Chapitre 11
Je perdis instantanément mon sourire en voyant la mine qu'affichait Lucas. Il semblait à la fois terriblement inquiet et heureux de me voir, ce qui m'étonnait.
– Qu'est-ce qui se passe ? demandai-je tandis qu'il m'entraînait déjà à une vitesse folle dans le dédale de rues que nous devions parcourir en me tenant la main.
– Il était là, juste quelques minutes avant que tu sortes, expliqua-t-il en ralentissant la cadence pour que je puisse mieux le suivre – il était plus grand que moi, et ses longues jambes lui permettaient de faire de plus grandes enjambées.
– Tu l'as reconnu ?
– Je le reconnaîtrais entre mille, affirma-t-il. Dès qu'il a vu que je paraissais t'attendre, il est parti. Heureusement que tu es sortie en retard, sinon vous vous seriez croisés. D'ailleurs, pourquoi tu n'es pas sortie pile à l'heure ?
– Ma prof de philo m'a parlé un peu, elle s'inquiétait à propos du fait que je ne sois pas venue en cours hier.
– Et tu lui as répondu quoi ?
– Exactement ce que j'ai raconté à Tessa et Capucine. Je ne me sentais pas bien, alors j'ai préféré rester chez moi.
Lucas acquiesça. Je pensais la même chose que lui. Si je n'avais pas traîné un peu, je serais tombée nez à nez avec la personne que je détestais plus que tout au monde. Heureusement que cette "rencontre" n'avait pas eu lieu...
Mais pourquoi avait-il eu peur de Lucas ? Est-ce qu'il attendait que je sois seule pour agir ? Que personne ne soit à mes côtés ? Ou que je sois un instant moins prudente que je ne le suis désormais ? Que je fasse quelque chose qui lui laisserait une issue, une brèche par laquelle il pourrait se faufiler et m'attaquer ?
Le trajet passa rapidement, et je revins sur terre juste au moment où nous arrivions devant ma maison.
– Fais attention à toi, d'accord ? me lança Lucas en me lâchant la main tout doucement.
– Toi aussi, dis-je en m'éloignant de lui peu à peu. Et passe une bonne soirée !
Comme réponse, j'eus droit à un grand sourire. Je fis semblant de lui envoyer un baiser et soufflais pour qu'il s'envole jusqu'à lui. Il fit de même, amusé, puis il me tourna le dos, s'en allant. Je souris à mon tour et poussais la portail de ma maison.
– Alors, comment s'est passée ta journée ? demanda ma mère dès que je fus arrivée dans le salon.
– Magnifiquement bien ! Madame Durend s'est inquiétée pour mon absence d'hier, ajoutai-je.
– Ton professeur a l'air de beaucoup t'apprécier, répondit-elle. Qu'est-ce que tu lui as dit ?
– Que je ne m'étais pas sentie bien et que je devais me reposer, tout simplement. Et toi, ça a été ?
– Comme d'habitude, j'ai l'impression que personne ne me prend au sérieux alors que je fais mon maximum pour proposer des projets bien élaborés, soupira ma mère. Je suis la plus jeune du groupe et la moins expérimentée, alors bien sûr ça n'aide pas...
– Je suis certaine que tu réussiras à les impressionner, maman.
– Merci, ma chérie, mais ce n'est pas aussi simple...
Elle sembla perdue dans ses pensées pendant quelques instants, puis elle lança avec un soudain entrain :
– Ton père ne sera pas là ce soir, ça te dirait qu'on se fasse une petite soirée entre filles ?
– Carrément ! m'exclamai-je. Pop-corn et film, ça te va ?
– Je suis d'accord ! sourit ma mère. Et si tu allais poser tes affaires pendant que je commence à préparer le dîner ?
J'acquiesçais, puis je montais rapidement les escaliers. Je posais mon sac près de mon bureau, heureuse de pouvoir profiter d'une soirée tranquille avec ma mère. Ça allait me détendre, et vu la situation ce n'était pas plus mal...
J'allais quitter ma chambre pour rejoindre ma mère et l'aider à préparer à manger quand mon regard fut attiré par une chose inhabituelle. Sur mon lit, par dessus la couverture, se trouvait une rose blanche. Intriguée et très surprise par cette fleur qui n'était pas censée être là, je m'approchais doucement de mon lit, avec prudence, comme si elle étai dangereuse.
Délicatement, je pris la rose en faisant attention aux épines et je la fis tourner doucement entre mes doigts pour l'examiner en détail. Rien de particulier ne retint mon regard. C'était une rose ordinaire, et même son odeur était celle que je connaissais. Elle était tout à fait normale, en touts points.
Mais pourquoi était-elle là ? Qui l'avait placée ici ? M'était-elle destinée ? Comment avait-elle pu être déposée sur mon lit sans que mes parents s'en aperçoivent ? Tout était pourtant bien fermé à clé en notre absence, et ma fenêtre était très rarement ouverte quand je n'étais pas là...
La question de savoir qui l'avait posée ici me hantait plus que tout. Ça pouvait être n'importe qui, mais sans savoir quel était son but c'était difficile de définir son identité. Impossible que ce soit Lucas ou bien mes parents, puisque le premier était au lycée toute la journée et les deux autres n'avaient pas été à la maison avant ce soir. Je ne voyais qu'une possibilité, mais je ne voulais pas l'accepter. Je ne voulais pas voir la réalité en face.
C'était pourtant évident, de mon point de vue. Seulement, je ne savais toujours pas comment cette rose avait atterri sur mon lit, ou plutôt comment quelqu'un avait réussi à l'introduire ici sans que je m'en aperçoive, ou que quelqu'un d'autre s'en rende compte. Je ne pensais qu'à une seule personne qui pourrait être à l'origine de cet acte, et je préférais ne pas y penser. Cependant, au fur et à mesure que je réfléchissais, cette éventualité me semblait plus que probable et cela augmentait considérablement mon trouble.
Tournant la rose entre mes doigts, je me demandais une énième fois pourquoi elle était là et qui l'avait déposée ici quand ma mère débarqua dans la chambre. Elle s'arrêta net en voyant la fleur que je tenais délicatement, comme si je risquais de la briser, et elle me regarda avec un air intrigué.
– Ce n'est pas toi qui aurais posé cette rose sur mon lit par hasard ? demandai-je en me tournant vers elle, même si je connaissais déjà la réponse qu'elle allait me donner.
– Je suis rentrée peu de temps avant que tu ne rentre à ton tour, et je n'ai rien touché en ton absence. Personne n'est venu ici, à ce que je sache. Je ne suis pas entrée dans ta chambre, et je ne vois pas qui aurait pu faire ça...
Ma mère s'interrompit et se mordait la lèvre inférieure, signe que quelque chose la tracassait. Ce tic, je l'avais aussi. Et je savais très bien ce qu'il signifiait... Elle aussi ne voyait qu'une seule possibilité, qu'une seule personne qui aurait pu déposer cette rose blanche sur mon lit. Je continuais de faire tourner la fleur dans ma main en l'observant, plus déconcertée que jamais.
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