Chapitre 10 - Une dernière nuit
/!\ Scène de sexe détaillée dans ce chapitre !!!! Je préviens pour ceux que ça pourrait choquer/gêner que j'invite à aller lire autre chose pour leur confort ^^ Pour les autres, bonne lecture ;) /!\
Dans un soupir, Richa se retourna en réinstallant son oreiller sous sa tête. Comme bien souvent, le sommeil la fuyait mais, pour une fois, elle aussi le fuyait. Elle craignait trop d'entendre l'appel de l'Enclave sous forme d'une vision d'un Humcréa supplicié lançant une prière désespérée à Kaëv'ah. A présent qu'elle avait compris que ces scènes se déroulaient réellement quelque part dans l'Enclave, elle supportait encore moins ces cauchemars.
Sans compter qu'elle s'inquiétait pour Yennaël, seul dans un monde inconnu, menotté à son lit d'hôpital. Le comportement de son amant la préoccupait également grandement alors qu'elle ne comprenait toujours pas pourquoi il se montrait si distant avec elle et qu'elle s'en sentait de plus en plus frustrée, blessée et abandonnée.
A rajouter à cela, il y avait toujours son sentiment de décalage, de ne pas être à sa place, de devoir partir, niché au creux de sa poitrine qui la tourmentait en l'empêchant de dormir.
La nuit allait être longue, surtout alors que la jeune fille n'avait rien sur quoi se concentrer pour occuper son esprit et s'empêcher de sombrer dans une introspection démoralisante.
Changeant à nouveau de position pour la deuxième fois en quelques minutes,elle s'agita dans ses draps en soupirant encore bruyamment.
« T'arrives pas à dormir ?
A ce murmure, Richa se tourna vers Vinciane, installée sur un matelas à côté de son lit.
Pour sa première nuit au restaurant depuis son retour, on avait jugé plus sûr ne pas la laisser seule et Vinciane s'était proposé de lui tenir compagnie pour permettre à Jonah de se reposer un peu après toutes ces émotions. Ça avait également été l'occasion pour Vinciane de ne pas rester seule cette nuit après les derniers événements et leur confrontation avec Mikhail.
Visiblement, elle aussi peinait à trouver le sommeil. Dans la pénombre de la chambre, elle fixait Richa, redressée sur un coude.
En réponse à sa question la jeune fille constata :
- Toi non plus.
- Je suis encore un peu secouée par tout ça... Et toi, pourquoi tu dors pas ?
- Je pense à des trucs.
- A Yennaël ?
- Ouais, entre autres. Je comprends pas pourquoi il est comme ça avec moi en ce moment, ça m'énerve.
- Il a pas l'air ravi d'être ici...
- Je vais pas te mentir, Vince, j'avais pas non plus l'intention de rentrer... Je suis désolée...
- Donc, tu t'es vraiment construit une vie là-bas ? C'est si bien que ça ?
- On peut pas dire ça... Les personnes non-humaines, comme moi, finissent sur des bûchers, y a des salauds à tous les coins de rues, j'ai souvent risqué ma vie, j'ai vécu des choses horribles et j'ai perdu des gens que j'aimais mais c'est là qu'est ma place. Je sais que c'est bizarre mais c'est comme ça, j'y peux rien. Désolée.
- Non, je crois que je comprends. Et t'as pas à t'excuser pour avoir trouvé ta place dans l'univers mais t'aurais quand même pu nous prévenir. Ça nous aurait évité de nous inquiéter.
- Je sais, désolée.
- Tu vas y retourner alors ?
- Sûrement, même si je sais pas trop ce qui m'y attend.
- Est-ce que t'as pu apprendre ce qu'il t'était arrivé au moins ?
- J'ai...retrouvé mon père...
- Quoi ? Mais...mais... Co...comment ça ? Qu'est-ce qu'il t'a dit ?
- Pas grand chose... Il ne connaissait pas mon existence avant de me rencontrer. Il a rien pu me dire sur moi...
- Alors t'es juste partie ? Ça va pas ? Pourquoi ?
- Je...je suppose que je pensais qu'à en apprendre plus sur moi et j'ai pas...réfléchi à ce que je ferai lorsque je les aurai... J'ai juste pas su comment réagir et j'ai pu que m'enfuir lâchement... Je pense que je saurai toujours pas que faire une fois rentrée mais je...je me sens mal pour tout ça... Là-dessus, je suis complètement perdue...
- Il doit être triste... Rencontrer sa fille puis la voir disparaître... ça doit être dur...
- Je sais bien... Excuse-moi mais je pense que je vais aller prendre l'air... ça ira si tu restes seule ?
- Ouais, t'en fais pas. Et désolée de t'avoir fait parler de tout ça.
- C'est normal que tu aies des questions. A tout à l'heure. »
Vinciane étouffa un bâillement en hochant le menton. De toute évidence, elle était bien plus fatiguée qu'elle ne l'affirmait et avait prétendu le contraire pour converser un peu avec Richa.
Cette dernière quitta son lit en écartant ses draps. Se débarrassant de son pantalon de pyjama, elle enfila un jeans et un de ses blousons de cuir puis, ses écouteurs enfoncés dans ses oreilles, elle sortir du restaurant. Elle prit la direction des bois sur les hauteurs de la ville.
Cette sortie nocturne fit remonter des souvenirs mais ça ne l'aida pas à dénouer ses pensées. Elle se sentait toujours aussi perdue. Elle ne se sentait pas mieux.
Sans y songer, elle se dirigea vers l'emplacement du passage qu'elle avait ouvert. Certainement était-ce son inconscient qui la poussait vers un retour dans l'Enclave. Elle ne pouvait cependant pas encore regagner son monde d'origine tant que Yennaël ne s'était pas remis de ses blessures. Elle devait le protéger.
En s'approchant, elle distingua une silhouette à travers les arbres qui se tenait à proximité du passage. L'obscurité n'entravant pas sa vision, elle reconnut Yennaël sans difficultés.
Le jeune homme paraissait encore mal en point, les traits tirés, légèrement courbé et se tenant le flanc. Semblant concentré, il étudiait le sol, là où Richa avait déchiré le voile entre les dimensions la première fois.
Absorbé par cet examen ou ses sens amoindris par son état, il sursauta lorsque Richa dévoila sa présence en lui demandant :
« Qu'est-ce que tu fais là ? Et la garde-à-vue ?
- Elle a été levée.
- Et tu me l'as pas dit ? T'as préféré venir ici pour... Pour quoi au juste ?
- Je voulais voir cet endroit. Je pensais peut-être forcer le passage et rentrer dans l'Enclave.
- Et tu peux pas ?
- Ce n'est pas un passage. C'est l'endroit depuis lequel tu as franchi la frontière grâce à un sort. C'est différent. Seules les personnes d'une puissance exceptionnelle peuvent faire ça. Moi, je ne le peux pas. Tu es la seule à pouvoir nous ramener dans l'Enclave depuis cet endroit alors fais-le.
- Non. T'es encore mal en point. On restera ici tant que tu seras pas parfaitement guéri, c'est ce qu'on a décidé.
- Non ! C'est ce que Liam a décrété ! De quel droit a t-il décidé ça ? Pour qui se prend t-il ? Il n'a même pas pris la peine de me demander mon avis ! Comment a t-il pu croire qu'il avait le droit de faire quelque chose de pareil ?
La gifle cueillit Yennaël par surprise et le fit légèrement tituber à cause de la force du coup et de sa faiblesse à lui.
Sonné, il ne put réagir avant que Richa le saisisse par le col de son blouson en le secouant à moitié. Le tirant brutalement, elle l'approcha de son visage, le plaquant presque contre le sien.
Toutes les émotions qui bouillonnaient et s'entrechoquaient en elle à la rendre à moitié folle depuis son retour sur Terre profitaient de toute la colère éveillée par les propos de Yennaël pour surgir. Le jugement qu'il se permettait de porter sur les actions de Liam l'enrageait.
Le vent qui venait de se lever agitant furieusement sa chevelure, elle cracha :
- Tout ce que Liam a voulu faire, c'est te protéger, comme il l'a toujours fait, parce que t'es incapable de le faire toi-même ! Tu penses qu'à ton projet alors faut bien que quelqu'un soit raisonnable à ta place, pauvre idiot ! Combien de fois tu serais mort sans Liem, hein, dis-moi ? Je croyais que c'était ton meilleur ami ! Essaye de te mettre à sa place ! A ton avis, qu'est-ce qu'il doit ressentir en ce moment, tout seul dans l'Enclave et se doutant que tu lui en veux, que tu le détestes, pour ce qu'il a fait ? Tu crois que ça a pas été horrible pour lui mais il a préféré se dire que tu le détestes peut-être, que tu serais loin de lui, mais que tu sois loin de tout danger ! Sérieusement, t'as une putain de chance d'avoir quelqu'un comme ça dans ta vie alors t'avères plus de dire des trucs comme ça !
- Je...je lui ai...rien demandé... Balbutia Yennaël, déstabilisé par la vive réaction de Richa.
- Je sais bien. Tu demandes jamais rien à personne, sauf pour tenir un rôle dans un de tes plans foireux.
- Je ne pensais pas que tu prendrais un jour la défense de Liam...
- Pour ce coup-là, il le méritait.
- Je suppose, oui, effectivement... Merci de m'avoir remis les pensées en place.
- Je te les ai remises en place juste pour Liam ou en général ?
Yennaël ouvrit la bouche, cherchant à formuler une réponse, mais il la referma et détourna le visage sur le regard.
Richa n'avait cependant pas besoin de paroles. L'attitude et l'expression de Yennaël lui suffisaient pour saisir le message. Ce ne serait pas cette nuit qu'elle comprendrait les causes du changement de comportement de son amant à son égard.
Elle aurait voulu crier, le secouer, le sommer de s'expliquer, mais une forte résignation s'abattit sur elle, chassant toute sa véhémence précédente. Si elle avait tenu à défendre Liam, elle n'avait à présent plus le courage de confronter Yennaël.
Ses épaules s'abaissèrent et elle soupira, en proie à un soudain et profond sentiment de vide et de solitude.
Suivant le flux et le reflux de ses émotions, le vent retomba à son tour.
Sans le regarder directement, elle saisit Yennaël par le poignet pour l'entraîner à sa suite en lançant :
- Allez viens, on rentre. Il est tard et ça caille.
Le jeune homme échappa à la prise de Richa mais il la suivit sans s'opposer. De toute manière, il n'avait pas réellement autre chose à faire que de l'accompagner dans cette dimension inconnue. Il n'allait pas rester à fixer le sol durant des heures en espérant que le passage vers l'Enclave s'ouvre. Ça aurait été inutile.
En silence, ils regagnèrent le restaurant et Yennaël en profita pour observer anxieusement tout ce qui l'entourait car, même si Richa lui avait transmis ses connaissances sur la Terre, il ignorait encore de nombreuses choses. Il se montra également intrigué par le restaurant, le lieu où Richa avait passé son adolescence.
A la suite de la jeune fille, il monta à l'étage dans l'espace habitation. Le laissant dans le salon, Richa se rendit dans sa chambre pour récupérer une paire de draps dans son armoire.
Dans son couchage aménagé au sol, Vinciane dormait profondément et elle ne réagit pas à son passage.
De retour dans le salon, Richa entreprit d'installer le divan en lit.
Après avoir étudié la pièce, plongé dans ses pensées, Yennaël vint l'aider, toujours en silence.
Lorsqu'ils eurent terminé, Richa se fit la remarque qu'elle n'avait aucun vêtement à donner à Yennaël pour s'en servir de pyjama. Semblant s'en moquer, le jeune homme haussa les épaules et se débarrassa de sa tenue pour se coucher.
Soudainement, la frustration, l'incompréhension, l'énervement, le sentiment de solitude et d'abandon qu'elle éprouvait face à la distance que lui manifestait Yennaël explosèrent en une seule vague d'émotions indescriptibles, qui la submergea. Elle craqua totalement à cause de la situation et de l'attitude de Yennaël.
Ne lui laissant aucune chance de réagir ou de se défendre, elle se jeta sur lui et le plaqua sur le divan. Avant qu'il ne pense seulement à se débattre, elle l'embrassa sauvagement en plongeant sa langue à la rencontre de la sienne.
Elle perçut le jeune homme se raidir contre elle et il parut hésiter durant quelques secondes mais il fut finalement incapable de lutter contre ses désirs sexuels, que la proximité avec la jeune fille éveillait furieusement en lui. Son instinct animal prit le dessus en repoussant sa raison et sa détermination.
Ses bras se refermèrent autour du corps de Richa en l'étreignant avec force.
Toutes ces fois à la repousser ces derniers jours lui avaient coûté et ça avait été un combat de tous les instants contre ses sentiments mais la peur l'y avait aidé sauf qu'elle ne se faisait actuellement plus entendre, éclipsée par son instinct animal frustré d'avoir été bridé.
Serrant Richa, il lui rendit son baiser en s'accrochant à plusieurs de ses longues mèches noires désespérément.
Ils prolongèrent ainsi leur baiser en s'agrippant l'un à l'autre avec une intensité teintée de fatalisme.
Leurs lèvres ne se séparèrent que parce qu'ils eurent besoin de reprendre leur respiration mais ils auraient souhaité garder leurs langues enlacées pour se sentir à nouveau connectés l'un à l'autre alors que leur lien semblait inexorablement s'étioler.
Le souffle aussi court que celui de Yennaël sous elle, Richa se redressa en plongeant son regard dans le sien couleur d'orage.
Les yeux du jeune homme s'écarquillèrent alors que l'image de la jeune fille au-dessus de lui se superposait à son visage tordu de douleur à cause des tortures de Mirévoyk et une crainte innommable l'écrasa. Il fut cependant incapable de la repousser en creusant la distance comme il l'avait fait jusqu'ici. Il avait actuellement trop envie d'elle, il ne pouvait résister à ses désirs charnels.
De toute manière, Richa ne se serait certainement pas laissé rejeter à présent qu'elle avait réussi à briser la barrière de son indifférence.
A peine prit-elle le temps de retrouver un minimum sa respiration avant de revenir embrasser Yennaël avec une fougue désespérée.
En cet instant, elle se sentait glacée de l'intérieur, comme lors de sa première nuit avec Yennaël, et recherchait la chaleur que lui procurait le jeune homme pourtant, même si sa peau brûlait sous ses doigts et que la température autour d'elle augmentait, un froid intense se distillait en elle et se répandait entre elle et Yennaël. Elle avait beau s'accrocher à son amant et l'embrasser de toute sa passion, elle continuait à être glacée, rien ne paraissait pouvoir la réchauffer.
Si Yennaël répondit à son baiser sans se faire prier, il continuait à éprouver un regain de cette peur dès qu'il apercevait les traits de Richa, à tel point qu'il commença à ne plus supporter de les voir, lui qui appréciait habituellement de les contempler.
La saisissant par les épaules, il la fit basculer sur le côté pour l'allonger sur le ventre à côté de lui.
Après quelques secondes de surprise et de frustration, croyant que Yennaël la repoussait finalement, Richa devina les intentions du jeune homme. Ça ne la dérangeait pas particulièrement mais elle continuait à souffrir de ce froid intense.
Heureusement, il n'augmenta pas lorsqu'elle retira ses vêtements, aidée par Yennaël.
S'allongeant sur elle en la couvrant de son corps, Yennaël l'embrassa dans la nuque en parcourant ses courbes de caresses mais la jeune fille frissonnait également de ce même froid qui la dévorait.
Se redressant sur une main, elle passa son autre bras autour du cou de Yennaël, perdant ses doigts dans ses boucles rousses, pour le ramener au maximum contre elle, toujours en quête de cette chaleur, de cette proximité qui semblaient lui échapper malgré ses efforts.
Même la main de Yennaël qui se glissa entre ses cuisses ne lui procura pas la sensation d'être proche de lui, même si plusieurs gémissements de plaisir lui échappèrent.
Elle aurait voulu embrasser le jeune homme pour se donner l'impression qu'ils n'étaient pas aussi éloignés l'un de l'autre, séparés par un gouffre toujours plus imposant, qu'elle en avait la détestable sensation mais sa position ne le lui permettait pas.
Yennaël s'appuya contre elle, contre son bassin redressé, la pénétrant dos à face. Une exclamation étouffée jaillit de la gorge de la jeune fille et elle serra le poing sur un des plis des draps. La sensation était légèrement différente de ce dont elle avait coutume et il fallut plusieurs minutes pour qu'elle devienne agréable.
Agenouillé contre elle et la tenant par les hanches, Yennaël commença par bouger lentement avant d'accélérer peu à peu avec des mouvements de plus en plus brutaux.
Le volume de leurs gémissements à tous deux augmenta, ceux plus aiguës de Richa et ceux plus rauques de Yennaël, mais ils ne se confondaient pas les uns avec les autres. Le concert de jouissance qu'ils composaient paraissait dissonant et discordant. C'était la première fois que leurs voix ne s'unissaient pas.
Cette constatation fit encore davantage croître le sentiment de vide qui creusait la poitrine de Richa.
Comment pouvait-elle se sentir si seule alors qu'elle faisait l'amour avec l'homme qu'elle aimait ?
Les larmes lui montèrent aux yeux à travers ses soupirs de plaisir. Un plaisir qui avait un goût affreusement amer.
L'orgasme qui la submergea fit jaillir ses larmes et elle se laissa lourdement tomber sur le ventre, essoufflée.
Ce n'était pas la satisfaction du désir charnel assouvi qu'elle éprouvait en cet instant mais un sentiment de vide, d'abandon et toujours plus de froid.
Yennaël s'allongea pesamment à côté d'elle et Richa vint se blottir contre lui dans l'espoir de combler cet écart bien trop profond qu'elle percevait soudainement entre eux depuis quelques jours.
Elle s'accrochait désespérément au jeune homme comme pour le retenir mais elle sentait qu'il lui échappait malgré tout.
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top