Chapitre 33
Quand il revint à lui, Matthew eut un moment d'égarement. Il ne savait plus où il était et il douta même, l'espace d'une nanoseconde, de son identité. Il se souvint alors de la folle nuit qu'il venait de passer et sentit une vague de chaleur de gêne et d'émerveillement traverser son visage qui devait sûrement être rouge écrevisse.
Il souleva doucement la couverture et remarqua qu'il était propre et habillé. Il tourna la tête vers son coussin attitré et vit que lui aussi ne portait pas la même tenue que la veille. Après son évanouissement, Léo avait dû le nettoyer et le changer.
Honteux, il enfonça son visage dans le cou de l'autre jeune homme et lâcha une plainte.
— Je sais pas quelle heure il est Minus, mais il doit sûrement être beaucoup trop tôt pour tes états d'âme, marmonna Léo d'une voix matinale.
— Tu m'as lavé ? demanda le Minus en question tout doucement.
— Bien sûr. En aucun cas je t'aurais laissé dans mon lit dans cet état et comme monsieur ne veut plus dormir dans son lit, je n'ai pas eu le choix.
Matthew redressa vivement la tête. Comment ça il insinuait que c'était de sa faute ? Alors oui, il se voyait mal dormir dans son propre lit maintenant qu'il avait goûté au sommeil à deux, mais il n'avait pas eu l'impression de s'imposer. Est-ce que c'était un moyen pour lui faire comprendre qu'il allait devoir reprendre les vieilles habitudes, à savoir chacun sa place ?
— Eh, Minus, j'ai jamais dit que ça me dérangeait. Maintenant rendors toi si tu veux pas avoir une sale tête et qu'on pense qu'on a fait quelque chose cette nuit.
— Mais ... on a fait quelque chose cette nuit, lui répondit piteusement Matthew.
— Je sais, soupira Léo. Mais est-ce que tu veux que les deux idiots à l'hôpital le sachent et te le fassent remarquer ?
Oh ... Effectivement. Si on prenait les choses dans ce sens-là, il était bien trop tôt pour se lever et se poser des questions existentielles. Par curiosité, Matt jeta quand même un regard sur son téléphone afin de voir l'heure qu'il était.
— Léo ... il est midi moins le quart. Tu penses que ton frère nous détestera de pas venir pour midi ?
Le français l'attrapa par le haut et l'obligea à se recoucher entre ses bras. Matthew finit par capituler et replongea en plein rêve. Les heures n'étaient que des nombres après tout.
Au même moment, deux personnes émergeaient d'une nuit bien plus reposante que celle de leurs amis. Théo fut le premier à ouvrir les yeux. L'espace d'un instant, il eut comme une impression d'étouffer. Il pensa alors que ça y était, son accident le rattraper. Mais un ronflement le fit revenir sur terre et il comprit assez rapidement que ce qui l'empêchait de dormir correctement n'était autre que le bras de Klaus, posé sur son torse.
Théo se mit alors à rire. S'il s'était dit en venant aux Etats Unis, qu'il finirait régulièrement dans un lit avec un autre homme, à moitié nu et les jambes emmêlées aux siennes et l'un d'entre eux servant de coussin à l'autre, il ne l'aurait jamais cru. Depuis qu'il savait pour son aromantisme et son asexualité, Théo était parti du principe que jamais il n'aurait personne ni dans son coeur ni dans son lit. Il n'avait juste pas pensé qu'il rencontrerait son âme-sœur ici, en Floride.
Alors certes, Klaus et lui n'étaient qu'amis, mais c'était tout ce que Théo aurait pu demander dans sa vie. Un ami qui le comprenne et avec qui il pourrait agir le plus naturellement possible. Et s'il fallait une preuve qu'il avait trouvé cet ami, leur position serait suffisante. Et dans le cas contraire, leur soirée l'était.
Ils s'étaient endormis tard, sûrement beaucoup trop tard pour une personne en convalescence dans une chambre d'hôpital, mais pour rien au monde Théo n'aurait voulu qu'il en soit autrement. Ils avaient parlé, parlé et encore parlé jusqu'à ce que Morphée leur fasse comprendre qu'il était temps d'arrêter. Klaus lui avait parlé de ses expériences amoureuses, à priori pas très fameuses, Théo en fit de même ainsi que toutes les choses par lesquelles il avait dû passer avant d'accepter son orientation sexuelle et amoureuse. Il avait aussi parlé de la réaction de son frère et de ses parents, ainsi que des personnes qu'il avait considéré comme des amis. Il lui raconta aussi ce que c'était d'être une personne différente dans un milieu comme le sien, comment son frère et lui faisaient tâche dans les évènements mondains.
En fait, maintenant qu'il y pensait, contre toute attente, il était celui qui avait le plus parlé de toute la soirée. Et Klaus l'avait écouté religieusement. Il ne l'avait jamais interrompu, lui faisant seulement quelques remarques ou lui posant des questions une fois qu'il terminait de parler. Ca paraîtrait presque étonnant venant du blond et pourtant, Théo le savait capable de ce genre d'attention. Pourtant, ça ne l'empêcha pas de se sentir bizarre. On l'avait écouté, sans le juger, sans l'interrompre, sans lui dire que c'était barbant. Et c'était l'une des choses les plus gratifiantes qu'il avait eu à vivre.
Oui, Klaus était décidément son âme sœur.
Cependant, âme sœur ou non, celui-ci pesait de plus en plus lourd sur son torse et Théo commençait vraiment à moins bien respirer à cause de la pression qu'exerçait le bras de Klaus. Il l'attrapa et essaya de s'en dégager. Malheureusement, tout ce qu'il récolta fut un grognement.
Au même moment, une infirmière fit irruption dans la chambre. Elle était déjà passée plusieurs fois dans la matinée, mais bien trop fatigué, Théo s'était rendormi dès la porte refermée. Etonnamment, elle n'avait pas fait de remarques sur la position des garçons bien qu'un lit de camp avait été installé sur le côté pour finalement ne pas être utilisé.
Cette fois-ci, lorsque Théo bougea, l'Allemand se réveilla. Il papillonna des yeux, s'habituant petit à petit à la lumière, avant de s'asseoir et de saluer l'infirmière d'un sourire. Celle-ci se mit à rougir avant de déposer les médicaments et un plateau sur la table et leur souhaiter un bon repas.
— T'as une touche, lui fit remarquer Théo en souriant.
— Je dirais plutôt que c'est d'avoir vu deux beaux gosses dormir dans les bras l'un de l'autre qui lui a fait de l'effet.
— Possible ... mais elle ne m'a pas souri à moi, elle ne l'a fait qu'à toi. Et elle m'a mis double ration juste parce que tu es là.
— De toute façon, il n'y a que toi que j'accepterai d'aimer malgré la distance, annonça Klaus avec un air dramatique.
— Klaus ... On vit à environ quatre heures l'un de l'autre ... Même une fois les vacances terminées, on pourra se voir.
— Tu voudras me revoir ?
Théo resta bête devant la question. Il se tourna vers Klaus et le frappa derrière la tête.
— Crétin. T'as oublié la conversation d'hier ? Cette histoire d'âme sœur et tout ça ?
— Ah oui, c'est vrai.
Klaus haussa les sourcils et fouilla sur le plateau repas de Théo. Il se servit sans gêne et mangea. Après tout, Théo avait eu raison plus tôt, la quantité de nourriture avait doublé par rapport à la veille et ce n'était pas pour rien. Sauf que pendant ces vacances, à aucun moment l'Allemand n'avait songé à flirter avec des filles et se trouver un coup pour l'été. Sa rencontre avec les garçons, totalement imprévu, avait modifié tous ses plans. Lui qui comptait à l'origine passer le plus de temps possible à festoyer le soir, à aller faire de l'escalade et du surf tous les jours, il était presque surpris à l'idée qu'il ait passé de meilleurs vacances en faisant des châteaux de sable ou en se faisant une soirée Retour vers le futur à l'auberge avec ses nouveaux amis.
Léo était vraiment un chic type. Ce genre de mec avec lequel vous voudriez être ami et en même temps, ça paraissait impossible de l'être vu sa prestance et son caractère. Parce qu'il fallait quand même être honnête, parfois il avait quand même un caractère de chiotte. Le mec froid et sarcastique. Autant dire que c'était à l'opposé de ce qu'était Klaus. Mais, contre toute attente, il adorait ce mec.
S'il y en avait un autre qu'il adorait, c'était bien Matthew. Le charrier était devenus sa nouvelle passion. C'était sûrement la première fois qu'il rencontrait un garçon à la fois borné et adorable. Puis son innocence touchait tellement l'Allemand qu'il adorait l'embêter avec ça. Malgré tout, voir l'évolution de la relation entre Léo et Matt était une chose qu'il ne regrettait pas de vivre.
Et puis, il y avait sa rencontre avec Théo. Il y avait SURTOUT sa rencontre avec lui. Son âme sœur comme il le disait lui-même. Jamais il n'avait ressenti ce genre d'alchimie avec une personne et encore moins avec une personne du même sexe, avec laquelle il n'y avait aucune tension amoureuse ou sexuelle. Et c'était tout bonnement incroyable.
— Je t'aime Théo, lui lâcha-t-il sans prévenir entre deux cuillères.
Théo pouffa. Le blond avait ce talent pour lui sortir des phrases plus ou moins étranges sans prévenir.
— Je sais, lui répondit-il avec un clin d'œil.
— Eh Han Solo ! Tu pourrais au moins me dire que tu m'aimes moi aussi hein ! râla Klaus avant de rire. Je te fais une déclaration et c'est tout ce que ça te fait ?
— Klaus, je te rappelle que tu m'as déjà embrassé ... et qu'en suite, tu m'as expliqué que c'était parce que tu m'aimais sans être amoureux de moi ... si ça c'est pas une déclaration, je sais pas ce que c'est.
— Pfff, le romantisme est mort. Tu m'as coupé l'appétit.
Klaus reposa la nourriture qu'il avait dans les mains et croisa les bras pour signifier son mécontentement. Amusé, Théo se rapprocha doucement de lui, attrapa le visage du blond d'un main et l'obligea à se retourner vers lui. De son autre main, il prit la fourchette qu'il planta dans un morceau de viande avant de le présenter à la bouche de Klaus.
— Pour me faire pardonner et te montrer mon amour, acceptes-tu que je te nourrisse ?
Avant que Klaus ne puisse lui répondre, la porte de la chambre s'ouvrit sur une aide-soignante chargée de venir débarrasser le plateau. Lorsqu'elle vit les deux garçons et leur position, elle se mit instantanément à rougir et sortit de là leur disant qu'elle reviendrait lorsqu'ils auraient terminé. La scène provoqua un fou rire chez Théo et Klaus.
— Génial ! s'exclama Théo en lâchant le blond. Si jusque-là, elles pensaient pas qu'on est ensemble, là c'est terminé !
— Elle est sûrement partie jusqu'à leur salle de pause pour annoncer que les deux canons de la chambre 305 sont en couple ... Dis ...
— Toi t'as une idée et j'ai l'impression de savoir ce que c'est ...
— Allez, geignit Klaus. Ça va être drôle ! Et puis comme ça, tu auras peut-être une triple ration la prochaine fois !
Théo leva les yeux au ciel et rapprocha Klaus de lui. Ce simple geste suffit à mettre le blond en joie de voir sa blague être suivi par son ami. Il s'installa correctement et passa un bras derrière le dos du français. Ils allaient bien s'amuser.
L'aide-soignante revint dans la chambre cinq minutes plus tard, les joues portant toujours une belle couleur rouge et son regard hésitant à observer les deux Apollons.
— Excusez-nous pour tout à l'heure, lui dit Klaus. On ne pensait pas que vous viendriez chercher le plateau aussi vite.
— Ce n'est rien, bafouilla la femme.
Elle s'approcha doucement, les yeux rivés sur le plateau qu'elle devait récupérer. Lorsqu'elle arriva à côté des garçons, ces derniers virent le coup d'œil qu'elle jeta vers la main de Klaus, posé sur la taille de Théo.
— D'ailleurs, commença Klaus, j'ai une question et peut-être que vous pourrez me donner une réponse.
Il se pencha légèrement vers la jeune femme pour chuchoter.
— Savez-vous quand monsieur Leroy pourra recommencer les efforts ... disons, un peu plus physiques ?
La réaction de l'aide-soignante ne se fit pas attendre. Son visage ayant atteint un niveau de carmin sûrement jamais atteint, elle attrapa simplement le plateau et sortit précipitamment de la chambre sans un mot.
— T'es pas croyable ... un gamin. Là, c'est sûr qu'elle est partie répéter ça à tout le monde, lui annonça Théo.
— Eh ! Tu étais d'accord !
— Malheureusement, lui répondit-il en levant les yeux au ciel ... mais tu restes vraiment un gamin malgré tout.
Klaus lui fit un clin d'œil avant de s'installer confortablement sur le lit. Théo pouffa devant son comportement et s'installa à côté de lui. Il ferma les yeux, la fatigue s'abattant sur lui. Il n'avait pas encore totalement récupéré de son accident et sentait qu'il manquait encore de repos. Dans la logique, avoir accepté que le blond dorme ici la nuit dernière n'était pas forcément la meilleure idée qu'il avait eu et pourtant, ça lui avait fait du bien.
Il sentit un poids se poser sur son épaule et ouvrit légèrement les yeux pour se retrouver nez à nez ou plutôt nez à cheveux avec la tête de Klaus. Ils restèrent ainsi un petit moment, dans le calme.
— Tu sais quoi ? Je pense que j'aurais quand même aimé tomber amoureux de toi, lui dit sans prévenir Klaus. Même si tu ne peux pas me retourner mes sentiments, je sais que ça aurait été une expérience incroyable et que pour une fois, je me serais dit que mes sentiments, même à sens unique, en valait le coup.
— A ce point ? demanda simplement Théo qui se doutait que dernière ses paroles, se cachait un évènement qui lui était encore inconnu.
— Ouais ...
— Tu me raconteras ce qu'il s'est passé ?
— Plus tard ...
— D'accord. Plus tard ...
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