Lettre 6
Bonjour cher lecteur,
Dans ma précédente lettre, j'avais commencé à vous raconter la prise de la base française par les allemands. Voici donc la suite, que je tenterai de vous détailler au maximum de mes souvenirs.
Je me rappelle d'être resté longuement debout, tel un poteau, à fixer les horreurs devant moi. Une fumée épaisse, signe de victoire pour les nazis, s'élevait au-dessus des combats incessants qui se déroulaient dans un chaos déchaîné. J'avais levé le nez vers le ciel, admirant sa beauté déchirée par les feux orangés et par les nuages noirs de cendres. Je constatais tout cela avec les épaules basses et le coeur vide.
Pourquoi? Pourquoi tant d'atrocités en ce si petit monde?
Soudainement, un coup de feu derrière moi me tira de mes contemplations philosophiques. La guerre continuait. En me retournant vivement, je vis Levi voûté vers l'avant, tenant à peine sur ses jambes, haletant. Pendant un instant, j'avais crains pour sa vie, mais je me rassurai en voyant un ennemi au sol, mort, un fusil dans sa main sanglante. Mon regard croisa celui du bel homme ténébreux et, réjoui à un point tel, j'en oubliai le monde autour de moi afin de me jeter dans ses bras. Je le maintenais fortement contre moi, ayant peur que si je le lâche, il ne s'efface à tout jamais.
- Levi! Comme tu m'as fait peur!
Je vins promptement sceller un baiser soulagé, embrassant vivement ses lèvres douces, mais l'homme y mit rapidement un terme, me repoussant à bout de bras. Son regard se voulait désolé, mais ses paroles étaient froides et sévères.
- Pas le temps. On doit s'enfuir.
- Que t'est-il arrivé, bon sang? m'inquiétai-je en constatant l'état de ses blessures.
- Pas le temps! répéta Levi tout en repoussa ma main que je dirigeais vers son visage souillé.
Rapidement, le soldat m'empoigna férocement et il nous conduisit loin de la zone de combat. Alors que je courais avec lui, je me retournai vers la base française. Les soldats tombaient comme des mouches; c'en était fini, nous allions perdre la guerre. Si la France venait à tomber, qui allait s'opposer aux allemands? Je ne pouvais pas croire que la victoire irait aux mains d'Hitler, ça non. Même si tout semblait pointer cette solution, je n'allais jamais m'y plier; quitte à mourir pour ma religion et mon orientation sexuelle. J'étais prêt à payer le prix de mes pêchés, mais jamais je n'allais me soumettre aux lois infâmes de cet homme cruel et impitoyable. Il allait faire face à son pire ennemi; un "Jaeger".
Soudainement, au loin, je vis le supérieur de Levi tenter de repousser les ennemis. Brave, il encourageait le peu de soldats restant à se battre jusqu'au bout. En le voyant conduire ses hommes à leur mort, je sentis la fibre de la guerre vibrer en moi. Je n'allais pas m'enfuir alors que je pouvais encore me battre. Sur un coup de tête, j'enfonçai mes talons dans le sol boueux, tentant de freiner Levi dans son élan. Il manqua de tomber vers l'arrière lorsque je le retins. Le soldat français me dévisagea confusément, me questionnant du regard.
- On ne peut pas s'enfuir! On doit se battre!
- Nous avons tout perdu! Si on veut gagner cette guerre, on doit aller demander de l'aide aux anglais! fit Levi brutalement.
- Tu ne comptes pas laisser ton supérieur en plan? Sinon y va, ces hommes auront une chance de s'en sortir en vie! Levi, je t'en prie... Viens avec moi.
Je le suppliais en lui tendant la main, le fixant droit dans les yeux. C'était un moment déchirant que jamais je ne souhaite revivre. Allait-il m'abandonner afin de réaliser son plan peu fiable? Je savais que Levi m'aimait bien trop pour me laisser à mon sort, mais je gardais en tête qu'il était aussi très buté. D'un autre côté, je le comprenais de vouloir s'enfuir sans son supérieur: lui qui l'avait si souvent réprimandé pour son homosexualité, et qui sait ce qu'il lui avait fait de pire? L'abandonner aurait été une douce vengeance que Levi n'aurait sans doute pas regrettée. Cependant, j'étais là; présent avec mon pardon éternel et prêt à mettre ma vie en péril pour sauver d'autres. Levi pouvait bien gravir toutes les montagnes du monde, mais jamais il n'arrivera à surmonter l'obstacle que je suis. Et l'inverse est vrai.
Notre confrontation silencieuse sembla durer une éternité ou deux. Les yeux métalliques de l'homme étaient si venimeux qu'ils me blessaient droit au coeur. Je n'arrivais pas à déchiffrer ses pensées: il cachait ses émotions sous ce voile de méchanceté.
Puis, sans dire un mot, Levi marcha vers moi et il s'agenouilla aux côtés de l'allemand qu'il venait de tuer. Il le pillait de ses armes et de ses munitions. Pistolet, mitraillette, balles: même en fouillant un peu plus en profondeur, l'homme ténébreux trouva un couteau caché dans la botte du défunt. J'observais Levi faire, réalisant tranquillement que ces gestes confirmaient sa réponse - réponse qui s'avérait positive. Après m'avoir jeté un bref regard, le français me lança la mitraillette, que j'attrapai sans problème. Je vérifiai combien de munitions il restait dans l'arme: assez pour faire plusieurs victimes.
- On y va, furent les seules paroles qui venaient confirmer le consentement de Levi.
Ensemble, nous retournâmes au front, plus motivés que jamais. Droit devant nous se déroulait la bataille entre le capitaine français et le général allemand; autant vous dire que c'était la confrontation la plus entêtée du siècle. Les morts s'accumulaient, mais aucun camp n'était prêt à jeter les armes. J'étais convaincu que Levi et moi allions sans doute changer la donne.
Ce fut donc dans un grand soulagement que les français se battirent à nos côtés. C'était la première fois que je tuais des hommes. C'était la première fois que je tuais des allemands; mes semblables. Par contre, j'avais l'impression que je faisais le bien: je débarrassais la planète de gens qui ne méritaient pas de vivre. Les gens racistes et fermés d'esprit qui érigeaient ces camps de concentration n'avaient pas raison d'être; et tout ceux qui encourageaient cette mentalité n'étaient pas mieux qu'eux.
Message à vous, chers lecteurs du futur: apprenez à détecter les gens mauvais et à les chasser comme la peste. Ne tolérez pas qu'un incapable accède au sommet et qu'il dirige votre pays avec ses propres valeurs telles la richesse ou le pouvoir. Imposez-vous et transformez votre avenir - votre planète - pour le mieux. Plusieurs gens ne vivent et ne vivront que pour leur monnaie futile: faites tout en votre pouvoir pour résister et pour changer leur mentalité.
Comme je l'avais prédit, notre présence fut fructueuse pour les français. Les allemands, réalisant qu'ils venaient de perdre un soldat qui s'était rangé dans le camp opposé, comprenaient peu à peu que l'issue de cette bataille n'allait pas être celle escomptée. Dans un dernier effort, je m'alliai avec les français afin de repousser l'envahisseur. De plus en plus en désavantage numérique, les allemands n'eurent d'autre choix que de rebrousser chemin et de nous laisser à notre sort. À la fin de cette petite bataille remportée, les soldats français ne se réjouirent que par un mince sourire. Les pertes étaient trop grandes pour que nous puissions sauter dans les airs et s'embrasser.
Soudainement...
- Ackerman!
Levi fut appelé. Un soldat était agenouillé près d'un blessé et il secouait sa main désespérément afin d'obtenir l'attention de mon amant secret. Celui-ci se dirigea au pas de course vers le dit soldat malgré sa jambe boitante. Je suivis de près Levi, qui s'agenouilla mollement aux côtés du triste mourant. Je fus pris d'un haut-le-coeur en constant que c'était le capitaine français. Il avait le ventre complétèrent détruit à cause une ridicule balle. Le saignement était bien trop abondant pour qu'il puisse survivre plus longuement. Je m'approchai de Levi et posai une main sur son épaule en guise d'encouragement: il n'avait pas à être témoin de tant d'horreurs.
- Ackerman... débuta faiblement le capitaine. Prends c-ceci...
D'une main tremblante, le supérieur remit son insigne militaire tachée de sang à Levi. Celui-ci, visiblement chamboulé, la saisit sans hésitation, se demandant sans doute pourquoi il avait été choisi sur le lot de successeurs. Le mourant ferma ses paupières un instant avant de les rouvrir à moitié. On voyait dans ses yeux son âme le quitter peu à peu.
- J'ai confiance en vous... Devenez... le capitaine que vous auriez dû être... depuis le tout début...
Sur ces dernières paroles, l'homme s'éteignit. Il n'y avait plus la moindre présence de vie en lui. Seul son sang continuait de couler inutilement, faisant virer au rouge l'herbe humide sous le corps. De haut, je vis Levi baisser sa tête, serrant l'insigne près de son coeur, avant de se relever d'un bond, aucune trace de larmes sur ses joues. Il regarda chaque homme présent dans les yeux après avoir subtilement glissé l'insigne dans la poche de son pantalon.
- Allons nous réfugier en Angleterrre, fut les premiers mots prononcés par le capitaine Levi Ackerman. Seuls les anglais peuvent comprendre notre situation et nous appuyer. La France est prise, mais tout n'est pas perdu. Nous allons nous battre jusqu'à la mort.
Personne n'osa contredire le nouveau supérieur. Il n'y avait plus que lui pour diriger les troupes avec le peu d'espoir qu'il restait. Le silence plana au-dessus de nos têtes, où nous nous recueillîmes autour du capitaine bravement tombé au combat. Le crépitement du feu incessant brisait ce silence de plomb. Seul ce bruit de fond nous rattachait au monde environnant; nous rappelait toutes les vies qui avaient été prises en ce jour fatidique.
À cet instant précis, je ne pus m'empêcher de penser que j'aurais dû me sacrifier afin de sauver plus de vies. Pourquoi n'étais-je pas mort et qu'eux oui? Pourquoi la vie avait-elle décidé que Levi allait venir me sauver "in extremis" alors que j'étais prêt à faire face à mon destin?
Rapidement, je chassai ces pensées de mon esprit: non, Levi est venu me secourir, car il m'aime. Je dois vivre pour lui. Il est ma raison de vivre. Jamais je ne dois l'abandonner et jamais il ne m'abandonnera.
Je dus réprimer l'envie urgente de saisir la main de mon amant afin de me rassurer et de le détendre en retour. Cependant, alors que nous allions faire demi-tour et lever le camp, je croisai le regard intense de Levi. Le contact visuel m'avait profondément touché. Les mots n'avaient pas été nécessaire: tout avait été dit par le seul pouvoir du regard. J'y distinguais une bravoure sans égale, certes, mais entrecoupée d'épisodes d'une tristesse absolue. Comme j'avais l'envie brûlante de le serrer dans mes bras et lui souffler des mots d'amour... Comme j'avais envie de le consoler en l'embrassant tout doucement... Comme j'avais envie de sentir ses mains caresser ma peau tendrement... Malheureusement, jamais nous n'aurions pu nous exprimer ainsi publiquement sans risquer la peine de mort ou l'exil. En temps de guerre, il n'y avait pas de place pour l'amour, encore moins homosexuelle.
Ainsi, je vais conclure ma lettre. Je vous reviendrai avec mon aventure en territoire anglais. Au plaisir que vous poursuiviez la lecture de ces lettres que j'écris avec émotion spécialement pour vous.
Mes salutations,
Eren Jaeger.
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