⇝ Chapitre 70 ~ Alice
— Ce n'était pas à moi de te le dire, réplique calmement Luke, après avoir rouvert les paupières.
Furieuse, Alice essuie une larme sur sa joue, les yeux encore rivés à la porte de la chambre de Luke qui vient de se refermer derrière Freddie.
— C'est le genre d'information qu'on doit connaître ! riposte Mike, en se plaçant à côté d'Alice.
Luke secoue la tête. Alice se force à se concentrer sur lui et ses yeux bleus pleins de de patience et de résignation, plutôt que de rester coincée sur le regard ferme et inébranlable du chanteur de Dark Fate, qui l'a autant secouée que l'explosion du Vésuve au-dessus de Pompéi.
— Non. Vous ne vous rendez pas compte du fardeau que ça représente, ni de ce que ça fait, de voir le regard des gens autour de vous s'éteindre lorsqu'ils apprennent la vérité. Ce n'est pas une information croustillante qu'on peut ranger dans un dossier !
Une étincelle de colère s'allume sur le visage de Mike. Alice sent son cœur se déchiqueter un peu plus. Ils ne se disputent pas, d'habitude. Brutalement, elle plonge quelques semaines en arrière, lorsqu'elle s'est aussi disputée avec Emmy.
— Ce n'est pas ce que je veux dire, Luke, et tu le sais ! s'exclame rageusement Mike. Tu imagines un peu, si quelque chose lui était arrivé devant nous ? Personne n'aurait su quoi faire ! Alors que si on le savait-...
— Ça n'a pas été le cas, coupe aussitôt Luke, d'un ton sec. Vous imaginez un peu ce qu'il se passerait, si le monde entier l'apprenait ?
— Nous ne sommes pas le monde entier, s'immisce Caitlin, alors qu'Alice était sur le point de réagir. Il est aussi notre ami. Je comprends ce que tu nous dis, Luke, mais Mike essaie de t'expliquer que ça aurait pu avoir de terribles conséquences.
Le jeune homme réfute de la tête.
— Non, car c'est son secret. Je ne pouvais rien dire. Kit et Jay le savent, et eux auraient su quoi faire s'il y avait eu un problème.
« Bien-sûr que Kit sait » songe Alice, le cœur serré. Il avait bien tenté de l'empêcher de porter des jugements à l'emporte-pièce et de la prévenir de la façon dont l'histoire allait se dérouler, mais elle ne l'avait pas écouté. Elle avait refusé tout net la vérité.
Mike secoue la tête d'un air désapprobateur.
— C'est une information trop grave pour qu'elle reste secrète, surtout quand on vit sous le même toit, réplique-t-il. Il s'est mis en danger !
— Il n'y a rien d'étonnant là-dedans, marmonne Alice. C'est tout lui, de vouloir protéger les autres !
Caitlin hoche la tête, mais Luke l'ignore et se concentre sur Mike.
— Tu as gardé mon secret, à l'époque où je ne voulais pas parler d'Anna, lui rappelle-t-il, durement.
— Ça ne te mettait pas en danger, argue Mike sans ciller.
— Sauf quand son corps a été retrouvé, lance Alice en fronçant les sourcils. Cette conversation ne nous mènera nulle part !
— Tu vois où je veux en venir, Michael, reprend Luke en croisant les bras. C'est son choix, et tu dois le respecter.
— Le rôle d'un ami, c'est de dire la vérité, même si elle est déplaisante, et de faire ce qui est le mieux pour l'autre, même si ça passe par rompre une promesse !
Luke marque vivement son désaccord en secouant la tête.
— Et qui suis-je, pour savoir ce qui doit être fait quand on est malade ? C'est facile, de parler quand on n'est pas concerné ! Tu es simplement vexé qu'il me l'ait dit à moi, et pas à toi.
— Pas du tout ! rétorque Mike, les joues rouges de colère. Je suis furieux que tu aies laissé Emmy tomber amoureuse de lui alors que tu savais que c'était voué à l'échec !
— Je n'étais pas au courant ! proteste agressivement Luke. Je ne l'ai su qu'il y a quelques semaine et tu sais aussi bien que moi que ça fait longtemps qu'on sait tous qu'ils ne sont pas amis !
Alors qu'Alice se demande sérieusement comment la situation pourrait s'empirer et que Mike ouvre la bouche pour répondre, Caitlin s'interpose.
— C'est quelle genre de maladie ? questionne-t-elle.
Alice vacille.
Tout le monde se tourne vers Caitlin et un silence accueille sa question pleine de bon sens. Un silence teinté de paroles. Sa question est simple, et c'était ce qu'ils auraient dû demander en premier. Une épine de culpabilité se loge dans la poitrine d'Alice. Voilà plusieurs minutes qu'ils se querellent, au lieu de se concentrer sur le principal !
— Une maladie invisible, de celle qui tue à petit feu. Et de façon héréditaire, visiblement, répond Luke d'une voix blanche.
— Douloureuse ? demande-t-elle encore.
Luke hausse les épaules.
— Ça dépend, d'après ce que j'ai compris.
— Et en quoi elle consiste ? interroge Alice, le cœur cognant aussi fort que s'il était au bord de ses oreilles.
— Elle... C'est une maladie dégénérative. Elle détériore ses poumons... et un jour elle s'attaquera à ses cordes vocales.
Alice ne peut retenir un hoquet horrifié. Elle a soudainement l'impression de marcher aux abords d'un gouffre dont le vide paraît vouloir l'aspirer à chaque foulée supplémentaire.
— Quoi ? Mais, pour un chanteur, pour quelqu'un qui aime autant... (elle s'interrompt et secoue la tête pour reprendre ses esprits.) Non, c'est impossible !
— Je ne crois pas que Luke plaisanterait à ce sujet, objecte Mike, dont le teint a pris une couleur cadavérique.
— Emmy est au courant ? demande Caitlin, paniquée.
Luke hoche la tête.
— Elle l'a appris toute à l'heure. Vous comprenez mieux son état, maintenant.
Alice n'en revient toujours pas : comment a-t-il réussi à leur dissimuler une chose pareille ? Comment ont-ils tous pu être aussi aveugles ? Elle songe alors avec effroi à toutes les fois où elle l'a entendu tousser cet hiver, à son essoufflement à chaque fois qu'il monte un étage, aux matins d'hiver où il lui avait paru plus pâle et plus cerné qu'à l'accoutumée. Elle n'avait rien remarqué. Ou plutôt, elle n'avait pas voulu voir.
— Comment a-t-on pu passer à côté de ça ? s'interroge Caitlin, à haute voix. Dans La vie dans les veines, il dit clairement qu'il est malade.
— Et il y a aussi la chanson Nos cœurs empoisonnés, renchérit Mike, dont la peau n'a toujours pas repris de couleurs.
Mortifiée, Alice ne peut qu'hocher la tête. Nos cœurs empoisonnés raconte la lutte d'un homme contre sa maladie et décrit à quel point elle empoisonne aussi les gens autour de lui. Kit et Jay ont chacun un couplet dans cette chanson. Et Freddie ne chante que l'intro et les refrains, le bridge étant construit sous la forme de question-réponse entre lui et Kit et Jay. Il ne chante ni l'outro ni le refrain final, car son personnage est mort.
C'est à cet instant qu'Alice réalise qu'elle le sait depuis le début. Elle n'en avait juste pas conscience. Effarée, elle porte la main à son front et se tourne vers Luke.
— Tu avais raison, souffle-t-elle. La réponse était sous nos yeux depuis le début.
Il lui jette un regard désolé avant de déclarer :
— Ça ne sert à rien de culpabiliser. S'il voulait vraiment que tout le monde le sache, il aurait été plus clair. Il ne voulait pas que vous le sachiez, et la meilleure façon de cacher un secret aussi lourd, c'est de le dévoiler au monde entier.
— Pauvre Emmy ! Je comprends mieux pourquoi ça se passe si mal, soupire Caitlin en fixant la porte de la chambre de Luke comme si c'était une montagne infranchissable.
— Il fait ce qu'il croit être juste, objecte Mike. La seule raison pour laquelle je lui en veux est qu'il persiste à briser le cœur d'Emmy. Si de toute façon ça finira par arriver, autant qu'il profite du temps qu'il lui reste, non ?
— Je pense qu'il ne veut pas que l'histoire se répète, argue Luke. Il a grandi sans son père et a vu sa mère triste toute sa vie à cause de sa mort brutale. A mon avis, il ne veut pas infliger la même chose à Em.
Alice soupire profondément. Elle comprend à présent pour Kit a eu l'air si malheureux, ce jour-là, quand elle lui a dit qu'Emmy était amoureuse de Freddie. Il avait eu l'air si lugubre ! Elle sait maintenant que c'était parce que, même s'il existait un univers dans lequel Freddie changeait d'avis et acceptait d'être avec Emmy, il finissait toujours et irrévocablement par mourir et par la laisser. Il n'y avait pas de fin heureuse. Pas pour eux.
Elle comprend aussi la frénésie avec laquelle il écrit et compose ses chansons. Chacune sera peut-être sa dernière.
Mike respire un grand coup et déclare, d'une voix dure :
— Peu importe. Il faut qu'il choisisse, et qu'il s'y tienne. Soit il reste avec Em, soit il s'en va, mais il ne peut pas faire un peu des deux.
— Tu n'as pas tort, admet Caitlin. Je n'aimerais pas être à leur place. Je ne sais même pas ce qui est le mieux pour eux !
C'est au tour d'Alice de prendre la parole :
— Mieux vaut un bonheur éphémère qu'une vie sans rien de tout ça. Moi, je préfère les voir ensemble, même si ce n'est que pour quelques temps, plutôt qu'Emmy passe sa vie à regretter leur relation avortée.
— Je ne suis pas certain qu'il l'entende de cette oreille, objecte Luke avec douceur.
Alice se tourne vers lui, une lueur farouche dansant dans ses yeux bruns et plante son regard déterminé dans le sien.
— On sera là. Quand il mourra, on sera là pour Emmy. On sera avec elle.
A côté d'elle, Caitlin frissonne. Alice hausse un sourcil à son attention.
— C'est effrayant, que tu en parles si facilement, explique-t-elle, un pli soucieux barrant son front.
— De quoi, la mort ? s'étonne Alice. Ça va tous nous arriver un jour. Il faut en parler.
— Ce mot est terrifiant, chuchote-t-elle, les paupières closes. Il blesse les gens de façon irrémédiable, leur fait faire des choses insensées et ne laisse qu'un trou béant, qui ne se referme jamais vraiment.
— Caitlin, je ne savais pas que tu en étais autant terrifiée, s'immisce Mike, en posant sa main sur son épaule. Ce qu'ils essaient de dire, c'est que c'est dans l'ordre des choses, même si c'est une notion qui demeure abstraite et mal comprise.
Caitlin ouvre les yeux et les garde fixés sur Luke.
— C'est à cause de la mort que Zoey m'a laissée, tout comme c'est à cause d'elle que tu as quitté Emmy.
Luke pousse un profond soupir, comme si ce souvenir lui était aussi douloureux que s'il s'était produit la veille.
— C'est vrai, admet-il. J'étais sous le choc et je n'avais pas compris que ce n'était pas de me faute. Je croyais ne rien mériter, y compris la vie qui m'était offerte.
Alice frissonne. Elle déteste l'entendre parler ainsi, elle déteste imaginer ce qu'il a pu éprouver et ne pas avoir été là au moment où il en avait le plus besoin.
— Mais je me trompais, poursuit Luke en détaillant Caitlin avec gentillesse. La vie est un cadeau, et il n'est pas empoisonné, et il n'y a pas d'existence qui a plus de valeur qu'une autre.
— Comment peut-on s'habituer à l'absence perpétuelle de quelqu'un qu'on aime autant ? questionne-t-elle.
— Tu ne peux pas, répond gravement Luke. J'aime penser qu'Anna est aujourd'hui dans un endroit dépourvu de douleurs, qu'elle est apaisée et qu'elle ne souffre plus. Parfois, j'imagine même qu'elle veille sur nous. Quelque part, elle vit encore à travers moi, et je sais que mes parents voient encore ses yeux derrière les miens. Il n'y pas de vie sans mort, et pas de mort sans vie.
Il ponctue sa phrase par un sourire encourageant.
— Ça ne doit pas être un frein pour vivre, au contraire.
Alice hoche la tête pour appuyer ses dires et aperçoit Caitlin faire de même, bien qu'elle n'ait pas encore changé d'avis sur la question.
— En tout cas, reprend Mike, maintenant qu'on est au courant, il faut absolument qu'on voit ce qu'on peut faire pour l'aider. Est-ce qu'il y a des trucs qu'il ne peut plus faire ? Comment ça se traduit dans la vie courante ? Est-ce qu'il s'est déjà forcé à faire des choses qu'il ne pouvait pas faire juste pour qu'on se doute de rien ?
Luke ouvre de gros yeux et Alice songe un instant qu'il va l'étrangler pour sa question mal posée, surtout que Mike poursuit ses questions :
— Est-ce qu'il peut conduire ? Cuisiner ? Entretenir la maison ?
— Michael, commence Caitlin d'un ton réprobateur, avant d'être coupée par le concerné.
— Je suis malade, pas infirme. Il y a des choses que je suis encore capable de faire.
Freddie a parlé d'un ton amer, qu'Alice n'a encore jamais entendu. Il se tient à quelques pas d'eux, la tête haute, le corps rigide, les épaules droites. Seul son visage fatigué atteste de la violence de la tempête qui l'a secoué.
Emmy est à ses côtés, le menton redressé, malgré les traces de larmes qui maculent encore ses joues. Elle lui offre un sourire timide qu'Alice s'empresse de lui rendre. Que se sont-ils dit ? Rien dans leur attitude ne permet à la jeune femme d'en avoir la moindre idée.
— Si vous voulez vraiment m'aider, alors ne changez pas votre façon de me voir. C'est le seul cadeau que vous pouvez me faire.
— Pardon, s'excuse Mike, les joues cuisantes de honte.
— J'ai l'habitude. Si tu n'as rien remarqué, c'est parce qu'elle n'a pas encore atteint de stade handicapant. Mais, si tu avais fait du sport avec moi, tu aurais vite remarqué mes problèmes respiratoires.
Toutes les fois où Alice l'a vu sortir de la piscine, aussi essoufflé que s'il avait nagé un deux cent mètres olympiques, lui reviennent tout d'un coup à l'esprit. Elle ne s'en était jamais formalisée, lui, Kit et Jay avaient fait comme si c'était normal, quand bien même il n'avait pas nagé très longtemps.
— Tu es moins essoufflé qu'au début de l'été, lorsque tu nages, lance alors Alice en lui offrant un sourire taquin.
— C'est vrai ?! s'étonne le chanteur.
Alice confirme en hochant la tête.
— Je m'étais simplement dit que tu manquais d'entraînement, explique-t-elle. Jamais je n'aurais pensé que c'était parce que tu étais malade.
Freddie hausse les épaules, son sourire envolé. Le cœur d'Alice se comprime dans sa poitrine.
— Je ne sais pas si je dois être soulagé ou inquiet du fait que vous n'ayez rien vu, avoue le chanteur. À chaque fois que je me vois autrement dans les yeux des gens, ma santé s'empresse de me rattraper et de me rappeler que je ne peux pas être comme tout le monde.
Alice aurait aimé plaisanter sur le fait qu'il était hors du commun, étant donné qu'il était le chanteur principal d'un des plus gros groupes de tous les temps, mais n'en est pas capable, du fait de son ton aigre.
Jamais une amertume ne lui a paru aussi justifiée. Parce qu'aucun d'eux ne réagissait comme il le fallait. Parce qu'on ne se rend compte de la valeur des choses qu'une fois qu'on les a perdues.
Alice décide à cet instant de s'excuser.
— Pourquoi tu m'as laissée te dire tout ça toute à l'heure ?! Je suis désolée ! s'exclame-t-elle, réellement horrifiée par les propos qu'elle a tenus plus tôt.
Elle les jauge un instant, lui et sa résilience à toute épreuve. Il se contente de l'observer avec compassion.
— Tu étais en colère. Tu t'inquiétais simplement pour Em.
— Oh, Freddie, soupire Alice, bouleversée.
Sans lui laisser le temps de répondre, elle se précipite sur lui et le serre dans ses bras. Il se fige et met quelques instants à poser ses mains sur le haut de son dos. La batteuse se demande alors combien de fois il a eu besoin qu'on lui témoigne de l'affection, et combien de fois il n'en n'a pas reçu.
— Je m'inquiète aussi pour toi, dit-elle en le relâchant.
— Il ne faut pas, s'empresse-t-il de répondre, sans ciller.
— Tu ne pourras pas m'en empêcher, argue la jeune femme en se reculant un peu.
Elle l'observe sous un jour nouveau et se demande si ses pommettes saillantes et son corps maigre sont dûs à ses séjours à l'hôpital. Elle décide de s'inspirer de sa compassion et lui sourit avec bienveillance.
— Ça te prendra du temps, mais tu finiras par accepter qu'on tient à toi.
Il ne répond rien, car son ton est sans appel. À côté de lui, Emmy glisse ses doigts dans les siens et presse sa paume contre la sienne. Le chanteur tressaille et lui jette un regard teinté d'incompréhension. La chanteuse ne dit rien mais elle redresse tout de même ses épaules.
Alice sourit. « Bien, songe-t-elle, à force de persuasion, il finira par changer d'avis. »
— Je propose qu'on se change les idées autour de crêpes, suggère alors Emmy. Je vais aller faire la pâte. Kit et Jay doivent se demander ce qu'on fait tous là-haut ! ajoute-t-elle, en lâchant la main de Freddie.
Elle lui sourit et Alice aperçoit des fissures sur le visage du chanteur. Caitlin et Luke emboîtent le pas à Emmy, et Alice s'apprête à faire de même, jugeant que Mike devrait encore discuter avec Freddie.
Mais il retient Alice par le bras, alors que les trois autres ont déjà disparu dans l'escalier.
— Est-ce que vous pouvez m'aider ? demande-t-il en les fixant tour à tour.
La batteuse lutte contre le sentiment de vertige qui l'assaille.
— T'aider à quoi ? questionne Mike, en réponse.
Il respire un grand coup pour se redonner contenance et déclare, d'une voix claire et nette :
— À convaincre Emmy de me laisser.
Alice secoue la tête.
— Non, il en est hors de question.
— Pourquoi ? Maintenant que vous savez que je ne peux pas être avec elle, pourquoi ne voulez-vous pas m'aider à lui épargner une souffrance supplémentaire ? Je ne comprends pas ! s'exclame-t-il d'une voix brisée.
— Parce que je refuse de m'impliquer là-dedans. Et aussi parce que je ne suis pas d'accord avec toi. Si tu as peur qu'elle ne se remette pas de ta mort, sache que je serai là pour la rattraper et l'aider à avancer.
Alice s'est exprimée d'un ton doux et inflexible à la fois. Elle ne changera pas d'avis, et le calme qui l'habite la rassure sur un point essentiel : elle a pris la bonne décision. Les traits du chanteur se décomposent, et il se tourne vers Mike, qui n'a pas encore pipé mot.
— Il faut que tu choisisses, Frederick. Ou bien tu restes loin d'elle, ou bien tu es avec elle. Si tu ne peux pas t'empêcher de la garder près de toi, alors c'est peut-être que tu devrais t'autoriser à l'aimer et à la laisser te combler.
Freddie ne répond rien et il semble à Alice qu'elle et Mike viennent de lui asséner le coup de grâce.
— Ça aussi, ça te prendra du temps, reprend Alice en détaillant son visage avec patience. C'est un chemin que tu dois parcourir seul. Mais elle t'attendra au bout, et tu le sais.
Mike hoche la tête. Alice ponctue sa tirade d'un sourire plein de force pour le chanteur et s'aventure à son tour dans les escaliers. Elle entend déjà des rires depuis le salon. Elle entend aussi le début des excuses de Mike et accélère le pas.
Lorsqu'elle arrive dans la cuisine, tout le monde a le nez dans les ingrédients et Emmy semble peiner à se faire entendre.
— Je suis française, vous devriez m'écouter ! râle-t-elle. Je sais mieux que vous comment on fait des crêpes !
Alice prend le relais : hors de question qu'elle laisse Kit ruiner une seconde fois ses merveilleuses crêpes ! Luke se montre plus sage que lui : il obéit précisément à chacune de ses indications tant et si bien qu'Alice se demande s'il n'a pas déjà été commis.
Au bout d'un moment, Mike les rejoint, mais sans Freddie.
— Il est encore en haut, indique Mike à l'attention d'Emmy. Si j'étais toi, j'irais le voir.
Kit soupire en voyant les cheveux bleus d'Emmy disparaître dans les escaliers.
— Cette histoire me fend le cœur ! s'exclame Alice, en fixant son petit-ami.
Kit hausse les épaules.
— Malheureusement, il n'y a rien à faire.
Personne n'ose répondre quoi que ce soit et le silence s'installe, seulement troublé par la musique que diffuse l'enceinte de Caitlin.
Puis, quelques minutes plus tard, les conversations reprennent. Personne n'est surpris lorsqu'Emmy revient, cette fois accompagnée par Freddie, dont les joues rouges attestent du baiser qu'Alice les a vus échanger au milieu de l'escalier.
Si Alice avait dû revivre en boucle une soirée, elle aurait choisi celle-là. Elle a entendu les rires de tout le monde, et pour la première fois, ils étaient sincères et juste chez chacun d'eux. Personne n'était mis de côté, tout le monde était dans le moment présent. Joyeux, légers. Ils étaient loin de la célébrité, des gens qui en attendaient trop d'eux et du sombre destin qui les attendait. Ils étaient juste des jeunes découvrant la vie. Cet été avait un goût d'éternité, et Alice s'en souviendra toujours.
Plus tard, lorsqu'elle sera allongée dans le lit de Kit, elle songera à tout ce qu'elle a appris sur Freddie et elle versera quelques larmes que Kit séchera patiemment. Il lui dira qu'elle ne doit surtout pas penser à ce qui les attend, car à trop penser au futur, on en oublie de vivre. Il lui murmurera que de belles années se profilent encore et que l'espoir n'est dangereux que pour ceux qui n'en ont pas. Elle se souviendra que tout le monde était heureux.
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Bonsoir ! Comment allez-vous ?
Merci d'avoir lu ce chapitre ! Qu'en pensez-vous ?
À votre avis, qu'est-ce qu'Emmy et Freddie ont bien pu se dire pendant qu'Alice, Mike, Caitlin et Luke discutaient ? D'ailleurs que pensez-vous de leur discussion à eux ? Êtes-vous d'accord avec ce qu'ils disent, notamment au niveau de la mort ?
Que pensez-vous des réactions de Mike et Alice, lorsque Freddie leur demande de l'aide pour convaincre Emmy de s'éloigner de lui ? Pensez-vous qu'il va tenir compte de leurs avis ?
N'hésitez pas à me donner votre avis, c'est toujours un plaisir de vous lire et de vous répondre ! 💜
A la semaine prochaine pour la suite !
Prenez bien soin de vous ! 🎶🩶
(PS : cette fois, le prochain chapitre sera bien du point de vue d'Emmy, j'ai choisi d'inverser les deux chapitres pour avoir d'abord la vision d'Alice !)
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