Tyson ralenti et nous continuons de rouler en silence. Je ne pensais vraiment pas que la journée allait ainsi tourner. Mon coeur me fait tellement mal que j'en ai la nausée. La colère s'est dissipée, laissant mes nerfs tellement à vif que j'ai envie de pleurer. Mais qu'est-ce que je peux dire ? Je ne vais quand même pas m'excuser d'avoir défendu quelqu'un, non ? C'est quand même un comble ça ! Je n'ai rien fais de mal ! Ou...peut-être que si ? Je repense à ces garçons, prêts à nous frapper et j'en ai la chair de poule. Mais j'ai beau regarder, il ne fait aucun doute que c'est moi qui ai provoqué tout cela. Rien d'étonnant que Tyson soit furieux. De plus, ce n'est pas comme si je n'avais pas conscience de m'attirer des ennuis. Ce n'est pas comme si Kyle et Aaron ne passaient pas leur temps à me dire de mesurer mes paroles...Mais c'est plus fort que moi. Quand je suis énervée, ma langue se délie et je n'ai plus aucun filtre. Je regarde le jeune homme du coin de l'oeil et pince les lèvres. J'ai tout gâché. Et cette vérité me fait bien plus mal que ce que j'imaginais. Cette complicité étrange qui s'installait entre nous, je l'appréciais vraiment. Mais maintenant qu'il a vu cette facette de ma personnalité, cette façon que j'ai de provoquer des situations délicates, que va-t-il penser de moi ? Mieux vaut peut-être en rester là. On se verra pour la pièce, mais instaurer une distance ne nous ferait peut-être pas de mal ? Une boule se forme dans ma gorge à cette idée et je cligne plusieurs fois des yeux, me retenant de pleurer. Au bout de quelques minutes, la voiture s'arrête sur un parking et Tyson se tourne vers moi.

— Je suis désolé, je me suis emporté, me dit-il, j'ai eu peur qu'il t'arrive quelque chose parce que je...

Je secoue la tête. Non. Il n'a pas à s'excuser. C'est moi qui suis en tort. J'ai été irréfléchie, comme toujours. Et je nous ai mis en danger. J'ai envie de le prendre dans mes bras, que l'on oublie toute cette histoire. Pourquoi est-ce que je ne peux pas tout simplement réfléchir avant de parler ? Je n'aurais rien dis, on serait certainement en train de nous amuser dans la grande roue ou ailleurs. On aurait pu passer une bonne soirée. Alors que là, on va se quitter sur une mauvaise note. Je déteste ça. J'ai beau savoir que j'ai fais ce qu'il fallait pour cette fille, je me rends bien compte que ce fut au détriment de notre soirée.

— Non, c'est moi qui suis désolée, j'ai été impulsive et je n'aurais pas dus réagir comme ça, le coupé-je avant de rajouter, même si j'avais quand même entièrement raison.

C'est plus fort que moi. Je ne peux pas simplement me contenter d'être désolée. Quand je sens que j'ai malgré tout bien fait, il faut absolument que je le fasse savoir. Cela n'enlève rien à la sincérité de mes excuses. J'ai eu tort de provoquer ces types, mais j'ai eu raison de défendre cette fille. Et ça, personne ne pourra dire le contraire. Je lève la tête, défiant du regard Tyson. Si il me dit que j'ai eu tort, je sors de la voiture. Bon...j'espère qu'il n'en fera rien car je ne sais absolument pas où on est, et je n'ai pas la moindre envie de retrouver le chemin jusqu'à chez moi à pieds. Mais Tyson éclate de rire, secouant la tête de droite à gauche. Son rire est communicatif et je le rejoins pour quelques minutes d'hilarité.

— Je t'aime !

Mon dernier éclat de rire s'étrangle dans ma gorge tandis que je baragouine un « quoi » incompréhensible. Tyson me regarde, la bouche entrouverte, le menton tremblant. Non, je n'ai pas rêvé. Il m'a bien dit ce que je pense qu'il m'a dit. Et il a l'air sérieux. Je me mords la lèvre. Qu'est-ce que je peux dire ? Qu'est-ce que je ressens ? Est-ce que je l'aime ? Mon coeur bat de plus en plus vite tandis que j'ai de plus en plus chaud. Je ne peux pas lui donner de faux espoirs, mais en même temps, je n'ai aucune envie de le rejeter. Alors je fais la seule chose que je sais vouloir à cet instant précis. Doucement, je m'approche de lui, et pose mes lèvres sur les siennes. Ses lèvres sont douces et chaudes. Je sens un sourire se dessiner dessus tandis que sa main droite se pose sur ma joue. Sa langue chatouille la mienne, m'arrachant un gémissement. Mon cœur tambourine comme un fou dans ma poitrine. Je l'aime ? Ou bien ai-je simplement envie de lui ? Suis-je vraiment obligée de répondre maintenant ? Sans période d'essai ? De temps de réflexion ? Il me livre ses sentiments sur un plateau, mais ai-je seulement deux options ? Dois-je vraiment les accepter ou les refuser ? Après tout, si je compare, au restaurant, on goûte un plat, et soit on le mange, soit on le renvoie en cuisine. Serait-ce vraiment si terrible de faire la même chose ?

Ses bras m'attirent à lui sans pour autant que ses lèvres quittent les miennes et je me retrouve à califourchon sur ses genoux. Un frisson me parcourt le corps et je me presse un peu plus contre lui. Un sourire se dessine sur ses lèvres qu'il dépose sur mon cou. Je mets la tête en arrière, soupirant sous ses baisers. Si je ne suis pas encore au clair avec mes sentiments, au moins le suis-je vis à vis de mes désirs. C'est plutôt une bonne chose, non ? Ses mains glissent sous mon teeshirt et je me redresse, à bout de souffle. Je ne peux pas. Je ne peux pas aller plus loin en le laissant croire que ses sentiments sont réciproques. C'est cruel. Et je ne veux pas être ce genre de personne.

— Tyson, je...je ne sais pas quoi te dire...Tu me plais, je ne peux pas le nier, mais t'aimer ? Je ne sais pas, je...

— Je comprends, me coupe-t-il en glissant sa main dans la mienne et jouant avec mes doigts, mais je devais te le dire. Non, ne dis rien et écoute moi. Je t'aime. Je t'aime depuis...depuis toujours je crois. Je ne suis pas parfait, loin de là. Mais je suis quelqu'un d'honnête. Je...J'aimerais qu'on tente le coup. Et si ça ne fonctionne pas, et bien tant pis. Au moins, on aura essayé. Mais...si tu ressens la moindre petite attirance pour moi, essayons. Je...je nous aimerai pour deux si il le faut. Mais je refuse de te laisser filer sans que tu m'aies donné ma chance.

Tyson me regarde droit dans les yeux, et toutes les petites boutades que je voulais lui lancer pour revenir à quelque chose de moins sérieux s'éparpillent dans mon esprit. Cette déclaration explose dans mon coeur, me laissant complètement sans dessus-dessous. Et je dois être horriblement égoïste puisque j'acquiesce. Oui. Je veux lui donner sa chance, mais surtout, je veux me donner le temps de faire le point sur ce que je ressens. Mais si je le rejette et que je réalise que je l'aime, je n'aurais pas de seconde chance. Et je refuse d'avoir des regrets, quitte à lui briser le coeur. Oui, je suis vraiment horrible de penser ainsi. Même si, je l'avoue, rien que l'idée de le rendre malheureux fait exploser le mien en mille morceaux. J'ouvre la bouche, laissant les mots couler comme ils viennent, ne sachant pas vraiment ce que je vais lui répondre. Et je suis moi-même surprise par la véracité de mes propos :

— Je ne veux pas te perdre.

Un sourire s'étire sur ses lèvres et il m'attire à lui. Nos lèvres se découvrent, nos langues valsent et nos vêtements s'évadent. Tyson tend le bras et je l'entends vaguement farfouiller la boite à gant. Je passe mes mains sous son tee-shirt, parcourant sa peau qui se parsèment de nervures sur mon passage. Mon pantalon s'échappe, son maillot le rejoint. Tyson me repousse légèrement, me questionnant du regard. J'acquiesce, et pour en donner plus de poids, j'arrache l'emballage de la protection. Ses lèvres retrouvent les miennes et j'en ressens un profond soulagement tandis que mon désir augmente encore d'un cran. Je me soulève légèrement afin de le laisser se préparer. Puis, le temps d'un instant fugace avant que mes doutes ne me rattrapent, nous nous aimons, avec pour seul témoin, le soleil flamboyant qui décline à l'horizon.