Matthew commençait clairement à paniquer. Il voyait le visage de Léo s'approcher doucement du sien et il n'avait aucun moyen de fuir. La main dans ses cheveux le faisait toujours autant frissonner et son cœur s'emballait de plus en plus. Il devait même devenir plus rouge qu'avant et se demandait même s'il ne suait pas à grosses gouttes. En conclusion, Matthew était au bord de l'apoplexie et ne savait même pas ce qu'il avait envie de faire. S'enfuir ou laisser Léo venir combler l'espace entre leurs lèvres. Espace désormais réduit à deux petits _ ou énormes _ centimètres. Encore un peu et ...

« Théo ! Dépêche, ils vont s'embrasser ! cria Klaus de la porte de la chambre. »

Il fouilla de manière désespérée dans ses poches, les retournant jusqu'à finalement tendre le bras dans le couloir et attraper ce qui semblait être le portable d'un Théo qui apparut totalement essoufflé.

« Allez-y, je filme. Et dire qu'on a failli louper leur premier bisou ! s'extasia Klaus, le téléphone devant lui, alors que Théo venait de poser sa tête sur son épaule, un air fier sur le visage.
– Bordel, marmonna Léo. »

Il laissa tomber sa tête sur le matelas et laissa les cheveux de Matthew glisser de ses doigts. Ce fut la perte de ce contact qui ramena le plus jeune à la réalité. Il prit une grande inspiration, comme s'il avait arrêté de respirer pendant un moment, ce qui semblait être réellement le cas et se positionna sur le dos, les yeux rivés sur le plafond. Les mains posées sur le cœur, il avait l'impression que celui-ci tentait de sortir de sa poitrine. Et il réagissait ainsi alors qu'ils avaient juste été sur le point de s'embrasser.

Est-ce qu'il regrettait d'avoir été interrompu ? Malgré son haleine du matin, son cœur battant furieusement, son moment de panique passé, oui, il le regrettait énormément. Mais d'un autre côté, aurait-il pleinement profité de ce baiser s'il avait eu lieu maintenant? Peut-être pas. Ou peut-être se serait-il réveillé de ce moment de panique. Il n'en savait rien en fait.

« Ça craint, laissa-t-il échapper dans un soupire de dépit.
– Je ne te le fais pas dire. »

Matt tourna finalement la tête vers Léo qui se trouvait toujours à côté de lui. Ils se fixèrent du regard pendant quelques secondes avant que Matthew n'éclate de rire, ramenant aux lèvres de Léo leur rictus habituel. Il ne savait pas vraiment pourquoi il riait. Peut-être qu'il relâchait une certaine pression. Ou alors se rendait-il enfin compte de la situation.

Il avait été à deux doigts d'embrasser pour la première fois le mec qui lui plaisait et avait été interrompu par ses deux autres colocataires qui voulaient filmer de près ce premier baiser

Totalement insensé maintenant qu'il y pensait.

Ils ne s'étaient finalement pas embrassés, mais cette simple constatation montrait à Matthew le chemin qu'il avait parcouru depuis son arrivée. dire qu'il n'était là que depuis deux semaines. Il avait vécu plus en l'espace de ces deux semaines que pendant tout le reste de sa vie et quelque chose le laissait penser qu'il n'était pas au bout de ses surprises.

Il observa le visage de Léo dont le regard semblait insondable. Maintenant qu'il y pensait, c'était la première fois que Matthew pouvait détailler son visage d'aussi près sans que cela paraisse étrange. Il put alors faire attention aux quelques grains de beauté qui parsemaient son visage, à l'angle parfait de son nez, aux lignes nettes de ses lèvres, au noir plus profond qu'il ne le pensait de ses yeux et surtout à cette lueur qu'ils renfermaient à ce moment-là.

« Tu es heureux ? lui demanda-t-il alors.
– On va dire que ça pourrait être pire. »

Ce qui signifiait en langage Léo qu'il l'était. Et Matthew ne put s'empêcher de sourire en pensant qu'il contribuait à ce bonheur. Il espérait cependant un jour réussir à faire apparaître un véritable sourire sur les lèvres de son désormais petit ami.

Petit-ami.

Il plongea son visage contre le torse de Léo afin de se cacher. Il fallait qu'il parvienne à s'habituer à ça et à ce que cela engageait à partir de maintenant.

« Qu'est-ce que tu as cette fois ?
– On sort ensemble, lui répondit simplement Matthew.
– Il semblerait. »

Matt pouffa. La situation était bien trop inattendu en réalité pour qu'il puisse s'y faire rapidement. Il lui faudrait sûrement quelques jours pour se le rentrer dans la tête.

Un flash le fit finalement sursauter. Il se redressa et se tourna vivement et vit Théo et Klaus, ce dernier tenant toujours son téléphone devant lui.

« Idiot ! Tu as mis le flash ! s'énerva Théo en bousculant Klaus. Tu les as interrompus !
– Désolé, s'excusa piteusement Klaus en tendant le téléphone à Théo. Mais je filmais et puis quand Matthew a fait son rire trop mignon, j'ai voulu les prendre en photo rapidement ! Et puis tu es marrant toi ! C'est ton téléphone ! Pas le mien !
– Tu n'avais qu'à prendre le tien et pas le mien ! Le problème aurait été réglé comme ça.
– Ils se comportent comme un vieux couple, fit remarquer Matthew à Léo.
– Et c'est nous qui sommes censés sortir ensemble ... »

Léo secoua la tête et se leva. Sans un mot de plus, il attrapa ses affaires et sorti de la chambre.

« Si j'étais toi, je le suivrai sous la douche, dit Théo avec un air suggestif sur le visage.
– Qu-quoi ? s'exprima aussi distinctement Matthew.
– Bah tu le suis et comme ça vous partagez la douche. Tu le savonnes, il te savonne et vous nous faîtes pleins de bébés laitue !
– Laitue ?
– La contraction de Léo et Matthew, ça fait Lé-thew, soit laitue en français.
– Ok, donc tu as décidé de nous donner un nom de salade ... »

Matthew fit mine de réfléchir avant d'éclater de rire.

« C'est le pire surnom du monde.
– Je sais, mais imagine à quel point il va plaire à Léo quand il l'apprendra. »

Une heure plus tard, Matthew était lui aussi douché et habillé. Il était revenu dans la chambre rejoindre les garçons qui l'attendaient. Ils avaient décidé d'aller faire un tour en ville avant de se prendre un truc à emporter et de s'installer sur la plage ce qui avait ravi Matthew. n'avaient pris que le strict minimum afin d'avoir de quoi pouvoir payer et pouvoir se baigner. Ils sortirent de l'auberge et commencèrent à se diriger vers un des coins de la ville qu'ils n'avaient pas encore pris le temps de visiter.

« Qu'est-ce qu'on pourrait aller voir ? demanda Théo en sortant un guide qu'ils avaient acheté tous ensemble quelques jours auparavant mais dont ils ne s'étaient encore jamais servis. »

Ils se penchèrent tous sur le guide, ou plutôt Théo, Léo et Klaus se penchèrent sur le guide tandis que Matthew tentait en vain de regarder par-dessus de l'une de leurs épaules. Il se sentit alors tirer en avant et se retrouva face à petit livre, son dos appuyé contre le torse de Léo. Il avait désormais tout loisir de chercher une destination avec eux mais il était bien trop perturbé par la main qui s'était placé sur sa hanche et le maintenant contre Léo. La chaleur de sa main semblait transpercer le vêtement qui la séparer de sa peau et se propageait rapidement dans le reste du corps de Matthew.

C'était ... agréable. Gênant, mais agréable.

Matthew avait juste envie de laisser son esprit flotter dans cette douce chaleur et inconsciemment, c'est ce qu'il fit jusqu'à ce que des lèvres se rapprochent de son oreille et le fassent frissonner.

« Concentre toi sur notre destination, tu feras ça une autre fois ... quand on sera en privé. »

Maintenant, Matthew avait encore plus chaud. Il n'en avait pas l'habitude. Il ressentait une sorte d'excitation, ce qui était totalement insensé en sachant qu'il avait totalement paniqué lorsque Léo avait voulu l'embrasser ce matin. Mais il se sentait réellement bien. Ils étaient à l'extérieur, son petit-ami _ il ne s'y ferait jamais _ le maintenait par la hanche, et il se sentait juste bien.

« Et toi Matt, quelque chose à proposer ? demanda Klaus avec un petit sourire.
– Pourquoi pas Sawgrass Lake Park ? proposa-t-il en se reprenant et se félicitant d'avoir feuilleté le guide lorsqu'ils l'avaient acheté. »

Déçu de ne pas l'avoir pris la main dans le sac, Klaus bouda de minuscules secondes avant de retrouver rapidement le sourire en apprenant que Sawgrass Lake Park était un parc naturel qui contenait des animaux dont certains plutôt dangereux. âme d'aventurier avait alors été tout de suite conquis par l'idée et il avait été le premier à se diriger vers le premier arrêt de bus qu'il aperçut.

Ils mirent une bonne demi-heure avant d'atteindre le parc. Il était magnifique et peu fréquenté ce jour-là pour leur plus grand bonheur.

Matthew se fit balader dans tous les sens par un Klaus totalement fou. Celui-ci avait rapidement dégainé son appareil photo afin de mitrailler le paysage, les animaux et ses amis. Puis ils arrivèrent enfin à l'endroit qu'attendait le plus les garçons.

« Ces crocodiles sont énormes, déclara Théo hésitant un peu à se rapprocher de la barrière. »

Alors qu'il allait lui aussi s'approcher de la protection, Matthew reçut un petit coup de coude dans les côtes de la part de Klaus qui mit un doigt devant son sourire taquin et le vit se diriger vers Théo sur la pointe des pieds. Arrivé derrière lui, il lui attrapa soudainement les épaules en lâchant un énorme cri qui reçut automatiquement une réponse du Français.

« Mais t'es vraiment un crétin fini ! hurla Théo, une main sur le cœur.
– C'est pas ma faute si tu es un froussard !
– Tu sais ce qu'il va faire le froussard ? Il va présenter son poing à ta figure et ils vont tellement bien s'entendre que tu croiras qu'il est greffé à ton visage ! »

Théo semblait si sérieux que Klaus commença rapidement à craindre de véritables représailles et jugea plus prudent de prendre la fuite. Il prit ses jambes à son cou et s'éloigna le plus rapidement possible d'un jeune homme qui le prit directement en chasse.

Matthew riait. Comme à chaque fois que Klaus et Théo faisaient les idiots. Puis il s'arrêta net. Léo continuait à avancer, doucement, comme seul au monde. Matt eut alors l'irrépressible envie de le rejoindre, ce qu'il fit. Il arriva à son niveau et marcha au même rythme que lui. Ils étaient proches mais ne se touchaient pas. Le plus jeune observait la main pendante à côté de lui. Il avait envie de l'attraper mais n'osait pas. Et si Léo n'était pas d'accord ? Il s'arrêta alors de marcher, tirailler par son envie de lui tenir la main.

« Qu'est-ce que tu fous ? demanda Léo en se retournant vers lui.
– Je ... réfléchissais.
– Fait gaffe à pas surchauffer. »

Il aurait dû répondre à sa pique comme il le faisait à chaque fois, mais Matthew voulait vraiment autre chose. Il rattrapa donc Léo et s'arrêta devant lui.

« Est-ce que j'ai le droit de te tenir la main ?
– Non. »

La réponse courte et directe de Léo lui fit un coup au cœur. Il aurait sûrement dû s'y attendre mais au fond avait espéré le contraire. Il baissa les yeux sur le sol, se demandant s'il devait s'excuser pour sa demande.

« On a pas scellé notre accord ce matin, donc techniquement on est pas ensemble. »

Matthew releva la tête et le regarda incrédule. Il se foutait vraiment de lui en réalité. Pourtant, il semblait si sérieux. Serait-il vraiment capable de refuser de sortir avec lui tant qu'ils ne s'étaient pas embrassés ? Ca semblait totalement insensé, mais venant de Léo, à quoi s'attendait-il ? Surtout en sachant qu'actuellement son frère était en train de pourchasser un de leur ami pour se venger. Il y devait y avoir quelque chose de particulier dans leur ADN.

Dans tous les cas, Matthew ne voulait prendre aucun risque. Il devait prendre son courage à deux mains et faire quelque chose afin de ne jamais savoir si Léo était sérieux ou non.

Il franchit alors les derniers centimètres qui les séparaient et attrapa Léo par le col de son haut afin de pouvoir aligner leurs lèvres. Il ferma les yeux, refusant de le regarder. Il avait peur de sa réaction. Mais lorsqu'il sentit une main se glisser derrière sa nuque alors qu'une autre prenait place sur sa hanche, il s'abandonna complètement. Ses doigts se détachèrent du vêtement pour laisser ses bras s'enrouler autour du cou de son _ désormais officiel _ petit-ami et il le laissa l'attirer plus près de lui.

C'était bon. C'était doux. C'était tous les adjectifs mélioratifs qui existaient dans ce monde.

Puis l'air leur manqua. Bien trop vite. Léo s'éloigna légèrement, attrapa un court instant la lèvre inférieure de Matthew entre ses dents avant de laisser leurs lèvres se frôler à nouveau. Sa prise sur la hanche du plus jeune se raffermit, sentant ce dernier pantelant.

« Dis-moi que j'aurai le droit de t'embrasser dès que je le souhaiterais, murmura Matthew qui peinait à retrouver son souffle.
– N'importe quand. »

Matthew ouvrit finalement les yeux qui s'ancrèrent immédiatement dans ceux de Léo. Tout en eux souriait. Leurs yeux. Leurs lèvres. Et jamais l'Américain n'avait vu d'aussi beau sourire, d'autant plus qu'il appartenait à l'homme qui lui plaisir tant.

Et comme le matin même, un flash le ramena à la réalité.

« Alors là, tu peux pas m'accuser cette fois-ci. »

Ils se retournèrent et virent Klaus et Théo, de nouveau parmi eux, et encore une fois armée de leurs téléphones afin d'immortalisé la scène. Et loin d'être gêné, Matthew se mit à rire et se détacha finalement complètement de Léo mais uniquement pour quelques secondes car très vite sa main chercha celle de l'autre homme et leurs doigts s'entremêlèrent ensemble.

Parce qu'il le pouvait maintenant.

Leur accord relationnel était désormais scellé.