Lettre 5

Bonjour cher lecteur,

Dans cette lettre, je traiterai de ce qui est survenu lors de l'assaut de la base française par les allemands. En guise de rappel, je tiens à mentionner que j'étais toujours prisionnier par les français. C'était donc en étant enfermé dans les cachots que je vivais ce moment totalement stressant.

J'entendais, venant de l'étage supérieur, de violents coups de feu et des cris déchirants. Je m'en faisais beaucoup pour Levi, mais j'avais foi en lui; il avait de grandes capacités au combat et je me rassurais en me forçant à croire qu'il allait repousser les allemands avec ses camarades. J'avais déjà eu un exemple de ses compétences physiques... Alors pourquoi doutais-je?

Alors que je restais attentif au moindre bruit provenant du haut, je perçus soudainement des coups de feu très près, ce qui me fit sursauter. Tout à coup, un corps glissa et tomba dans les marches, venant s'affaisser au sol. Une large marre de sang prenait de l'expansion sous le corps, principalement sous la tête, où un large trou béant avait été causé par une balle de gros calibre. J'arrivais à distinguer, grâce à la veste militaire de l'homme, que ce soldat qui était parti si tôt était français. 

Puis, des claquements de semelle se firent entendre. Du haut de l'escalier en acier, deux hommes apparurent; deux ennemis, mais qui faisaient ironiquement partie de mon camp. Les soldats servant la croix gammée me remarquèrent et, me reconnaissant comme des leurs, ils virent me rejoindre promptement. Je décidai de jouer l'allié en détresse.

Puisque les mots que nous échangeâmes furent en allemand, je mets la traduction française pour vous.

- Les gars! Aidez-moi! fis-je, m'accrochant désespérément aux barreaux.

Mon plan était tout simple; ils allaient me libérer, croyant que j'étais encore de leur côté, puis j'allais les suivre un bout de temps et les tuer avant qu'ils ne fassent plus de victimes. Ils allaient payer pour avoir assassiné ce soldat innocent si froidement.

- Hey! Que fais-tu ici? Ils t'ont capturé lors de la dernière bataille? demanda l'un des soldats nazis.

- Oui! Aidez-moi à sortir d'ici!

Alors que l'allemand allait venir ouvrir la cellule, son équipier l'en empêcha, lui barrant la route avec son fusil. Cet homme avait un regard malveillant et suspicieux. « Qu'a-t-il contre moi? Je ne suis qu'un vulgaire soldat, non? »

- As-tu parlé? me demanda-t-il d'un ton froid.

- Quoi...? Parler...? Mais non, jamais! J'ai résisté aux pires tortures! Les gars...!

- Tu as résisté? s'exclama l'autre type, semblant impressionné.

- Ne le crois pas. Il peut mentir rien que pour sauver sa peau. Regardes bien ses yeux.

Durant un silence pesant, les deux soldats ne fixaient étrangement alors que je les regardais confusément. Je ne pouvais pas retenir un stress énorme de monter en moi et c'était ce qui m'inquiétait le plus. S'ils venaient à déceler le mensonge dans mes propos, c'en allait être fini de moi. Plusieurs secondes éternelles s'écoulèrent durant lesquelles nous ne faisions que nous fixer bêtement. Je tentais de rendre mon regard paniqué un peu plus piteux, les suppliant silencieusement comme le ferait un innocent. Cependant, le silence était lourd; je savais qu'il n'était pas de bon présage. J'essayais de m'inventer un plan si tout venait à dérailler.

Et je dus le réaliser en une fraction de seconde.

- Nous n'avons pas le temps de nous soucier d'un traître. Viens, ordonna l'allemand plus sévère, se retournant.

- Mais... Les gars! Vous ne pouvez pas me laisser là, insistai-je, tentant de les convaincre.

- C'est la guerre, mon gars, me répondit le soldat. Notre but est d'éliminer les ennemis et si tu as parlé, tu en es un. Et puis, nous n'avons pas de temps à perdre avec toi.

- Je vous jure que je n'ai rien dit! mentis-je.

- Arrête ton charabia! Si on gagne, on viendra te chercher!

Sur ce, les allemands quittèrent le sous-sol dans lequel j'étais emprisonné et ils reprirent leur carnage. Je frappai les barreaux du pied, pensant que j'avais failli à mon devoir. Je devais protéger les gens - c'était justement pour ça que je m'étais engagé dans l'armée -, mais si je n'arrivais pas à arrêter les nazis dans leur soif de sang, mes efforts auraient été vains.

« Levi... »

J'eus soudainement une pensée pour mon amant secret. Je ne savais pas ce qu'il pourrait penser de moi si je venais à échouer. Je ne savais pas ce qu'il penserait de moi si je lui annonçais, sur sa tombe, je n'avais pas su le protéger. La haine bouillant en moi, je scrutai ma cellule jusque dans les moindres recoins afin de lui trouver un défaut. À première vue, il n'y en avait aucun; les français savaient comment bien confiner leurs prisonniers. Cependant, en observant bien les fissures dans le béton âgé, je remarquai une forme plutôt définie au sol. Saisissant ma chance, je tentai de déloger la forme, ce qui fut un succès. En dessous de la mince plaque de béton se trouvait une petite cuillère rouillée. Je la saisis, découragé: comment une petite cuillère allait-elle pouvoir me tirer de mon pétrin?

Soudainement, je perçus un bruit provenant du haut des marches et je sentis une odeur distinctive. De l'essence... Que se passait-il? Alors que je me retournais, je vis un torrent de feu s'engouffrer dans la cage d'escalier. La chaleur intense me fouetta de plein fouet; je dus me protéger avec mon bras. Les vapeurs de l'essence et la fumée du feu me firent tousser sur un réflexe de survie. Mon esprit et mes instincts se mirent en marche: si je ne trouvais pas une façon de me tirer de cette cellule, j'allais mourir brûlé. Je voyais l'essence se répandre au fur et à mesure que le feu se propageait.

Armé de ma petite cuillère, je me dirigeai hâtivement vers la porte de ma cellule. Avec la poignée de l'ustensile, je tentai de crocheter la serrure. Malheureusement, ce fut totalement impossible: la fumée épaisse virait au noir et je commençais sérieusement à suffoquer. Mes yeux me piquaient horriblement. Malgré tout, je n'avais pas le droit d'arrêter: c'était la vie ou la mort. Je tentai encore et encore et encore et encore et encore de briser la serrure avec la petite cuillère, mais je dus renoncer lorsque les flammes me brûlèrent le revers de la main. Sous la chaleur intense, j'avais échappé l'ustensile de l'autre côté de la porte et elle se fit engloutir par les flammes; jamais je n'aurais pu la récupérer. Afin de protéger ma blessure, je déchirai le bas de mon chandail et j'entourai le tissu autour de ma main. Je pris le temps d'observer mes alentours, couvrant mon nez et ma bouche de mon coude afin de bloquer les toxines. Visiblement, plus aucun échappatoire ne s'offrait à moi. J'allais mourrir dans cette cellule de la base française, dans l'anonymat le plus obscur et dans la méprise de tous. Je refusais de mourir ainsi, sans avoir accompli mon devoir.

Je reculai afin de me distancer des flammes qui s'approchaient, me stoppant seulement lorsque je sentis le mur de béton m'arrêter. « Voilà, c'en est fini de moi. Mon heure est venue. Adieu Levi, on se retrouvera dans l'au-delà après cette guerre... »
Alors que je me laissais glisser le long du mur, manquant d'oxygène et affaibli par la chaleur intense, mes dernières pensées allaient à mon amant. Je lui étais reconnaissant de m'avoir fait goûter au plus beau sentiment que l'humain puisse ressentir: l'amour. J'en venais même à souhaiter, s'il s'en tirait en vie et pas moi, qu'il aille une belle continuité de vie. Je ne voulais pas que ma mort lui soit un fardeau: qu'il vive en paix en me pensant bien aux côtés de Dieu.

Je me sentais sombrer dans l'inconscience. Je préférais ne pas ressentir la douleur mordante des flammes en m'évanouissant que de faire face à ma mort. Tout allait être mieux ainsi...

Cependant, des cris se firent entendre. Je n'avais pas la force d'ouvrir les yeux et de comprendre la situation. Si c'était des soldats qui voulaient me sauver, je leur en interdisais par la pensée. Je ne voulais pas qu'ils décèdent ou qu'ils se blessent par ma faute. Décidé à en finir rapidement, je ne fis rien pour lutter ou encourager cette voix à me sauver.
Sur le bord de l'inconscience, je sentis qu'on me manipulait. C'était Dieu qui avait reconnu ma bonté, ayant sans doute ignoré mon pêché d'avoir fait l'amour avec un autre homme, et qui venait me chercher. Je voyais un éclat pur entrecoupé par de courts instants de ténèbres. Mais, rapidement, je me sentis tomber, comme si je revenais dans mon corps. En reprenant connaissance, j'ouvris difficilement mes yeux; « où suis-je? » Mes tympans percevaient les vibrations molles d'une voix étouffée. Étais-je sauvé? Mes sens s'éveillaient peu à peu alors que j'étais vivement secoué.

- Eren... Eren...! Eren! Eren, bordel, reviens à toi!

Mes yeux se mirent à distinguer formes et couleurs. Le ciel de l'après-midi s'étalait dans des teintes d'orangé et de rose. Ces jolies couleurs étaient lacérées par d'épais nuages foncés. Puis, mes yeux se déplacèrent vers l'agitation à mes côtés. J'aurais pu reconnaître ces mèches d'obsidienne, ces yeux métalliques et ce visage doux parmi des centaines. J'eus de la difficulté à prononcer son nom.

- L-Levi...

- Espèce d'idiot! me criait-il comme si j'avais les oreilles bouchées. C'est la guerre, magne-toi bordel!

Alors qu'il tentait de toutes ses forces de me soulever et de nous déplacer, une explosion derrière nous nous propulsa vers l'avant. Le souffle nous fit retrouver le sol dans des retrouvailles douloureuses. Alors que, sonné, je me redressai un peu, je remarquai que le soldat français était évanoui à mes côtés. Je n'avais pas remarqué que son visage était couvert de cendres et que ses mains étaient blessées. Ses jointures saignaient légèrement et plusieurs brûlures parsemaient sa peau originalement d'une blancheur immaculée. Son uniforme subissaient les répercussions de la bataille: il était tout poussiéreux, abîmé, calciné et déchiré à certains endroits, et il était taché de sang au niveau de l'épaule. Qu'avait vécu Levi avant de venir me porter secours?

C'était l'enfer. Lorsque je trouvai la force miraculeuse de me remettre sur pieds, décidé à protéger mon amant, je pris conscience de mes alentours. La base française avait été entièrement engloutie par les flammes et, alors que les soldats tentaient de fuir le feu, les soldats allemands en profitaient pour les exécuter. C'était un véritable désastre. Aucun ne mot ne pouvait décrire l'atrocité de la situation.
Levi et moi nous trouvions sur un terrain gazonné à l'écart de la bataille. Par chance, plusieurs soldats avaient pu se tirer des flammes, mais s'ils avaient réussi à survivre, les nazis les attendaient de pied ferme. Plusieurs groupes éparpillés se battaient dans un désordre cacophonique. Des coups de feux, des cris, de la fumée, du sang, la mort... Je me sentais vaciller.

Sur ce, cher lecteur, je vais vous laisser languir. Comme résumer une bataille - la guerre - est impossible en une seule lettre, je poursuivrai cette épopée dans la suivante. En espérant de vous retrouver pour la suite de mon aventure.

Mes salutations,
Eren Jaeger.

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top