L'esprit dans l'arme

Finalement, c'est plus difficile qu'il le pensait, devenir un guerrier. Peut-être devait-il seulement abandonner ce désir stupide...

Déjà couvert de neige, des oreilles au bout de la queue, Alan peinait à avancer. Bien qu'il ne ressentait pas vraiment le froid qui l'entourait la neige pesante l'empêchait d'avancer convenablement, elle lui forçait à faire de plus grand pas, et donc à avoir encore plus mal qu'avec des pas normal, déjà qu'il avait l'impression de ne plus avoir de jambe du tout tellement elles étaient endolories. Non, il n'en pouvait plus... Il n'aurait pas dû monter cette montagne, bien qu'il s'agissait du seul chemin possible. Il avait l'impression de manquer d'air là-haut. Peut-être était-ce le cas. Peut-être devrait-il redescendre...

De plus, il avait l'impression qu'il n'allait nulle part, plus il regardait autour de lui. La tempête de neige l'aveuglait, déjà que le paysage entier était aussi blanc que sa fourrure. Il savait bien que, autrefois, il habitait dans ce genre d'endroit, mais il avait oublié à quel point c'était dangereux. Peut-être était-ce là la raison de sa descente jusqu'aux plaines de Gomans.

C'est alors qu'il vit, plus loin, une vive lumière bleu, n'arrangeant point le fait qu'il ne pouvait pas voir. Portant sa main sur son front comme pour empêcher la neige de lui masquer la vue, il regarda cette lumière étrange, dont il avait la curieuse envie de s'approcher. Son désir d'y aller prit le contrôle sur ses mouvements et donc il se dirigea vers la lumière d'un pas aveugle et très lent, car, plus il s'approchait, plus le vent soufflait, plus la tempête était forte. Il tendit son autre main vers l'objet qui brillait ainsi, mais il ne fit que le frôler, chose qui le fit se figer sur place.

Un tas d'images défila devant ses yeux. Des bagarres sanglantes, des victoires festives, les aventures qu'il avait l'impression de vivre, bien qu'il ne s'agissait pas de lui. Pourtant, cela semblait réel, si réel qu'il en restera tétanisé, ignorant le tremblement sous ses pieds.

Lorsqu'il se ressaisit, ce fut à cause du second tremblement, plus menaçant et inquiétant que le premier. Lorsqu'il se retourna, il écarquilla les yeux, redressant les oreilles d'un air assez surpris.

Une vague de neige immense fondait droit sur lui, une vague de la taille du clocher. Ne désirant pas mourir enfoui sans la neige, le tigre voulu prendre ses jambes à son coup, mais lorsqu'il commença à courir, il tomba aussitôt sur le sol. Ses membres ne lui répondaient plus dû à la fatigue. Il allait mourir alors, si?

La neige, ne possédant évidement aucune conscience, ne fit que tout engloutir, entraînant avec elle sa seule victime et l'étrange objet. La vague énorme de neige percuta des arbres, brisant littéralement le tronc épais des conifères rares de cette montagne. Continuant sa course vers le bas de la montagne, l'avalanche percuta un rocher plus gros que soit. Malgré qu'elle fendit celui-ci, elle se termina bien vite, le jeune encore vivant par miracle ayant tout le bas du corps coincé dans la neige qui la composait. Ce dernier ouvrit avec peine les yeux, tentant évidement de se sortir de ce pétrin, sans succès. Il était véritablement prisonnier, incapable de faire le moindre mouvement avec ses jambes, ses bras étant trop faibles pour le hisser du piège où il était maintenu captif.

Il songea à se laisser faire, à laisser le froid finir le travail, la fatigue achever la tâche. Il n'aurait pas dû avoir autant confiance... Ce fut une grave erreur. Il était faible.

C'est alors que la lumière de tout à l'heure attira son attention. En effet, l'objet était devant lui, à porter de main et quasi totalement à découvert. Il s'agissait d'une épée, une épée semblant de glace, voire de cristal. Le bleu scintillant de sa l'âme se reflétait dans les yeux de Alan, qui en fut presque hypnotisé. Il rendit la main vers l'arme, tendant d'attraper le manche avec beaucoup d'efforts. Lorsqu'il posa la main sur celui-ci, il crut que le temps s'était arrêté.

La lumière déjà bien aveuglante devint plus vive encore, si vive qu'elle en faisant mal aux yeux. Au même moment, il semblerait que la neige emprisonnant Alan se creusa peu à peu, le libérant donc d'une mort quasi certaine. Toujours l'épée en main, il entendit une voix venir de la l'arme, qui semblait bel et bien être sa salvatrice.

- Ne t'inquiète pas petit, je vais t'aider.

Suite à ces mots, il ne pu lui demander pourquoi, qui et comment, épuisé, à bout de force. Il va donc se laisser tomber sur le sol, toujours en gardant en main le manche de l'épée. Il la serra même avec force, malgré que lentement, dû à l'épuisement, il va perdre connaissance. Il ne va que sentir de grands bras le prendre délicatement, sans qu'il puisse deviner de qu'il s'agissait, juste avant qu'on ne l'entraîne de force dans un profond sommeil.

● ● ●

Dans son esprit, tout était de glace. Le paysage était semblable à celui de la montagne, sauf que la neige tombait avec douceur, comme si la tempête avait brusquement cessé. Il était toujours incapable de bouger, mais il semblait bien réveillé, même s'il savait bien qu'il s'était évanoui. Il regarda devant lui, où il aperçu un grand, très grand lion, dont la fourrure était aussi blanche que la sienne. Sa crinière abondante d'une douce fourrure duveteuse remuait légèrement dans le vent, on aurait dit qu'il s'agissait d'un gros nuage. Assez impressionné par la taille de l'homme se tenant fièrement devant lui, Alan demeura silencieux. Il devina que celui-ci n'était pas là pour rien.

En effet, le grand lion va légèrement lever le menton, puis esquisser un sourire assez rassurant.

- Tu n'as rien à craindre de moi, je ne suis pas mauvais.

- Si vous l'aviez été, vous m'auriez déjà fait du mal, non?

Comme pour confirmer ce que disait cet étranger dans sa tête, il avait dit cela, soutenant son regard en laissant la neige imaginaire se déposer sur lui. Il savait qu'elle n'était pas réelle, car elle dégageait une chaleur rassurante. Ce fut un peu l'inverse pour le regard de l'imposant félin, qui va sembler bien confus par cette question.

- Peut-être...? Peut-être pas... Je ne puis vraiment te blesser ou te tuer.

- Ah? Et pourquoi cela?

Sa curiosité et son attention avaient été attrapées avec succès par ce personnage, qui semblait toujours assez pensif sur la question. Il va finir par cesser cette réflexion intensive, balayant avec sa main le vide comme pour dire qu'il abandonnait, pour l'instant.

- L'arme que tu as pris entre tes mains, j'en suis l'unique possesseur... du moins, jusqu'à maintenant. Désormais, je suis plutôt son possesseur, de part le sens "hanter".

- Vous voulez dire que vous êtes... Un peu comme un fantôme? Ou un esprit?

- Je suis ce comment tu me définiras. Mais tout d'abord, avant de t'expliquer un peu les circonstances pour lesquelles je suis ici, venons-en à la politesse.

L'homme de grande taille va alors s'approcher du léopard. Il faisait bien deux fois sa taille, même trois fois! Levant la tête avec lenteur, Alan le constata, ravalant discrètement sa salive. La main massive du lion se tendit vers lui, probablement pour qu'il "lui serre la pince".

- Je suis "Le chevalier aux crocs de givre", mais tu peux simplement m'appeler Botulf. Et non, ça n'est pas une blague.

Il avait ajouté cela en voyant le regard impressionné du jeune homme, bien qu'il eut surtout cette réaction lorsqu'il sentit la poigne de fer se refermer sur sa main habile, mais assez chétive. Malgré tout, il avait bien reconnu le nom du plus grand, du plus juste, du plus puissant chevalier de tous les royaumes. En effet estomaqué par cette rencontre, il n'y cru pas au début, bien que la preuve était évidente. Le lion avait tout des légendes. La carrure, le sourire chaleureux... Oui, même s'il vivait tout seul, il avait évidement entendu parler des légendes urbaines... ou ses histoires bien réelles comme celle-ci.

- Et toi, petit? Comment t'appelles-tu?

- Alan...

- C'est tout? Tu n'as point de nom de famille?

Un peu embêté, le lion se gratta la tête, ayant lâché depuis déjà un moment la main du petit mobien.

- Dans ce cas... Pour l'instant, Alan, tu porteras le mien. Cela te convient?

Assez surpris de cette suggestion, il ne fit que répondre en hochant de la tête. Satisfait par ce geste, Botulf fera de même, puis il penchera la tête en voyant Alan lever légèrement son index, comme s'il voulait préciser quelque chose.

- Oui? Qui a-t-il?

- Je tiens vraiment à savoir: comment vous êtes-vous retrouvé là-bas, dans les monts enneigés? On... enfin, vous avez perdu votre épée là-bas?

- En fait, c'est un peu plus compliqué que cela, mais je veux bien tenter de te l'expliquer. Si ma mémoire le veut bien...

Le lion sembla se concentrer pour recouvrir les souvenirs manquants dans le puzzle. Ça se voyait qu'il s'agissait d'une tâche difficile, signe qu'ils ne provenaient pas de l'an dernier. Les yeux plissés, se caressant le bas de la crinière comme une barbe, il essayait de reconstituer tout ce désordre. Il y parvint en plusieurs longues secondes, voire minutes.

- Ah! Ça y est ça me revient! Il y a de cela plusieurs années, j'ignore combien précisément, tous les Royaume étaient menacés par un danger énorme.

- Quel genre de danger?

- Je ne sait plus vraiment à vrai dire, je ne me rappelle que du vécu.

Toujours en caressant sa barbe lentement, Botulf leva les yeux au ciel, comme nostalgique par ce qu'il a vu.

- Puisque tu connais déjà bien la légende, je ne vais que te résumer un peu tout ça. Pour vaincre ce grand danger, il était nécessaire de rassembler les magiciens et leur outil, ou si tu préfères, les chevaliers élémentaires.

Bien qu'il fut assez déçu que la légende "vivante" ne veuille s'attarder aux détails, il demeura attentif. Il eut beau avoir entendu des milliers de fois l'aventure épique et très ancienne, elle était très captivante. Ça l'inspirait, il en éprouvait de l'admiration.

- Les chevaliers élémentaires sont, comme tu dois probablement le savoir, des guerriers qui usent de magie lorsqu'ils utilisent une arme enchantée. Cette arme est passé de génération en génération, de préférence la génération qui a conçue l'arme, bien que certaines d'entre elles viennent tout particulièrement de certains territoires qui ne correspondent pas à celui de l'autre.

- Oui, je le sais bien en effet. Et vous avez vaincu la menace, je ne me trompe?

- La menace à été arrêtée. Pourquoi donc?

Le jeune leopard pencha la tête, semblant hésitant. Finalement, il va poser sa prochaine question, semblant prendre son temps pour chaque syllabes.

- Que vous est-il arrivé alors? Pourquoi "hantez"- vous votre épée?

- Oh... Il s'agit simplement d'une genre de malédiction.

- Comment ça?

Botulf, semblant chercher une bonne manière de s'expliquer, va se racler la gorge avant de poursuivre. Il semblait très peu à l'aise lorsqu'il tournait autour de ce sujet.

- Suite à notre victoire, un débat s'est créé pour que l'on choisisse ce qu'il adviendra des armes. Les Aviluniens et certains autres clans voulaient qu'on les garde en cas d'une nouvelle bataille, mais moi comme mes camarades étaient en désaccord avec eux.

- Et ensuite...?

- Ensuite... L'un de nous a trahi le groupe, nous emprisonnant dans notre arme destinée, comme avec une cellule infranchissable.

- Pourquoi faire une telle chose?

D'un air empli d'empathie, Alan regarda dans les yeux Botulf. Il y décelait une très grande tristesse et de la culpabilité.

- Hélas, je l'ignore autant que toi petit.

- Et donc... Qu'est-il advenu des autres?

- Tous enfermés eux aussi. Le temps ne s'écoule plus pour nous à cause de ce maléfice, donc je suppose que tous sont encore en vie.

- Je vois...

Un peu déçu de cette fin peu joyeuse, Alan va secouer la tête pour reprendre ses esprits, la levant ensuite vers Botulf.

- Mais... Pourquoi êtes-vous dans mon esprit? Car cela m'étonnerait que nous soyons toujours dans les montagnes.

- En effet, nous ne sommes plus là-bas, ni toi ni moi, car sinon, je n'aurais pu établir aucune connexion à distance. En ce moment même, quelqu'un possédant un coeur aussi bon que le tien est en train de te sauver de cet endroit risqué.

- Oh? Qui donc?

- Ouvre les yeux, tu le verras bien.

Perplexe, le léopard réfléchit, puis obéit. Il va alors, du moins son vrai lui, ouvrir les yeux lentement. Qui sait ce qui l'attendait à son réveil?

...

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