L'annonce

(petite parenthèse dans une parenthèse, mais écoutez la musique la haut en lisant, vraiment ça met dans l'ambiance du chapitre) C'est d'ailleurs cette musique, SOS de Indila qui m'a donné envie d'écrire l'histoire.

Lundi 3 Avril 2018

Je regarde l'écran de mon portable en me levant.

6h50. Parfait, ni trop tôt, ni trop tard.

Mon frère et ma sœur devraient être en train de dormir. Mais vu le bruit que j'entends dans le salon en bas, ce n'est pas le cas. Le générique de Peppa Pig retentit. Les salauds, ils ont allumé la télé sans autorisation.

Il ne me reste plus qu'a descendre.

"Que-ce que vous faites ? Maman dort, éteignez ça.

Mon frère me regarde bizarrement.

- Quoi ? je demande.

- Elle est pas là.

Putain de merde. Je fais comment moi ? Bon gardons notre calme.

- Bon, elle doit sûrement être parti faire un tour. Si elle ne revient pas avant que vous partiez à l'école, on se prépare quand même. Ok ? "

Bien évidemment que je mens. Elle est imprévisible depuis quelques mois. Je n'ai aucune idée d'où elle pouvait être.

On se prépare, quand même, je ramène ma sœur, Cassy, à l'école. Elle a sept ans la pauvre, elle ne comprends pas l'état dans lequel est maman depuis quelques temps.

Moi non plus d'ailleurs. J'essaye d'aller la voir, de lui parler... Mais c'est si dur de la voir dans comme ça. Elle est malheureuse, ça crève les yeux. Un jour j'arriverai à lui rappeler que je l'aime vraiment.

C'est le problème de ma mère. Elle pense qu'on ne l'aime pas.

Je sors ça de ma tête.

" Tiens Cassy, c'est ta maitresse que je vois là-bas. dis-je.

- Max ? elle me regarde avec un air triste.

- Dis-moi.

- Elle va revenir maman, hein ?

- J'en suis sûr, comme à chaque fois. Aller va, à ce soir ! "

Je ne sais même pas si elle sera à la maison ce soir. Elle nous l'a déjà fait, ne pas revenir pendant une journée après tout.

Je rentre. Mon frère, Mathis est déjà parti au collège.

Il est en sixième, l'année des découvertes.

J'attends un peu avant de partir au lycée. Je n'ai pas envie d'avoir à discuter avec mes amis avant les cours, alors je fais en sorte d'arriver pile à l'heure.

Jamais en retard, ce serait un sacrilège.

Au lycée, je me dirige directement vers la salle de maths. Les autres sont déjà devant la porte quand j'y arrive. Certains me lancent un regard étonné en voyant mon air échevelé.

D'autres me saluent juste d'un signe de la main ou d'un "salut". Il ne savent pas que je ne vais pas bien.

Je vais devoir faire semblant de sourire, encore.

Le  cours de maths passe, le prof est chiant, mais de toutes façon je suis là pour apprendre, pas pour m'amuser. Il m'interroge, je répond. Voilà.

Puis viens le tour du cours d'anglais, d'allemand puis une heure de vie de classe.

On aurait pu appeler ça le vide de classe. Ça ne sert strictement à rien. Sauf peut-être à m'avancer sur les devoirs de physique pour mercredi.

Oui, parce que chez moi, j'ai pas le temps de faire mes devoirs. Vu que ma mère n'est pas toujours en état de s'occuper de mon frère et de ma sœur, un soir sur deux je fais à manger et je me charge d'eux toute la soirée.

Je ne sais pas si je suis en colère contre elle. Parfois j'ai envie de la serrer dans mes bras tellement elle va mal, d'autres fois, de pleurer à cause des mots qu'elle me jette à la figure. Ou alors de m'énerver, de perdre mon sang froid.

Je ne peux pas le perdre, ce sang froid.

Pour mon frère, pour ma sœur, pour elle, je dois être fort.

Mais je sais que ce n'est pas sa faute.

Peut-être que si je l'aidais plus..?

" On a perdu Max crois. se plaint Mr Brueur, notre professeur principal.

- Désolé monsieur, je pensais à autre chose.

- Je vois ça. Et dis-moi, quel est ton projet professionnel pour le post-bac ?

Ah le post bac, on est seulement en seconde et les profs nous bassinent tout le temps avec ça. Personnellement, je n'ai pas de projet.

Je veux juste partir de chez moi. Je crois que c'est une façon de fuir, quelque part. Mais je ne peux pas abandonner ma famille comme ça. Même ma mère.

J'envisage de lui payer un psy, en faisant des petits boulots. Non pas qu'elle puisse pas se le payer elle-même, mais je sais qu'elle ne voudra pas.

- Pas vraiment... je répond.

- Ce n'est pas grave, mais penses-y quand même. me dit le prof en se retournant pour continuer son discours ennuyeux. "

Viens ensuite l'heure de manger. L'heure que je redoute le plus.

Parce que je dois parler à mes amis, faire semblant de rire, de sourire. D'être heureux.

Ensemble, on se dépêche de rejoindre la file des élèves qui attendent pour manger. On discute, on rit. Et intérieurement je pleure et je crie.

" Max, ça avance avec ton crush ? me demande malicieusement Élise, une amie.

Comme si j'avais le cœur à ça...

- Je sais pas. Je suis pas sûr finalement...

- Mouais, comme si j'allais te croire. En même temps je te comprends, il est grave beau. Si il y avait pas eu Sacha, je crois que j'aurais essayé.

Elle me fait un coup de coude taquin.

- Eh oh, je croyais qu'on avait dit pas de vol de crush! je rigole.

- Oui bon, au moins j'aurais réussi à te faire rire. Mais t'inquiète, je te le laisse le BEAU Hugo. "

Si elle savait que mon rire n'en était pas un...

Elle fait exprès d'appuyer sur le beau, cette folle. Mais je l'aime bien quand même. Je peux compter sur elle.

Mais même si je peux lui faire confiance, jamais je ne pourrai lui dire pour ma mère.

J'aimerais pourtant dire à quelqu'un à quel point ma famille est dysfonctionnelle. Leur montrer à tous ce que ça fait d'être vraiment triste.

Face à ceux qui font office de modèle, exposent leur malheur feint, leurs peines de cœur simulées, mon désespoir ferait office de...

De quoi ?

De toutes façon je sais très bien que jamais je ne le dirai à personne.

J'ai bien faillit le dire une fois. Une seule.

Quand le prof principal, Mr Brueur m'a posé la question fatidique à la fin du premier trimestre.

" Aucuns problèmes familiaux qui puissent influencer les décisions du conseil de classe? "

Ce jour là, j'ai faillit fondre en larmes. Me dire que j'aurais peut-être pu régler ça rapidement, mettre fin à la terreur qui enserrait mon cœur.

Me dire qu'il aurait suffit d'un simple "oui", pour que tout se règle. Que tout redevienne normal.

Mais ce jour, je ne l'ai pas dit, ce "oui". J'ai feint d'aller bien, et j'ai répondu avec mon plus beau sourire que tout allait bien.

Parce que c'est tellement plus facile de se taire.

Et je continue ma journée, comme si de rien était.

Les cours passent, le soleil tourne, ma tête aussi.

Je vais devoir rentrer, et peut être affronter ma mère.

Mais je le dois.

Je les aime.


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En cours d'histoire, quelqu'un toque à la porte.

Je sursaute.

Un homme que je n'ai jamais vu dans le lycée entre. Il est habillé tout en noir, semble fatigué et vieux.

Il dit mon nom à Mme Féret. Elle me montre du doigt. L'homme dans l'embrasure de la porte me fait signe de me lever et de le rejoindre.

Je ne sais pas pourquoi, mais j'ai l'impression qu'il me lance un regard désolé.

J'ai un mauvais pressentiment.

Je commence à ramasser mes affaires. La prof me dit que ce ne sera pas nécessaire, mais l'homme en noir lui signifie que si.

Sous le regard intrigué de mes camarades, qui se demandent sûrement ce que j'ai bien pu faire, je quitte la classe.

Dans le couloir, il y a un autre homme qui m'attends. Il me propose de prendre mon ac et mon manteau. J'ai pas besoin d'être assisté, merci. Pensai-je. Je lui réponds que non merci.

On se dirige vers le bureau du proviseur. Décidément, ça sent pas bon.

Dans le bureau, l'air est lourd. J'ai l'impression d'être dans un four, pourtant il ne fait pas chaud.

Le proviseur arrive, accompagné de son adjoint et de l'infirmière.

J'ai peur soudain. Je me sens comme oppressé.

" Monsieur Carrell, commence le proviseur. Je vous ai fait venir dans mon bureau...

Il s'arrête. Je croit qu'il n'arrive plus à parler.

Qu'est-ce donc qui pourrait être tellement grave pour que notre proviseur, si assuré, en perde les mots ?

- Laissez monsieur, nous allons nous en occuper, dit un des homme avec sa veste noire.

- Bien... asseyez vous.

Je ressentirais presque de la compassion pour le proviseur.

- C'est à propos de votre mère, Max.

Je ne relève même pas le fait qu'il m'ait appelé par mon prénom. Que s'était il passé ?

- Quoi !? je crie.

- Nous l'avons retrouvé... morte. Ce matin dans la ville voisine. "

Je déglutis. Ça ne peut pas être possible...

La mine sombre de tous les occupants de la pièce m'annonce pourtant le contraire.

Je me tourne vers eux, un par un, dans l'espoir que l'un d'entre eux m'annonce que c'est un canular.

Non... Je crois que ça n'en est pas un.

"...Comment ?" Parvins-je à articuler, la gorge sèche soudain.

Les deux hommes que je ne connais pas s'échangent un regard. Malgré les larmes qui commencent à flouter ma vision, je perçois beaucoup de choses dans ce regard.

De la tristesse, de la pitié, de la colère peut-être.

L'homme de droite ouvre la bouche.

Je n'ai le temps d'entendre qu'un seul mot.

"Suicide"

Et mon monde s'écroule

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