Chapitre 2

Quand j'arrivai à l'orée de la forêt, je me transformai et accélérai ma cadence. Je sentis la joie de Shrill de retrouver la nature et surtout de retrouver sa liberté. Je lui laisse le contrôle. L'air frais me fouettait le visage faisant danser mon pelage blanc. Je continuais à courir ainsi, quand je sentis une présence étrange ou plutôt des présences. Je m'étais introduit par faute dans le territoire d'une autre meute. Je tournai alors les talons pour quitter le plus vite possible. Pas que j'aie peur d'eux mais je ne voulais pas de problèmes. Tout à coup, deux loups-garous se tinrent devant moi. Heureusement que j'ai déjà retrouvé ma forme humaine.

-Que fais-tu ici pauvre garçon ? Ce n'est pas très sûr de se balader comme ça dans la forêt, me demanda l'un d'eux.

Pauvre garçon ?

C'est parce que l'odeur des délicieux humains que tu fréquentes au lieu de dévorer te colle.

En outre, je camoufle mon aura, donc ils ne ressentent rien.

Merci pour l'information.

-Il sera un repas délicieux, lui chuchota son ami pour que "je ne l'entende pas".

Je compris alors que ces deux-là étaient des carnivores. Pas que nous soyons des herbivores mais nous étions nommés végétariens car nous mangions la viande des animaux. D'ailleurs, se nourrir sur les humains était un crime impardonnable dont la punition fut l'injection de poudre d'argent. Le département de lutte contre la carnivorie (DLCC) essayait de son mieux d'arrêter ces criminels. Alors, pourqoi pas leur donner une troisième main.

-Désolé messieurs. Je me suis égaré. Est-ce que vous pouvez m'aider ? leur demandai-je d'un ton mélancolique et abattu.

-Sûrement, où habites-tu ? me demandèrent-ils, un sourire malin se dessinant sur leurs visages.

-Je ne sais pas,... je suis nouveau.... On a emménagé ici...au début de cette semaine...Tout ce que... je sais... c'est que ça se situe... quelque part près de l'orée de la forêt, répondis-je en entrecoupant ma réplique par des sanglots.

-Ne pleures pas mon petit. Viens avec nous. On va t'aider à retrouver ta demeure, me "rassura" l'un d'eux.

-Oh merci ! Mais comme vous êtes gentils ! Rares sont les gens comme vous.

-Normalement c'est par là, me montra-t-il le chemin.

-D'accord monsieur...

-Andrew et c'est mon ami Phil.

-Content de faire votre connaissance.

-Le plaisir est mutuel. Maintenant allons-y avant que la nuit tombe.

Sur ce, ils commencèrent à marcher me laissant derrière eux. Il s'assuraient que je suis suffisamment loin pour ne pas les entendre. J'étais maintenant sûr que ce sont des canivores et qu'ils comptaient me prendre à leur repère pour me dévorer. Quant à moi, je jouais mon rôle à merveille, ému et apeuré, je m'avançais lentement en mimant quelques fois la fatigue.

-Est-ce que nous arrivons bientôt ? m'enquéris-je.

-Nous passerons par notre demeure pour apporter quelque chose. Nous ne tarderons pas et reprendrons notre chemin. Ce n'est plus très loin. Quelques minutes et nous y serons.

Effectivement, nous marchons à peine quelques centaines de mètres avant que mes deux "guides" ne s'arrêtent devant une vielle bâtisse qui semblait être délaissée depuis des siècles. Andrew toqua à la porte deux fois puis siffla et retoqua trois fois. Je supposai que c'est une formule clé. La porte s'ouvrit sur un type XXL qui faisait au moins deux mètres. Andrew entra suivi par Phil qui me conduisit devant lui. Si de l'extérieur, elle semblait abandonnée, de l'intérieur c'était extrêmement le contraire. Je pus en conclure que c'était leur repère depuis déjà longtemps. Le tout était bien organisé, décoré et j'en passe. Le bâtiment s'ouvrait sur un grand hall, si ça peut se qualifier ainsi. J'aurai plutôt dit une cour semblable à celle des châteaux. D'ailleurs l'espace fourmillait de monde, plus précisément de loups-garous.

Phil me tenait par la main au risque que je me perde dans la foule. Nous nous faufilâmes parmi la foule pour arriver devant deux grandes portes gardées par deux loups-garous, le moins que je puisse dire costauds. Ces derniers, connaissant les deux bonshommes, ouvrèrent le passage et nous entrâmes dans une vaste salle, légèrement éclairée par une lampe blafarde. Un homme imposant était assis sur l'immense trône au fond de la chambre. Il avait une cicatrice qui traversait son œil gauche allant jusqu'à sa lèvre inférieur et il laissait émaner une aura sombre qui me faisait tressaillir quand même. Jamais je n'avais rencontré un homme de sa froideur et de sa laideur. Je me retins pour ne pas répliquer quand son aura me percuta de plein fouet. Il avait fait exprès.

Pourquoi a-t-il déployé son halo ? Je ne suis finalement qu'un simple humain pour eux.

Et la réponse ne tarda pas à venir.

-Qui est-ce ? Pourquoi avez-vous apporté un intrus à notre repère ? Est-ce un espion ? Je ne crois pas. Il est très faible pour être un agent du DLCC(le département de lutte contre la carnivorie). S'il avait l'odeur d'un humain, je ne saurais jamais que c'est un loup-garou, gronda le "roi des vilains".

Les deux "chasseurs" m'humèrent de nouveau et se rendirent compte que je les avais truqués.

-Mais tu as dit que tu es un humain qui a perdu le chemin, vociféra Andrew en me giflant tellement fort que je tombai par terre.

Oups ! L'odeur de mes amis devait avoir disparu. Je n'avais pas beaucoup le choix. Je ne pouvais pas battre tout le monde. En outre, ils me prenait pour un faible. Alors, si je déployais mon aura, j'aurais une chance de m'en sortir vivant mais je risquai que quelqu'un fuit et révèle mon secret. Il découvriraient immédiatement qui j'étais réellement. Alors mes deux uniques solutions étaient : soit faire l'imbécile qui ne savait rien, soit jouer l'espion qui connait plein de choses dangereuses pour eux. Et dans les deux cas, je n'avais qu'à espérer qu'il ne me tuerait pas et me garderait pour l'interrogatoire. Alors j'optai pour la première.

-Si, si. Je suis vraiment perdu et je veux rentrer à la maison. Je ne suis pas ce que vous croyez. Quelque soit ce que vous me prenez pour, je ne le suis pas. Je m'appelle Ardy Varenson et je veux rentrer à la maison. Je ne veux aucun problème. S'il vous plaît, votre majesté, laissez-moi partir. Ma mère doit être très inquiète. S'il vous plaît, le suppliai-je en sanglotant.

Il me regarda d'un air dégoûté puis leur ordonna de me mettre à la prison en attendant qu'il prenne une décision me concernant. Deux gardes me prirent jusqu'aux cachots. Ils étaient sombres, humides. Le silence absolu. Il n'y avait que des cellules. Les uns aux côtés des autres. Pour la plupart, ils étaient vides. D'autres contiennent des squelettes d'anciens prisonniers. Je scrutais les alentours mais ne sentis que l'ambiance de mort qui régnait sur l'endroit. Les deux loups-garous continuèrent à me conduire vers le fond du couloir. Quand soudain, j'entendis un faible murmure ou plutôt une respiration saccadée. Je me tournai vers l'origine de ce son et découvris Carlos, l'un des élites du DLCC. Son équipe et lui ont été perdu maintenant depuis un mois. Mais je paniquai quand je ne vois aucune trace des autres et lui-même était en train d'expirer ses derniers soupirs. Le pauvre ! Soudain, les deux vilains m'arrêtèrent et me poussèrent dans l'une des cellules.

-Hé, sale humaine, Alpha a eu pitié de toi, il t'a envoyé de la compagnie, hurla l'un d'eux d'un ton méprisant.

Il y a plein de cellules et ils n'ont choisi que celle occupée.

C'est l'alpha qui leur ordonné de te mettre avec cette humaine pour vérifier si tu es vraiment un loup-garou ou pas.

Mais qu'est-ce que je peux être selon lui alors ?

Un kelb, c'est ce qu'on appelle les loups-garou qui n'en possèdent que le nom. Un peu comme ta mère mais d'un degrés plus intense.

Ah ! Mais où est le rapport avec cette fille ?

Il va sûrement t'affamer pour réveiller ton instinct lupin et la dévorer. C'est à dire un coup, deux oiseaux. Mais si tu étais un kelb, tu n'aurais réagi d'une aucune manière. Et tu seras mort de famine.

Quelle chance ! Moi, qui ai l'appétit d'un loup-garou et d'un vampire. Si je comprends bien, je dois m'enfuir avant que vous ne perdiez la raison et preniez le contrôle.

Oui, c'est ça. Je te laisse maintenant. Vaut mieux préserver notre énergie.

Je m'avançai vers la fille recroquevillée dans le coin de la cellule à pas de loup. Je tendis ma main tendrement vers elle pour la secouer, mais elle ne réagit pas. Je m'assis alors à ses côtés.

-Ça fait longtemps que tu es ici ?

Face à son silence, j'ajoutai:

-Comment tu t'appelles ?

Elle lève sa tête vers moi, me dévisage puis retourne à son ancienne position.

-Tant pis pour toi. Si tu veux garder le silence, je m'en fous. Je n'ai pas voulu être rude et t'ignorer, mais si tu insistes ce n'est pas moi qui va te prier de m'adresser la parole. Après tout, nous ne sommes que des coprisonniers. Alors, celui-ci est ton coin, et l'autre bout est le mien, m'énervai-je devant son impolitesse.

Mais pour qui se prend-elle ?

Sur ce, je me dirigeai vers mon coin et m'assis à mon tour. Je réfléchissais pour trouver une solution. Mais je n'arrivai à rien. Non pas faute d'idées, mais les chances étaient toujours minimes. En outre, je ne comptais pas m'enfuir en laissant cette fille ici.

Je m'engageai à la protéger au prix de ma vie, non que je sois amoureux de ma camarade de cellule comme vous commencez à l'imaginer, mais parce c'est un être faible. Rester ici pour elle signifiait le décès. Je n'étais pas capable d'avoir un mort sur l'esprit, imaginant son regard suppliant de ne pas l'abandonner. Les remords et le regret allaient m'amocher. En outre j'avais une espérance de vie centenaire voire millénaire. D'où, c'était improbable de ruiner ma vie à cause d'un accident. Également, je n'étais pas du genre couard. J'étais fort et elle avait besoin de moi, je me voyais obligé par le nom de la noblesse et du courage de lui prêter une troisième main. Bref, il fallait tout d'abord faire un bon plan et vite, avant que mon ventre ne commence à gargouiller et que je commence à perdre les manettes. N'ayant rien obtenu, je fermai les yeux pour dormir afin de faire écouler le temps. N'oubliez pas que je suis un vampire à part entière. Rester éveillé pour quelques jours n'aurait aucun effet sur moi. Sauf que ça demande de l'énergie, ce qui était pour le moment très rare voire introuvable. Pour regagner mes forces, j'avais besoin du sang.

<<Et vous comprenez le reste. D'où étais-je supposé procurer ma nourriture ? Exactement, vous avez bien visé, de cette petite fille. >>

C'est pour cette même raison que j'éteignis toutes mes capacités surnaturelles y compris mes sens surdéveloppés, mes réflexes, etc... Je devais consommer ce qui me restait d'énergie prudemment et surtout sagement. Sur ce, je voyageai vers le monde des songes.

Je dormais paisiblement quand une idée me vint à l'esprit. Cette solution nous sauvera certainement. Mais je devais peser bien le pour et le contre. C'était un choix crucial que je devrais faire. Ma décision serait décisive et aurait des conséquences totalement inconnues. Quand Frank m'avait dit que le cerveau était plus actif pendant le sommeil que pendant l'éveil, je n'y avais pas cru, mais voilà que j'avais la preuve que ce qu'il m'avait affirmé était bien vrai.

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