Lettre 4
Bonjour cher lecteur,
Je tiens une nouvelle fois à m'excuser pour le thème un peu osé de ma dernière lettre. J'en conviens, ce n'est pas approprié de traiter ainsi de cette facette de l'amour, surtout que nous sommes homosexuels, mais cette partie était vraiment crutiale dans l'aventure que je vivais. Et ce, simplement parce que cela venait nouer intimement le lien que je développais avec le soldat français Levi.
Ainsi, j'avais finalement accepté de coopérer, puisque je me sentais en sécurité aux côtés de Levi, et de leur dévoiler l'emplacement des 18 principaux camps de concentration. Le matin suivant nos ébats, le soldat français prenait note des noms que j'avais à lui dévoiler. Il écrivait au stylo-plume, sur un bout de papier, assis à un petit bureau de la chambre. Je le regardais faire en l'aidant à épeler les noms allemands.
- Sutthof. Avec deux « T ».
Levi écrivit ce mot de son écriture raffinée et soignée. Il semblait si aisé que je doutais qu'il ait écrit allemand toute sa vie.
- Bien... Ensuite? demanda-t-il.
- Hum... Sobibor.
- Ça s'écrit comme ça se prononce?
- Oui.
Tandis qu'il transcrivait ce nom, concentré, j'en profitai pour l'admirer en silence. Il n'avait qu'enfilé en vitesse son pantalon, donc j'avais la plus belle vue pour moi seul. Je remarquai, à cet instant précis, les nombreuses cicatrices qui couvraient son dos. Elles semblaient plus ou moins récentes, mais elles représentaient toutes les souffrances qu'il avait vécues. Ceci me fendit le coeur, car je pouvais l'interpréter de plusieurs manières métaphoriques. Ces marques gravées dans sa peau étaient sans doute des traces de ses précédentes batailles dans l'armée, mais elles pouvaient être également perçues comme étant des conséquences de sa vie personnelle. J'imaginais que ces cicatrices symbolisaient toutes les insultes, tous les regards dédaigneux et tout le mépris qu'il subissait à cause de sa divergence sexuelle. Et puis quoi, encore? Je ne connaissais pas beaucoup Levi: il pouvait avoir vécu pire! Je laissai un petit soupir passer le seuil de mes lèvres.
- ... Quinze, seize, dix-sept... Eren, il en manque un.
J'étais si perdu dans mes pensées que je ne réalisais pas que Levi s'adressait à moi. Je revins à moi seulement lorsque le français se retourna vers moi et qu'il se mit à secouer sa main sous mes yeux.
- Eren? Encore endormi?
- Ah, euh... Sans doute...
- Es-tu sûr que ça va? questionna Levi, semblant authentiquement inquiet pour moi.
- Oui, lui dis-je, souriant un peu. J'étais tout simplement en train de penser.
- Tu penses trop, lança l'homme charmant tout en me donnant une petite pichenette sur le front. Dis-moi quel est le dernier camp.
- Treblinka, affirmai-je après avoir révisé les noms inscrits sur la feuille.
- Treblinka... Avec un « K »?
- Oui. T-r-e-b-l-i-n-k-a.
- C'est bon.
Levi compta une dernière fois les noms avant de ranger le stylo-plume dans l'encrier. Puis, il laissa la feuille reposer le temps que l'encre fraîche sèche un peu. Quelque peu soulagé, je m'approchai de Levi afin de déposer un baiser sur sa tête.
- Merci, lui dis-je.
- C'est moi qui devrait te remercier, répliqua le soldat tout en se retournant vers moi, ses mains posées sur mes hanches. Cette information nous sera d'un bénéfice extrême.
- Je l'espère...
Comme je le trouvais très invitant dans cette position, je vins m'asseoir sur ses cuisses, lui faisant face. Il sourit légèrement, les yeux doux. Je lui offris un large sourire, chérissant le sien. Levi monta ses mains à mon visage, attrapant mes joues, ce qui me força à le regarder droit dans les yeux.
- Je serai là pour te protéger, compris? Tu n'as rien à craindre tant que tu es avec moi.
- Levi...
Rassuré, je viens sceller un doux baiser avec lui, fermant mes yeux afin de profiter de cet instant de tendresse. J'adorais tant sentir l'agréable texture de ses lèvres: ça me détendait l'instant de cet échange. Malheureusement, comme à chaque fois que nous étions enfermés dans notre bulle de paix, ce moment ne dura pas aussi longtemps que nous l'aurions souhaité. Par manque d'air, nous nous distançâmes, gardant nos visages près l'un de l'autre. Tout en détaillant ses traits délicats, je fronçai des sourcils tristement.
- Est-ce bien, ce que nous faisons...? demandai-je faiblement.
- Eren, fit Levi d'une voix plus rigide. Ne doute pas. Si tu te sens bien, alors c'est bien. Si tu te sens inconfortable, tu me le dis immédiatement, compris?
- Oui, mais... comment dire...?
Encore une fois, Levi me saisit le visage afin de me fixer dans le blanc des yeux.
- Il n'y a que toi qui compte, Eren. Si tu t'arrêtes à chaque insulte, à chaque commentaire négatif, tu ne seras jamais en paix avec toi-même. Ai-je raison?
- Oui. C'est vrai, avouai-je, sachant parfaitement de quoi il parlait.
- Alors oublie le monde. Oublie qu'ils te méprisent. Je t'aime, moi, pour de vrai. Je crois... Je crois que je n'ai jamais été aussi sincère de ma vie...
D'adorables parcelles rosées prirent place sur les joues de Levi, ce qui rendait son teint pâle un peu plus coloré. Je le trouvais absolument mignon à ainsi rougir. Ému, je le serrai dans mes bras, sentant également le rouge me monter aux oreilles.
- Aaaaw... Levi, ne rougis pas, tu me donnes envie de te croquer...~
- Alors je serai ta pomme~
- Ma pomme à moi, dis-je tout en venant frotter le bout de mon nez contre le sien.
- Et toi, Eren, commença Levi, me souriant, tu es ma clé.
- Aaaw...
- La clé de ma prison~
- Levi!
Il trouvait toujours les mots pour me faire encore plus fondre pour lui. Comment ne pas succomber à son charme si pur et pour son coeur si tendre? Qui aurait cru que j'aurais pu trouver l'homme parfait lors de cette guerre horrible?
Levi, après avoir poussé un petit rire alors que je cachais ma figure rougie des mains, vint laisser un rapide baiser sur mes lèvres. Toutes ces manies adorables me faisaient sentir sans dessus dessous. J'étais si bouleversé qu'il m'était difficile de retrouver le nord.
- Bon, dit soudainement Levi, me ramenant à moi. On devrait s'habiller et aller porter cette feuille.
- O-Oui...!
Peu de temps après, nous nous retrouvâmes déjà à marcher dans les corridors de la base française, moi suivant le beau soldat ténébreux. Je craignais un peu pour mon sort après que nous aillons remis ce bout de papier, mais Levi était toujours là pour me rassurer. Il m'avait promis, avant que nous ne quittions la pièce dans laquelle nous nous trouvions plus tôt, qu'il allait négocier avec son supérieur dès la remise. Cependant, malgré ses belles paroles, mon fort intérieur doutait. J'imagine que c'est parce que j'ai de très bons instincts.
Enfin, nous rejoignîmes son supérieur, le capitaine. Celui-ci attendait à un axe de corridors, semblant attendre aux côtés de trois gardes. Je me sentais un peu intimidé, mais je restais fort. Levi était auprès de moi; je devais me sentir invincible. L'homme ténébreux remit finalement le papier à son supérieur.
- Il ne manque plus que de placer les points sur la carte, dit-il tout en lui tendant cette retaille.
- Bien... Excellent! s'exclama le capitaine, paraissant surpris par tous ces endroits.
Puis, après que le supérieur eut pris connaissance des noms de camps, il rangea la feuille dans une poche cachée de son veston militaire. D'un regard sévère, il observa Levi, paraissant méfiant.
- Ne me dites pas que vous avez recommencé ce délit...?
- Quel délit? répliqua immédiatement le soldat.
- Gardes! Emparez-vous de l'allemand!
- Quoi? m'exclamai-je.
- Non!
Je me retrouvai rapidement maîtrisé par deux gardes français. Levi, qui voulait s'approcher de moi et me tirer de ce bourbier, se fit également emprisonner par le troisième soldat. Je me débattais avec fureur, ne comprenant pas ce soudain revirement de situation. Levi tenta par tous les moyens de calmer le jeu, même si la panique était évidente dans ses traits.
- Capitaine! Laissez-le! supplia-t-il.
- Hors de question. Chef d'escouade Ackerman, j'en ai marre de votre comportement délinquant. Appâter d'autres hommes dans votre lit rien que pour leur soutirer de l'information n'est pas une méthode conventionnelle et légale, expliqua le superieur tandis que mon sang se gelait dans mes veines. Votre manigance a duré bien trop longtemps et cela me répugne au plus haut point. Si seulement vous n'étiez pas un combattant si talentueux, je vous ferais exécuter sur-le-champ.
Le capitaine français ne semblait pas du tout d'humeur radieuse. Ses yeux lançaient des dagues à son subordonné alors que ce dernier paraissait profondément troublé. De mon côté, le monde venait de s'effondrer. Je venais de réaliser que je n'étais qu'un vulgaire pantin aux yeux de l'homme que je chérissais. Levi avait fait semblant de m'aimer afin de me soutirer de l'information. Mon cœur était si brisé que je ne réalisais pas ce qu'il se passait autour de moi. Il y avait du mouvement, des éclats de voix, de l'agitation comme je ne pouvais le définir. Atterré, je ne résistais pas lorsque les deux soldats français m'amenèrent de force vers les cellules. J'entendais mon nom se faire crier, mais je ne réagissais aucunement.
J'avais aimé et je souffrais comme jamais auparavant.
L'instant d'après, je sentis le froid mordant du béton contre ma joue et une vive douleur s'emparer de mon coprs. En me redressant un peu, de réalisai que je saignais un peu du nez. Me sentant encore faible, je levai mes yeux vers les soldats qui refermaient la cellule dans laquelle je venais d'être emprisonné. Rapidement, je réalisai qu'ils m'avaient jeté sans merci dans ce cachot peu entretenu, qui devait se situer dans le sous-sol de la base. Sentant mes membres endoloris, je me déplaçai vers le fond de cette petite cellule, sur le bord des larmes.
« Levi... Pourquoi m'as-tu si sournoisement trahi...? »
Je devais avouer que mes sentiments envers lui étaient étonnement sincères. Cependant, ce qui me brisait le plus le coeur, c'était qu'à peine quelques minutes avant que tout ne vire au drame, Levi m'avait assuré qu'il n'avait jamais été aussi honnête. Évidement, savoir que je n'étais pas le seul qui avait profité de sa beauté sans égale me fendait le coeur. Je me sentais profondément trahi. De multiples émotions que je n'avais jamais vécues auparavant prirent d'assaut mon être et elles me plongèrent dans un profond état dépressif. Tout ce que je souhaitais, à cet instant, était de mourir dans cette guerre atroce, puis de tomber dans l'oubli, tout comme ma vie s'était déroulée. Plus rien ne comptait à mes yeux.
Je fus soudainement tiré de mes pensées noires lorsque j'entendis à nouveau mon nom. Lentement et sans énergie, j'ouvris mes yeux et je levai ma tête vers les barres de fer qui constituaient la porte. Les larmes me vinrent aux yeux lorsque je reconnus ce visage pur et tout simplement beau. Levi affichait un air peiné et il avait un regard si déchirant qu'il mettait à nouveau mon cœur en miettes.
- Eren! Je t'en supplie, écoutes-moi!
- L-Levi... brefouillai-je, les yeux vides.
- Eren... commença le français, ne sachant par où commencer. Je l'avoue, mon capitaine a raison; j'ai dû faire cette procédure à maintes reprises afin de recueillir de l'information... Pardonnes-moi, Eren, j'en conviens que c'est tout à fait déplacé...
Je n'osais pas le regarder ni même ouvrir la bouche, de peur d'échapper une larme ou un sanglot. Je ne voulais pas pleurer, ça non. Il était hors de question que je montre si ouvertement ma faiblesse. Même si mon âme souffrait comme jamais, je me refusais de le laisser paraître; j'aurais simplement été une cible plus facile à attaquer.
Sentant que je n'allais pas répondre à son aveu, Levi, paraissant toujours aussi désolé, poursuivit ce qu'il avait arrêté. Il s'agenouilla devant la porte de la cellule, agrippant d'une main une barre en fer, alors que je restais recroquevillé sur moi-même à l'autre extrémité du cachot.
- Cependant, Eren, jamais je ne t'ai menti. Tout ce que je t'ai dit, tout ce que je t'ai fait... Tout cela était vrai, je te le jure...! Rien n'est plus vrai que les sentiments que j'ai à ton égard, Eren... Je le pensais vraiment quand je t'ai avoué que je n'avais jamais été aussi sincère...
Reprenant tranquillement espoir, j'eus le courage de relever ma tête vers lui, l'admirant à travers des yeux embrouillés. La tête baissée, Levi était si piteux... Il devait être aussi démoli que moi. Il continua de parler sans avoir l'audace de me regarder dans les yeux.
- Eren, je le reconnais, j'ai commis tant d'erreurs... Je regrette tout ce qui est arrivé... La seule chose que je ne regrette pas, c'est... c'est de t'avoir rencontré, Eren...
Puis, je pus enfin croiser ses yeux d'acier. Je pouvais y lire toute la souffrance et toute la désolation qu'il ressentait. Poignardé au coeur, je m'approchai de la porte et je posai ma main sur la sienne. Il sembla surpris que je lui pardonne si facilement, mais il s'empressa de tendre sa main vers moi, la traversant entre les barreaux afin de la poser sur ma joue. Une émotion si forte nous nouait la gorge, mais malgré cela, je tentais de lui dire tout ce qui me pesait sur le coeur.
- Levi... Je comprend, mais...
À peine eus-je trouvé la force de tout expliquer que le bel homme m'empêcha de poursuivre mon discours.
- Je t'aime, Eren. Je t'aimerai pour toujours, ma clé...
Sans avertissement, les larmes que je tentais tant de bien que de mal de retenir se mirent à couler sur mes joues. Même dans une situation aussi improbable que celle-ci, Levi arrivait toujours à me faire fondre. Il avait ce don de me déstabiliser à tout moment.
Alors que j'étais sur le point de lui faire part de mes ressentiments en retour, nous fûmes interrompus par une soudaine explosion provenant des étages supérieurs. Nos instincts en alerte, nous entendîmes l'alarme de la base qui nous pressait d'évacuer. Levi parut terrorisé lorsqu'il jeta un regard vers les escaliers d'où il était venu.
- Nous nous faisons attaquer... murmura-t-il.
- Levi!
- Eren, je viendrai te chercher, promis.
Puis, avant qu'il ne me quitte, il m'embrassa une dernière fois. Malheureusement, à peine ses lèvres avaient-elles eut le temps de se coller aux miennes que Levi partait déjà en direction de l'étage, empoignant un fusil et un casque au passage. Je m'agrippai aux barreaux, priant pour qu'il ne se fasse pas tuer durant cet assaut.
Cher lecteur, ceci est la fin de ma quatrième lettre. Pardonnez-moi pour cette romance à l'eau de rose, mais ce qui vous concerne le plus est la guerre qui faisait rage. Cependant, bien qu'il aurait été préférable que je dissimule ce sentiment qui me liait au soldat français, je trouvais qu'il était primordial que j'en parle pour que vous puissiez bien comprendre comment je me sentais en une telle situation.
Sur ce, je vous retrouve pour une prochaine lettre. Merci encore de bien vouloir prendre le temps de lire attentivement mon aventure invraisemblable.
Mes salutations,
Eren Jaeger.
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