30. Tyson
Je frappe plusieurs fois mon réveil avant de comprendre que c'est mon téléphone qui sonne. Soupirant, je me redresse et me passe une main sur la visage. Qui peut bien m'appeler à ...six heures du matin ? Je suis tenté de raccrocher en voyant le nom de Jeff, mais le message affichant les trente autres appels de sa part m'en dissuade. Il serait capable de venir jusqu'ici si je fais ça. Ça m'étonne d'ailleurs qu'il ne soit pas déjà sur le pas de ma porte. Mais je ne vais pas m'en plaindre. Si il s'était incrusté, je n'aurais pas pu parler tranquillement avec Ashley sur le chemin du lycée. Ashley...ma...copine. Je me pince plusieurs fois et profite des deux minutes que j'ai avant que Jeff me rappelle pour relire son message et lui en envoyer un.
Ashley – 00h45
J'ai passé une merveilleuse soirée et...j'ai hâte d'être demain. Dors bien mon chéri... Ça fait vraiment bizarre de t'appeler comme ça, tu sais. Mais j'aime bien. Bref, mes parents m'ont simplement demandé de les prévenir la prochaine fois que je rentrais tard. Il y a juste une chose...Enfin on en parlera quand tu viendras. Bisous...partout.
Je souris en relisant son message. Partout ? Intéressant. Mais plus sérieusement, il va effectivement falloir qu'on soit raccord sur notre façon de procéder. Est-ce qu'elle veut garder notre relation secrète ? Je n'en ai pas spécialement envie. Au contraire. J'ai envie de crier au monde entier qu'Ashley Evans est ma copine. Quoi que quand je songe au questionnaire que va me faire subir Jeff, je me dis qu'il est effectivement plus sage d'attendre encore un peu. Heureusement que j'ai vu son message avant d'avoir mon meilleur ami au téléphone, sinon je lui aurais de suite tout dit. D'ailleurs, en parlant du loup... Je décroche après la première sonnerie.
— Salut Jeff, comment tu vas ce matin ?
— Ouf tu es vivant ! s'exclame mon meilleur ami, j'ai failli appeler la police, le CIA, ta mère, tu sais !
— Rien que ça. Mais dis-moi, pourquoi devrais-je être mort ? lui demandé-je tout en allant chercher de quoi m'habiller.
— Tu étais censé m'appeler hier soir, je te rappelle. Tu as ramené Ashley chez elle après les cours et tu devais me dire ce que vous vous êtes raconté. Je n'ai pas voulu te déranger car je me suis dis que si tu ne répondais pas c'était soit que tu t'envoyais en l'air, mais si c'était le cas tu m'aurais appelé de suite après pour me le dire. Après tout, il s'agit d'Ashley ! Cela aurait été l'événement de l'année ! Mais vu que tu ne l'as pas fais, c'est que tu t'es mangé un râteau monumental. Je suis désolé pour toi, mec.
— Jeff, grogné-je piqué au vif dans ma dignité, je ne me suis pas pris de râteau.
Je ferme les yeux, me rendant compte de ma connerie. Maintenant que je lui ai dis ça, il va de suite comprendre et il ne me lâchera plus. Et je n'ose imaginer la réaction d'Ashley quand elle apprendra qu'à peine ensemble, je suis allé raconter tout les détails intimes de la nuit qu'on a passé. Car oui, même si je n'entrerais pas dans les détails, Jeff les imaginera tout seul. Non. Il faut absolument que je le tienne à distance de tout ça...Au moins jusqu'à ce que je me sois mis d'accord avec Ashley sur la version à donner.
— Tu...elle...Vous...balbutie Jeff, ce qui me fait ricaner.
— Si un jour on m'avait dit que j'arriverais à te faire perdre tes mots, je ne l'aurais jamais cru, me moqué-je, mais te fais pas de film mon lapin, on est juste sortis se promener et je l'ai raccompagné chez elle. Rien de plus.
— Comment ça, rien de plus ? Tu n'étais pas censé te déclarer ? Ah ! Je vois. Ok je comprends. T'en fais pas, super Jeff est là. Je vais t'arranger un autre rencard et là tu pourras te déclarer ! Je vais te coacher comme ça, le jour J, tu seras fin prêt !
Je souris, secouant la tête même si il ne peut pas me voir. Si Jeff n'existait pas, il faudrait l'inventer. Derrière ses blagues et sa façon de tout prendre à la légère, il a le don de déceler l'important et de tout faire pour rendre la tâche plus facile aux gens...même si en règle général, son intervention cause plus de tort que de mal. Je m'apprête à refuser, mais, tout compte fait, j'ai bien envie de voir ce qu'il va essayer de faire pour nous rapprocher.
— Bah, tu sais, commencé-je en souriant, si tu m'aides comme tu l'as fais l'autre fois, je ne risque pas de l'embrasser avant qu'on soit tout les deux centenaires...
— Ouai, j'ai pas assuré, je suis désolé. Je ne mérite pas le titre de Bro du siècle. J'ai déshonoré le bro'code. Punis moi comme il se doit !
— C'est sur, confirmé-je en mordant mon poing pour m'empêcher de glousser, tu as commis une faute innommable. Pour te faire pardonner, tu devras...tu devras...Tu devras tenir Paige éloignée de moi toute la journée !
Jeff reste silencieux un moment et je le laisse cogiter tout en terminant de me préparer. Dans la salle de bain, j'hésite à mettre du parfum, mais en imaginant le regard qu'Ashley me lancera, je décide que ça vaut le coup d'embaumer un peu la classe.
— Toute...toute la journée ? Me demande Jeff tandis que je passe me chercher une pomme dans la cuisine.
— Oui. Toute la journée. Marché conclu ? Confirmé-je en déposant un baiser sur la joue de ma mère.
— Ok, mais t'as intérêt à me raconter tout ce que vous vous serez fait ou dis ! Je mérite au moins ça, vu le sacrifice que tu me demandes.
— Un sacrifice ? Rester avec ta petite amie ? Demandé-je dubitatif.
— J'avais des....projets aujourd'hui, tu sais.
— Jeff, tu devrais arrêter de la tromper, soupiré-je, ou alors quitte là, mais rien ne bon ne va sortir de cette histoire, crois-moi.
Mais une fois de plus, Jeff fait la sourde oreille, et je n'insiste pas. Nous raccrochons et je pousse un soupire tandis que ma mère me tend un cookie fait maison.
— Tu ne travailles pas aujourd'hui, lui demandé-je surpris.
— Pas ce matin, je commence à midi, me répond-elle d'un ton lasse, mais dis-moi, tu es rentré tard hier soir, je me trompe ?
— Hum...je...ouai, je suis sorti avec des potes et j'ai pas vu l'heure, désolé maman, réponds-je en me grattant l'arrière du crâne.
— Ha, les soirées entre amis...Et elle porte quelle nom ce pote ?
— Ash....maman ! Râlé-je avant de piquer plusieurs gâteaux que j'enveloppe précieusement dans une serviette en papier, je dois y aller. Promis je ne rentre pas tard ce soir.
— C'est ça, dis à cette Ash que je serais ravie de faire sa connaissance, me lance-t-elle avec un clin d'oeil avant de monter à l'étage.
Je secoue la tête et sors de la maison. Non. Je ne vais certainement pas lui présenter de suite Ashley. Ma mère risquerait de ressortir son vieil album de grossesse, puis les photos compromettantes de moi bébé. Hors de question qu'elle fasse fuir la femme de ma vie ! J'envoie un message à Ashley pour lui dire que j'arrive et démarre. Quelques minutes plus tard, je sonne à sa porte.
— Encore toi ! Ashley ! Ton chauffeur est arrivé ! Gronde le jeune homme face à moi.
— Bon..bonjour heu...Bayron, le salué-je le plus amicalement possible.
— C'est Aaron, me reprend-il en croisant les bras.
Je marmonne des excuses et me mord la langue. Pour la bonne impression, je crois que c'est foutu à tout jamais. Mais d'ailleurs, n'est-il pas censé être retourné à l'université ? N'a-t-il jamais cours ? Je lui adresse un sourire qu'il ne me rend pas.
— Aaron, qui est-ce ? Demande une femme en ouvrant un peu plus la porte, oh, Tyson, c'est ça ? Tu viens chercher Ashley ? Elle devrait arriver dans une minute. Mais entre donc, ne reste pas planté là. Aarychou, laisse le passer veux-tu ?
Aarychou me défie du regard de dire quoi que ce soit, mais n'étant pas suicidaire, je vais évidemment m'abstenir de tout commentaire. Passant devant lui, je sens son regard menaçant me suivre jusque dans le salon où madame Evans m'invite à m'asseoir. La nervosité que j'avais habilement réussi à maintenir éloignée jusque là refait surface et je prends de grandes inspirations, tentant de me détendre. C'est sans compter sur Aaron et son regard flamboyant de colère qui ne me lâche pas d'un iota. Est-ce qu'Ashley lui a dit ? Est-ce qu'il sait qu'on a... ? Non, Ashley ne lui aurait jamais dis. Mais peut-être qu'en revanche elle lui a dit que nous étions ensemble ? Oui. Cela expliquerait le comportement de son frère. Je me rappelle encore très bien l'avertissement qu'il m'a donné l'autre jour. Avertissement que j'ai outrageusement ignoré et piétiné la nuit dernière. Mais en repensant à ce moment de plaisir brut avec Ashley, je dois dire que...je ne regrette aucunement.
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