Chapitre 27 - Le prince des opposants à la Flamme Blanche
Depuis les accords avec la Flamme Blanche, il y avait déjà des décennies, les Terres Intérieures avaient perdu leur accès à l'océan, ayant cédé une partie de leur territoire à la Flamme Blanche, une partie à présent nommée les Terres Blanches, et ses ressources marines ne provenaient plus que de la Grande Mer Intérieure, ce qui réduisait donc grandement leur production, c'était lorsque le royaume s'appelait encore les Terres Centrales. Heureusement, aujourd'hui, elles pouvaient encore compter sur leurs cultures d'oliviers, d'agrumes, ainsi que d'huitres perlières, qui leur permettaient de garantir une stabilité au royaume, qui avait repris une nouvelle place dans l'Enclave.
Le pays avait cependant perdu sa position de première puissance de l'Enclave, même si il profitait d'un climat du sud qui était également plus tempéré au nord ainsi que la quasi primauté sur l'ensemble des eaux de la Mer Intérieure, au profit des Terres de Fer, dont l'influence avait augmenté lorsque la demande en minerais avait explosé, à cause des épées à forger pour les troupes de l'organisation.
Evidemment, ce genre de changements provoquait de forts mécontentements parmi l'ensemble de la population, mais cette prospérité partiellement perdue n'était plus qu'un souvenir rapporté par les livres d'Histoire remontant à plus d'un siècle. Plus aucun habitant des Terres Intérieures n'avait connu les Terres Centrales, tous avaient grandi et vivaient depuis toujours dans un royaume tronqué, sous l'égide de la Flamme Blanche.
Cette perte d'une partie du territoire ne semblait donc plus pouvoir expliquer l'irritation étouffée qui couvait dans les villes du pays en en parcourant les rues, de forts sentiments anti-Flamme Blanche dont l'épicentre était Inteliore, et l'arrivée de l'âme damnée du dirigeant de l'organisation, Blanche la Pure, qui prétendait apparemment réviser tout le fonctionnement de la Flamme Blanche aux Terres Intérieures, n'arrangeait guère cette atmosphère, au contraire, notamment car des nantis d'Imbala n'avaient que fort peu apprécié qu'elle intervienne dans leur chasse à l'Humcréa et leur vole le trophée, ce dont la jeune femme semblait éperdument se moquer.
En revanche, ce qui paraissait plus probablement être la cause de cette colère sous-jacente était possiblement les conditions dans lesquelles la Flamme Blanche enfermait le royaume depuis sa création et son avènement.
Depuis le départ, l'organisation se méfiait particulièrement de la famille royale des Terres Intérieures, bien davantage que de n'importe laquelle puisque, si aucune des caractéristiques physiques de cette espèce ne se retrouvait dans l'apparence de ses membres, le nom de la famille royale semblait indiquer une origine elfique, sans compter que l'épouse du roi actuel et descendant de la lignée, Llodd, n'était pas issue d'une famille appartenant à la Flamme Blanche, comme c'était devenu de coutume depuis de nombreuses années déjà, ce qui nourrissait encore davantage la défiance de la Flamme Blanche.
Si cette dernière avait préféré ne pas la destituer en faveur d'une autre lignée sans aucun doute planant sur ses origines, c'était uniquement pour s'assurer le soutien du peuple. Lors de la mise en place de la suprématie de l'organisation, lorsque la Flamme Blanche n'en était qu'à ses balbutiements et son autorité n'était pas aussi indiscutable qu'aujourd'hui. Par ailleurs, le fait que les souverains se succédant sur le trône des Terres Intérieures sachent qu'ils ne conservaient leur place seulement par la volonté de la Flamme Blanche les incitait à se montrer obéissants et totalement soumis à l'organisation, qui les contrôlait plus que n'importe quel autre roi.
Du moins, jusqu'à maintenant puisque cette autorité incontestable était de plus en plus remise en question dans le royaume.
La raison en était d'ailleurs probablement justement cette pression de la Flamme Blanche sur la famille royale, et, à travers elle, sur le pays tout entier. En effet, comme l'organisation éprouvait une profonde méfiance envers les Kill'han, elle limitait leur pouvoir, leurs décisions et leur marche de manœuvre.
En résumé, elle réduisait la puissance dont jouissait normalement un monarque de royaume pour mieux les contrôler et empêcher toute trahison, qui aurait été influencée par cet éventuel sang humcréa.
Les Terres Intérieures n'étaient pas aussi autonomes que les autres pays ni que l'avait promis la Flamme Blanche, ce qui, après des années à le supporter en silence, puisque c'était la condition pour être protégé des Humcréas, avait de quoi contrarier les habitants du royaume. Sans compter que, traditionnellement, les Terres Intérieures fonctionnaient avec un système de votes soumis à la population au sujet de décisions importantes, pour savoir si les citoyens approuvaient ou non, ce qui influençait la dite prise de décision, l'avis de la population étant pris en compte par le gouvernement, or, avec les fortes restrictions imposées par la Flamme Blanche, ce procédé avait grandement perdu de sa valeur et de son utilité, et les sujets des Terres Intérieures n'appréciaient que moyennement d'être ainsi délaissés et ignorés par ses dirigeants après s'être exprimé, ou bien même si ils faisaient entendre leur voix.
Même si personne ne s'en était plaint jusqu'alors, acceptant la situation telle qu'elle était, cette complaisance envers la Flamme Blanche semblait s'achever, avec les habitants du royaume de plus en plus nombreux à se détourner de l'organisation, à remettre en cause la fidélité qu'ils lui vouaient.
Pour faire naitre cette colère, il avait cependant bien fallu que quelqu'un fasse ressurgir le souvenir de la manière font fonctionnait anciennement le royaume, sans la présence de la Flamme Blanche, qu'on l'exhume des archives ou des livres d'Histoire, pour le présenter à tous, provoquant ce mécontentement se répandant en rampant dans les rues, ainsi que pour l'entretenir.
Qui était donc responsable ? Qui possédait la motivation, l'opportunité et l'occasion de le faire ? Qui avait intérêt à ce que la Flamme Blanche perde ses partisans au profit de ses détracteurs, qu'elle soit discréditée et qu'elle perde son emprise sur l'Enclave – puisque, si l'origine de ce rejet de la Flamme Blanche se trouvait bien aux Terres Intérieures, il fleurissait également dans d'autres royaumes, notamment les Terres de Fer et les Terres de Forêt, probablement car certains des membres de leur famille royale étaient unis par le mariage – qui fournissait une telle aide aux opposants de la Flamme Blanche ?
C'était pour tenter d'apporter une réponse à ces questions qu'Esadd s'était rendu à Inteliore, où il était depuis quelques jours maintenant.
Il lui semblait néanmoins qu'il aurait été plus utile à Plainiore, puisqu'il continuait à penser que Yennaël allait avoir besoin de davantage d'aide, mais le jeune homme avait assuré, en lui transmettant un message par pierre de communication que Liam aurait dû suffire et qu'il avait besoin d'un homme de confiance pour vérifier d'où provenaient ces sentiments anti-Flamme Blanche, or, il ne pouvait pas placer sa confiance en de nombreuses personnes, mais c'était avant qu'on ne massacre toute une patrouille dans la nuit.
Après un incident pareil, Esadd doutait que les choses soient aussi aisées, pourtant, Yennaël ne le rappelait toujours pas, ce qui ne lui plaisait pas, craignant que leur plan ne s'expose à un danger trop important sans lui, alors qu'il demeurait à Inteliore à la recherche d'un allié inconnu, qu'il ne trouvait pas.
Depuis son arrivée à la capitale, il avait enquêté sur d'éventuelles réunions secrètes entre personne défavorables à la Flamme Blanche ou d'un lieu particulier où elles se seraient retrouvé pour échanger mais il ne semblait pas y avoir d'organisation quelconque, juste une colère qui gonflait, mais cependant attisée par quelqu'un, un quelqu'un qui restait invisible.
Esadd gagnait chaque jour les tavernes et auberges des quartiers modestes, habités par les travailleurs agricoles ou les pêcheurs, premièrement car il lui paraissait plus logique que ce mécontentement remonte jusqu'aux quartiers aisés et non en descende et deuxièmement car il savait d'expérience, l'ayant appris lorsqu'il fréquentait assidûment les débits de boissons, presque dans une autre vie, que c'était le soir autour d'un verre qu'on se plaignait de sa situation et devenait particulièrement réceptif aux discours qui expliquaient pourquoi les choses s'avéraient si déplaisantes, mais il n'avait toujours pas croisé celui – ou ceux – qui s'attaquait à la Flamme Blanche en s'efforçant de rallier le plus de monde à sa cause.
Evidemment, il savait que rien n'arrivait sans quelques efforts et que la patience était primordiale, surtout lorsque son adversaire était la Flamme Blanche, mais ces circonstances de recherche ne lui plaisaient guère, redoutant que sa présence régulière dans les tavernes ne le replonge dans d'anciens travers dont il avait peiné à se défaire. Peut-être aurait-il dû s'en ouvrir à Yennaël.
Par ailleurs, même si il s'était montré prudent dans les questions qu'il avait posé, il craignait de se faire repérer, d'une manière ou d'une autre, ce qui l'aurait empêché de poursuivre ses recherches et l'aurait exposé au danger.
En effet, on pouvait juger étrange qu'un homme arrivé en ville de nulle part passe des heures devant son verre, seul, en changeant fréquemment d'établissements.
Sans compter qu'on le remarquait et relevait sa présence aisément, impossible donc de l'oublier ou de l'ignorer.
A part sur les îles volcaniques à la sortie du Golfe de l'Ours ou parmi certaines races d'Humcréas, il était rare de rencontrer des peaux à la couleur d'ébène comme la sienne, qu'il avait aussi foncée que son regard ou que ses cheveux,d u moins, dans le souvenir qu'il avait comme il arborait un crâne chauve depuis plusieurs années maintenant, puisqu'une partie de sa chevelure ne repoussait plus. Pour rajouter à ces traits déjà atypiques sur le continent, il portait une immense brûlure, qui le défigurait partiellement, sur toute la moitié gauche de son corps, du torse jusqu'au visage, un signe distinctif qui marquait les esprits, même si il gardait la capuche de sa cape courte rabattue sur le crâne.
Assis sur l'un des tabourets longeant le comptoir en tapotant pensivement le rebord de sa chope d'étain du bout du pouce, il épiait les conversations des hommes attablés autour de lui en quête d'une information d'importance filtrant jusqu'à lui, mais uniquement d'une oreille distraite, puisque tout ce dont il était sujet dans la taverne était la tâche ardue à accomplir dans les vergers ou sur le port, de famille, de météo ou de filles, en particulier de la serveuse, qu'Esadd trouvait effectivement jolie bien que plutôt insipide, rien que des banalités sans grand intérêt pour lui.
Dans un soupir de lassitude, il porta sa chope à ses lèvres pour avaler une gorgée de lait, dont il perçut à peine le goût, ses papilles gustatives ayant également été endommagées par les flammes, tout comme sa chair.
Les heures allaient encore lentement s'écouler jusqu'au petit matin, sans découverte sur autre chose que sur la vie amoureuse de la serveuse de la taverne.
Soudainement, une vague d'excitation traversa la salle qui sembla subitement plus bruyante et agitée, bien qu'elle le soit déjà uniquement à cause nombre de clients s'y entassant, alors que la porte claquait, annonçant l'arrivée d'un nouveau consommateur, ce qui n'avait rien de bien surprenant puisque, depuis l'ouverture de l'établissement, les gens ne cessaient d'entrer ou de sortir.
A en juger par l'effervescence qui se répandait dans l'ensemble de la taverne, celui qui venait de rejoindre la masse de la clientèle était suffisamment connu pour provoquer cette réaction parmi la foule, plus ou moins alcoolisée, ce qui piquait la curiosité d'Esadd, qui se retourna pour détailler le nouveau venu.
A première vue, l'homme ne présentait aucune caractéristique remarquable, avec une taille et une stature ordinaires, une tenue taillée dans une toile épaisse sous une longue cape sombre de qualité moyenne et une paire de bottes de cuir éraflé. Ses cheveux étaient d'un blond terne et coupés courts en mèches raides, des yeux d'une couleur difficilement identifiable, qui n'était pas tout à fait bleu ni réellement du gris ou noisette. Quant à son visage, ses traits, bien que symétriques, étaient d'une banalité totale, du genre dont on ne se souvenait que lorsqu'on les avait en permanence face à soi.
Les seul éléments de son physique qui n'apparaissaient pas comme parfaitement fades étaient la détermination farouche qui se dégageait de son regard et l'aura charismatique qui l'enveloppait, ce qui était d'ailleurs certainement ce qui avait marqué ceux qu'il avait déjà rencontré, puisque tous les clients attablés paraissaient le reconnaître, tout comme Esadd.
Les sourcils froncés, il observait le nouvel arrivant à la dérobée, se demandant où il l'avait déjà croisé pour qu'il lui semble familier, mais, à cause de cette banalité qui imprégnait toute sa personne, il ne parvenait pas à se souvenir des circonstances d'une possible rencontre. Il avait très bien pu l'interroger, le croiser dans la rue ou encore s'installer à côté de lui dans l'une des tavernes qu'il avait déjà visitées, il l'ignorait.
Serrant le poing autour de sa chope, rapidement gagné par la frustration, il le suivit discrètement du regard alors qu'il traversait la salle, en adressant quelques hochements fermes du menton en différents sens, échangeant quelques paroles brèves ou en recevant quelques tapes amicales sur son passage, jusqu'au comptoir où il s'accouda.
Alors que Esadd s'attendait à ce qu'il commande de quoi se désaltérer au tenancier, occupé à essuyer des gobelets en terre cuite, le jeune homme bondit sur le comptoir comme si il s'était agit d'une estrade. Depuis son promontoire improvisé, il promena un regard sur l'assemblée de buveurs, qui portait l'entièreté de son attention sur lui, alors que les conversations se taisaient, certains rappelant leur voisin à l'ordre si il continuait à se montrer bruyant.
Un sourcil arqué, Esadd se tint en retrait en se demandant ce qu'il allait se produire et se disant que la soirée ne s'annonçait finalement pas aussi ennuyeuse que les précédentes. Peut-être même d'ailleurs qu'il venait de trouver l'instigateur du rejet de la Flamme Blanche à Inteliore.
Le confirmant, le jeune homme débuta un discours enfiévré et passionné où il ne dissimulait nullement son aversion envers la Flamme Blanche, l'accusant de s'emparer d'un pouvoir qui ne lui revenait pas et de les empêcher de choisir librement leur chemin, les contrôlant car elle pensait, à tort, qu'elle en avait le droit et que c'était simple de bâillonner leur voix, s'appuyant sur des témoignages du siècle dernier et des lois que la Flamme Blanche avait fait oublier, prouvant la justesse de son raisonnement ainsi que le fait qu'il avait accès à des documents difficilement trouvables, tout en haranguant la foule, qui manifestait son accord avec ces propos par des hochements de la tête, des applaudissements ou encore des exclamations d'assentiment et d'encouragement.
Non loin de ce jeune homme aux allures de prédicateur, installé au comptoir où il se dressait, Esadd l'écoutait tout en sirotant son lait, la tête penchée sur le côté, cherchant à déterminer ses motivations, et donc possiblement son identité à travers ses paroles.
Pour commencer, il lui paraissait évident qu'il ne s'agissait pas d'un Humcréa, pas seulement car son apparence était parfaitement humaine – il existait bien des moyens pour un Humcréa de camoufler sa nature – mais car son principal motif pour condamner la Flamme Blanche, le seul qu'il évoquait dans ses déclarations, était qu'elle empêchait le royaume de jouir pleinement de la puissance dont il aurait normalement dû disposer, comme auparavant. A aucun instant il n'abordait la chasse aux Humcréas or, tout Humcréa souhaitait la disparition de l'organisation pour pouvoir vivre librement sans crainte de terminer sur un bûcher.
Peut-être était-il un Humcréa qui s'abstenait de traiter de ce genre de sujets pour éviter qu'on ne comprenne qu'il n'était pas humain, mais il semblait plus possible à Esadd qu'il s'agissait d'un noble de la capitale dont l'ambition se trouvait freinée par l'influence de la Flamme Blanche et qui avait donc choisi de supprimer cet obstacle en s'attachant des alliés, dont il attisait et exploitait la colère.
Visiblement, il se moquait bien que la Flamme Blanche brûle des dizaines d'Humcréas en guise de spectacles tant que l'organisation ne le bridait pas dans sa volonté. La rage étreignit Esadd à cette réflexion.
Comment pouvait-on se soucier uniquement de son profit personnel, lorsque l'on connaissait déjà une situation enviable, sans se préoccuper de toutes ces personnes qu'on exécutait injustement, de ces familles qu'on massacrait ?
Tremblant de rage, Esadd avala le fond de son verre d'une traite.
Après ces constatations, il lui paraissait difficile de considérer cet homme comme un allié potentiel, pas alors que la cause des Humcréas lui importait si peu. Il lui semblait d'ailleurs dangereux de le contacter. Probablement n'était-il cependant guère objectif au sujet de ce jeune homme, qui lui déplaisait. Il lui faudrait en discuter avec Yennaël et Liam avant de se forger un avis définitif.
Se contenant donc, surtout que frapper un homme devant des dizaines de ses admirateurs ne lui semblait guère indiqué pour son intégrité physique, il préféra se désintéresser du discours, qui devenait répétitif de toute façon, qu'il n'écouta plus que d'une oreille distraite, pour plutôt puiser dans ses connaissances sur la capitale de manière à repasser dans sa mémoire toutes les familles puissantes de Inteliore, des commerçants aisés aux nobles en s'attardant également sur les propriétaires terriens, pour tenter d'identifier ce jeune homme, qui s'enflammait, emporté par ses propos, tout comme son public, sans grand succès.
Certainement manquait-il de connaissances, probablement aurait-il dû s'y intéresser davantage ou y être plus attentif, cela lui aurait été bien utile actuellement, mais il n'était pas fait pour ces affaires de puissance et de politique. Il se moquait bien de pouvoir nommer les membres de la famille royale sur huit générations.
A cette pensée, Esadd écarquilla les yeux en se redressant subitement, le regard rivé sur le jeune homme, qui se faisait acclamer par la clientèle de la taverne, alors qu'il venait de deviner qui il était. Jamais il n'aurait envisagé cette possibilité sans sa réflexion contrariée, tant elle paraissait invraisemblable.
Personne ne s'attendait à ce qu'un homme descendant dans les quartiers modestes de la capitale vêtu comme un travailleur pour provoquer la Flamme Blanche et la détracter de la sorte soit un prince, encore moins l'héritier du royaume, Rafaël Kill'han.
Une fois qu'Esadd l'eût reconnu, il ne lui paraissait plus aussi improbable que ce jeune homme ne soit autre que Rafaël Kill'han. En effet, du haut de ses vingt-et-un ans, le prince des Terres Intérieures manifestait ouvertement son opposition à la Flamme Blanche, pour les mêmes raisons que celles citées dans son discours, sans pour autant obtenir l'adhésion des puissants de la ville ou le soutien de sa famille, du moins, pas officiellement puisque son père, Llodd, ne prendrait certainement pas le risque de provoquer la colère de l'entité la plus puissante de l'Enclave.
Ainsi, il avait donc décidé de s'approprier l'appuie de la population, ce qui n'était pas non plus stupéfiant puisque le gouvernement des Terres Intérieures avait toujours requis l'avis du peuple pour orienter sa politique.
Son physique trop banal pour être retenu devait certainement représenter un atout dans ces manœuvres. Même ses propres sujets ne semblaient pas avoir conscience de qui il s'agissait, le prenant seulement pour un inconnu aux idées bien ancrées et aux paroles convaincantes.
Bien, à présent, Esadd savait qui les aidait inconsciemment dans leur lutte contre la Flamme Blanche, même si il demeurait dubitatif sur la possibilité de s'en faire réellement un allié de confiance.
Sans s'attarder davantage dans la taverne, il laissa quelques pièces sur le bois usé du comptoir en payement pour sa boisson pour s'esquiver discrètement.
La température nocturne lui parut bien fraiche en comparaison de l'ambiance surchauffée, littéralement comme figurativement, de la taverne et il resserra les pans de sa cape autour de lui pour se réchauffer sur le trajet jusqu'à l'auberge où il logeait depuis son arrivée à Inteliore.
Une fois à l'abri des regards indiscrets dans la petite chambre, il sortit sa pierre de communication dissimulée dans la doublure de sa chemise.
Le fin disque de pierre aux contours irréguliers d'un orange ocre reflétait timidement la lumière de la chandelle qu'il avait allumée en entrant.
Activant le sort implanté dans sa pierre en tapotant sur la surface polie, ne pouvant le faire par magie puisqu'il n'en possédait pas la moindre once, il attendit quelques secondes que sa pierre se synchronise avec celle de celui qu'il souhaitait contacter avant d'inscrire son message du bout du doigt, avertissant Yennaël de sa découverte.
Avant de la ranger à nouveau, il envoya un second message à un autre destinataire, pour prévenir de son retour prochain. Un sourire attendri se traça sur ses lèvres lorsqu'il reçut un message en réponse presque immédiatement dans lequel Alerrin lui faisait part de sa hâte de le voir revenir.
Peut-être allait-il cependant devoir repousser son départ de Inteliore puisqu'il jugeait qu'il n'avait pas réellement agi pour leur cause dans cette ville or, il appréciait toujours particulièrement de défaire la Flamme Blanche.
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