42 - Nouveau tournant
Point de vue Sada
Je suis vraiment une idiote... Le temps que Katsuki guérisse de son bras, le bébé sera déjà né sans que je n'aurais eu l'occasion de lui annoncer que je suis enceinte. J'en suis déjà à deux mois et demi, bientôt trois de grossesse. Pour l'instant, j'arrive à cacher la légère rondeur de mon ventre mais le temps joue contre moi et comme une conne...
Je commence à avoir des pensées à propos de cet enfant ! Je commence à m'y attacher, à regarder tous les jours mon ventre et le caresser dans le miroir, à me dire que ce n'est peut être pas si dramatique... Ce n'est qu'une vie de plus et peut être pas la clé de la malchance, autrement si on pense comme ça, moi aussi je suis une malchance pour mes parents.
Dans ce cas, tout être humain sur Terre est une malchance pour les mères qui les ont mis au monde !
Voir une femme enceinte m'attendrit, mais d'être enceinte me terrifie parce que je ne suis pas préparée à ça. Je n'ai pas appris les bonnes méthodes d'éducation, ma mère n'est pas vraiment la définition de la patience incarnée et mon père est de la vieille école, alors la décharge parentale je connais trop bien... Je n'ai rien pour accueillir ce bébé et pourtant je dois le dire à Katsuki AUJOURD'HUI, sinon je n'aurai jamais le courage !
Quand il m'a posé des questions sur Hiyori, j'ai eu la trouille qu'il ait deviné mes allées et venues chez le médecin et je ne veux pas qu'il l'apprenne de manière aussi conne... Je veux bien faire les choses mais je ne sais pas comment. Mais comme d'habitude, je vais tout gâcher...
- Nour... Je vais le dire à Katsuki.
<< Enfin... souffle-t-elle. Quand ? >>
- Aujourd'hui. Mais je ne sais pas comment lui annoncer.
<< Dis lui juste simplement, ne cherche pas à faire une annonce grandiose, tu ne sais pas la réaction qu'il aura. Dans tous les cas, il mérite de savoir. >>
- Merci de me rassurer...
<< Nan mais Shiro-chan, tu ne connais pas Baku depuis le temps ? Il te laissera pas tomber pour ça, du moins je le vois mal fuir. >>
- On ne sait jamais comment on peut réagir face à ça... Il m'en voudra de ne pas lui avoir dis plus tôt, ça c'est sûr.
<< Alors tu lui diras la vérité, que c'était pour le ménager avec ce qu'il a traversé. C'était juste pas le bon moment pour en rajouter une couche. >>
- Hm...
J'inspire profondément et souffle longuement avant d'attraper mon portable et envoyer un message à Katsuki. Il est parti faire vérifier sa candidature pour les prochains examens en même temps d'avoir rendu sa thèse de l'année.
[Moi :
- Il y a aussi quelque chose que j'aimerais te dire, tu peux te libérer ce soir ?]
Je vais angoisser toute la journée... Il ne répond pas tout de suite, il doit être encore occupé.
- Nour...
<< Oui ? >>
- Le pire... C'est que je commence à vouloir le garder ce bébé...
<< Oh Shiro'... >>
Elle me prend dans ses bras en me caressant la tête alors que mes larmes sont incontrôlables. J'éclate facilement en pleurs à cause des hormones, mais là c'est toute la pression que j'ai supporté depuis l'accident de Katsuki qui s'échappe... Et je m'en veux de vouloir maintenant garder ce gosse, j'aurais préféré ne pas avoir l'instinct maternel...
Surtout pas maintenant...
<< Elle sait vraiment faire que pleurer celle là... peste Naomi un peu plus loin. >>
Nour fusille du regard son groupe de pimbêches en me serrant davantage pour me boucher les oreilles. Naomi et ses amies, c'est un peu le groupe de bimbos qu'on a tous au collège et lycée. Elle était à fond sur Katsuki au début de la première année et c'est elle qui s'est retrouvée devant Michiko au konbini. Je crois qu'elle n'a pas digéré ma relation avec Katsuki...
<< Ne les écoute pas Shiro-chan... >>
<< Nan mais c'est vrai, je vois pas ce que Bakugou trouve de sexy à une pleurnicheuse pareille. >>
<< Tu veux vraiment te manger le pupitre la pimbêche ?! enrage Nour en se levant d'un bond. >>
- Nour calme toi c'est rien...
<< Je t'ai pas sonné l'albinos ok, c'est à elle que je parle ! >>
<< Avec ta tronche de pot de peinture t'as vraiment pas à la ramener franchement !! Laisse Shiro-chan tranquille, elle t'a rien fait que je sache ! >>
Je retiens Nour par le bras alors qu'elle commençait vraiment à se mettre en colère, tandis que les autres étudiants autour de nous regardaient le scandale et certains filmaient.
<< Je dis juste qu'elle est banale c'est bon, c'est pas tout le monde qui peut se permettre de s'embellir ! >>
<< C'est tout ce que t'as comme répartie ?! Grandis un peu pauvre conne on est plus au collège ! >>
- Nour arrête !
Je la tire vers moi pour les garder à distance l'un de l'autre mais--
<< T'en mêle pas toi ! pousse Naomi. Tu veux te battre le pitbull peut être ?! Pas étonnant que tu sois une kassos avec la réputation de tes parents qui sont des voleurs ! >>
- Nour on nous regarde, arrête !
J'allais la retenir mais le coup de poing est quand même parti, suffisamment fort pour faire tomber Naomi et lui casser le nez. Je n'avais jamais vu Nour aussi remontée, elle tremble de tout son corps et ses poings se serrent...
<< Je connais même pas mon père... Ma mère m'a élevée seule connasse alors MONTRE LUI UN PEU DE RESPECT !!! Une pouffiasse comme toi née avec une cuillère en or à la bouche et à qui on a toujours torché le cul n'a pas la moindre idée de ce qu'on a enduré !!! Tu t'en prends à Shirosaki juste pour un mec qui s'est jamais intéressé à toi, franchement on se demande qui fait le plus pitié !! >>
Nour... Elle ne m'a jamais raconté son passé par peur d'être pitoyable et que je ne devienne son amie par pitié. Sauf que je peux comprendre ce que ça fait de se sentir abandonner... Aussi bien entouré de sa propre famille ou pas. Nos vies sont différentes, mais je peux comprendre.
Naomi peste en essuyant le sang qui coulait de son nez, avant de se relever à l'aide de ses amies.
<< T'as fini de jouer au vilain petit canard...?! Ta mère aurait dû y réfléchir à deux fois avant de se faire mettre en cloque ! >>
- Nour non !!
Je la retiens du mieux que je peux, mais mon pied glisse de la marche tandis que Naomi me bouscule vers les bancs pour en découdre avec elle.
<< Shiro-chan !! >>
Une vive douleur me fait plier le ventre et paralyse mes jambes. Nour pousse Naomi pour me relever, mon souffle s'est coupé...
<< Shiro' ça va ??? >>
- J'ai mal... J'ai trop mal...
<< Shirosaki ??? panique Chan qui venait d'arriver. >>
<< Chan, va chercher Baku ! >>
Ce qu'il fait aussitôt sous l'incompréhension de la salle. Ma main se crispe sur le coin de la table alors que la douleur s'intensifiait quand j'essayais de me relever. Nour me tient la main en la frottant pour me rassurer, mais j'ai déjà commencé à paniquer quand j'ai senti mon ventre taper sur le banc...
<< Ca va aller, respire à fond...! >>
<< Oh ça va t'as juste trébuché, fais pas ta drama queen ! renchérit Naomi. >>
<< Espèce de--!! jure Nour. >>
Mais je la retiens en secouant la tête. Ca ne sert à rien de répliquer...
Katsuki arrive en trombe dans l'amphi, suivi de Chan, et s'abaisse à ma hauteur.
<< Qu'est-ce qui s'est passé ??? >>
<< Pose lui la question, grogne Nour en foudroyant Naomi du regard. >>
- J'ai glissé et je suis tombée...
<< T'as mal où ?? demande Katsuki en regardant si je n'ai pas de coupure. >>
Je prends sa main que je presse légèrement contre mon ventre tandis que Nour se disputait avec Naomi et que Chan les retenait tant bien que mal. Leurs cris étouffaient parfaitement ce que je m'apprête à dire. Katsuki regarde ma main qui tremble, puis relève la tête en voyant mes larmes noyer mes joues.
- ... Je suis enceinte Katsuki...
Son expression déforme lentement ses yeux. Et maintenant...? Qu'est-ce qu'il va dire...?
<< ... Tu... >>
Je me plis sous la douleur, c'est comme si on me transperçait le bas ventre !
- Mais ça va pas...! Pas bien du tout...!
<< Chan, ta bagnole ! crie Katsuki, la voix qui tremble. >>
J'ai passé la journée et le début de soirée à l'hôpital. J'ai fais une fausse couche...
Katsuki est resté dans le couloir avec les autres, Kirishima, Shoto et Midoriya sont arrivés après son appel. Moi... Je reste dans ma chambre d'hôpital, dans le silence le plus total, à essayer de réaliser que j'avais perdu le bébé.
J'ai perdu le bébé...
Je n'aurais jamais imaginé que ça puisse faire aussi mal. Je ne sais même plus quoi dire, les mots se mélangent jusqu'à former un noeud dans ma tête. Je n'ai même pas le courage d'affronter Katsuki et de tout lui expliquer, il doit être encore sous le choc... Je ne voulais pas qu'il l'apprenne comme ça.
Bravo Sada... Tu peux pas faire pire, si...?
Tu n'es même pas capable de protéger un enfant, alors qu'est-ce que tu vas t'imaginer une vie de famille ? Arrête de croire à des rêves que tu peux pas réaliser, tu fais trop d'erreurs.
Je sursaute mais n'ose pas relever la tête en entendant la porte s'ouvrir et se fermer derrière moi. Je reconnais les pas de Katsuki se rapprocher de mon lit et mon coeur accentue ses battements en sentant sa présence dans mon dos. Je n'ose pas me retourner ni bouger, mais au lieu de me faire engueuler j'ai la surprise de sentir ses bras m'entourer par derrière et sa tête se réfugier dans mon cou.
<< ... Pourquoi tu me l'as pas dis...? murmure-t-il. >>
- J'avais peur... Et je ne trouvais pas le moment...
Ma voix tremble et ma gorge se noue. Il me lâche quelques secondes pour s'allonger sur le lit avant de me blottir contre son coeur.
- Tu m'en veux...?
<< Ouais je t'en veux. Pour me l'avoir caché. >>
Il me caresse la tête en regardant le plafond.
<< Pour le reste, tu connais mon avis. >>
- Un bébé maintenant, à notre âge Katsuki... Tu pourrais le regretter...
<< Sada, à 20 ans ou à 30 ans je m'en fous. On est jeunes, et alors ? Regretter de quoi ? Un gosse ça se fait à deux, je l'aurais assumé. >>
- Mais tes rêves du tour du monde...
<< C'est pas un choix que je fais avec ça, dit-il en tapotant mon front. >>
Arrête Katsuki j'ai encore envie de pleurer...
<< Tu sais, le monde va pas disparaitre demain alors je peux bien attendre-- >>
- Non. Ne te prive surtout pas... Pas pour ça...
<< Huh ? >>
- Katsuki... J'y ai longuement réfléchi et je t'aime, tu peux pas savoir à quel point... Mais je n'ai jamais osé t'en parler depuis que j'ai appris que j'étais enceinte et j'avais peur que ça te fasse changer d'avis.
Je me redresse pour le lui dire droit dans les yeux.
- Je ne veux pas être un frein à tes projets. Alors si tu as l'occasion de partir, je t'en supplie fais le... Pars, fais le tour du monde comme tu en as envie mais ne m'attends pas.
<< ... Tu veux dire... qu'on devrait en rester là ? >>
Je baisse les yeux en reculant.
- Je pense que c'est le mieux, surtout pour toi... J'ai pas envie que tu fasses des sacrifices que tu pourrais regretter, même si c'est de ton plein gré je ne veux pas. Tu as tellement d'ambitions et un avenir si prometteur, je ne veux pas t'emporter dans ma chute... De toute façon, je n'étais à la Fac que pour le "prestige" d'y être inscrite, je n'avais pas vraiment de projets en tête. Mais maintenant je veux que tu penses à toi et uniquement à toi même, moi j'ai envie d'évoluer de mon côté. Je ne dis pas que je n'évolue pas avec toi, au contraire c'est toi qui m'as ouvert les yeux. Je ne peux pas continuer d'attendre que toutes les réponses à mes questions me tombent du ciel, j'ai envie de savoir ce que je suis et pourquoi j'existe. Et honnêtement...
Je tourne la tête.
- Je ne peux plus te regarder en face après ce que j'ai fais...
<< Mais cette fausse couche tu pouvais la prévoir ! >>
- C'était de ma faute quand même ! J'aurais dû faire attention mais voilà...! Je ne suis même pas capable de faire quelque chose de bien...
<< Sada-- >>
- S'il te plait... Ce n'est pas une vie pour toi de vivre avec quelqu'un comme moi qui tourne en rond chaque jour, à toujours t'inquiéter pour moi et ma santé, à toujours me surveiller pour m'éviter une rechute, non ce n'est pas une vie... Alors s'il te plait, reste le Bakugou Katsuki que j'ai toujours connu.
C'est la première fois que je vois Katsuki afficher un air aussi déboussolé, mais il ne me contredisait pas et baissait la tête. Je cale mon front contre le sien en retenant mes larmes.
- Je t'aime... Et c'est justement parce que je t'aime que je préfère prendre cette décision... Laisse moi du temps pour me trouver et remettre de l'ordre dans ma vie...
<< Tu comptes faire le deuil toute seule...? Tu viens de perdre ce gosse et tu veux t'enfuir. Putain Sada, je suis là, je sers quoi moi...? >>
- Je ne voulais pas que tu souffres...
<< Désolé mais c'est trop tard... >>
- Regarde moi.
J'attrape son visage entre mes mains et il en profite pour m'embrasser et me serrer avec force. J'ai mal moi aussi... Mais je sais qu'il se relèvera toujours, et justement je veux le laisser se relever. Moi en revanche, il me faut du temps...
- Sache seulement une chose... Je ne nous remets pas en question. Toi et moi... Si le destin le permet, on se reverra peut être...
<< Je crois pas au destin... >>
- Pourquoi...?
<< J'ai pas envie que tu fasses partie de mon passé. À t'entendre parler, j'ai l'impression que tu me fais des adieux. >>
- ... Tôt ou tard tu m'oublieras.
<< Jamais. >>
Katsuki a accepté de rompre après quelques jours de réflexion et m'a accompagné à l'aéroport. Je rentre en France avant la fin de l'année, c'était prévu de toute façon. Nour a longuement refusé de me laisser partir et m'en a voulu plus d'une fois, mais elle est quand même venue me dire au revoir dans le hall avec une accolade.
<< Tu vas me manquer... >>
- Toi aussi... En fait tout le monde va me manquer.
Elle me sourit, les yeux larmoyants.
<< T'inquiète, je veillerai sur la tête brûlée. >>
<< Et moi je veillerai sur cette tête de linotte, plaisante Chan. Prends soin de toi Shiro'. >>
Je souris en les enlaçant tristement. Katsuki n'a pas décroché un seul mot depuis notre départ.
Je souffle en nouant mon écharpe avant de prendre mes affaires.
- Bon... Je vais y aller...
Mais Katsuki ne dit rien et me regarde tristement. Mon sourire s'efface, merde je n'ai pas envie de pleurer...
<< ... Tu peux toujours changer d'avis. >>
- Oui... Mais non. Je dois rentrer chez moi...
Il soupire en attrapant ma main avant d'embrasser mes phalanges.
<< Appelle moi quand tu seras arrivée. En espérant que ta vie soit celle que tu souhaites... >>
- Toi aussi... Et si tu passes par la France--
Je marque un temps d'arrêt en sentant une larme s'échapper sur ma joue.
- S-Si tu passes par la France, ma porte te sera ouverte...
Son léger sourire me détruit...
<< Je note. >>
À suivre...
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