⇝ Chapitre 10
Aussitôt la salle de concert gagnée, l'effervescence et l'euphorie noient l'appréhension. Cette sensation, cette impatience inhérente à la scène, m'a manqué. C'est comme replonger dans une de ses passions après une longue pause ou relire son roman préféré.
Les professeurs ne souhaitant pas que nous nous mêlions aux lycéens, nous nous sommes retrouvés dans une loge séparée. Nous avons à peine croisé les lycéens qui chantaient et jouaient ce soir. Je soupçonne Mathieu de ne pas avoir voulu nous rappeler Solange à Alice et moi. Et je présume qu'il n'a pas non plus envie d'être triste ce soir. Il l'avait décrite comme effrontée, sûr d'elle, travailleuse, et volontaire. Il pensait qu'elle avait les épaules pour la célébrité.
Le décès de Solange a attristé tout le monde, y compris le corps enseignant, et le lycée avait même fait l'objet d'une enquête. Il en était ressorti que plus personne n'avait le droit de quitter le lycée sans autorisation écrite des parents pour rentrer chez eux pour les vacances ou pour un rendez-vous médical. Plus de carte de sortie. C'était sans doute mieux comme ça.
Plongée dans cette pièce en compagnie de mes amis les plus chers, je ne peux m'empêcher de sourire d'un air béat. C'est tellement beau que c'en est irréel. Jamais je ne pensais pouvoir remonter sur scène. Et pourtant. Et pourtant !
Un sourire perlé d'espoir nous unit tous les cinq. Même si nos efforts s'avèrent vains, nous ne tirerons pas notre révérence sans nous être déchaînés. Si ce soir doit être le dernier à vivre pour la musique, alors ce sera le plus grandiose. Le plus vibrant, le plus étincelant. Ce soir, la musique de nos cinq âmes ravagera la salle à chaque éclair, déracinera les esprits à chaque bourrasque et les flots houleux écraseront les plus réticents. L'épais fil rouge qui nous relie tous les cinq ne sera plus un secret pour personne.
Au pied de la scène, nous passons nos bras autour de nos épaules, formant un cercle fermé tandis que les applaudissements pour les lycéens nous précédant perdurent. Nous fermons les yeux.
— C'est le moment, murmure Caitlin. Le nôtre. On va tout donner. C'est notre seule chance, mais eux ne le savent pas. D'ailleurs ils n'ont pas à le savoir ! Jouons et chantons comme si c'était la dernière fois ! C'est dans nos veines de toute façon, on ne peut pas lutter contre notre vraie nature !
J'ouvre les paupières et croise le regard de mes quatre amis.
— On va y arriver. Je me briserai les cordes vocales s'il le faut, mais nous allons briller si fort qu'ils en seront aveuglés pour toute leur vie !
— A Sad Joy ! conclut Luke, en nous gratifiant tous d'un joyeux sourire. Je suis heureux d'être avec vous pour ce moment.
— A Sad Joy ! répétons-nous, en chœur.
Puis, nous nous séparons. Je respire un grand coup et me place derrière Luke. Je suis au milieu entre lui et Mike, tandis que Caitlin et Alice sont derrière, au synthétiseur et à la batterie.
Et quand je monte sur scène, la fièvre m'accompagne à chacun de mes pas, me guide un peu plus. Elle bat contre mon oreille, comme un second cœur.
C'est alors que je l'entends. Une clameur. Elle s'envole doucement jusqu'à mes oreilles, comme un murmure, comme un ruisseau. Elle enfle telle une rivière, et finit aussi forte qu'une cascade. Notre nom, Sad Joy, scandé de toute part dans la salle. Une larme roule sur ma joue lorsque j'attrape ma guitare. Je croise le regard encourageant et plein de fierté de Mathieu qui s'apprête à nous laisser la scène.
Et contrairement à ce soir du mois d'août, l'angoisse ne me broie pas les entrailles quand je me place derrière le micro.
— Bonsoir !
Ma voix résonne étrangement dans la salle. Les ondes la traversent tout entière et en emplissent chaque centimètre carré.
— Je ne pensais pas revenir un jour, je poursuis, gagnant en assurance. Mais qu'importe, nous voici ! Avant que nous commencions, nous souhaiterions commencer par remercier notre ancien professeur, Mathieu Wiener, qui nous a proposé de participer à ce concert.
Un tonnerre d'applaudissements éclate dans la salle en honneur de Mathieu, qui, debout à côté de M. Ginsique, se contente de sourire et de hocher la tête.
— Nous souhaitons le remercier de croire en nous et de nous apporter autant d'aide et de soutien, continue Alice, sa voix claire rebondissant sur toute la pièce.
Les applaudissements reprennent de plus belle et Luke est obligé d'attendre avant de prendre la parole. Je ne peux pas empêcher mon sourire idiot de s'étaler sur mon visage. Les gens sont sans conteste contents de nous (re)voir !
— A présent, reprend Luke avec son léger accent, nous allons pouvoir commencer. Et j'espère que les parents ici présents ne vont pas trop nous détester pour la chanson que nous allons chanter. Oui, je parle bien de la chanson qui vous casse les oreilles depuis bientôt un mois.
Quelques rires retentissent quand il annonce enfin le premier titre.
— Mes amis, nous vous présentons Into The Unknown, du groupe Panic ! At the Disco !
On nous applaudit encore quelques secondes, puis le silence se fait. Nous échangeons un rapide coup d'œil, et nous jetons à corps perdu du sommet de la falaise.
[Il devrait y avoir un GIF/vidéo ici. Procédez à une mise à jour de l'application pour le voir.]
— Ah-ah, oh-oh ! Ah-ah, oh-oh, oh-oh ! s'exclament Alice, Caitlin et Mike, sous les cris de nos instruments.
— Into the unknown ! entonné-je
— Into the unknown ! répète Luke
— Into the unknown ! m'exclamé-je encore.
— Ah-ah, oh-oh !
Les projecteurs balaient la pièce et j'aperçois plusieurs personnes sourire et des enfants sautiller, danser.
— I can hear you but I won't ! Some look for trouble ! While others don't ! démarre Luke.
— There's a thousand reasons I should go about my day ! continué-je. And ignore your whispers, which I wish would go away, oh-oh-oh ! Whoa-oh !
Je chante sur les notes légères de ma guitare électrique. Des frissons remontent le long de mes bras. Je suis sur scène. Entourée de mes amies. Et tout me paraît soudainement limpide. Tout est à sa place, je suis là où je dois être.
— You're not a voice ! You're just a ringing in my ear ! enchaîne Luke
— And if I heard you, which I don't ! I'm spoken for, I fear !
— Everyone I've ever loved is here within these walls !
— I'm sorry, secret siren, but I'm blocking out your calls ! affirmé-je, la voix rauque et pleine de conviction.
— I've had my adventure, continue Luke, les cheveux déjà dans les yeux.
— I don't need something new, complété-je.
— I'm afraid of what I'm risking if I follow you ! m'écrié-je, en même temps que Luke.
Je me redresse de toute ma hauteur pour le refrain.
— Into the unknown !
— Into the unknown ! répète Luke
— Into the unknown ! clamé-je, le corps toujours couvert de frissons.
— Ah-ah, oh-oh ! Ah-ah, oh-oh, oh-oh !
La mélodie reprend plus doucement, telle une accalmie au milieu de la tempête. Mes doigts brûlent de laisser ma guitare hurler.
— What do you want? 'Cause you've been keeping me awake ! reprend Luke.
— Are you here to distract me so I make a big mistake ? demandé-je, sourire aux lèvres.
— Or are you someone out there who's a little bit like me ? interroge Luke.
— Who knows deep down I'm not where I'm meant to be ?
— Every day's a little harder as I feel your power grow !
Comme la première fois, nous concluons ensemble le couplet :
— Don't you know there's part of me that longs to go !
Cette fois, Luke reprend le refrain.
— Into the unknown !
— Into the unknown ! dis-je encore, les yeux rivés à ma guitare pour que Luke puisse se concentrer sur le chant.
— Into the unknown !
Sa voix est parfaite, sans la moindre fêlure et en même temps riche de maîtrise et de puissance. Tout ce que Mathieu aime.
— Ah-ah, oh-oh ! Ah-ah, oh-oh, oh-oh !
Luke ferme les yeux avant de s'exclamer, plus puissamment encore :
— Whoa-oh-oh !
— Are you out there ? questionné-je.
— Do you know me ? enchaîne Luke.
— Can you feel me ? demandé-je encore.
— Can you show me ? conclut Luke.
— Ah-ah, oh-oh !
— Oh-oh, oh-oh ! répété-je.
— Ah-ah, oh-oh !
— Oh-oh, oh-oh !
— Ah-ah, oh-oh ! Oh-oh, oh-oh ! Oh-oh, oh-oh ! Oh-oh, oh-oh ! Oh-oh, oh-oh ! entonnons-nous, tous les cinq.
— Where are you going ? Don't leave me alone ! reprend Luke.
— How do I follow you ! clamé-je.
— Into the unknown ! terminé-je, la voix de Luke entremêlée à la mienne.
Une salve d'applaudissements nous accueillit, affublée de cris et de sifflements.
Une légère appréhension pointe le bout de son nez quand Caitlin reprend la main :
— Merci, merci ! Maintenant que nous avons toute votre attention, nous pouvons passer à la chanson suivante... qui est l'une des nôtres ! Elle s'appelle Les violons continuent de chanter et parle de deux filles tombées amoureuses, que la vie a fini par séparer.
Elle garde le sourire en présentant la chanson, sa chanson. C'est toujours quelque chose, de pouvoir utiliser la musique comme catharsis. Et personne ne sait à quel point elle est personnelle (ou à quel point elle ne l'est pas).
Caitlin règle son synthétiseur sur le violon et démarre doucement la chanson. Luke et moi y ajoutons quelques notes humides comme le vent d'automne.
— C'était un soir d'octobre, deux filles aux écharpes ocre ! Les violons chantaient et les feuilles tombaient. De leurs lèvres s'échappa une baiser. Maintenant, je pense qu'il s'est envolé ! commence Caitlin, d'une voix calme et chaude comme les marrons.
Alice et Mike ajoutent un rythme lent qui tambourine la chanson comme une pluie d'été.
— Les violons continuent de chanter et les feuilles de tomber. Je ne peux pas oublier la pluie mêlée de larmes. Ni le charme des colchiques dans les prés. Je ne peux pas oublier ton rire emporté dans l'alizé. Non, je ne peux pas oublier ! chanté-je, avec Caitlin.
— C'était un soir d'octobre, deux filles aux écharpes ocre. Les violons chantaient et les feuilles tombaient, reprend Caitlin.
Les feuilles fauves de ma guitare s'évanouissent au profit de celles de celle de Luke, plus vives encore.
— Elle m'a dit que les violons étaient cassés, continué-je, les yeux rivés sur le fond de la salle. Et qu'octobre était mort. J'ai regardé les arbres aux couleurs fauve, et j'ai pensé qu'elle danserait toujours dans mon octobre.
Je crains que si je ferme les yeux, la mélancolie automnale puisse m'envahir. Il me semble presque sentir les feuilles humides tourbillonner dans le vent doux et l'odeur de la pluie, que j'aime tant.
— Les violons continuent de chanter et les feuilles de tomber. Je ne peux pas oublier la pluie mêlée de larmes. Ni le charme des colchiques dans les prés. Je ne peux pas oublier ton rire emporté dans l'alizé. Non, je ne peux pas oublier ! chanté-je, avec Caitlin et Alice.
Les larmes de l'automne coulent sur mes joues quand je prends conscience que le public chante avec nous. Les gens chantent et connaissent notre chanson !
Je souris avant d'entamer le bridge.
— Les violons ont sangloté, les feuilles ont disparu. Je n'embrasse plus que la brume. Et bientôt il ne me restera plus que l'amertume.
Je reprends ma guitare et la laisse exprimer toute sa mélancolie automnale. Un instant, il n'y a plus que la mélodie. Les violons qui sanglotent, les guitares qui pleurent, la basse et la batterie qui craquent comme les arbres sous le mistral. Puis, Caitlin termine la chanson avec la coda, accompagnée par un public qui connaît les paroles par cœur.
— Les châtaignes écorchent mes pieds, je n'ai plus la force de bouger à temps. Les violons continuent de chanter et les feuilles de tomber.
Je n'ai pas la force de passer au printemps. Je préfère danser dans mon octobre.
Un orage d'applaudissements et de sifflements accueillent notre chanson. Je souris à Caitlin, fière d'avoir pris le pari de chanter nos chansons.
— Merci ! Si vous souhaitez avoir notre chanson en CD, sachez qu'il y a un petit stand à la sortie ! reprend Mike, radieux. Il s'agit du titre phare de notre EP Dans le vent. D'ailleurs, nous allons vous interpréter une autre chanson issu de notre cru ! Si vous aimez la nuit, celle-là est pour vous ! Et si elle s'appelle Nyx, c'est parce que Luke aime étaler sa science, conclut Mike en tirant la langue à son meilleur ami.
Le trait d'humour de Mike est récompensé par des éclats de rire. Puis, nous entonnons notre seconde chanson. Celle-ci a des notes à l'orgue, bien plus sombres, en plus des pointes de violons, que Luke et moi jouons à tour de rôle sur le deuxième synthétiseur entre nous selon lequel d'entre nous joue de la guitare.
Luke entame le premier couplet. Cette chanson, nous l'avons écrite ensemble, tous les cinq, sur des paroles et des mélodies griffonnées par Luke et moi. J'aime penser que c'est un peu notre chanson à tous les deux.
— La nuit est pleine de profondeur,
Oh, je parle à Nyx dès que j'ai peur.
Elle m'a proposé un pacte, oh.
Ma peur contre de l'audace, oh.
Je me lance dans le refrain, rassurée par l'écho de notre mélodie.
— Il était enveloppé par la nuit, nox, noctis.
Il s'est noyé au milieu des fantômes.
Il ne sort pas, il en est un, oh.
Je suis une étoile, oh, suspendue, oh, par un fil.
La nuit elle-même danse sous mes paupières. Elle aime tourmenter ses victimes.
— Je lui ai seulement dit que la vie me terrifiait,
Que la nuit, Nyx, rendait le cauchemar réel.
Maintenant, plus rien ne m'effraie,
Pas même la mort, pas même l'amour, pas même le réveil.
Je rouvre les yeux pour le refrain, que je sente seule, encore une fois, accompagnée par les instruments.
— Il était enveloppé par la nuit, nox, noctis.
Il s'est noyé au milieu des fantômes.
Il ne sort pas, il en est un, oh.
Je suis une étoile, oh, suspendue, oh, par un fil.
Je reprends ma guitare pour jouer un bref interlude musicale, où l'orgue tonitrue l'immuabilité du pacte passé par le chanteur avec Nyx. Puis, Luke se glisse encore dans la peau du narrateur, qui, désespéré, a commis une erreur,.
— Vide, pressé comme un citron, je n'ai d'humain que l'apparence.
Quand on n'a plus peur, on ne ressent rien.
Elle a fait de moi son monstre, son pantin.
J'ai embrassé la nuit elle-même et elle m'a volé toute mon essence.
Je répète le refrain, accompagnée cette fois par Alice. Nous sommes un peu comme des fantômes, témoins invisibles et impuissants de ce qui se déroule sous nos yeux depuis longtemps éteints.
— Il était enveloppé par la nuit, nox, noctis.
Il s'est noyé au milieu des fantômes.
Il ne sort pas, il en est un, oh.
Je suis une étoile, oh, suspendue, oh, par un fil.
La musique prend encore en intensité. Les doigts de Caitlin ne se contentent plus de danser sur les touchés, mais les martèlent, comme de la pluie battante sur un toit de taule.
La voix plus véhémente, Luke entonne le dernier couplet, point culminant de la chanson.
— Chaque année, elle me laisse cinq minutes, oh.
Où je suis humain mais je ne ressens rien, oh.
L'absence de peur est aussi pesante que sa présence.
Alors je me jette dans la nuit même.
Cette fois, nous reprenons tous les cinq le refrain sous les supplications des instruments.
— Il était enveloppé par la nuit, nox, noctis.
Il s'est noyé au milieu des fantômes.
Il ne sort pas, il en est un, oh.
Je suis une étoile, oh, suspendue, oh, par un fil.
Puis, imperceptiblement, les instruments se taisent, jusqu'à ne devenir pas plus fort qu'un murmure. D'une voix paisible, je répète une dernière fois le refrain.
— Il était enveloppé par la nuit, nox, noctis.
Il s'est noyé au milieu des fantômes.
Il ne sort pas, il en est un, oh.
Je suis une étoile, oh, suspendue, oh, par un fil.
Il n'y a pas plus plaisant que de chanter ses propres chansons avec un public qui en connaît les paroles. Un tonnerre d'applaudissements retentit dans toute la salle. Je prends une profonde respiration, légère comme une plume.
— Merci ! lance Alice pour obtenir à nouveau le silence. A présent, nous allons revenir à nos classiques avec une reprise du groupe Dark Fate.
Après avoir balayé la salle d'un sourire fier, elle reprend :
— Cette chanson parle au musicien qui vit en chacun de nous. Par les temps qui courent, rappelons que la musique est un pansement efficace. Voici donc La vie dans les veines !
A capella, Luke se lance dans le premier couplet.
— Devant moi les ombres dansent, ce n'est pas le monde.
Je joue quelques notes dès la fin de la première phrase, accompagnant la voix de Luke, qui enchaîne aussitôt avec la fin du couplet, où Alice et Mike me rejoignent.
— J'espère me noyer dans l'onde,
Avant que les ombres ne m'inondent.
Les notes qui s'échappent de ma guitare sont douces lorsque Luke entonne le refrain, accompagné de plus par Caitlin au piano.
— Docteur, j'suis malade, j'ai la vie dans les veines
Je veux tout faire, tout savoir et oublier la peine
Luke ajoute maintenant sa guitare. Je poursuis avec le deuxième couplet.
— Les ombres m'ont étouffé et mon cœur s'est arrêté.
Il ne s'est réveillé que grâce à la mélopée,
La mélopée qui m'empêche de mourir, me fait exister.
Alice s'escrime ensuite sur le deuxième refrain, son préféré.
— Docteur, j'suis malade, j'ai la musique dans le sang,
C'est bouillonnant, frémissant, un peu comme les gémissements du vent
Caitlin se rue ensuite sur le troisième couplet, la voix grave et mélodieuse.
— Dès que la musique jaillit, les ombres s'éloignent.
Elles qui craignent la lumière et la pléiade.
Me voilà humain, le temps d'une chanson, d'une belle étoile
Puis, c'est au tour de Mike de s'immiscer dans la chanson avec le troisième refrain.
— Docteur j'suis malade, j'ai la vie dans les veines,
Je suis comme un flacon d'hydrogène sous pression, avec trop d'oxygène
Enfin, sous les acclamations de la salle, Luke termine avec le quatrième et dernier couplet.
— Dans mes veines, des étoiles, sur mon cœur des étincelles.
Je suis le feu, oh, dans mon âme pas de cendres qui s'amoncellent,
Seulement des flammes qui en lèchent chaque parcelle
— Docteur, je suis malade : je suis vivant ! conclus-je, avec mes quatre amis et le public qui ne connaît que trop bien cette chanson.
On nous applaudit à tout rompre et je savoure l'instant, l'émotion d'être aussi bien entourée. Mes problèmes me semblent ridicules, minuscules à côté de la montagne d'euphorie qui tremble dans ma poitrine. Je n'ai jamais autant voulu quelque chose. Et comme j'ai déjà perdu ce rêve que j'aime plus que moi-même, cette étincelle que j'avais peur d'étouffer, j'en connais toute sa valeur. Je ne m'arrêterai pas là, c'est certain.
— Eh oui, sacré groupe ! commenté-je pour regagner l'attention de la salle. C'est déjà la fin de la soirée. Et pour cela, quoi de mieux que de se motiver et de se rappeler qu'un jour, on aura gravi la montagne et pourra en apprécier l'air frais ? Je crois sincèrement qu'il ne faut jamais baisser les bras, et continuer à travailler, quelque soit l'objectif qu'on souhaite atteindre.
Je marque une petite pause avant d'annoncer le titre final, l'apothéose de la soirée.
— Voici Rise Up, du groupe Smash Into Pieces !
Dès lors, la dernière chanson, la plus importante, celle au message le plus fort, démarrent sous nos doigts qui grattent cordes et touches.
[Il devrait y avoir un GIF/vidéo ici. Procédez à une mise à jour de l'application pour le voir.]
— Young hearts take all the deep cuts ! Old scars here to remind us of who we are ! How far we've come, commence doucement Luke.
Alice enchaîne sur la suite du couplet, puisque sa batterie n'est pas encore de la partie.
— We fall so we can get back up ! Fall down down on our knees ! With our face straight up ! Piece by piece we will pick ! Ourselves back up again !
Je lutte contre les souvenirs qui m'assaillent, le bruit atroce qui a résonné dans tout mon être, jusque dans mes os, quand mon rêve s'est brisé en un millier de fragments sous mes yeux impuissants. Quelque chose s'est éteint à ce moment-là.
Le groupe n'existait plus. Solange non plus. Et plus horrible encore, mon rêve non plus. La musique, qui m'avait portée jusque là, m'avait forgée de ses notes vrombissantes, n'était plus là non plus. Il ne me restait plus rien, à part un silence affligeant, des pensées dans lesquelles tourbillonnaient des millions de possibilités improbables et éclataient des larmes douloureuses. Mais le silence est aussi une chanson.
— Tearing down these walls ! Dreaming of a new horizon ! Out of ashes we will rise ! Rise up ! continue Caitlin, les doigts toujours agités au-dessus des touches de son clavier.
Cette chanson, nous l'avons remplie d'espoir jusqu'à ce qu'elle en déborde. C'est notre cri. Peut-être que cette fois, quelqu'un l'entendra et y répondra.
— Throw us to the wolves ! And we'll show you what we're made of ! s'exclame Mike, des larmes roulant déjà sur ses joues. Out of ashes we will rise ! Rise up out of ashes and dust wе will pick ourselves up ! We risе up !
Mes doigts reprennent leur course sur les cordes, précis, rapides et affûtés comme une lame.
— These cuts never leaves us the same ! We are what comes from our choices of yesterday ! From a taste of hell, reprend Luke, les yeux brillants lui aussi.
Quand je me jette avec force et abandon dans la suite du couplet, mon visage est brouillé par les larmes, mais tant pis, mon âme évacue des années passées à souffrir en silence. Mon espoir, qui prenait la poussière dans un coin de mon esprit, s'épanouit à présent comme une fleur au soleil.
— Fall down it's better to die trying ! Deep down find out who you are in the darkest place ! Piece by piece you will get your ass back up again ! m'exclamé-je.
— So we are ! chantent Mike et Luke.
— Tearing down these walls ! Dreaming of a new horizon ! Out of ashes we will rise ! Rise up ! m'écrié-je, aux côtés d'Alice.
Nos voix sont assurées. Plus jamais la confiance qui les habite ne les quittera.
— Throw us to the wolves ! And we'll show you what we're made of ! Out of ashes we will rise ! poursuivent Caitlin, Luke et Mike.
— Rise up out of ashes and dust we will pick ourselves up ! We rise up ! terminons-nous, tous les cinq.
Nos instruments frémissent davantage, joignant leurs aspirations aux nôtres. Mike s'élance dans le bridge avec une exaltation telle que de nouvelles larmes apparaissent au coin de mes yeux.
— Sometimes we need to break ! Before we get up again again again ! We need to believe in the impossible ! hurle-t-il, sa voix rauque emplie de vibrations pour la musique.
Et puis, d'une seule et même voix, unis par la vie qui coule dans nos veines, les notes et les mélodies qui les inondent, nous concluons la chanson. La tête bien haute, le regard au loin, et plus jamais tourné vers le sol et la poussière.
— Tearing down these walls ! Dreaming of a new horizon ! Out of ashes we will rise ! Rise up ! Throw us to the wolves ! And we'll show you what we're made of ! Out of ashes we will rise ! Rise up out of ashes and dust we will pick ourselves up ! We rise up !
Quand, sous les tempêtes d'applaudissements, je repose ma guitare, il me semble quitter soudainement le jardin protégé où nous étions. La fatigue m'assaille, me rompt les veines. Mes mains tremblent encore sous l'effort intense que je leur ai demandées. Qu'importe, nous avons tout donné et c'était merveilleux.
FIN DE LA PARTIE 1.
~
Bonsoir ! Comment allez-vous ?
Je suis super contente de vous retrouver avec ce chapitre ! Que pensez-vous de ce concert ? Quel a été votre moment préféré dedans ? 😁
Pensez-vous que Sad Joy a pu convaincre un des responsables de label et/ou maison de disques qui étaient présents ?
• Évidemment 😌🤘🏻🎸🎶
• Non 🙈👀😌
(si non, qu'imaginez-vous ?)
On se retrouve mardi pour le post concernant la partie 2, qui est, comme la partie 1, d'un point de vue encore inconnu... 👀
Prenez bien soin de vous ! 🧡🧡
(Et écoutez de la musique 🎶🧡)
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top