|| Chapitre 3 : L'annonce ||
🕊️ - M. Walker, M. WALKER ! crie l'enseignant. Votre téléphone sonne.
Je sursaute tellement fort, que je tombe presque de ma chaise. Je secoue la tête, avant de regarder mon professeur, qui semble agacé.
- Désolé, monsieur, je bredouille, embarrassé.
- Je l'espère bien. Votre téléphone n'arrête pas de sonner depuis au moins deux minutes.
- Oh ! Puis-je répondre ? je demande
- Allez-y.
Je prends mon portable dans mon sac : j'ai deux appels manqués de ma mère. Ce qui est bien, c'est que comme le lycée était au courant de l'accident d'Alyssa, il m'a autorisé à répondre au téléphone, si c'est mes parents qui m'appellent. Car ils n'appellent pas pour rien. Je me lève et me mets au fond de la classe, sous les regards curieux des autres élèves. Je rappelle ma mère, qui répondit aussitôt :
- Allô, je dis.
- Allô Lyam. Ça va ?
- Oui ça va et vous ?
- Je... ça va.
- Ok. Vous êtes en voiture ? je demande.
Je viens d'entendre un bruit de moteur.
- Oui, nous venons te chercher.
- Qu... quoi ? Pourquoi ? Qu'est-ce qu'il se passe ?
Et si... non, si c'est vrai, j'hallucine. Si c'est réel, c'était sans doute le plus beau jour de ma vie.
- L'hôpital nous a appelé : ta sœur s'est réveillée, déclare ma mère, émue.
Je me fige sur place, sous le choc. Je fais tomber mon téléphone qui atterrit par terre dans un bruit sourd. Mon teint a viré au blanc pâle. Je m'adosse au mur, sous le regard inquiet de mon professeur. Ma mère a sans doute raccroché, car je ne l'entends plus.
Je... ça ne peut pas être vrai... Ma sœur s'était réveillée de son coma, deux mois après son accident. Je me masse les tempes, pris d'une soudaine migraine. Je suis sous le choc. Je n'arrive pas à y croire. Enfin, mon Alyssa s'est réveillée. Je vais la revoir, je vais de nouveau la serrer dans mes bras. Rien que cette pensée me fait chaud au cœur.
- M. Walker, tout va bien ? questionne M. Beckler.
Je reporte mon attention vers mon prof d'histoire. Je ne réponds pas à sa question. Au lieu de ça, je fixe Phoebe, Sofia et Matt, qui me regardent, inquiets. Je peux voir l'angoisse mélangée à de l'espoir, dans leurs regards.
- Elle s'est réveillée, je souffle.
Les deux meilleures amies d'Alyssa poussent des cris de surprise. Elles semblent touchées et soulagées. Je me tourne vers Matt, qui me regarde, un grand sourire aux lèvres. Il est très content. Les autres élèves se mirent à chuchoter entre eux. La voix du professeur vient stopper leurs messes basses.
- Votre sœur s'est réveillée ? demande-t-il en se tournant vers moi.
J'hoche la tête, on ne peut plus joyeux.
- Oui. Ma mère m'a appelé. Ils viennent me chercher à l'hôpital, pour qu'on aille la voir.
- Je suis très content pour vous. Nous lui réserverons le meilleur accueil.
- Merci (je regarde de nouveau les amies et le copain de ma jumelle), je vous tiens au courant.
- Merci ! répondent les concernés à l'unisson.
Je prends mon sac et sors de la salle de classe. Je me mets à courir à travers les couloirs, avant d'atterrir dans la cour. L'idée de revoir ma sœur adorée me donne de la force. Au loin, j'aperçois la Tesla noire de mes parents qui est garée dans l'allée. Je les rejoins en quelques secondes. Mon père était au volant et ma mère sur le siège passager. J'ouvre la porte arrière, et monte à l'intérieur.
- Salut, je dis.
- Salut fiston, répond mon père, qui m'adresse un sourire à travers le rétroviseur. Les cours, ça a été.
- Ouais, ouais. Sinon, depuis quand Lyss est réveillée ? je m'empresse de demander afin de changer de sujet.
Je n'aime pas parler des cours.
- Depuis quelques heures, déclare ma mère. Elle est assez agitée. D'après ce qu'on nous a dit, elle est très fatiguée et a besoin de beaucoup de repos. Aussi, elle est restée dans le coma pendant presque trois mois, donc c'est normal qu'elle soit perdue et crevée. Par contre, elle ne t'a pas demandé.
- Ah, je lance, tout simplement.
Je suis étonné que ma sœur ne m'ai pas mentionné. Moi qui crois qu'elle allait le faire. Tout en conduisant, mon père me dit :
- Le docteur a dit qu'il avait constaté quelque chose, mais qu'il préférait nous le dire en face. Ça semblait assez grave. Mais bon... on verra.
Je ne réponds pas : qu'est-ce qui peut être aussi grave. Tout ce qui concerne ma sœur m'inquiète. Nous arrivons à l'hôpital : mon père se gare sur le parking et nous sortons de la voiture. Nous rentrons à l'intérieur du bâtiment. Il y a du monde, ce qui n'est pas surprenant venant d'un hôpital. Mes parents et moi nous dirigions vers le guichet : une jeune dame y était. Elle est en train de faire de la paperasse. Elle lève la tête quand elle nous voit.
- Bonjour, dit mon père. Nous aimerions voir Alyssa Walker, s'il vous plaît.
La femme regarde sur son cahier, puis reporte son attention sur nous :
- Comme vous devez le savoir, elle s'est réveillée. Elle a été transférée dans une autre chambre. Le numéro, c'est 436, au quatrième étage, énumère-t-elle.
- D'accord, merci.
Nous prenons l'ascenseur, qui s'arrête au quatrième étage. Nous sortons quand soudain, nous tombons nez à nez avec le médecin qui s'occupe de ma sœur.
- Oh, bonjour, docteur, dit ma mère.
- Bonjour M. et Mme Walker. Eh bien, le bonjour Lyam.
Comment est-ce qu'il connait mon prénom ? Peut-être que mes parents lui ont dit. Et puis, depuis le temps que je viens ici...
- Bonjour monsieur, je murmure.
- Je vous attendais, annonce le professionnel. Veuillez bien me suivre, s'il vous plaît.
Nous suivons le docteur qui s'arrête devant la chambre 436, celle de ma sœur. L'homme pose sa main sur la poignée, avant de se tourner vers nous :
- Sachez qu'Alyssa est très fatiguée. Elle a besoin de repos et...
Mais il ne termine pas sa phrase et se contente d'ouvrir la porte. Mes parents et moi pénétrons, et quand je l'aperçois, mon cœur rate un battement : ma jumelle est allongée sur son lit, le regard vague. Elle semble perdue dans ses pensées. Elle n'est pas avec nous, elle parait... ailleurs. Elle finit par remarquer notre présence, au bout de quelques minutes. Ses yeux verts croisent les miens et nos regards restent accrochés, quelques instants. Mais Alyssa détourne le regard, replongeant dans ses pensées.
Le pire, c'est qu'elle ne réagit même pas à notre présence : elle ne crie pas mon prénom ou n'éclate pas en sanglots, rien. Elle est impassible ; son visage ne dégage aucune émotion. Ça commence à m'inquiéter : ce n'est pas ma sœur... elle n'a jamais été comme ça. Moi qui la connais mieux que personne, je ne l'ai jamais vu se comporter ainsi. Quelque chose cloche, mais quoi ? J'ai beau réfléchir, je fais chou blanc.
Sans prévenir, je cours vers ma sœur et la serre dans mes bras. Cette dernière commence à se débattre, tout en poussant des hurlements stridents :
- Ahhhh !! Lâchez-moi !
Je m'écarte d'elle, étonné. Mais qu'est-ce qu'il se passe, bon sang ? Pourquoi est-ce qu'elle réagit comme ça ?
- Mais... Alyss ! C'est moi, Lyam, ton frère jumeau.
- Qui êtes-vous ? Je ne sais pas qui vous êtes, souffle-t-elle.
Je lance un rire amer : dites-moi qu'elle le fait exprès. Un, elle me vouvoie et deux, elle ne sait pas qui j'étais. Non, mais là, c'est la meilleure.
- Alyssa chérie, intervient ma mère en s'approchant d'elle avant de lui prendre la main. C'est Lyam, ton jumeau, tu ne le reconnais pas ?
- Mais qui êtes-vous, bon sang ! s'écrie ma sœur, en repoussant ma mère, qui faillit tomber. Mon père la rattrape à temps. Et puis, c'est qui, Alyssa ? Et... je ne vous connais pas, je ne vous ai jamais vu ! Partez !
Je suis surpris par le ton qu'emploie Alyssa : jamais, elle n'a parlé de cette manière à quiconque. Elle a toujours été obéissante et polie, et là... elle parle mal et hausse le ton. Même mes parents sont surpris par son comportement. Mon père se tourne vers le médecin, qui est resté en retrait.
- Docteur, que se passe-t-il ? Qu'à ma fille ? Pourquoi est-ce qu'elle réagit de la sorte ? demande-t-il, d'une voix sèche.
L'intéressé se passe une main dans les cheveux, gêné. Il pose son regard sur ma sœur, qui semble toujours déboussolée. Il s'approche d'elle et règle quelque chose sur une des machines qui se trouvent à côté de son lit. Puis, il se tourne vers nous :
- C'est ce que je voulais vous dire... mais, je n'ai pas su comment vous l'annoncer.
- Monsieur, dites-nous, je supplie, au bord du désarroi.
Je ne peux plus tenir. Je veux savoir ce qu'avait ma sœur et pourquoi est-ce qu'elle est devenue bizarre. La tension est à son comble, je suis sur le point de craquer.
- Votre fille... a perdu la mémoire. Elle est devenue amnésique, souffla le docteur. Je suis... désolé.
En entendant ces mots, je sens mon cœur se briser en deux. Non, ça ne peut pas être vrai... c'est impossible. Alyssa... amnésique. Ce mot tourne en boucle dans mon esprit. Je lance un rire amer : ça doit être une mauvaise blague.
- Vous rigolez, j'espère, je m'esclaffe.
Le professionnel secoue la tête. Ma mère lâche un sanglot, avant d'enfouir sa tête dans le cou de mon père, qui la serre contre elle. Je me mis à trembler de tous mes membres. Dites-moi que je rêve ! Ma... ma jumelle ne sait plus qui je suis ? Elle ne se souvient plus de moi... elle m'a oublié. Ce n'est pas possible, je ne peux pas y croire.
Je n'arrive pas à accepter qu'Alyssa puisse m'oublier. C'est... ma sœur, ma jumelle, ma moitié, mon sang, ma confidente, ma meilleure amie, la personne avec qui j'ai passé les meilleurs instants de ma vie. C'est la personne qui me fait rire, avec qui je passe tout mon temps. C'est celle qui me comprend le mieux, qui me soutient, me réconforte quand je ne vais pas bien. On se dit tout, on fait tout ensemble. Nous deux, c'est à la vie, à la mort. Quand un de nous deux n'allait pas bien, l'autre aussi l'était. Et ainsi de suite...
Mais rien que le fait de me dire, que plus jamais ne sera pareil entre nous, me détruit de l'intérieur. Je... c'est tellement dur à encaisser. En plus, je dois le dire à Matt, Phoebe et Sofia, ce qui va être très dur. Eux aussi auront du mal à l'accepter.
La culpabilité me ronge de l'intérieur : pourquoi est-ce que j'ai fait ça, pourquoi ? Je m'en veux vraiment... Alyssa a perdu la mémoire et c'est à cause de moi. Je suis l'unique coupable dans cette histoire.
Alyssa ne fait rien : elle reste là, à regarder ailleurs ; comme si de rien n'était. Aussi, on ne peut pas lui en vouloir après tout, elle ne se rappelle plus de nous. Ne pouvant plus rester une seconde de plus ici, je sors en trombe de la chambre. J'ignore les cris de mes parents, qui me supplient de revenir. Je n'en ai plus rien à faire maintenant. Je me mets à courir dans les couloirs, bousculant tout le monde sur mon passage. Je descends les quatre étages par les escaliers, cours dans le hall et je finis par me trouver dehors.
Je marche un peu, avant de m'arrêter. Je pousse un cri de haine, de tristesse. Tout ce que je ressens à ce moment se trouve dans mon hurlement. Je tombais à genou sur le sol, mes cheveux tombant devant mes yeux. Le sol commence à devenir humide : je pleure. Je balaye mes larmes d'un revers de manche, avant de me lever.
Tête baisée et mains dans les poches, je me mets à marcher dans la rue. Le visage de ma sœur n'arrête pas d'apparaître dans mon esprit ; elle me hante : j'essaie de l'enlever, mais ça ne marche pas. Je finis par arriver dans un parc. Je m'assois sur un banc. Je ferme les yeux et laisse le vent frais caresser mon visage.
Tout ce que je veux, c'est retrouver ma sœur, ma vraie sœur. Celle qui est joyeuse et qui sait redonner le sourire. Je ne veux pas celle qui ne sait pas qui je suis, qui était perdue et amnésique. Ce n'est pas l'Alyssa que je connais. Elle est tellement différente de la fille que je connais... Pourquoi est-ce que ce stupide accident a dû arriver ? Je me déteste vraiment, je n'arrive même plus à me regarder dans un miroir.
Je fuis mes parents et ma sœur, car je ne veux pas accepter la réalité. Mais je sais qu'elle va me rattraper ; je ne peux pas fuir éternellement. Je suis :
Un lâche
Un abruti
Un idiot
Un fuyard
Un imbécile
Un mauvais fils
Un frère qui n'a même pas réussi à affronter l'amnésie de sa propre sœur.
Une mauviette
Et encore... ce n'est que le début.
Je me fais une promesse : sauver ma sœur de ce cauchemar, qui vient tout juste de commencer. Je suis prêt à me battre pour elle, je peux soulever des montagnes. Je suis même capable de me sacrifier, si ça pouvait la guérir. Car après tout, c'est ma jumelle et je peux tout faire. Comme je suis son frère jumeau, rien ne me fait peur. J'ai la force d'affronter cette réalité qui me sépare de plus en plus d'Alyssa. Mais jamais, je ne la laisse tomber ; parce que je l'aime plus que tout au monde. Sans elle, je ne suis rien. Je sais que ça peut paraître excessif, mais ce que je ressens pour elle était on ne peut plus sincère. Le lien que j'ai avec elle est spécial. Je ne connais personne qui avait une relation aussi fusionnelle avec son frère ou sa sœur.
L'amour d'un frère pour sa sœur est éternel et surtout indestructible. Alyssa et moi, on est liés pour toute la vie.
Pour toujours et à jamais.
🕊️🌼🕊️🌼🕊️🌼
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