Chapitre 23 - Lydia
Cela faisait des jours qu'Agatha n'emportait pas un, mais deux adolescents dans son laboratoire, en même temps. L'un de ces enfants était toujours un vampire. Avant chaque séance, Agatha venait observer Vallie et elle prenait des notes sur son état physique et mental.
Lydia n'osait même pas respirer quand la scientifique se postait ainsi devant sa cellule. Son regard fou brillait d'un éclat de lucidité si bien qu'elle ressemblait à un animal sauvage avec des yeux de femme. Cette fois-ci, elle crut qu'elle allait s'évanouir d'angoisse. Mais Agatha ne s'attarda pas et retourna dans son laboratoire, un sourire satisfait aux lèvres.
Vallie, qui ne voulait pas donner à sa ravisseuse le plaisir d'avoir peur, n'avait pas détourné le regard. Même si elle n'avait plus la force de bouger, même si elle n'avait plus la force de respirer, elle se battrait.
– Tu vas bien ? demanda la vampire.
Lydia secoua la tête de gauche à droite, car ses lèvres tremblaient trop pour parler.
– Elle ne te fera rien avant longtemps, ne t'inquiète pas.
– Ce n'est pas pour moi que je m'inquiète. Quand elle te regarde comme ça, comme si tu n'étais rien, ça me terrifie.
Vallie se traina jusqu'à la paroi transparente. Ses bras squelettiques tremblaient si fort que Lydia crut qu'elle allait s'effondrer. Mais même sans muscles et sans force elle semblait indestructible.
– Elle ne me fera rien nous plus, je suis son cobaye témoin, m'assoiffer lui suffit.
– C'est déjà trop ! rétorqua la sorcière. Si je pouvais sortir d'ici je la ferais pendre et je la viderais de son sang.
Vallie poussa un long soupir d'épuisement et envoya ses cheveux sales en arrière. Des perles colorées se perdaient dans certains de ses dreadlocks, comme un souvenir de sa vie avant d'être enfermée ici.
– Tu avais décoré tes cheveux ? demanda Lydia.
Vallie passa sa main dans ses cheveux et les caressa telle une sirène charmant les marins. Une beauté brute se reflétait sur son visage émacié.
– Je portais souvent des tresses avant, avec des coquillages, des perles et des anneaux.
Lydia leva la main et frôla la parois comme si elle pouvait caresser les tresses soyeuses et colorées de la vampire. Un cri de douleur résonna dans le laboratoire. La sorcière ne sursauta même pas.
– Qu'est-ce qu'elle fait ?
Vallie se pinça les lèvres en tendant l'oreille.
– Je crois qu'elle cherche à ce que le vampire s'attaque à la petite fée qu'elle a ramené il y a deux jours. Elle parle d'un gaz...
– Pourquoi est-ce qu'elle fait tout ça ? laissa échapper Lydia les larmes aux yeux.
Sa voisine lui accorda un sourire doux.
– Parce qu'elle souffre. Elle souffre et elle cherche à punir les responsables.
– Mais nous ne sommes pas responsables !
La peur et la frustration de la sorcière la firent abattre son poing sur le sol. Elle fut incapable de retenir ses larmes plus longtemps.
– Pas nous, mais ceux qu'elle pourrait atteindre grâce aux expériences qu'elle fait sur nous.
Un nouveau cri résonna, puis un second, suivi d'un long et lourd silence. Lydia et Vallie se fixèrent, retenues l'une par l'autre de plonger dans une profonde terreur face à ce qui pouvait arriver.
Agatha sortit de son laboratoire. Un masque à gaz protégeait sa bouche. Aeron qui sortit juste après en portait un identique.
– Prépare la prochaine attaque, nous frapperons dans deux semaines, et nous lâcherons quelques bombes ce soir, ordonna-t-elle d'une voix étouffée par le masque.
Il hocha la tête et disparut dans le couloir. Agatha, elle, retira son masque et s'assit au sol, face aux deux cellules de Lydia et Vallie. Elle les regarda tour à tour, en silence, sans bouger, sans rien laisser paraître de ce qu'elle pensait. La sorcière s'était recroquevillée dans un coin, mais la scientifique ne fit rien. Elle se contenta de les observer. Pendant un instant, alors qu'elle venait de jeter un coup d'œil à Vallie, qui tenait à peine assise, Lydia crut apercevoir un éclat de joie dans le regard d'Agatha.
Pas une joie sadique, mais un réel bonheur. A quoi pouvait-elle penser ? Quelle pensée, quel souvenir pouvait bien la rendre heureuse ainsi, et apathique la seconde d'après. Comment son esprit avait pu sombrer au point que sa quête existentielle soit mue par une folie si lucide ?
Lydia n'eut aucune réponse. Agatha se leva enfin et retourna dans son bureau. Ses hommes emportèrent deux corps ce soir-là. Celui d'un vampire de seize ans et celui d'une fée de quatorze ans qui avait été vidée de son sang.
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