Le coffre fort
Asphodèle se retourne brusquement. Je suis pétrifié sur place, tandis que Héka me laisse sur place et s'enfuit le plus loin possible.
Au moins elle ne se fera peut être pas prendre...Cela dit, j'ai remarqué que ses capacités physiques avaient diminué dernièrement. Il faudra que je pense à l'interroger à ce sujet...
Enfin, il y a de très fortes chances pour que je meure dans les heures qui suivent donc inutile de planifier ce que je ferai après.
Elle se lève lentement de sa chaise et avance vers moi. Je ne bouge toujours pas, de toute manière je ne cours pas assez vite pour la distancer...Je ne la lâche pas des yeux, mes muscles tétanisés par la peur ne répondent plus, je transpire à grosses gouttes.
Elle m'attrape brusquement le poignet et me tire à l'intérieur, puis claque la porte.
- Salut, Yeren. Ça fait longtemps.
- ...
- Je ne vais pas me fatiguer à poursuivre ta copine, elle est sûrement déjà planquée quelque part. Et puis elle est inutile, tu es le plus important après tout. Comment ça va, depuis le temps ? Dit elle tout en me retirant mes armes et mes munitions.
- Depuis que vous m'avez kidnappé et pété le poignet dans un bar sordide, vous voulez dire ?
- Oui. Mais tu devrais me remercier, c'est grâce à moi que tu as ouvert les yeux sur l'horrible réalité qui t'entoure.
- ...
- La vérité est dure à accepter, pas vrai ? En tout cas nous, nous ne te remercions pas. Tu imagines le nombre de patrouilles de police et de perquisitions que nous ont amené ta petite mise en scène ? Sans compter que les pauvres arrêtaient de rejoindre notre Congrégation parce qu'ils nous prenaient pour des kidnappeurs d'enfants !
- Ce que vous êtes.
- Mais ce n'était pas vraiment un kidnapping, on comptait te rendre à tes parents après !
- Je me fiche complètement de vos intentions douteuses. Vous êtes une organisation tout sauf respectable et si cette "petite mise en scène" vous a porté préjudice, j'en suis ravi.
Depuis quelques minutes déjà je ne répondait plus que par automatisme, car quelque chose avait attiré mon attention. Un coffre fort encastré dans le mur de la pièce, très mal dissimulé par un petit rideau. On dirait que j'ai bien fait de me faire enfermer dans cette pièce...enfin, le plus gros problème reste bien sûr la présence d'Asphodèle. Évidemment il me reste deux objets que j'ai réussi à cacher, une clé USB vierge dans ma chaussure et le petit poignard attaché à ma cheville mais ça risque d'être un peu léger...surtout que je déteste me battre à l'arme blanche depuis le meurtre de mon père. Enfin, on fera avec.
- Ah oui, tu en es ravi ? Très bien, je vois qu'il est impossible de discuter avec toi. C'est pour ça que je hais les fils de bourges dans ton genre...Ces gamins pensent tous avoir une intelligence supérieure mais restent persuadés qu'ils ont toujours raison. Alors que c'est bien évidemment faux !
Bon, inutile de te torturer pour savoir qui t'envoie, je le sais très bien. Puisque c'est comme ça, nous diffuseront les informations dès ce soir...Mais là, actuellement, j'ai plutôt envie de m'occuper de toi.
Une vague de peur me submerge. Je pensais être plus fort que ça mais j'ai terriblement peur de mourir. Et qu'est ce qui arrivera aux autres si la mission échoue ? Elle continue à parler, une lueur dangereuse dans le regard.
- Ce qui est bien avec toi, Yeren, c'est que tout le monde pense que tu es mort. Donc si tu disparaissait, personne ne s'en rendrait compte ! C'est merveilleux, n'est ce pas ? Je me demande combien vaudraient tes organes sur le marché noir. Après tout le Yeren Fall est un mets très raffiné. Certaines personnes donneraient cher pour déguster ton foie...
Je la fixe, d'un regard qui se veut sans émotions. En réalité je suis mort de peur...Ça a toujours été comme ça, au début je me forçais à avoir l'air d'un futur patron, et maintenant j'essaye d'avoir l'air d'un mafieux sans scrupules qui n'a peur de rien. Mais au fond j'ai toujours été le même gamin effrayé que la peur et la pression ont poussé à commettre un terrible meurtre, puis des dizaines d'autres. Enfin, je réussis toujours à créer l'illusion...d'ailleurs, ça a encore marché.
- Très bien, je vois. Monsieur est un dur à cuire, pas vrai ? Dans ce cas j'ai autre chose pour toi...
Elle se retourne pour chercher quelque chose dans son armoire, j'y vois une occasion parfaite. Sans aucune hésitation je saisis le poignard d'un geste vif et lève le bras pour lui porter un coup mais elle se retourne brusquement et bloque mon bras de sa main libre. Dans l'autre main, elle tient une seringue...
Je lui donne un coup de genou dans le ventre, elle me balaye les jambes et nous tombons à terre. Son visage est à quelques centimètres du mien et je peux voir son visage déformé par la haine...Elle appuie sur ma main toujours crispée sur le poignard pour le retourner vers moi mais je glisse au dernier moment sur le côté.
Déroutée par ce mouvement inattendu, mon adversaire se reprend rapidement et me cloue au sol. Le souffle coupé par son genou appuyé sur ma cage thoracique, je sens une aiguille s'enfoncer dans mon cou...
Je ferme les yeux et arrête de respirer, laissant ma tête pendre mollement sur le côté. Au bout de quelques secondes, Asphodèle enlève son genou et se relève. Je n'arrive pas à croire qu'elle soit aussi naïve...Je la fais tomber d'un grand coup de pied dans le tibia et avant qu'elle ait eu le temps de réagir, je plante mon poignard d'un coup sec dans sa jugulaire.
Elle ouvre la bouche pour hurler mais je la fais taire en plaquant ma main dessus : je suis censé être discret après tout...Je me rapproche de son oreille et lui chuchote doucement :
- Inutile de hurler, tu vas mourir et faire du bruit n'y changera rien. Alors facilite moi un peu la tâche pour une fois...Ta jugulaire est percée, tu sais ce que ça veut dire n'est ce pas ? Tu vas te vider de ton sang ici même, sans pouvoir faire quoi que ce soit. Alors au lieu de crier, profite des minutes qu'il te reste pour faire le point sur ta vie...Es tu sûre d'avoir fait les bons choix ?
Je retire doucement ma main. Elle me regarde avec des yeux vitreux.
- Tu as un beau visage Yeren...Malgré le fait que tu sois un gamin de onze ans psychotique et instable, je suis heureuse que tu sois ma dernière vision. Tu as les mêmes yeux que ton père...
- Que savez vous sur mon père ? Pourquoi avoir autant insisté pour que je voie son vrai visage la première fois que je vous ai rencontrée ? Vous le connaissiez ?
- Dis toi simplement une chose...Je n'ai pas choisi ce pseudonyme par hasard. Asphodèle signifie "coeur abandonné".
Elle ferme les yeux, un sourire aux lèvres. J'ai un peu pitié de cette femme...
Père n'aurait épousé une femme pauvre pour rien au monde. Elle aurait dû se résigner, mais certaines choses ne s'oublient pas...Elle aura passé sa vie à tenter de lui faire payer.
Cependant je me rends compte que j'ai oublié de lui poser la question la plus importante : qu'est ce qu'elle m'a injecté dans le cou ?
La seringue a roulé par terre, je la ramasse et lis l'étiquette : dilitírio.
Je la fourre dans ma poche, je pourrai demander à Tristan d'analyser les résidus qu'elle contient plus tard. Pour l'instant j'ai une mission à accomplir...Je me dirige vers le coffre - fort. La commande vocale s'active aussitôt.
- Bonjour, Asphodèle. Souhaitez vous ouvrir le coffre ?
- Oui.
- Oh, vous n'êtes pas Asphodèle. Puis je vous demander le mot de passe, dans ce cas ?
Je m'assois par terre pour réfléchir. Puis une intuition subite me vient : je connais le mot de passe d'Asphodèle. Je me relève et fais face au coffre fort :
- Mot de passe : Prestimion.
La porte s'ouvre avec un léger déclic. Un sourire victorieux sur les lèvres, je sors l'ordinateur et le pose sur le bureau.
Je l'allume et y rentre ma clé USB, puis je lance la copie du disque dur sur celle ci. J'ai beau avoir une mission à remplir, cela ne m'empêche pas de penser à mes propres intérêts...Je sais qu'il est dangereux de jouer avec le feu et qu'Alvin y a perdu la vie mais je suis plus malin que lui, et l'occasion est trop belle. Un disque dur plein d'informations compromettantes sur le boss du cartel...Je me demande ce que je vais en faire...
Une fois la copie terminée, je remets la clé USB dans ma chaussure et je récupère mes armes, puis je m'empare d'un sac à dos par terre et j'y fourre l'ordinateur, avant de sortir de la pièce...Je ne peux pas m'empêcher de sourire au cadavre d'Asphodèle avant de refermer doucement la porte.
Je regarde rapidement mon portable, aucun nouveau message. Je commence à écrire tout en courant dans les couloirs :
À : Héka, Ouran, Vaas, Reyke, Nell et Noah
Salut tout le monde, ça se passe comment de votre côté ? J'ai l'ordi, vous me prévenez dès que vous avez la mallette.
À : Héka
Hey, je suis vivant. Désolé pour tout à l'heure, je sais pas ce qui m'a pris...Tu es où exactement ?
Une fois les messages expédiés, je range mon portable dans ma poche et continue à courir, regardant de tous les côtés pour trouver Héka ou d'autres membres du groupe. Les couloirs sont presque déserts, c'est étrange...soudain je sens mon téléphone vibrer :
De : Héka
Je suis juste à côté de toi, je te vois. Ne bouge surtout pas, j'arrive.
Je tourne la tête et je vois une forme en mouvement à une dizaine de mètres de moi.
À : Héka
Ah oui je te vois ! Bon bah j'arrive !
De : Héka
NON NON NON ! NE VIENS PAS ICI !
Trop tard, je suis déjà à moins d'un mètre d'elle. Je m'approche doucement et elle vient vers moi, malgré l'obscurité j'arrive à distinguer son visage défait et mes narines sont assaillies par une forte odeur de...vomi.
- Héka ? Qu'est ce qui se passe ?
- Je t'avais dit dit de pas venir ici.
- C'est toi qui as vomi ?
- ...
- Réponds moi !
- Effectivement, c'est moi.
- Très bien, alors maintenant je voudrais savoir ce qui se passe. Tes capacité physiques ont baissé ces derniers temps, tu vomis sans raison...Je pourrais demander aux autres mais je pense que c'est pas la première fois que ça t'arrive. De plus, selon les autres tu as complètement arrêté de fumer et de boire dernièrement, alors que tu aimais ça avant. J'ai quelques suppositions personnelles mais je voudrais que tu confirmes...
- Chef, on a une mission à terminer.
- Je m'en tape de la mission. Je suis le chef de cette équipe et l'état de mes subordonnés est ma priorité. Donc maintenant on va oublier un peu la mission et tu vas me dire la vérité. J'ai peut être l'air d'un gamin mais je comprends vite...
- ...
- ...Héka...Tu es enceinte, n'est ce pas ?
- ...
- Je vois. C'est Alvin, pas vrai ? Voilà pourquoi tu as l'air encore plus triste que d'habitude quand on parle de lui...Vous étiez ensemble.
- Bravo, petit chef. Tout juste.
- Donc tu étais bien enceinte de lui...Depuis combien de temps ?
- Trois mois.
- Ok. Ne t'inquiète pas, je dirai rien à Tristan...Et je ferai en sorte que tu aies un rôle un peu moins physique dans les prochaines missions. Et puis quand ça se verra trop, je trouverai une excuse pour que tu puisses te reposer.
Je la vois sourire dans le noir.
- Bon, on devrait peut être bouger maintenant...Ça pue, ici.
- T'as raison.
Nous marchons déjà depuis quelques minutes quand mon portable vibre à nouveau.
De : Vaas
Mec, j'ai une bonne nouvelle et une mauvaise. Je commence par laquelle ?
À : Vaas
On a pas le temps de jouer aux devinettes !
De : Vaas
Ok j'ai compris 😅
Bon bah on a la mallette
Y a tout le fric dedans, on a vérifié
Par contre on s'est faits un peu repérer 😣😣😣
Du coup ils sont tous en train de nous poursuivre 👌
À : Vaas
Oh. Merde.
À : Vaas
REJOIGNEZ LA SORTIE. VITE.
De : Vaas
Bah on voudrait bien mais si on y va ils vont nous suivre et vous pourrez pas sortir 😰
À : Vaas
MAIS BORDEL ARRÊTE DE METTRE DES SMILEYS C'EST PAS LE MOMENT !
À : Vaas, Ouran, Noah, Reyke et Nell
Écoutez, on a la mallette et l'ordi donc ON FONCE TOUS VERS LA SORTIE. Par contre Noah et Reyke faites gaffe, ces génies du groupe de Vaas se sont faits repérer donc vous risquez de croiser des gens sur le chemin. Vous êtes autorisés à les tuer, de toute façon on est déjà repérés !
De : Reyke
Reçu 5/5 ! (Quels boulets quand même...)
Je range mon portable, soulagé. Au moins personne n'est perdu, et tout le monde a bien reçu les consignes.
- T'es sur ton portable depuis tout à l'heure, il y a un problème ?
- Mais regarde le tien un peu, j'ai tout expliqué !
Elle sort son portable de son sac et commence à lire, en fronçant les sourcils.
- C'est pas vrai...Quel crétin ce Vaas, je suis sûre que c'est encore lui qui a fait n'importe quoi.
- On réglera ça plus tard, pour l'instant on est coincés dans un bunker souterrain en état d'alerte et on transporte un ordinateur extrêmement précieux qui pourrait entraîner notre décès dans d'atroces souffrances si on le ramène pas intact à Tristan dans les heures qui viennent...
- On court alors ?
- Effectivement, on court !
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