Chapitre 1: un rêve étrange
Il observait passivement l'obscurité. Une lumière agressive l'éblouit. Des hurlements, semblables à ceux de créatures affamées, grondaient tel un orage. Il avait l'impression de voir une population effrayée courant dans tous les sens. Cette vision le hantait, il avait du mal à faire la différence entre la réalité et l'hallucination.
Des cris et des plaintes perçaient ses tympans. Ces images lui donnaient des sueurs froides. Il apercevait des lumières intenses tombant du ciel en une pluie de feu devant un ciel sombre.
Des spasmes secouaient son corps et il avait l'impression que son pendentif brûlait sa peau en diffusant dans son corps une énergie surpuissante. Il n'en pouvait plus. Il ne comprenait pas ce qu'il voyait mais il avait l'impression que sa vie et le monde étaient menacés.
Cette vision était-elle un souvenir? Etait-elle une prophétie ou l'imagination de son esprit fertile ? Il ne put le savoir car une vibration intense suivie d'une sonnerie dissonante le réveilla. Cette sensation de réveil était pour lui semblable à celle qu'éprouverait un plongeur lors de sa sortie de l'eau.
Ses paupières étaient lourdes d'un sommeil interrompu trop tôt. La sonnerie de son smartphone faisait bouger l'engin sur sa table de chevet accompagnée d'un vrombissement insupportable. Il avait beaucoup de mal à se lever. Sa main partit à tâtons déverrouiller le mobile pour faire cesser ce bruit discordant. Malgré son esprit encore bouleversé, il prit l'appareil et regarda les notifications qu'il avait reçu pendant la nuit. Il y avait des messages de discussions, les liens des dernières vidéos des youtubers à la mode et quelques flashs info qui attirèrent l'oeil du jeune homme. Certains venaient de particuliers, d'autres de grands journaux. Ceux qui l'intriguèrent étaient deux de BFM TV, un du Monde, deux de l'humanité et un du Figaro. Le premier titre était un fait divers du Figaro « Incendie à Paris», le second, une nouveauté politique expliquée par l'Humanité « Un nouveau parti politique vient d'être créé» et enfin, un flash info de BFM TV détaillé sur trois pages d'articles « Réunion des Chefs d'Etat au sujet du réchauffement climatique ». Sur le fond immuable des sempiternels problèmes de guerre et autres alertes climatiques, cette problématique l'inquiétait particulièrement. L'article lui faisait froid dans le dos. Afin de ne pas trop se briser le moral dès le matin, il arrêta là sa lecture.
Le jeune homme se leva de son lit et s'avança le plus silencieusement possible vers la cuisine car sa mère dormait encore profondément dans sa chambre. Il voulait lui laisser encore quelques minutes de sommeil. Il entra dans la cuisine, ouvrit le frigo, saisit une bouteille de lait et la posa sur la table. Un verre de jus d'orange pressé y était déjà posé, soigneusement préparé par sa mère la veille.
L'odeur du lait chaud qui mijotait se faufilait tel un serpent jusqu'à ses narines. Il s'assit aussitôt, pressé de savourer son premier repas de la journée.
Il dégusta le lait en un rien de temps. Puis il but le délicieux jus d'orange. Le jeune homme se releva de sa chaise et ouvrit les rideau mosaïqués de la fenêtre. Aussitôt, une lumière chaude, jaunâtre, transperça les ténèbres de la nuit s'évaporant. La lumière de l'aube caressant maintenant la peau du jeune homme qui s'apprêtait à partir.
Au même moment sa mère se réveilla. Elle sortit de sa chambre et fit un gros bisou à son fils qui venait de débarrasser son repas et commençait à ranger ses affaires dans son sac.
- Bon courage mon chéri, je pense à toi pour cette rentrée. J'espère que tu vas retrouver tes anciens amis et que tu vas faire la connaissance d'autres. Et n'oublie pas de croquer !
- T'inquiète pas Maman ! Ca va aller ! Je tâcherai de dessiner pour toi ! dit-il avec un léger rictus.
- Tu es un amour ! Je t'aime !
Après les paroles de sa mère, Ambroise mit ses affaires de cours, un petit livre à la couverture rouge et son cher carnet de dessins dans son sac qui était pour lui comme une Bible qu'il ne fallait pas perdre. Le dessin était sa passion, son obsession, un centre d'intérêt qui lui valait de nombreuses moqueries quand il était enfant, puis une certaine solitude au collège. Mais, paradoxalement, il fut encouragé et maintenant il était envié, adoré par ses camarades grâce à son talent.
Il ferma son sac, le mit sur son dos, ouvrit la porte tout en lançant un sourire à sa mère qui le regardait partir fièrement.
Il ferma la porte derrière lui, il descendit l'escalier en colimaçon de béton qui menait vers le hall d'entrée de l'immeuble, puis il ouvrit la porte vitrée qui donnait sur sa résidence.
L'air frais du matin caressait ses joues, éclaboussait ses lunettes de joie de vivre malgré ce jour de rentrée, éternel recommencement. Ambroise regarda sa montre, il était huit heures, il fallait qu'il se dépêche. Alors, il prit son dernier casque audio, offert par sa mère et le posa sur son cuir chevelu châtain ébouriffé. La main gauche dans la poche de son jean, décidé, il se saisit de son smartphone et lança la lecture d'une de ses musiques préférées d'un groupe de Hard-Rock. La batterie marquait le rythme effréné et entraînant à ses oreilles. Le morceau était accompagné des accords déchaînés de la guitare électrique et de la ligne mélodique de guitare basse. La musique le boostait, l'entourait, possédant ses membres tel un démon l'entrainant dans sa marche. La chanson et lui ne faisaient plus qu'un. De ce fait, il n'aperçut pas la dernière notification qu'il avait reçue.
Le jeune homme regarda enfin ce que c'était et en découvrit l'auteur. C'était un message d'Alexis, son meilleur ami depuis sa plus tendre enfance, il l'avait toujours soutenu dans ses créations, projets et perspectives. Il l'avait défendu quand il se sentait attaqué et il était la plupart du temps avec lui dès qu'il se sentait seul. Il avait entendu dire qu'il était parti en Espagne pendant les vacances d'été, mais il n'avait pas eu de ses nouvelles, ça avait été le silence radio. Ce simple petit « Slt » fit apparaître sur son visage un sourire. Il était content que son ami ait pensé à lui. Alors il lui demanda comment s'étaient passés ses vacances, ce qu'il avait vu, ce qu'il avait fait. Alexis lui répondit que ça s'était très bien passé et qu'il avait vu de belles choses, notamment à Barcelone et il lui envoya quelques petites photos illustrant son voyage. Ambroise sourit de nouveau quand il les vit et envoya à son tour quelques photos de ses vacances. Mais, contrairement à son ami, ses vacances se faisaient très peu hors de France, au plus loin il allait des fois, seul avec sa mère, dans sa maison familiale en Occitanie. Puis, Alexis lui demanda s'il avait avancé dans ses créations, dessins et bandes dessinées. Ambroise lui répondit, accompagné d'un petit smiley, qu'il lui montrerait cela au calme, après son service.
En effet, certains soirs, le jeune homme travaillait dans un bistrot de la ville pour gagner son argent de poche. De quoi s'acheter de temps en temps de petits plaisirs.
En réponse à cela, Alexis envoya un petit pouce en l'air et un smiley affamé. Un sourire se dessina sur le visage du jeune homme.
Au même instant, le bus arriva, le réveillant de sa discussion virtuelle.
Les grandes roues épaisses s'affaissaient sur le goudron tout en lâchant de petits jets de pression. Le bus s'arrêta.
Soudainement, le jeune homme eut une étrange sensation. Il avait l'impression que le temps, s'était arrêté, il avait l'étrange impression qu'une seconde durait une éternité et surtout que l'atmosphère s'alourdissait, comme si l'air devenait plomb. Il avait étrangement chaud, cela contrastait avec l'air frais d'une fin d'été qu'il avait ressenti en sortant de chez lui.
La porte du bus s'ouvrit en dégageant un souffle de fumée écoeurant. Le jeune homme, légèrement endolori par cette absence d'esprit, entra dans le véhicule. La porte coulissante se referma derrière lui, accompagnée de bruits de mécanismes. Il s'approcha du chauffeur qui avait l'air d'un jeune âge, lui donna une pièce de deux euros qu'il sortit d'un porte-monnaie rouge cerise.
- Bonjour, un ticket s'il vous plait, demanda le jeune homme d'une voix hésitante au conducteur.
- Tenez.
Le conducteur lui tendit l'objet de sa demande qu'Ambroise prit aussitôt tout en pénétrant à l'intérieur du bus déjà bien rempli.
Le jeune garçon était entouré d'un tas de gens collés les uns aux autres tels des sardines dans une boîte. Ces personnes étaient, pour la plupart, immobiles. Les yeux rivés sur leurs appareils tactiles, smartphones, tablettes ou liseuses, regardant et écoutant dans leurs casques dernière génération sûrement des émissions et musiques à la mode, se laissant bercer, indifférents au monde extérieur grâce au flot d'informations les assaillant. Le jeune garçon nageait entre ces multiples individus.
Il s'installa, remit son casque sur ses oreilles et sortit de son sac son carnet qui lui était si cher. De nombreux dessins, croquis à divers états de finition se trouvaient à l'intérieur. Il y avait des dessins d'imagination, de mondes, des créatures insolites et des dessins d'observation de nature morte ou bien vivante. Il prit son crayon et commença à croquer toutes ces personnes qui se trouvaient autour de lui tels des poissons dans un aquarium. Il commença par dessiner une jolie fille qui se situait en face de lui.
Elle avait l'épaule gauche dénudée et les cheveux bruns ondulés comme les vagues d'un océan. Il traça les lignes principales de ses formes. Puis dans un second temps, il dessina les rides, traces du passage du temps d'un vieux monsieur qui se trouvait à sa gauche.
Soudainement son téléphone vibra. Il le déverrouilla et regarda la notification qu'il venait de recevoir. C'était encore une information venant de BFMTV publiée sur sa page Facebook. Cette information prétendait que le GIEC, Groupe d'Experts Intergouvernementaux sur l'Evolution du Climat, aurait fait un rapport relatant des observations de scientifiques du monde entier, qui auraient démontré une étrange augmentation de trois degrés Celcius sur la surface de la Terre en à peine quelques mois. L'organisation aurait, selon l'article, envoyé un signal d'alarme à L'ONU et aux gouvernements du monde entier. L'article dit que ces infos sont controversées par quelques hommes politiques et patrons d'entreprises américains, partant du principe qu'il s'agissait d'une intox pour affoler la population et étaient très loin de la réalité. L'article restait flou sur certains points et avait l'air d'être plus ancien que la notification le faisait croire, mais, cette information lui rappela l'insolite sensation d'alourdissement qu'il avait ressenti tout à l'heure. Le jeune homme avait peur, de la sueur dégoulinait de son visage. Cette angoisse était indicible, non pas parce que le problème le concernait, mais, malgré tout, il avait le désagréable sentiment qu'une force supérieure l'observait, l'étouffait. Pour oublier cela et cette inquiétude grandissante pour ces étranges événements, il reprit son carnet et continua à griffonner. Son dessin était moins précis que d'habitude, car il était déstabilisé. De plus, il sentait au fond de lui, sans que son propre être en soit conscient, que quelque chose, qu'un changement radical, se préparait.
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