Chapitre 3 - Vieille et nouvelle connaissances

« Richa ?

S'étonna Yennaël en abaissant la main, dans la paume de laquelle il avait fait gonfler une boule de feu, prêt à attaquer, lorsqu'il avait entendu Esadd s'affaisser non loin. Ce n'était probablement pas la meilleure défense au milieu de centaines d'ouvrages mais c'était par réflexe qu'il avait croisé les doigts pour effectuer ce sortilège de flammes.
Cela lui fit étrange de prononcer ce prénom directement devant celle à qui il appartenait alors que, ces dernières semaines, il l'avait formulé sans pouvoir s'adresser à personne, presque dans le vide, mais il en éprouvait également une forte satisfaction.
La jeune fille était la dernière personne qu'il s'attendait à découvrir dans cette bibliothèque mais il devait avouer qu'il en était étrangement heureux.
Ouvrant la bouche, il s'apprêta à dire quelque chose, probablement pour demander à Richa ce qu'elle faisait là, comme c'était la première question qui lui venait à l'esprit, faisant définitivement s'éteindre les derniers effets de sa magie, mais, avant qu'il n'enchaine après avoir manifesté sa stupeur, la douleur explosa dans son visage, de sa mâchoire à la pommette. Il tituba de plusieurs pas en arrière en se rattrapant à l'étagère la plus proche.
Sonné, il porta les doigts à son visage et découvrit qu'un fin filet de sang s'échappait de sa narine.
Sans la lumière émise par les flammes qu'il avait générées, il peinait à véritablement distinguer ce qui l'entourait mais il n'avait pas besoin de voir pour deviner que Richa venait de le saluer avec son poing de toute la force dont elle était capable, à moins qu'elle ne l'ait bridée.
A quoi aurait-il pu s'attendre d'autre après tout ? Ils ne s'étaient pas séparé en très bon terme, Richa et lui, bien au contraire.
D'ailleurs, d'après les menaces qu'elle avait proféré à son encontre la dernière fois, il pouvait se douter que ce n'était qu'un début et qu'elle lui réservait bien pire.
Avançant vers lui, comme il s'était inconsciemment éloigné en titubant, Richa le saisit par le col de sa tunique, le trainant à ses pieds, et elle dressa à nouveau le poing, prête à l'abattre sur lui.
Ne cherchant nullement à l'esquiver, à se débattre et encore moins à se défendre, Yennaël se contenta de détourner le visage sur le côté dans un réflexe, en espérant que la douleur en aurait été amortie, estimant qu'il méritait ce trainement, qu'il se serait volontiers infligé lui-même si il l'avait pu.
Le coup ne vint pas.
Retrouvant ses esprits, Esadd se releva vivement, malgré sa stature musculeuse, traduisant une habitude à réagir promptement, et ceintura Richa de ses larges bras pour la soulever du sol en l'écartant de Yennaël.
Se rappelant de l'endroit où ils se trouvaient et de la possibilité, à éviter, qu'ils avaient de se faire repérer, la jeune fille retint une exclamation de surprise et elle battit des jambes par réflexe à la recherche du sol, sans le rencontrer sous ses semelles.
Son premier réflexe aurait probablement été de se débattre, rejeter le crâne en arrière pour heurter un nez, enfoncer ses coudes dans un abdomen ou une poitrine, selon ce qu'elle aurait rencontré sur le chemin de ses coups, mais, comme l'avait saisie sans aucune violence et même, à la place, avec une certaine douceur, elle hésita à le faire.
Ce qui donna à son adversaire l'occasion de prendre la parole d'une voix éraillée :

- S'il vous plaît, attendez qu'on soit ailleurs pour vous taper dessus. On a pas le temps pour ça. Alors regardons ce qui nous intéresse et tirons-nous d'ici. Je déteste cet endroit... Oh, au fait, alors c'est toi, Richa ? Ravi de te rencontrer enfin, depuis le temps que j'entends parler de toi ! Enchanté, je suis Esadd Neymorr.

Reposant la jeune fille à terre en la tournant vers lui, Esadd lui tendit la main en un geste de salutation, ne paraissant nullement lui reprocher le coup de grimoire sur le crâne.
Quelque peu déstabilisée par cette présentation sympathique et pleine de bonhomie alors qu'ils venaient davantage de se comporter comme des adversaires que comme des alliés, Richa le fixa avec un sourcil arqué, circonspecte.
Comme elle l'avait déjà constaté, il était grand et elle devinait sa puissante musculature sous sa chemise ample. Même sans percevoir précisément les couleurs sans lumière, elle distinguait qu'il avait la peau foncée, probablement autant que son regard couleur d'ébène.
Aucun cheveux n'apparaissait sur son crâne parfaitement glabre.
Pour son âge, Richa l'évaluait à une quarantaine d'années, un peu plus ou un peu moins, mais elle peinait à réellement le déterminer avec plus d'exactitude à cause de l'immense brûlure qu'il arborait.
Sur tout le côté gauche de son visage, la chair avait comme fondu avant de se solidifier à nouveau, laissant sur lui une marque irréversible, et la brûlure continuait en descendant sous le col de sa chemise.
Même si elle n'avait aucun moyen de deviner avec une absolue certitude les causes de cette ancienne blessure, comme elle n'allait certainement pas se permettre et se risquer à user de ses pouvoirs psychiques conférées par sa pierre, toujours autour de son cou, Richa se tourna immédiatement vers les hauts vitraux par lesquels continuaient à entrer les lumières des bûchers se consumant à l'extérieur.
Dans un monde où régnait une organisation comme la Flamme Blanche, il semblait logique, affreusement logique, qu'une pareille cicatrice soit le souvenir, les séquelles, d'un bûcher auquel il aurait échappé de justesse, même si Esadd ne présentait aucune caractéristique d'Humcréa qui aurait pu le conduire à une telle condamnation. Cela ne signifiait pas qu'il n'en était pas un pour autant. Il pouvait très bien les camoufler, comme le faisait Richa, ou bien tout simplement être un magicien et donc être dépourvu de tous signes extérieurs, comme Yennaël.
Richa ne se focalisa cependant pas sur cette immense cicatrice de brûlure ni sur la recherche de traits physiques inhumains mais sur le sourire qu'il lui offrait en salutation, large, lumineux, exposant une rangée de dents éclatantes. Il y avait quelque chose de tellement franc, honnête et chaleureux dans ce sourire qu'il contamina immédiatement Richa et elle le lui rendit sincèrement, même si il était fort possible qu'il ne puisse pas le distinguer dans l'obscurité, chassant toutes les violentes émotions que le visage de Yennaël avait réveillé en elle.
Sans hésiter, éprouvant de la sympathie presque instantanément pour cet homme, elle serra la main qu'Esadd lui présentait, échangeant une solide poignée de main avec lui et son sourire s'élargit encore davantage.
Son esprit lui paraissait nettement moins embrouillé car, lorsqu'elle avait découvert Yennaël devant elle, tout s'était mélangé dans ses pensées, plus particulièrement ses sentiments : de la colère, du ressentiment, de la surprise, de l'appréhension, du soulagement, du dénis, de la joie, de l'attirance et encore d'autres choses qu'elle était bien incapable de démêler, mais le sourire d'Esadd l'apaisait en lui faisant oublier tout cela.
Elle s'abstint donc de se tourner vers le jeune homme roux dans son dos.
Se redressant en prenant appui contre la bibliothèque qui l'avait soutenu précédemment, Yennaël essuya les traces de sang maculant encore son visage d'un revers de la manche, puis il recentra l'attention générale sur ce qui les amenait dans cet édifice de la Flamme Blanche :

- Ne perdons pas davantage de temps. Nous n'en avons pas beaucoup.
- Ouais, plus vite on sera parti d'ici et mieux ce sera, approuva Esadd soudainement bien plus grave qu'il y avait quelques secondes. J'ai cru voir une section d'archives sur Mirévoyk là-bas, sur la droite.
- On a eu la même idée de venir ici pendant que tout le monde était occupé à regarder cramer d'autres Humcréas on dirait. Lança Richa sans s'adresser plus particulièrement à Yennaël ou à Esadd.
- Effectivement, c'était une opportunité à saisir. Confirma Yennaël.
- Quelle bonté de la part du grand défenseur des Humcréas !
- Il me semble que toi aussi tu es là. As-tu essayé de les aider ? As-tu fait quelque chose pour ces Humcréas ? Y as-tu seulement songé ? Et fais-tu quelque chose pour que tout cela cesse un jour ? (Richa détourna le regard sur le côté, forcée de reconnaître la justesse des paroles de Yennaël et l'égoïsme de ses motivations). Alors, as-tu trouvé des choses susceptibles de t'aider dans tes recherches ?
- C'est qui Mirévoyk ? Demanda Richa en éludant la question de Yennaël sans beaucoup de subtilité. C'est pas la première fois que j'en entends parler.
- Ça fait plusieurs mois que tu es dans l'Enclave et tu ne t'interroges là-dessus que maintenant ? S'étonna Yennaël.
- Bah comme je suppose que y a que peu de chances que ce type soit mon père, j'ai pas vraiment eu de raison de m'y intéresser.
(le silence se prolongea durant plusieurs secondes puis, constatant que Yennaël ne comptait apparemment pas répondre, Esadd s'en chargea :)
- Un cinglé qui a indirectement fait naître la Flamme Blanche à cause de ses ambitions de conquête du monde.
- C'est plus compliqué que ça... »

Marmonna Yennaël entre les étagères entre lesquelles il s'était enfoncé, éclairé par une flamme dansant dans sa paume, sans s'appesentir sur le sujet et son ton indiquait clairement que celui-ci était clos.
En quête de quelques précisions supplémentaires, curieuse à présent que le sujet avait vaguement été évoqué, Richa se tourna vers Esadd mais, qu'il capte ou non son regard interrogateur dans l'obscurité, ce dernier haussa les épaules avant de reprendre l'examen des rayonnages en s'éclairant de la flammèche qu'il arracha à un briquet qu'il sortit la poche de son pantalon de toile, confirmant qu'il ne possédait pas une vision nyctalope.
Se convainquant mentalement que la présence de Yennaël en ces lieux ne changeait rien en se le répétant mentalement, Richa les imita en recommençant à arpenter les allées étroites à l'affût de tout qui aurait ressemblé à un registre ou de n'importe quoi s'en rapprochant.
Pour ce faire, elle emboîta le pas à Esadd, puisqu'elle jugeait qu'il s'agissait d'un bon moyen d'éviter de croiser Yennaël au détour d'une des bibliothèques comme il paraissait logique qu'ils se répartissent les ouvrages à étudier et s'attribue chacun une partie de la pièce pour gagner du temps, comptant bien ignorer le rouquin autant que possible. Le savoir ici en même temps qu'elle était déjà suffisamment irritant sans qu'elle ne voie son séduisant minois.
Pourquoi avait-il fallu qu'il soit là justement cette nuit alors qu'elle était parvenue à l'esquiver durant ces deux mois d'errance dans l'Enclave ?
Quelque part, la présence du jeune homme n'était finalement pas si surprenante. Après tout, il était intelligent, il avait dû remarquer que le seul moyen pour pénétrer dans ce bâtiment était d'attendre un déclin de la surveillance et, comme elle, il avait cyniquement constaté que cette exécution massive représentait une excellente occasion à saisir.
Un raisonnement identique à celui de Richa mais cette dernière s'efforçait de le diaboliser pour alimenter les reproches qu'elle lui adressait.
Dans un grognement, qui fit se soulever sa lèvre supérieure, dévoilant ses longues canines acérées, elle constata que son esprit était actuellement entièrement habité par Yennaël alors qu'elle souhaitait justement l'en chasser. Cette situation était vraiment haïssable.
Du moins, pas totalement. Elle devait tenter de voir le bon côté des choses : au lieu d'Esadd, Yennaël aurait pu être accompagné de Liam et, là, ça aurait été encore pire, comme le jeune homme semblait l'avoir détestée dès que ses yeux s'étaient posé sur elle pour la première fois.
Au moins, Esadd lui inspirait de la sympathie.
Secouant la tête de gauche à droite, Richa tenta à nouveau de se défaire de ces réflexions, qui recommençaient à se mélanger sans ordre, et elle fixa les rayonnages se déroulant devant elle pour s'obliger à se focaliser dessus, songeant à ses origines dont la réponse au secret l'attendait forcément quelque part.
Durant quelques minutes, elle réussit à s'intéresser uniquement à ses recherches, énumérant les titres inscrits sur les tranches sur lesquels elle ne s'attarda pas, mais sa concentration s'éparpilla et dévia encore bien rapidement.
Elle s'en aperçut lorsqu'elle se surprit à examiner avec bien trop d'attention un recueil de chansons humcréas ou traditionnelles de l'Enclave. Cet ouvrage faisait réagir la musicienne qui était en elle et qu'elle avait négligée, à regret, depuis son arrivée dans l'Enclave, mais il n'avait aucun intérêt pour sa quête. Elle ne pouvait se permettre de se disperser alors que le temps n'allait probablement pas tarder à leur manquer.
L'entendant grommeler tout bas, manifestant son agacement face à son incapacité à trouver des renseignements, Esadd, se tenant derrière elle, se retourna vers elle et, avisant l'ouvrage qu'elle observait toujours avec envie, il eut un léger sourire triste puis il tira le recueil du rayonnage, écartant les autres volumes entre lesquels il était comprimé. Ouvrant le sac que Richa portait sur le dos, il le glissa dedans.
Aussi surprise que touchée, la jeune fille ouvrit la bouche pour formuler son étonnement mais Esadd haussa les épaules avec un nouveau sourire lumineux.
Il n'y avait pas véritablement de sens dans ce geste. Il avait constaté qu'elle désirait ce recueil et il avait donc estimé qu'il suffisait de le prendre. Après tout, la Flamme Blanche ne reviendrait pas exiger de comptes, du moins, pas pour ce vole.
Le remerciant, car elle savait qu'elle n'aurait jamais subtilisé ce recueil sans lui, Richa lui sourit largement en hochant le menton.
Même si elle ne découvrait rien la guidant sur une piste vers ses origines parmi tous ces rayonnages, et elle se doutait de plus en plus que ce serait effectivement le cas, cette exploration de bibliothèque n'aurait pas été totalement infructueuse, mais elle avait encore le temps de possiblement faire une découverte.
Du moins, elle le crut jusqu'à entendre des pas fermes claquer dans des escaliers en pierre, ceux reliant le rez-de-chaussée au premier étage, où ils se retrouvaient pris au piège puisque le seul moyen de le quitter était d'emprunter ces mêmes escaliers.
Son ouï étant plus développée grâce à ses longues oreilles d'elfe, Richa avait relevé le danger avant qu'Esadd ou Yennaël ne remarque quoi que ce soit.
Exploitant ces quelques secondes qu'elle leur avait probablement permis de gagner grâce à ses sens aiguisés, elle prévint Esadd juste à côté d'elle et, si elle ne s'élança pas à la recherche de Yennaël pour en faire de même avec lui, ce fut car Esadd lui assura qu'il s'en chargeait avant de disparaître dans l'allée suivante, s'y déplaçant avec quelques difficultés à cause de la largeur de ses épaules, en lui conseillant de plutôt de se préparer à l'arrivée de ce qui était vraisemblablement une patrouille de la Flamme Blanche.
Après tout, il n'y avait aucune raison pour qu'Esadd abandonne Yennaël à son sort comme il semblait, au même titre que Liam, être un de ses acolyte de confiance, ce qui ne l'empêchait cependant pas de ressentir une pointe d'anxiété qu'elle aurait pu dissiper en rejoignant le rouquin.
Richa réajusta les sangles de son sac sur ses épaules, s'assurant qu'il ne glisserait pas, puis elle escalada la bibliothèque la plus proche en prenant appui sur les planches des rayonnages.
Heureusement qu'elle était légère et que le bois était solide, sinon, l'étagère aurait basculé.
Sans la moindre difficulté, elle se hissa jusqu'au sommet contre lequel elle s'aplatit, écrasée contre les planches de bois peintes de blancs et le plafond de pierres taillées.
Même si c'était bien loin d'être l'endroit le plus confortable de la pièce, c'était certainement la meilleure cachette qu'elle pouvait trouver, surtout si rapidement, et il s'agissait également d'un point en hauteur depuis lequel elle pouvait observer la pièce, bien que sa vision était majoritairement obstruée par toutes les étagères.
Elle repéra aisément Yennaël et Esadd grâce à la lumière que produisaient les flammes générées par la magie du rouquin.
Certainement averti du danger en approche par Esadd, il éteignit la lumière orangée qui disparut soudainement, probablement étouffée par le poing soudainement serré du jeune homme, mais pas à temps.
La porte donnant sur les escaliers s'ouvrit exactement simultanément à la disparition des flammes éclairant Yennaël et Esadd. Si bien que, même si les Hommes Blancs qui venaient d'entrer ne pouvaient être certains de ce qu'ils avaient aperçu si brièvement, ils le repérèrent.
Ils se dispersèrent dans la bibliothèque en se dirigeant vers l'endroit depuis lequel la leur s'était volatilisé de manière à l'encercler alors que deux autres demeuraient sur place, surveillant la porte pour empêcher quiconque de s'enfuir.
Une parfaite souricière.
Allongée contre le sommet de son étagère, Richa observa alternativement la porte gardée puis ce qu'elle évaluait comme la position approximative d'Esadd et Yennaël. Il ne lui fallut que quelques secondes pour se décider.
Peut-être qu'elle n'était finalement pas aussi égoïste et seulement motivée par son intérêt personnel.
Grâce à la grande proximité des étagères et à son agilité naturelle de demie-elfe, elle n'eut aucune difficulté à passer sur la bibliothèque suivante sans un bruit.
Progressant avec les Hommes Blancs, elle rejoignit Yennaël et Esadd en même temps que deux des soldats les atteignaient, leur bloquant toute échappatoire, se resserrant sur eux.
Se tenant dos à dos, Yennaël et Esadd se préparèrent à combattre mais Yennaël n'avait même pas suffisamment d'espace pour dégainer l'épée qu'il portait au côté et Esadd pouvait juste dresser ses poings devant lui sans effectuer de mouvements latéral. Sans compter que tout acte de magie de la part de Yennaël aurait attiré tout le reste de la patrouille plus sûrement qu'un appel de leurs collègues.
D'ailleurs, l'un des deux soldats qui les prenaient au piège ouvrait la bouche pour avertir ses compagnons, mais, ne lui en laissant pas l'occasion, Esadd le frappa à la jugulaire, lui coupant le souffle.
Enchainant à sa place, Richa bondit depuis le sommet de l'étagère, directement sur l'Homme Blanc qui luttait pour retrouver sa respiration. Se réceptionnant souplement, même si elle manqua de s'assommer contre l'un des rayonnages à cause de l'espace réduit, Richa se redressa en dégainant ses deux lames qu'elle fit tournoyer entre ses doigts, laissant l'Homme Blanc gisant à ses pieds.
A trois, ils firent face au deuxième Homme Blanc, qui, étrangement, n'avait encore appelé aucun renfort alors qu'il en aurait pourtant eu l'occasion.
Silencieux, se tenant en une posture simple qui n'était aucunement une amorce d'attaque ni ne reflétait la moindre intention belliqueuse, il semblait se contenter de les étudier dans la semi-obscurité. Les flammes des bûchers à l'extérieur dotaient son uniforme de couleurs rougeoyantes et sanglantes.
Avant qu'un des trois ne se prononce sur comment réagir face à cette attitude, atypique pour un Homme Blanc faisant face à des Humcréas, l'homme leur adressa un signe de tête leur ordonnant de filer, puis, se détournant, il avertit ses collègues qu'il venait de repérer du mouvement à l'opposée de leur position avant de s'éloigner.
Ils demeurèrent totalement stupéfaits.
Cet Homme Blanc venait-il de leur offrir une chance de s'échapper ? Mais pourquoi ?
Décidant d'un commun accord tacite qu'ils s'interrogeraient à ce propos ultérieurement et que l'urgence actuelle était de s'extirper de ce piège, ils allèrent pour s'élancer vers la porte mais Richa signala qu'elle était surveillée.
Dans un juron de Yennaël, ils se rapprochèrent des vitraux donnant sur la place où se dressaient les bûchers, réfléchissant rapidement à un plan pour se débarrasser des gardes sans lancer le reste de la patrouille à leur poursuite.
Ils n'eurent cependant pas le temps d'en élaborer seulement une ébauche. Richa entendait les pas des soldats les entourer, le mensonge de leur surprenant allié n'ayant pas tenu longtemps face à la constatation visuelle.
Se préparant à devoir affronter les Hommes Blancs, n'ayant apparemment pas d'autres choix, Richa raffermit sa prise sur les manches métalliques de ses dagues et Yennaël entrecroisa ses doigts en en pliant certains, prêt à invoquer ses pouvoirs, encadrant Esadd dont le regard obscure s'agitait en tous sens en étudiant la situation.
Effectivement, ils semblaient piégés dans cette bibliothèque et leur seule possibilité était de combattre, n'allant certainement pas se rendre, mais c'était surtout et également le meilleur moyen d'ameuter tous les Hommes Blancs présents sur cette île, et même sur les voisines.
Même si ils combattaient et triomphaient de cette patrouille, ils ne pourraient quitter les Iles Blanches.
Ils se trouvaient au cœur de la Flamme Blanche et risquaient de se faire consumer par elle.
Du point de vue d'Esadd, il fallait qu'ils créent un effet de surprise dont ils auraient pu profiter alors que leurs adversaires n'auraient pas compris ce qu'il se passait et n'auraient pu s'organiser.
Dans cette idée, Esadd saisit Yennaël par le poignet et ceintura Richa de l'autre côté, les tirant à lui, et il s'élança, entrainant les deux autres sans aucune difficulté grâce à son importante puissance musculaire, pour bondir à travers le vitrail le plus proche.

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