur. Comment avait-il pu songer que si peu préparé comme il était, avec aucune base en maniement d'épée, il aurait pu rendre à la dame ses effets?

Pourtant, l'abandon n'avait pas l'air de d'être une possibilité à ses yeux. Il regardait l'épée, toujours avec insistance. Aussi loin puisse-t-elle être, en tendant la main, il avait l'impression qu'elle était proche, très proche. Il n'avait qu'à...

- Je vous conseille de vous éloigner ce charmant jeune homme...

Des pas se faisaient entendre dans l'unique issue de la ruelle, des pas accompagné d'un lourd son de bois contre les dalles craquelées. S'extirpa alors hors du mystère la même dame que plus tôt, l'air paisible. Elle semblait en effet totalement sereine à présent, et pourtant, le danger la guettait avec ce voleur ne voyant qu'en or. Elle avait même eu grand courage de daigner faire face au danger. Elle était très petite, cette dame, et vu la main tremblante sur le bâton sur lequel elle s'appuyait, non seulement elle avait de l'âge, mais avait aussi accumulé fragilité. Et pourtant, aucune trace de peur dans son visage impassible.

- Pff! Qu'est-ce que tu fais là, vieille folle? Retourne regarder des p'tits pains chauds avant que je ne te débarrasse, toi aussi!

Étrangement, la moufette s'adressant au voleur lâcha un petit rire doux, toujours aussi calme. Cette tranquillité d'esprit semblait perturber le brigand, qui fronça les sourcils en détourna la faucille dans sa direction.

- Qu'est-ce qu'il y a de drôle? Dis-le, assume pour que je puisse te retirer ces rides claires de ton visage!

La dame, toujours calme, éleva l'autre bras d'où pendait sa peau comme une guenille. Elle leva son index délicat, l'agitant légèrement de gauche à droite en accompagnant son geste d'un signe de tête négatif. Le loup qui semblait facilement méprisable lâcha un grognement animal, laissant tomber l'enfant qu'il trouvait incapable pour s'en prendre à la dérobée. Quel répugnant! Son arrogance et sa cruauté dégoutaient tous deux Alan, qui en avait la nausée. S'en prendre à plus faible que soit, voilà ce qu'était là véritable lâcheté.

Le félin semblait pourtant avoir songé trop vite, car la moufette, avec ce sourire collé à ses lèvres, éleva son bâton, semblant simplement attendre que le loup sûr de lui serre sa faucille, puis la lève vers le ciel pour lui trancher la jugulaire, puis...

Le bâton para instantanément le coup, laissant le voleur dans l'incompréhension la plus totale. Il ne vit pas non plus venir la parade suivante, la dame en profitant pour faire tournoyer son bâton pour écarter le truand du passage, profitant de sa confusion trouble pour lui rendre sa monnaie de sa pièce. Trois coups instantané dans les côtes et les jambes furent amplement suffisant pour qu'on entende un râle douloureux de la part du loup avant qu'il ne se retrouve sans arme, la moufette profitant de l'incapacité de son agresseur pour l'attraper pas le capuchon avec son bâton, donnant un élan conséquent à son arme d'allure si inoffensive qui envoya pourtant valser le voleur jusqu'au mur bloquant le passage.

Le canidé, glissant jusqu'au sol en voyant des étoiles, se prit la tête pour se ressaisir, lâchant un cri beaucoup moins impressionnant lorsque la moufette le pointa avec son bâton qui lui servait à la base d'appui. Ou peut-être pas?

- Aller, debout jeune homme. Je pensais que vous vouliez me faire la peau?

Le voleur soudainement pris d'une peur bleue face à la dame âgée prit les jambes à son cou, lâchant au passage le sac qu'il avait dérobé à madame. Stupéfait, Alan ravala sa salive nerveusement, suivant du regard le loup qui s'en fut d'un pas de course maladroit, sûrement douloureux après cette raclée qu'il venait de s'offrir. Mais son attention, rapidement, fut détournée par la moufette qui s'approcha de lui, cette expression chaleureuse toujours sur son visage. Ses rudes dessinaient un sourire détendu, certes habité d'une pointe d'amusement, une certaine satisfaction pour le karma jeté.

- Vous allez bien, jeune homme?

- Euh... Oui.

Hésitant, le félin se redressa, retirant vite fait la saleté de ses habits. Ce n'est qu'après plusieurs secondes qu'il remarqua l'air de la dame qui semblait l'observer. Il avait presque l'impression qu'elle pouvait voir en lui tant ses yeux clairs avaient un regard profond.

- Je suis vraiment navrée, madame. J'ai voulu vous rendre ce que ce voleur vous a pris, mais-...

Le bâton vint se poser sur sa tête d'un geste rapide, mais délicat. Perplexe, Alan cligna des yeux, mais se tut en sentant une réponse venir de la part de la moufette.

- L'acte est important parce que tu as essayé de l'accomplir et non pas parce que tu as réussi à l'accomplir. Et pour cela mon garçon, je peux amplement te remercier.

Toujours avec son bâton, elle va appuyer sur son épaule, comme pour le faire se baisser. Perplexe, Alan suivra simplement son geste, s'agenouillant à nouveau. Perplexe, il voit ensuite la dame le contourner, allant ramasser son épée tombée. Elle semblait d'ailleurs la regarder en silence, comm si son éclat lui était familier.

- Tu as une bien jolie épée, jeune homme.

- Ce... Ce n'est pas vraiment la mienne. Elle appartient à...

- Je sais à qui elle appartenait.

Alan se tait, comme surpris. Il n'ose rien ajouter, la voyant s'approcher avec l'épée qu'elle trimballe presque trop facilement en s'approchant de lui de son pas détendu. Alors qu'il tendait les mains mollement, elle y déposa l'arme délicatement, Alan croisant le regard confus de son reflet balafré.

- Mais aujourd'hui, c'est ton épée, mon garçon.

La femme âgée lui sourit tendrement, venant faire volte-face en lui masquant de son dos les étoiles dans ses yeux. Cette femme... était quelqu'un de spécial. Alan ignorait de qui il s'agissait, mais il était certain qu'elle en savait plus qu'elle ne le démontrait.

Pourtant, il n'eût pas le temps de lui poser la questions que déjà, elle reprit la parole, semblant aussitôt lire dans ses pensées.

- J'ai bien des choses à te montrer, mon garçon. Oh oui, bien des choses qui je pense peuvent t'intéresser. Mais...

Elle tourne un peu la tête dans sa direction, son petit panier à nouveau accroché au bras.

- ...Si tu veux savoir tout cela, tu devras me rejoindre un soir. Ma demeure est là où pointeront les tournesols du village à cette même heure. Tu n'auras qu'à suivre le sentier.

Alan n'était que plus confus, tendant la main vers la dame en se redressant, espérant qu'elle réponde à ses questions naissantes avant de s'en aller. C'est à ce moment qu'il entendit la voix de Madeleine dans son dos, se retournant pour voir son air inquiet alors qu'elle se précipitait vers lui.

- Tout va bien, Alan!?

- Je... oui. Désolé d'être parti comme ça, mais cette...

Il se retourne alors pour lui désigner la sage femme, mais alors qu'il scrute les alentours à sa recherche, elle semble... s'être totalement volatilisé.

Était-ce un...? Non, impossible. Il l'avait vu être bousculée, il l'avait vu donner une bonne leçon à ce voleur. Comment pouvait-elle déjà être disparue?

Le léopard semblait dérouté. Madeleine n'avait pas plus l'air de comprendre la raison de sa confusion, haussant un sourcil en voyant sa moue étrange.

- Cette?

- Non... Non, rien.

Elle soupira, prenant un air plus autoritaire en regardant les alentours, comme sur ses gardes.

- Ce voleur aurait pu te blesser, voire pire. Évite de recommencer, s'il te plaît.

- Navré, Madeleine. Je voulais seulement...

- Aider? Je sais, Alan...

Son exaspération se calme. Son regard, doucement, se radoucit.

- Aller, viens. On n'a toujours pas terminé, je te signale.

- Oui.

Même s'ils avaient des ingrédients sur lesquels se concentrer, Alan ne pouvait s'empêcher de penser à cette femme si mystérieuse. Qui était-elle? Que savait-elle? Plus le léopard y pensait, plus il se demandait si elle connaissait ses intentions, bien que c'était totalement fou. Même lui s'en rendait compte, c'est peu dire...

Mais il continua d'y penser même tout le reste de cette étrange journée. Que ça soit à leur retour, à la préparation de ce fameux et délicieux clafoutis, à l'entraînement... Madeleine voyait bien que le tigre avait quelque chose à l'esprit, mais elle jugea qu'il continuait de laisser mariner dans son esprit sa quête tant désirée. C'est probablement pour cela qu'elle le laissera tranquille pour ce soir, allant plutôt passer du temps avec son bien aimé, laissant Alan seul dans la chambre aujourd'hui sienne. Il hésitait encore, ses jambes fourmillant à l'idée de découvrir... de découvrir quoi? Au fond, il savait ce qu'il voulait savoir, mais il n'assumait pas totalement sa curiosité, peut-être de peur de contrarier Madeleine vu comment il poursuivait la fameuse légende qui la mettait mal à l'aise. Oui, c'était ça qui lui trottait dans la tête. Même s'il en savait désormais un peu plus, il avait toujours l'impression d'être un ignare, un étranger des montagnes comme on l'avait toujours vu.

Il jeta un regard vers l'épée, un regard plus las. Une question pendait au bout de ses lèvres alors qu'il hésitait à la poser.

Il renonça, détournant les yeux vers la fenêtre, vers l'extérieur où le coucher de soleil déjà se montrait. Il voyait quelques fleurs se faire bercer par le vent alors que les tournesols, rares par ici, se penchaient vers le soleil.

Le léopard se leva, hésitant une seconde fois à apporter l'épée avec lui. Étrangement, cette fois il hésita plus durement. Il recula sa main légèrement, cachant l'épée sous ses couverture avant de sortir de la pièce. En chemin, il s'arrêta devant l'entrée de l'atelier (l'énième changement) de Ronald ee trouvant justement en train de travailler, l'ourse à ses côtés, en train de le regarder faire. Sans rien dire, même pas pour les prévenir de peur que l'ancienne guerrière ne se braque sur l'idée, il passa tout droit, s'empressant de sortir pour rencontrer sa destinée.

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